IgE spécifiques en première intention : un peu d’accord, tout à fait d’accord ou pas du tout d’accord ?

samedi 24 juillet 2004 par Dr Stéphane Guez9797 visites

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IgE spécifiques en première intention : un peu d’accord, tout à fait d’accord ou pas du tout d’accord ?

IgE spécifiques en première intention : un peu d’accord, tout à fait d’accord ou pas du tout d’accord ?

samedi 24 juillet 2004, par Dr Stéphane Guez

Faut-il ou non réaliser des dosages d’IgE spécifiques en première intention lors de la prise en charge d’un patient ayant des problèmes respiratoires ou cutanés ? Vieux débat mais toujours d’actualité, et qui pose de nombreux problèmes aussi bien cliniques qu’économiques. Voici une nouvelle étude pour animer cette discussion.

Intérêt des dosages d’IgE spécifiques lors d’une prise en charge diagnostique en première intention. : E. Duran-Tauleria1, G. Vignati2, M. J. A. Guedan3, C. J. Petersson4

1Institut Municipal d’Investigació Mèdica, Barcelona, Spain ; 2Ospedale G. Fornaroli, Magenta, Italy ; 3Institut Universitari Parc Taulí, Sabadell, Spain ; 4Pharmacia Diagnostics AB, Uppsala, Sweden

dans Allergy 59 (s78), 35-41

 Introduction :

  • L’identification d’un patient atopique peut ne pas être considérée comme une étape nécessaire lors d’une prise en charge diagnostique en première intention.
  • Ce travail a donc étudié l’intérêt de réaliser un dosage d’IgE spécifiques en plus de l’examen clinique lors d’une prise en charge de première intention par un médecin pour des patients présentant une symptomatologie respiratoire ou cutanée.

 Méthodologie :

  • Il s’agit d’une étude de type prospective.
  • Elle a été réalisée dans 2 régions : Italie et Espagne, avec 2 parties I et II.
  • Pour chaque patient il y avait des critères d’inclusion et d’exclusion.
  • Après examen clinique, les patients étaient classés dans l’une des catégorises suivantes par une classification médicale :
    • allergie,
    • non allergique,
    • incertain.
  • Un échantillon de sang été prélevé pour chaque patient inclus afin de réaliser un dosage d’IgE spécifiques (CAP system Pharmacia), incluant le Phadiatop enfant (de 0 à 5 ans), ou le Phadiatop et un mélange alimentaire (Fx5e) (plus de 5 ans).
  • Si un résultat positif était trouvé, des IgE spécifiques supplémentaires étaient réalisées (de 6 à 26).
  • Dans la partie I de l’étude, les résultats des IgE spécifiques n’étaient pas disponibles avant que la classification par le médecin soit réalisée. Par contre dans la partie II, les résultats des IgE spécifiques étaient disponibles au moment ou le médecin a effectué sa classification.
  • Entre les 2 analyses, I et II, une intervention éducative des médecins pour améliorer leur connaissance des allergies IgE médiées et de l’utilisation des IgE spécifiques a été réalisée.

 Résultats :

  • Un total de 721 patients a été inclus.
  • Les résultats de la classification basée sur la clinique et les IgE spécifiques varient d’un coefficient kappa de 0.13 pour l’étude I, à 0.86 pour l’étude II.
  • En fonction du statut d’allergique, la proportion des patients classés incertains est réduite de 26.1% dans l’étude I à 4.1% dans l’étude II.
  • La proportion de patients qui ont été informés de la nécessité d’éliminer le contact avec certains allergènes est passée de 18% (étude I) à 62% (étude II) dans le groupe de patients classés à la fois par l’examen clinique et le résultat des IgE.

 Conclusion :

  • L’utilisation des résultats des dosages d’IgE spécifiques améliore la prise en charge clinique des patients ayant des symptômes de nature allergique lors d‘une prise en charge médicale de première intention, conduisant à donner des conseils d’éviction des allergènes.
  • Cependant, l’application de ces dosages dans les différents pays doit être confrontée aux différents coûts entraînés par cette procédure diagnostique.

Dans ce travail, les auteurs démontrent que le dosage des IgE spécifiques lors de la prise en charge primaire d’un patient présentant une affection d’allure allergique respiratoire ou cutanée, permet d’améliorer le diagnostic. Celui-ci est également suivi immédiatement de conseils concernant l’éviction des allergènes en cause.

Ce travail est surprenant à plus d’un titre. Il est évident que la biologie est une aide précieuse au diagnostic d’une façon générale, et au diagnostic allergique en particulier.

Cette étude semble bien faite à première vue, mais il manque une dimension primordiale qui est celle de la prise en charge primaire par un allergologue avec réalisation de tests cutanés.

Il serait très important d’étudier non pas l’intérêt du dosage des IgE spécifiques, mais celui d’une consultation allergologique avec réalisation de tests cutanés immédiats. Car il y a forcément, lors de la prise en charge de cette étude, une consultation à 2 reprises puisque les résultats biologiques ne sont pas immédiatement disponibles.

Par ailleurs on sait qu’il y a de risques de faux positifs et de faux négatifs concernant l’interprétation des résultats d’IgE spécifiques. Il est difficile de penser que tous les patients ont été forcément bien classés par des médecins qui ont eu une formation simple et rapide entre les 2 parties de l’étude.

On peut s’étonner ainsi de l’augmentation considérable du nombre de conseils d’éviction allergénique donnés. Ces mesures d’éviction ont un coût qui n’a pas été chiffré, et un intérêt parfois très limité.

Nous sommes donc dubitatifs sur les résultats de ce travail.

Il est certain que l’industrie voudrait pour des raisons évidentes que des dosages d’IgE spécifiques soient accessibles au plus grand nombre de médecins. Mais les allergologues sont actuellement confrontés à des erreurs de diagnostic importantes, en particulier en allergologie alimentaire, avec des jeunes enfants qui ont des conseils d’éviction entraînant de grandes difficultés d’alimentation, conseils qui ne s’avèrent pas fondés après analyse allergologique minutieuse.

Reste bien entendu le Phadiatop ou le test de dépistage alimentaire de type Fx5. Là l’intérêt et les limites de ces dosages ont déjà été démontrés, mais également l’intérêt de faire des tests cutanés en deuxième intention plutôt que des dosages d’IgE spécifiques.

A notre sens, cette étude ne permet pas de conclure sur l’intérêt de faire des dosages d’IgE spécifiques en première intention.

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