Allergologue versus Madame Irma… Mieux que la boule de cristal : les tests cutanés et les IgE spécifiques !

mercredi 4 mai 2011 par Dr Céline Palussière596 visites

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Allergologue versus Madame Irma… Mieux que la boule de cristal : les tests cutanés et les IgE spécifiques !

Allergologue versus Madame Irma… Mieux que la boule de cristal : les tests cutanés et les IgE spécifiques !

mercredi 4 mai 2011, par Dr Céline Palussière

Les tests cutanés et les IgE spécifiques pour l’arachide peuvent prédire les résultats des tests de provocation à l’arachide chez les enfants d’âge préscolaire sensibilisés à l’arachide. : Johannsen, H., Nolan, R., Pascoe, E. M., Cuthbert, P., Noble, V., Corderoy, T., Franzmann, A., Loh, R. and Prescott, S. L. (2011),

Skin prick testing and peanut-specific IgE can predict peanut challenge outcomes in preschoolchildren with peanut sensitization.

dans Clinical & Experimental Allergy, 41 : no. doi : 10.1111/j.1365-2222.2011.03717.x

 Contexte :

  • L’augmentation des allergies à l’arachide est un fardeau pour la communauté.
  • Un nombre croissant d’enfants en âge préscolaire a été identifié comme sensibilisé à l’arachide, dans le cadre d’une enquête sur d’autres paramètres de l’allergie.
  • Malgré le fait que beaucoup d’entre eux n’aient jamais ingéré consciemment de l’arachide, et donc que leur réactivité clinique reste inconnue, il est communément admis de placer ces enfants sous régime d’éviction pour de nombreuses années.

 Objectifs :

  • Déterminer l’utilité des tests cutanés (SPT) et le recours aux dosages immunologiques par fluorescence enzymatique (FEIA) dans l’identification de l’allergie ou de la tolérance à l’arachide, chez des enfants d’âge préscolaire avec sensibilisation à l’arachide.

 Méthodes :

  • Quarante-neuf enfants d’âge préscolaire (<5ans) avec sensibilisation à l’arachide (SPT>2mm ou IgE spécifiques pour l’arachide >0.35 kU/l), mais avec une réactivité clinique inconnue, ont subi un test de provocation pour l’arachide progressif en ouvert, atteignant une dose totale de 11g.
  • Un test de provocation positif a été défini par une réaction IgE-médiée objective au cours du test ou de la période de surveillance de 2 heures.

 Résultats :

  • Quarante-neuf pour cent (24/49) des enfants ont eu un test de provocation positif.
  • Un SPT>7mm le jour du TPO était prédictif d’un test positif avec une sensibilité de 83% et une valeur prédictive négative (VPN) de 84%.
  • Un FEIA >2.0 kU/l avait une sensibilité de 79% et une VPN de 80%.
  • La prédiction des résultats du TPO avec la combinaison des SPT et du FEIA (avec SPT>7mm et FEIA>2) augmentait la sensibilité à 96% et la VPN à 95%.

 Conclusions :

  • Au moins la moitié des enfants d’âge préscolaire avec sensibilisation à l’arachide et aucun antécédent d’ingestion d’arachide peuvent tolérer les arachides.
  • Un SPT <7mm et un FEIA<2 kU/l permettent d’identifier les enfants les plus susceptibles de tolérer l’arachide, avec seulement une probabilité de 5% de réaction au TPO.
  • Cette étude est donc une aide pour les cliniciens dans l’indication des TPO pour les très jeunes enfants sensibilisés à l’arachide.

Des tests cutanés positifs ou des IgE spécifiques pour l’arachide chez des petits enfants n’en ayant jamais consommé : le problème est fréquent au cours de nos bilans allergologiques, et la prise en charge est toujours sujette à débats. Eviction de principe ou non ? Test de provocation en milieu hospitalier ? La détermination de valeurs seuils pourrait-elle déterminer le risque en cas d’ingestion ?

L’allergologue n’a en effet pas toujours envie de proposer un TPO pour l’arachide à un enfant de moins de 5 ans, d’où l’intérêt de la détermination de seuils en tests cutanés et sériques pour prédire le risque de test positif.

Les auteurs de cette étude ont réalisé un TPO à 49 enfants de moins de 5 ans ayant des tests cutanés > à 2 mm et des IgE spécifiques >0.35 kU/l, mais n’ayant jamais mangé de cacahuète. La moitié d’entre eux a pu en consommer sans réaction clinique : l’éviction aurait été inutile pour eux (voire dangereuse ?).

Pour l’autre moitié des enfants, les valeurs retenues pour avoir les meilleures performances dans la prédiction des résultats étaient 7mm en tests cutanés et 2kU en biologie. La combinaison de ces deux techniques permettait d’atteindre une sensibilité de 96% et une VPN de 95%.

Les résultats de cette étude semblent donc très prometteurs, en identifiant les enfants les plus à risque de réagir au cours du TPO.

Il reste toutefois que l’utilisation des valeurs seuils se heurte toujours aux mêmes écueils : l’impossibilité d’extrapoler les résultats à une autre population.

Cette étude a ainsi été réalisée chez des petits enfants australiens, n’ayant certes jamais mangé de cacahuètes, mais dont l’exposition à l’arachide est susceptible d’être très différente de celle des enfants français, notamment par voie cutanée, transplacentaire ou au cours de l’allaitement maternel. Cette exposition peut influer notablement des taux d’IgE spécifiques.

L’extrapolation nécessiterait aussi une très grande reproductibilité des tests diagnostiques : quels extraits utilisés pour les pricks ? quels réactifs et quels étalonnages en biologie ?

L’idée des seuils est séduisante, dans une démarche de limitation des risques et de standardisation des pratiques. De nombreuses études se sont penchées sur le problème, mais retrouvent des résultats différents, preuve de leur manque de reproductibilité. Sicherer affirmait ainsi en 2010 que la valeur seuil d’IgE spécifiques pour l’arachide chez l’adulte était de 14kU/l.

L’allergologie moléculaire apporte par ailleurs des éléments décisionnels complémentaires, en particulier dans l’allergie à l’arachide, avec évaluation du risque encouru en cas d’ingestion.

Dans une population donnée, la détermination de valeurs seuils en tests cutanés et sériques est donc une aide précieuse pour le clinicien, mais l’extrapolation à des populations différentes est malheureusement difficile.

On notera toutefois que les tests cutanés ont encore de beaux jours devant eux, avec des performances meilleures que les IgE spécifiques isolées… L’idéal étant bien sûr d’associer les deux techniques !

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