Allergie à l’œuf : faut-il interdire l’œuf ? Faut-il réintroduire l’œuf ?

mardi 22 octobre 2013 par Dr Céline Palussière2874 visites

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Allergie à l’œuf : faut-il interdire l’œuf ? Faut-il réintroduire l’œuf ?

Allergie à l’œuf : faut-il interdire l’œuf ? Faut-il réintroduire l’œuf ?

mardi 22 octobre 2013, par Dr Céline Palussière

Sécurité des test de réintroduction des œufs très cuits chez des enfants allergiques à l’œuf : une étude de cohorte prospective. : Turner PJ, Mehr S, Joshi P, Tan J, Wong M, Kakakios A, Campbell DE. Safety of food challenges to extensively heated egg in egg-allergic children : a prospective cohort study.

dans Pediatr Allergy Immunol 2013 : 24 : 450–455.

 Contexte :

  • De nombreux enfants ayant une allergie IgE-médiée à l’œuf peuvent tolérer de l’œuf dans les plats cuits au four.
  • Les caractéristiques cliniques et la sévérité des réactions des enfants allergiques qui réagissent aux tests ouverts de provocation (TPO) à l’œuf cuit ne sont cependant pas bien définies.

 Méthodes :

  • Les enfants qui se présentaient à notre clinique de référence avec un diagnostic d’allergie à l’œuf et qui suivaient un régime d’éviction strict de l’œuf, étaient soumis à un TPO à l’œuf cuit.
  • Les tests étaient réalisés avec des quantités croissantes d’un muffin cuit entier, contenant 1/6ème d’œuf (équivalent à 1g de protéines d’œuf), suivant un protocole standardisé.
  • Les données étaient collectées de manière prospective de 2009 à 2012.

 Résultats :

  • Les tests de réintroduction en ouvert à l’œuf ont été menés chez 236 enfants allergiques à l’œuf qui avaient réalisé une stricte éviction alimentaire de l’œuf.
  • Un total de 150 enfants (64%) ont eu un test négatif, et ont pu incorporer l’œuf cuit dans leur alimentation avec succès.
  • Quatre-vingt six enfants (36%) ont réagi au test de réintroduction.
    • Parmi eux, 12 (14%) ont présenté une anaphylaxie (selon les critères du WAO), dont 4 enfants avec moins de 100mg de protéine d’œuf très cuit.
    • L’adrénaline intra-musculaire a été administrée à 5 des 12 enfants, et l’un d’entre eux a nécessité une seconde dose en raison de la persistance de l’hypotension.
    • Les tests cutanés, l’asthme ou les antécédents d’anaphylaxie n’étaient pas prédictifs du résultats du TPO.

 Conclusion :

  • La majorité des enfants ayant une allergie IgE-médiée à l’œuf ont été capables de tolérer 1g de protéines d’œuf cuit, mais les résultats du TPO demeurent imprévisibles, et 14% des enfants pour lesquels le TPO était positif ont présenté une anaphylaxie.
  • Nous recommandons donc que les TPO à l’œuf cuit aient lieu sous surveillance médicale.

Dans la prise en charge des allergies alimentaires, une fois le diagnostic posé, il faut définir le degré d’éviction.

En ce qui concerne l’œuf, il existe fréquemment des discordances apparentes, entre des tests cutanés ou sériques positifs, et une tolérance à de petites quantités d’œuf cuit dans les pâtisseries, par exemple.

Ceci s’explique bien désormais, grâce à l’allergologie moléculaire, qui a permis de mettre en évidence des protéines allergisantes thermosensibles (comme l’ovalbumine) et d’autre thermostables (comme l’ovomucoïde). Le passage au four des préparations contenant de l’œuf, comme les gâteaux, détruit en grande partie ces protéines sensibles à la chaleur, et permet aux enfants qui y sont sensibilisés d’en manger sans réaction. Ce qui n’est pas le cas des enfants sensibilisés aux allergènes thermostables.

Les auteurs de l’étude ont recherché s’il existait des facteurs prédictifs de tests de réintroduction positifs à l’œuf. Ils n’en ont trouvé aucun au niveau clinique (antécédents, asthme, tests cutanés). Dommage, ils n’ont pas réalisé en systématique de recherche d’IgE vis-à-vis de ces principaux allergènes au sein de l’œuf, qui auraient permis de définir leur profil de sensibilisation, et auraient certainement été prédictifs.

Les auteurs soulignent la gravité potentielle des réactions secondaires aux TPO positifs, avec 14% de réactions anaphylactiques. De quoi s’inquiéter...

Le problème réside à mon sens dans le recrutement des enfants allergiques à l’œuf qui ont été testés dans cette étude. Ils étaient en effet allergiques à l’œuf, certes, mais surtout en éviction alimentaire stricte de l’œuf.
Il nous faudrait savoir depuis combien de temps en moyenne ils étaient en éviction, et si la durée de l’éviction a un lien statistique avec la gravité des réactions.

En effet, en pratique courante, nombre de nos jeunes patients testés positifs à l’œuf, continuent à manger sans problème des biscuits secs ou des pâtisseries maison contenant un peu d’œuf bien cuit.
Les réactions cliniques ne sont souvent apparues qu’avec de l’œuf moins cuit, parfois même par contact cutané avec l’œuf cru.
Chez ces enfants, il est alors primordial de continuer à leur donner de l’œuf, afin de permettre l’acquisition de la tolérance, et la guérison de l’allergie. Les régimes d’éviction stricte sont relativement rarement nécessaires.

Quand on reçoit un enfant qui est déjà en éviction stricte de l’allergie, la biologie nous permet certainement d’évaluer le risque de test de réintroduction positif, et donc d’éviter la plupart du temps de courir le risque d’anaphylaxie.

Quant à la surveillance médicale préconisée lors des tests... elle va de soi, non ?

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