1er congrès francophone pédiatrique de pneumologie et d’allergologie - 4 et 5 novembre 2005

jeudi 24 novembre 2005 par Dr Emmanuelle Rondeleux3941 visites

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1er congrès francophone pédiatrique de pneumologie et d’allergologie - 4 et 5 novembre 2005

1er congrès francophone pédiatrique de pneumologie et d’allergologie - 4 et 5 novembre 2005

jeudi 24 novembre 2005, par Dr Emmanuelle Rondeleux

Le test de provocation orale est un élément incontournable du diagnostic de l’allergie alimentaire. Les Dr Fabienne Rancé et Antoine Deschildre ont présenté un exposé passionnant et très pratique sur le sujet.

Allergie alimentaire : test de provocation orale

Fabienne Rancé - Antoine Deschildre

Petit quid sur la réalisation des tests de provocation oraux (TPO) et recommandations officielles.

La prévalence cumulée de l’allergie alimentaire est de 6,7 % (allergie à un aliment à un moment donné) tandis que la prévalence actuelle est de 4,7% sur Toulouse.

Dans une étude de Pereira dans le JACI 2005 (JACI 2005 ; 116 : 882-92) 12 % des jeunes de 11 et 15 ans pensaient êtres allergiques à un aliment et 16 % à 11 ans, 19 % à 15 ans évitaient un aliment.

Quand on réalisait un TPO en double-aveugle seulement 1,4 % à 11 ans et 2,1 % à 15 ans étaient positifs.

Cette conviction d’être allergique va avoir des répercussions sur la qualité de vie : angoisse, frustration, répercussions psychologiques, sociales et financières.

85 % des patients pensent être mieux informés après la réalisation d’un TPO. D’où l’intérêt du TPO.

Il faut connaître l’histoire naturelle de l’allergie.

L’allergie au lait et à l’œuf guérissent, l’allergie à l’arachide exceptionnellement. L’allergie aux fruits à coque pourrait guérir dans 9 % des cas.

Les aliments les plus fréquemment responsables d’allergie alimentaire dépendant des habitudes culinaires des pays, mais quel que soit le pays, on retrouve toujours l’œuf, le lait et l’arachide dans les 10 premiers.

Pour Fabienne Rancé actuellement en France, les aliments prédominants sont le lait (12 %), l’œuf (9 %) et le kiwi (9 %).

Pour la réalisation d’un TPO, il faut remettre une fiche d’information aux parents, recueillir leur consentement et disposer d’un protocole de traitement d’une réaction allergique.

Le TPO doit être réalisé en pédiatrie, à proximité d’une unité de soins intensifs avec un personnel médical et paramédical entraîné selon les recommandations de l’Académie Européenne d’allergologie et immunologie clinique. Ceci se justifie par le fait que des réactions allergiques notamment respiratoires peuvent survenir jusqu’à 25 à 30 % des cas, qu’on a décrit des chocs anaphylactiques avec tous les aliments et qu’il n’y a pas de facteurs prédictifs ni à l’anamnèse, ni avec les résultats des tests allergologiques. On sait juste que l’asthme est un facteur de risque et qu’il doit être parfaitement équilibré. Et que les réactions les plus sévères ont été décrites pour des doses minimes.

Le TPO se fera généralement en hôpital de jour afin d’assurer une surveillance de 4 heures après la dernière dose. Une hospitalisation conventionnelle peut être nécessaire pour "préparer" le patient avant le test, pour la survenue d’une réaction justifiant de poursuivre la surveillance, pour l’évaluation d’une réaction retardée ou quand il est nécessaire de répéter la provocation (TPO sur plusieurs jours ou en double-aveugle).

Par mesure de sécurité, il faut avoir du matériel pour monitorage, un chariot d’urgence et avoir pris contact avec l’unité de soin intensif. Un protocole de traitement d’une réaction allergique doit être rédigé et les médicaments doivent être préparés. Il faut une feuille de surveillance.

Pour préparer les aliments, il faut disposer d’un mixeur, un mortier, un pilon, une balance de précision et de quoi stocker les aliments ainsi que la possibilité d’avoir des aliments frais.

L’aliment doit être testé sous la forme consommée par le patient ou sous la forme la plus allergénique (ex : cacahuète grillée, œuf cru, lait en poudre ou liquide).

Il faut limiter au maximum les capsules ou gélules qui empêche le premier contact oropharyngé qui pourrait être un élément starter de la réaction allergique.

Le "véhicule" dépend de la nature du test (ouvert ou aveugle). Il doit être neutre sur le plan allergénique. Il faut éviter un véhicule gras qui peut modifier la réaction et entraîner une réaction plus sévère. Il n’y a pas de standardisation des véhicules en particulier pour les tests en aveugle, le mieux étant de masquer au maximum le goût. L’objectif est de délivrer une quantité proche de la consommation habituelle.

Pour la réalisation du test, il faut prévoir avant une éviction alimentaire d’au moins 7 à 14 jours en cas de réaction immédiate et jusqu’à 12 semaines pour les manifestations digestives, à 1 mois en cas d’eczéma atopique. Pour cette éviction, on peut faire intervenir une diététicienne.

L’enfant doit être en situation clinique stable, avec un asthme contrôlé et un traitement minimal pour l’eczéma. Le traitement de fond de l’asthme doit être maintenu. Les antihistaminiques doivent être arrêtés depuis 4 jours à plusieurs semaines en fonction de l’antihistaminique, les bêta2 mimétiques de courte durée d’action depuis au moins 4 heures. Les bêta-bloquants et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion sont contre-indiqués. Le TPO est incompatible avec l’utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (risque majoré), de neuroleptiques, de glucocorticoïdes par voie générale et d’immunosuppresseurs.

Le jour du test, il faut être à jeun depuis au moins 2 heures, éviter la prise du biberon de lait le matin en cas de TPO au lait.

La pose d’une voie veineuse est recommandée car il y a un risque de réaction sévère justifiant le recours à la voie IV, mais il n’y a aucune évaluation dans la littérature.

Pour l’évaluation, il est nécessaire de faire un examen complet en évaluant tous les sites de réactions possibles en particulier la peau (établissement du SCORAD), les voies aériennes, la fréquence cardiaque et la tension artérielle.

En pratique courante, on fait des TPO ouverts. Les indications du TPO en double-aveugle sont les symptômes subjectifs, les réactions retardées sur TPO ouvert, les syndromes des allergies multiples et la recherche.

Au niveau de la méthodologie, la première dose peut être précédée d’un test de provocation labial.

La dose initiale doit être très petite de 1 mg pour l’arachide, 1 ml pour le lait, 1 mg pour l’œuf (0,1 ml d’une solution au 1/100).

L’augmentation doit être progressive, toutes les 15 à 30 minutes.

La dose finale doit atteindre la quantité normalement ingérée dans l’alimentation en fonction de l’âge.

En cas de TPO en double-aveugle, il faut attendre 3 heures minimum entre 2 tests, le plus judicieux étant de le faire sur 2 jours. Parfois il faut associer un effort physique au test.

Au niveau de l’interprétation, on parle de réaction immédiate quand elle survient dans les 2 heures, les réactions non immédiates survenant dans les heures à semaines.

Les organes cibles sont cutanéo-muqueux, respiratoires, digestifs, généraux et multi viscéraux.

Les signes objectifs cutanés (érythème, rash, urticaire aigue, angio-œdème, eczéma : apparition ou augmentation du scorad ? 10, prurit palmo-plantaire), digestifs (douleurs abdominales répétées ou associées, vomissements, syndrome oral, diarrhée, cassure de la croissance pondérale), des voies aériennes supérieures et/ou inférieures (rhinite, conjonctivite, œdème de la luette, modification de la voix, toux, dyspnée laryngée, crise d’asthme, diminution du DEP ? à 20%, du VEMS ? 15%, de la saturation en O2) et généraux (pâleur, prurit palmo-plantaire, diminution de la tension artérielle ? 20, augmentation de la fréquence cardiaque ? 20%) sont à distinguer des signes subjectifs cutanés (prurit isolé ou localisé), digestifs (douleurs abdominales isolées, nausées, dysphagie), généraux (céphalées, appréhension de la prise).

Le TPO est positif quand on a au moins un signe objectif. Il est négatif en absence de réaction y compris à distance. Il est douteux en cas de signes subjectifs.

La conduite dépend alors du patient, des antécédents et de l’allergène. Soit on arrête le test, soit on poursuit après une période d’observation à la même dose ou à la dose antérieure, soit on passe à un test en double-aveugle. Si on réalise un test en double-aveugle, il faut toujours le confirmer par un test ouvert.

Si le TPO est négatif, l’aliment peut-être réintroduit sous la forme testée en s’assurant que la quantité tolérée le jour du test est susceptible d’être consommée au cours d’un repas habituel. On peut éventuellement proposer un régime partiel comme dans le cas d’un TPO à l’œuf cuit.

Le risque de récurrence est variable selon les aliments (arachide ++) et diminue s’il y a une consommation régulière de l’aliment. Il faut donc une trousse d’urgence au moins le premier mois quel que soit l’aliment. Cette trousse d’urgence est toujours utile s’il s’agit d’arachide, de fruits à coque ou de sésame.

Si le TPO est positif, il faut maintenir l’éviction. On peut induire une tolérance pour le lait ou l’œuf, mais il y a alors un risque de récidive à l’arrêt du protocole de tolérance.

Lors d’une ingestion accidentelle, la réaction peut être plus sévère. Les facteurs de risque de réaction sévère sont la gravité de la réaction antérieure, la dose déclenchante, les cofacteurs médicamenteux ou infectieux voire le contact.

Le maintien de l’éviction fait courir un risque de carence nutritionnelle.

Il faut plus que jamais proposer un plan d’action en cas de manifestation allergique, maintenir la trousse d’urgence et en revoir sa composition notamment l’adjonction d’adrénaline en cas de réaction sévère au TPO, de réaction à des faibles doses < 100 mg ou d’asthme associé.

Il faut également savoir quand refaire le TPO. La guérison est probable quand il s’agit d’une allergie au lait ou à l’œuf. Elle est décrite pour l’allergie à l’arachide et les fruits à coque. Elle est d’autant plus probable que l’allergie est non IgE médiée. La probabilité de guérison diminue avec l’âge. Le TPO sera reprogrammé en fonction de l’âge du patient, des résultats des TPO antérieurs, en absence de réaction antérieure dans les 6 à 12 derniers mois et après contrôle des prick-tests et des RAST en sachant qu’il n’y a pas de valeur affirmant la guérison. Le TPO reste donc indispensable.

Le TPO confirme donc l’allergie alimentaire et démontre la guérison. En cas d’histoire clinique aiguë avec des tests cutanés positifs l’allergie est évidente. Par contre si ce n’est pas le cas, si ce sont des signes digestifs chroniques, un TPO reste indispensable. S’il y a des tests cutanés positifs et que l’enfant consomme l’aliment, il s’agit d’une simple sensibilisation et le TPO est inutile. En cas d’antécédents d’allergie au lait, le TPO est nécessaire pour chercher la guérison.

Il n’y a pas de valeur seuil pour certifier l’absence d’allergie. On peut avoir jusqu’à 30 % d’allergie avec des IgE spécifiques négatives. Par contre on essaye de fixer des valeurs seuils avec une valeur prédictive positive de 95 % d’allergie. Ces valeurs seuils varient selon les aliments et les équipes. Les IgE spécifiques sont variables dans le temps avec une augmentation lors du diagnostic puis une diminution progressive jusqu’à la guérison sans toute fois se normaliser lors de cette guérison. Les valeurs seuils vont nous permettre d’établir une conduite à tenir afin de définir le moment le plus opportun pour réaliser notre TPO. Ainsi on peut s’aider de l’arbre diagnostic suivant :

Il faut également tenir compte de l’histoire naturelle de l’allergie et des pathologies associées comme l’asthme.

En cas de sensibilisation chez un enfant n’ayant jamais consommé l’aliment antérieurement, on peut également établir un organigramme. Si un régime d’éviction est instauré en consultation spécialisée, on réévalue au bout de 6 à 12 mois.

On rappelle que les atopy patch-tests ne sont pas standardisés.

Dans ce cas, on fait un TPO classique en secteur hospitalier et on continue l’introduction de l’aliment à la maison en réévaluant à distance.

Les contre-indications du TPO sont
 l’âge inférieur à 6 mois,
 les antécédents de choc anaphylactique avec tests cutanés positifs,
 l’asthme mal contrôlé ou instable,
 le VEMS < 80 %,
 un traitement concomitant par bêtabloquant ou inhibiteurs de l’enzyme de conversion,
 la période pollinique quant l’enfant est allergique au pollen,
 l’absence de voie veineuse pour certains et
 si le consentement éclairé n’est pas obtenu.

L’âge de guérison clinique habituelle est de
 12 à 18 mois pour le lait de vache,
 2 à 3 ans pour l’œuf, 5 à 6 ans pour l’arachide (en général l’entrée à l’école primaire pour cette dernière).

Rappelons que
 les IgE spécifiques ont une sensibilité de 71 % et une spécificité de 29 %,
 les prick-tests une sensibilité de 58 % et une spécificité de 70 %,
 les atopy patch-tests de 76 % et 95 % (Niggeman Allergy 2000 ; 55 : 281-5).

Voilà un exposé qui remet bien les choses au clair.

On remarquera le temps de surveillance de 4 heures après la dernière prise alimentaire ce qui est plus long que les délais que nous fixions initialement.

Certains de mes confrères et consœurs ont estimé cela difficilement réalisable au sein d’un hôpital de jour qui ferme souvent tôt.

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