Podcast : mythes et légendes des allergies, lutte contre les rumeurs et les fake news en allergologie

samedi 1er novembre 2025 par Dr Philippe Auriol77 visites

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Podcast : mythes et légendes des allergies, lutte contre les rumeurs et les fake news en allergologie

Podcast : mythes et légendes des allergies, lutte contre les rumeurs et les fake news en allergologie

samedi 1er novembre 2025, par Dr Philippe Auriol

Aujourd’hui, nous allons voyager dans un monde un peu particulier : celui des idées reçues, des croyances parfois farfelues, mais aussi des légendes urbaines qui entourent les allergies. Car si l’allergie est une maladie bien réelle, décrite avec précision dans les manuels médicaux et confirmée par des tests objectifs comme le prick-test , elle est aussi entourée d’un halo de fausses explications et de recettes miracles.

Dans ce podcast, je vais déconstruire ces mythes à la lumière des données scientifiques, en m’appuyant sur les publications de référence comme le Global Atlas of Allergy de l’académie Européenne d’allergologie , en passant par les études sur les allergies alimentaires. Et bien sûr, je vous renverrai aussi du côté d’allergique.org, où ces thèmes sont régulièrement abordés de façon pédagogique et souriante.

Les allergies sont une « invention » moderne

C’est quelque chose que l’on entend encore régulièrement : « L’allergie est une maladie inventée par la médecine moderne, inexistante chez nos ancêtres ».
La réalité est plus nuancée.

  • Les allergies, telles que nous les connaissons aujourd’hui, ont effectivement explosé en fréquence depuis un siècle . D’environ 1% de la population dans les années 1960, nous sommes passés à une prévalence de 25 à 30% aujourd’hui en France.
  • Mais si vous attardez un peu sur les lectures historiques et médicales anciennes, vous découvrirez des descriptions anciennes d’urticaires chez Richard III en 1484, d’asthme chez Britanicus en 50 après JC ou d’angio-œdème avec choc anaphylactique pour le pharaon Ménès 4500 ans avant notre ère.
  • Ce qui change, ce n’est pas l’existence des maladies, mais leur fréquence et leur reconnaissance par la médecine. Il y a trente ans à peine, les manuels de médecine ne reconnaissaient pas l’existence des allergies alimentaires car elles étaient peu fréquentes ; aujourd’hui aucun scientifique ne les nie plus.

L’allergie n’est pas une invention moderne, mais une épidémie de notre temps, dont l’augmentation de fréquence est liée à nos environnements, nos modes de vie et l’évolution de notre système immunitaire.

De toute façon, l’allergie « C’est psychosomatique »

Quand j’ai quitté ma carrière de médecin urgentiste pour devenir médecin allergologue, il y a bien longtemps, c’est le discours que m’avait tenu le président du moment de l’ordre départemental des médecins. Quelle déception pour le jeune médecin que j’étais.

Oui bien sûr, le stress peut aggraver certains symptômes. Mais non, il ne provoque crée pas l’allergie.

  • un patient cardiaque peut faire un infarctus avec un stress : ce n’est pas le stress qui a rendu son coeur malade.
  • un patient asthmatique pourra également faire une crise d’asthme avec un stress mais là non plus ce n’est pas le stress qui l’a rendu asthmatique.
  • une poussée d’urticaire sera déclenchée par une émotion si l’on souffre d’urticaire chronique, pas si l’on va bien.

Les mécanismes de l’allergie de type I ont été décrits par Gell et Coombs : ils reposent sur la production d’anticorps IgE, la fixation sur les mastocytes et la libération d’histamine. Le rôle des émotions existe dans le déclenchement des crises, la perception des symptômes, mais pas dans leur origine.

Bref, l’allergie n’est pas une invention psychologique : c’est une réponse immunologique mesurable.

On devient allergique parce qu’on est trop propre

C’est la fameuse « hypothèse hygiéniste ». Elle n’est pas un mythe total, mais une simplification.

Donc oui, un enfant qui joue dehors, qui rencontre microbes et pollens, développe en général une meilleure tolérance. Mais croire que « la saleté protège » est caricatural.

On ne fait pas de tests cutanés avant l’âge de 7 ans

Ce conseil d’une stupidité sans nom continue à se propager malgré toutes les campagnes de communication des médecins allergologues.

  • S’il y a une allergie, des tests d’allergie peuvent être réalisés puisqu’ils visent à reproduire sur la peau ce qui se produit dans votre corps
    • L’allergie au lait commence dans les premiers mois de vie et guérie souvent avant l’âge de deux ans : évidemment que l’on peut tester l’enfant à cet âge là.
    • Il en est de même pour l’allergie à l’oeuf, à la cacahuète, à la noix de cajou toutes allergies de la petite enfance. Il est nécessaire de les mettre en évidence par des tests cutanés, biologiques et de prendre les mesures d’éviction adaptées
  • Si vous souffrez d’allergie, si vous pensez que votre enfant souffre d’allergie : il n’y a pas d’âge pour faire des tests cutanés.

Je ne mange pas de poisson parce que je suis allergique à l’iode

  • Personne n’est allergique à l’iode, l’allergie à l’iode n’existe pas
  • Il y a de nombreuses personnes allergiques à un produit qui contient de l’iode mais ce sont des allergies différentes :
    • Il y a l’allergie aux produits de contraste iodés et là aussi vous ne serez probablement pas allergique à tous les produits de contraste iodés donc un bilan allergologique permettra de trier dans les choix possibles et vous redonner la possibilité d’un scanner injecté en cas de besoin médical.
    • il y a l’allergie aux poissons et là encore selon le type de poissons les allergènes ne sont pas tous les mêmes et certains poissons peuvent vous être autorisés.
    • il y a l’allergie à la povidone iodée (betadine®) qui est encore une allergie différente
    • et bien sûr les allergies aux crustacées et aux mollusques toutes étant des allergies différentes avec des molécules allergisantes différentes.

De toute manière vous le saviez déjà au fond que vous n’êtiez pas allergique à l’iode, vous le sentiez ce doute quand vous saliez votre repas avec du sel…iodé.

Les faux coupables

Il y a de nombreux produits injustement accusés d’être en cause dans les allergies

  • Le lactose : c’est un sucre du lait. Il n’y a pas d’allergie au lactose mais il existe des allergies à certaines protéines du lait. Le lactose c’est un sucre qu’en principe homo sapiens ne digère pas, ou plutôt ne le digère plus quand il a atteint dix-huit mois de vie. 90% des asiatiques sont intolérants au lactose, il les ballonne et leur fait mal au ventre. C’est 60% des Africains et ce n’est qu’une dizaine de pour cent des Européens. Si vous prenez des comprimés de lactase : l’enzyme qui digère ce sucre, instantanément vous devenez capable de digérer le lactose.
  • Le gluten est souvent incriminé à tord lui aussi. En réalité, il ne s’agit pas d’une molécule unique mais d’un assemblage de protéines qui se forme quand on mélange la farine de certaines céréales (blé, seigle, orge) avec de l’eau et qu’on malaxe la pâte. Ces protéines sont naturellement difficiles à digérer pour l’organisme humain. Pour les rendre plus assimilables, il faut les transformer : c’est le rôle de la fermentation (quand on fait lever la pâte, les levures et bactéries commencent ce travail de “prédigestion”) et de la cuisson, qui modifie encore la structure du gluten. Certaines de ces protéines peuvent être responsables de véritables maladies comme la maladie coeliaque voire même des allergies comme l’omega 5 gliadine. Selon les symptômes il y aura ou pas allergie mais non, la plupart du temps vous pouvez gérer votre difficulté à digérer le gluten en en diminuant la quantité, en mangeant du pain de boulanger de qualité qui a été correctement levé et ne le mangeant cuit et non « blanc ».
  • Les additifs alimentaires, les colorants ou le glutamate sont souvent accusés : là aussi, si l’allergie est possible, elle est très rare mais leur mauvaise tolérance, elle, est fréquente. Limitez votre consommation de produits utra-transformés et tout ira mieux.
  • À l’inverse, des coupables réels et fréquents sont sous-estimés : par exemple, les parfums et huiles essentielles, les conservateurs de peintures, laques, vernis, les fragrances contenues dans les cosmétiques, le formol relargué par nos meubles en kit préfabriqués ou les expositions professionnelles aux huiles, aux métaux, aux résines .

    Les recettes miracles : qui ne font pas de miracles

Il y a des « remèdes » supposés guérir l’allergie. Vous avez sans doute entendu parler de régimes détox, d’oeuf de caille, de bracelets magnétiques, de techniques de gourou (Gesret®, Naet®).

  • Les recommandations officielles sont claires : aucune de ces approches n’a démontré d’efficacité spécifique.
  • Pire, elles peuvent retarder la mise en place d’une prise en charge scientifique adaptée et un traitement validé comme l’immunothérapie ou les biothérapies modernes .
  • les acariens voir plus – Définition , les pollens, la cacahuète sont naturels : pour les gens qui y sont allergiques ce sont des problèmes. Allez écouter le podcast sur la naissance d’une allergie.

En conclusion,

L’allergie est une maladie en pleine expansion, de nombreuses rumeurs infondées circulent à son sujet.

  • Si vous pensez souffrir d’allergie, allez voir un médecin allergologue et discutez en avec lui.
  • Ne faite jamais confiance à ceux qui vous parlent de « naturel » pour guérir vos allergies. L’allergie est une maladie naturelle, la cacahuète est naturelle, le pollen et les acariens aussi.
  • Quand un soignant vous dit qu’il a une technique magique pour guérir vos problèmes et qu’il a déposé un brevet et vend des licences pour sa « technique miracle » : fuyez le comme la peste, c’est un gourou. Faire la preuve de son efficacité c’est de la recherche internationale qui est mise en commun, critiquée, améliorée et elle n’est jamais le fruit du travail d’un seul chercheur.

Les mythes autour de l’allergie révèlent quelque chose : notre besoin d’expliquer et de simplifier des maladies complexes. Mais derrière les croyances, il y a une réalité scientifique solide : l’allergie est une maladie immunologique objectivable, fréquente, en progression mondiale, et dont les traitements reposent sur des preuves.

Comme nous le rappelons souvent sur allergique.org, il faut s’informer auprès de sources scientifiques fiables, dialoguer avec son allergologue et éviter de se laisser piéger par les fausses solutions des beaux parleurs qui ont quelque chose à vous vendre.

Dans le prochain épisode, nous parlerons des allergènes : qu’est-ce que c’est et comment devient-on un allergène ?

Merci à vous les amis, prenez soin de vous.


Ce voyage à travers les mythes et légendes de l’allergie nous montre à quel point la communication est centrale en pratique clinique. Les patients arrivent souvent en consultation avec des convictions fortes : « je suis allergique au gluten », « mon asthme est psychosomatique », « je vais guérir si j’évite le gluten », « je suis la méthode Naesret® ». Le rôle de l’allergologue est alors double : corriger les idées reçues, mais aussi valoriser la part de vérité qu’elles contiennent. Car derrière l’hypothèse hygiéniste ou l’hérédité, il y a bien des réalités scientifiques.

La difficulté est de trouver le bon équilibre entre pédagogie et rigueur : il ne s’agit pas de ridiculiser les croyances, mais d’accompagner le patient dans un cheminement vers la compréhension. L’expérience montre que cette approche renforce l’adhésion aux traitements, notamment à l’immunothérapie.

Enfin, déconstruire les mythes permet aussi d’ouvrir sur l’avenir : les biothérapies, la médecine de précision, les bases de données moléculaires ont dessiné une nouvelle image de l’allergologie, loin des recettes miracles et des approximations.

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