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Rencontre de printemps de l’APALA - 13 et 14 mai 2006 - Arcachon
lundi 15 mai 2006, par ,
L’Apala est l’association de promotion de l’allergologie en Aquitaine et c’est une association très active en formation continue avec deux réunions annuelles toujours pertinentes et passionnantes. Ce printemps ce sont les allergènes recombinants qui sont venus se mettre au menu avant une journée botanique le lendemain dans les forêts alentours du lac de Cazaux.
Le samedi que nous rapportons dans cet article fût une journée commune avec les médecins biologistes intéressés par les allergies. Dans laquelle Hervé Couteaux a d’abord placé le débat, le Dr Gabriel Peltre en a précisé les aspects moléculaires, Laurence Van Overtvelt en a ensuite montré les applications industrielles au travers des travaux de Stallergènes et enfin, le Dr Henri Malandain nous a ouvert les perspectives de l’allergologie de demain avec les usages diagnostic des recombinants que nous pourrons faire de la biologie dont une partie est déjà disponible au catalogue du laboratoire Phadia.
Les différentes étapes de production d’un allergène recombinant
Laurence Van Overtvelt, PhD -( Lab. Stallergènes - Antony)
Les Extraits allergéniques
À partir d’une source d’allergènes, on va isoler un extrait qui est très hétérogène : des allergènes et des molécules non-allergéniques. La concentration en allergènes est également très fluctuante. L’extraction, la purification et le stockage sont également source d’hétérogénéité.
Les allergènes sont difficiles à standardiser, contiennent des endotoxines, une contamination externe éventuelle.
Cela peut réduire l’activité voire créer des sensibilisations supplémentaires. Un certain nombre d’allergènes sont référencés, 17 allergènes majeurs sont nécessaires et suffisants pour diagnostiquer 90 % des allergies respiratoires.
Pourquoi prendre des allergènes recombinants ?
Ils sont parfaitement définis, dépourvu de molécules non allergéniques, plus homogènes que les allergènes purifiés, plus reproductibles, obtenus en plus grande quantité.
Inconvénients : leur coût, la difficulté de leur développement, leur caractère peu immunogène lorsqu’ils sont utilisés de façon isolée.
Leur production
À partir d’une source d’allergène, isolement de l’ARNm et amplification du gêne d’intérêt.
Le gêne est transmis à un hôte par un vecteur qui va ensuite transformer l’hôte ( E. Coli ou Pichia pastoris) et culture, sélection des transfrmants et purification.
– Les vecteurs sont des éléments indispensables de sélection (gêne de résistance AB) +2
– Les transformations sont chimique, éléctrique ou physique.
– Les hôtes utilisées sont des bactéries, levures, cellules d’insectes ,de mammifères ou de plantes.
Avantages et limites des hôtes
Bactéries > simples, peu coûteuses et assez faciles mais peu de modifications post-traduction, une association possible à des protéines toxiques, des protéines intracellulaires.
Levures > possibilité de modifications post traductionnelles, peu coûteux, rendement correct mais hyper glycosylation et protéines parfois périplasmiques.
Cellules d’insectes (baculovirus)/ humaines > l’intérêt est que les protéines humaines recombinantes sont similaires aux proténes natives mais sont lent et coûteuses.
Cellules de plantes > elles permettent également la modification post traductionnelle, mais elles donnent des produits glycosilés, d’un rendement médiocre et
pose un problème d’acceptabilité par l’agence du médicament.
Le choix du système est fonction de la nature de la protéine désirée et de son utilisation future.
Validation des allergènes recombinants
Elle se fait selon différentes techniques dans les quelles on cherche à montrer :
– la conformation de la molécule par cristallographie
– la purification de la molécule
– la stabilité de la molécule
– l’absence de toxicité
– son activité biologique
– son activité allergénique
Exemple BetV1a
– analyse de la structure 3D
– pureté et homogénéité moléculaire (sds-page)
– activité allergénique et réactivité
– conformation de la molécule
– caractérisation immunologique : histamino-libération, lymphoprolifération.
rBetv1a est du coup un bon candidat pour le développement d’une ITS au bouleau : la présentation d’une étude clinique en juin à l’EAACI est au programme.
Exemple de rDerp1 et rDerp2 cultivé sur suspension cellulaire de tabac
Même activation des basophiles avec le recombinant ou le naturel purifié, même chose pour la lympho-prolifération. Les autres critères y sont également favorables. L’intérêt de ce système sur suspension de tabac est l’obtention directe d’une forme mature pour le Derp1. Pour le Derp2 ce ne serait pas nécessaire et ce serait moins coûteux sur bactéries.
Intérêt des allergènes recombinants
– outils de recherche
– outils de diagnostic
– outils de traitement
– outils de standardisation
– outils de prévention
Allergènes majeurs recombinants : un nouvel abord pour l’ITS
Laurence Van Overtvelt, PhD -( Lab. Stallergènes - Antony)
Les objectifs d’une immunothérapie spécifique avec des allergènes recombinants seraient d’en améliorer l’efficacité, la tolérance et les schémas d’administration.
Par la voie sublinguale, les premières cellules en contact sont les cellules dendritiques qui présenteront ensuite l’antigène aux lymphocytes T naïfs.
La voie sublinguale a des atouts particuliers :
– pas de passage transmucosal direct,
– persistance de l’allergène sur la muqueuse,
– capture par les cellules de Langherans/dendritiques.
Ces cellules semblent préprogrammées dans la muqueuse pour induire une tolérance (FcER, IL10, TGFBeta, IDO (indoleamine desoxygenase), induisent la production d’IL10 et TGFBeta par les lymph. T).
On peut modifier les allergènes en leur ajoutant des adjuvants ou en travaillant la formulation galénique.
Leur production se limite aujourd’hui chez Stallergènes aux pollens de bouleau et aux acariens.
Les adjuvants recherchés sont des inducteurs d’IL10 et de TGFBeta.
Les candidats adjuvants pour les lymphocytes T tolérogènes que nous avons pressentis sont le Biostim (ndr : retiré du marché par l’afssaps pour innefficacité...), IL10, Lactobacillus (plantarum, rhamnosis), VitD3/Dexamethasone.
La galénique laisse penser que les formulations muco-adhésives semblent particulièrement intéressantes car elles permettent de réduire la dose pour une même efficacité.
En conclusion : les allergènes recombinants seuls ont un intérêt de pureté et de spécificté poussées mais ils nécessitent de développer des adjuvants et des formulations plus efficaces, plus sûres et avec des schémas d’immunisation simplifiée.
Quelques notions essentielles au sujet des allergènes
Henri Malandain (Lab. Biochimie - CH Chubert - Vannes) Mai 2006
Bien définir le vocabulaire
– Produit allergisant : c’est la source allergénique qui contient plusieurs allergènes.
– Sensibilisation : elle correspond à la synthèse d’IgE lors du contact de l’organisme avec un allergène.
– Réactivité : c’est ce que l’on observe
- Réactivité clinique : cela correspond à la définition de l’allergie. Le patient qui a une réactivité clinique à un allergène est dit « allergique » à cet allergène.
- Réactivité cutanée : elle correspond à la positivité des tests cutanés vis-à-vis d’une source allergénique
- Réactivité cellulaire : elle correspond à l’activation des cellules immunitaires (basophiles etc..)
- Réactivité sérique : il s’agit de la positivité des tests in vitro (ex : Rasts)
Les difficultés du diagnostic basé sur des extraits
La réactivité observée vis-à-vis d’un produit allergisant donné est la somme des réactivités vis-à-vis des allergènes qu’il contient.
A réactivité égale pour un produit, les patients présentent des réactivités
très différentes vis-à-vis des allergènes du produit.
On a donc affaire à une double complexité :
– multiplicité du côté des allergènes
– individualité des réactivités du côté des patients
A cela s’ajoute une troisième dimension : c’est la réactivité « croisée » (ou induite, ou par procuration)
La réactivité « croisée »
On distingue :
– L’allergénicité directe :
- sensibilisation à l’allergène A du produit P -> IgE anti-A
- contact avec le produit P -> liaison entre A et IgE anti-A -> réactivité à P.
– L’allergénicité indirecte :
- le patient possède déjà des IgE anti-A provenant de la sensibilisation à P
- contact avec le produit X contenant une protéine B homologue de A
- liaison entre B et IgE anti-A -> réactivité à X sans sensibilisation à X
A est un allergène « complet », B est un allergène « incomplet ».
Deux produits croisant contiennent ils des allergènes incomplets ?
– Non, sauf si les produits proviennent du même organisme.
– À priori, il n’existe pas d’allergènes 100% identiques provenant de produits différents, même issus d’espèces très voisines
Alors, pourquoi cette réactivité croisée ?
– Du fait de l’imparfaite spécificité des IgE : une IgE peut se lier à un autre épitope que celui pour lequel elle a été initialement prévue pour autant qu’il existe une homologie suffisante entre ces 2 épitopes.
Qu’est ce qu’une homologie épitopique ?
– Une ressemblance locale : caractéristiques spatiales et physico-chimiques.
Qu’est ce qui peut favoriser l’existence d’épitopes homologues ?
– L’appartenance des allergènes à une même famille de protéines,
– La proximité taxonomique des produits contenant ces allergènes
Existe-t-il des « familles d’allergènes » ?
Oui et non
– Dans une même famille de protéines, on peut rencontrer des allergènes et des non-allergènes,
– Dans une même famille de protéines, le pouvoir sensibilisant des allergènes n’est pas égal :
- Par exemple, soit une famille avec un allergène complet A et un allergène incomplet B , en l’absence de contact avec A, B ne pourra pas être un allergène.
- D’où l’importance de l’histoire immunologique du patient et des facteurs régionaux (pollens, habitudes alimentaires, habitat, génétique ?, etc...)
– S’y ajoute l’effet des transformations avant contact (ex : cuisson, préparations technico-alimentaires etc...) et de la digestion.
- On peut assister alors :
- à une diminution, voire une extinction de la réactivité (et/ou du pouvoir sensibilisant) de certains allergènes,
- ou, au contraire, à la formation de néo-épitopes et/ou de néo-allergènes.
Toute famille de protéines peut-elle s’avérer contenir des allergènes ?
– Peut être...
– La répartition actuelle semble limiter le nombre des familles avec allergène(s) parmi les familles de protéines connues.
Parmi les familles avec allergène(s), lesquelles sont importantes à retenir ?
Molécule | Aéro-allergènes | Aliments d’origine végétale | Aliments d’origine animale |
---|---|---|---|
PR 10 (ou Bet v 1 like | pollens (bétulacées) | divers | |
LTP (lipid transfer proteins) | pollens | très nombreux | |
Profilines | nombreux pollens | très nombreux | |
2S-albumines | graines | ||
Polcalcines | nombreux pollens | ||
chitinases | fruits | ||
Parvalbumines | poissons | ||
Lipocalines | phanères | ||
Tropomyosines | acariens, blattes, ... | crustacèes |
Pourquoi ces familles sont importantes ?
– Ce sont des allergènes très répandus (panallergènes)
- par exemple, les profilines dans le règne végétal, les tropomyosines chez les invertébrés (crustacées, mollusques, insectes, acariens, helminthes...)
– Ce sont des familles caractéristiques d’une catégorie de produit :
- par exemple, les lipocalcines du chien, chat, cheval, hamster etc...
- les parvalbumines des poissons
– On y trouve souvent des allergènes présentant une forte allergénicité :
- par exemple, les 2S-albumines parmi les protéines de stockage des graines,
- les LTP
– Ce sont des familles souvent à l’origine d’association d’allergies (allergies dites croisées)
- par exemple, PR 10, chitinases etc...
Quelles sont les réactivités induites ayant une importance clinique reconnue ?
Produit initiateur | Allergènes croisant | Réactivités induites |
---|---|---|
Bouleau | PR 10 (Bet v 1 like) | pollens (fagales), pomme, noisette etc... |
Pêche | LTP | fruits, graines, légumes |
Différents pollens | profilines | autres pollens, fruits, graines, légumes |
Latex | chitinases | fruits, avocat... |
Lait de vache | caséines etc... | lait de chèvre, brebis ... |
Graminées | divers | autres pollens de graminées |
En pratique, quel est l’intérêt de connaître la classification des allergènes ?
– Au moment du diagnostic :
- comprendre des réactivités associées ou inattendues,
- utiliser des allergènes purs (ex : recombinants) pour affine- r l’étiologie
– Pour la prise en charge du patient :
- estimer le risque clinique, décider d’une éviction etc ...
- à l’avenir : utiliser des allergènes purs en désensibilisation ?
Quelles sont les limites de la notion de familles d’allergènes ?
La réactivité se joue à un échelon plus fin que la molécule : l’épitope. La réactivité « croisée » peut résulter de la présence d’épitopes homologues sur des protéines de familles différentes.
– Cas des domaines protéiques :
- l’hévéine du latex n’est pas une chitinase mais croise avec le domaine hévéine des chitinases.
– Cas des épitopes glucidiques
- des chaines glucidiques sont portées par les IgE et peuvent être homologues et donner naissance à des motifs croisants, les CCD, bien que portés par des protéines de familles très différentes.
La classification des allergènes s’appuie sur la classification des protéines. Celle-ci est basée sur des motifs séquentiels d’acides aminés mais pas sur des critères immunologiques.
– On a ainsi des « superfamilles » dont les familles membres ne croisent pas entre elles,
- par exemple, la superfamille des prolamines qui contient entre autres les LTP, 2S-albumines, gliadines etc...
– L’appartenance à une famille contenant déjà un allergène connu n’implique pas une égale pertinence clinique pour d’autres protéines de cette famille.
De nombreux allergènes ne sont pas classables dans une famille de protéines :
– on n’a, pour le moment, caractérisé qu’une partie des protéines IgE-réactives, même dans les produits les mieux étudiés,
– des allergènes très importants cliniquement n’ont pas encore reçu de classification précise. Par exemple, le groupe 5 des graminées, le groupe 2 des acariens etc...
Enfin, la classification des protéines est inefficace pour répondre à la question « Pourquoi certaines protéines sont des allergènes ? » car les familles de protéines contenant un (des) allergène (s) sont trop diverses.
L’existence d’une caractéristique commune aux allergènes est à rechercher ailleurs.
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