Et ben mon Vioxx, un enterrement en beauté !

mercredi 8 décembre 2004 par Dr Philippe Carré1524 visites

Accueil du site > Allergènes > Médicaments > Et ben mon Vioxx, un enterrement en beauté !

Et ben mon Vioxx, un enterrement en beauté !

Et ben mon Vioxx, un enterrement en beauté !

mercredi 8 décembre 2004, par Dr Philippe Carré

Les patients asthmatiques ayant une intolérance à l’aspirine ont souvent une intolérance croisée aux AINS, dont l’utilisation est donc contre-indiquée chez eux. Avec le développement des inhibiteurs sélectifs des COX-2, une tolérance a été démontrée chez les asthmatiques ; qu’en est-il en cas d’utilisation de fortes doses ?

Sécurité d’utilisation du rofecoxib à haute dose chez les patients avec une maladie respiratoire aggravée par l’aspirine. : Woessner KM, Simon RA, Stevenson DD.

Scripps Clinic Medical Group, The Scripps Research Institute, La Jolla, California 92037, USA. kwoessner@scrippsclinic.com

dans Ann Allergy Asthma Immunol. 2004 Oct ;93(4):339-44

 Contexte

  • La maladie respiratoire aggravée par l’aspirine (MRAA) est caractérisée par une sinusite progressive, une polypose nasale, et un asthme qui débute et continue en l’absence d’exposition à l’aspirine et aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS).
  • Une réactivité croisée à tous les AINS inhibant la cyclo-oxygénase1 (COX-1) survient chez ces patients.
  • Les réactions à l’aspirine et aux AINS chez les patients avec MRAA sont largement dues à l’inhibition des COX-1.
  • Malgré le nombre de travaux sur la tolérance des inhibiteurs sélectifs des COX-2 dans la MRAA, un doute persiste sur le fait que de hautes doses d’un inhibiteur COX-2 pourraient suffire à induire une réaction croisée.

 Objectif

  • Déterminer si le rofecoxib à haute dose a une réactivité croisée chez les patients avec MRAA et un asthme.

 Méthodes

  • 60 asthmatiques ont eu un test de provocation oral en aveugle contre placebo par 50 mg de rofecoxib
  • La sensibilité à l’aspirine était ensuite confirmée chez tous les patients par des tests de provocation à l’aspirine en simple aveugle.

 Résultats

  • Aucun des 60 patients n’a présenté de symptômes, de modification des paramètres nasaux, ou de diminution de la fonction pulmonaire pendant le test au rofecoxib.
  • Les 60 patients ont eu des symptômes respiratoires pendant le test à l’aspirine, avec une dose de provocation moyenne de 57 mg
  • L’intervalle de confiance exact à 95% en faveur d’une probabilité sous-jacente que 50 mg de rofecoxib induise des réactions croisées respiratoires, chez les patients avec MRAA, était de 0 à 0.05 , ou 0% à 5%.

 Conclusions

  • Ces résultats confirment l’absence de réactivité croisée entre l‘aspirine et les inhibiteurs hautement sélectifs des COX-2 dans la MRAA.
  • Les auteurs suggèrent qu’il est temps de commercialiser les inhibiteurs hautement sélectifs des COX-2 en fonction de ces données, et d’attirer l’attention sur le fait que les patients avec une MRAA en particulier, et les patients asthmatiques en général, évitent que soient retirés les inhibiteurs sélectifs des COX-2.

Chez 60 patients asthmatiques ayant un test de provocation positif à l’aspirine, pour une dose déclenchante moyenne de 57 mg, un test de provocation par 50 mg de rofecoxib n’entraîne aucune réaction adverse chez aucun des patients, que ce soit en terme de symptômes respiratoires ou nasaux ou en terme de baisse de la fonction respiratoire.

Il n’existe donc pas de réaction croisée entre le rofecoxib et l’aspirine chez les patients ayant une maladie à l’aspirine.

Les auteurs en concluent qu’il serait temps d’autoriser la prescription de ces molécules, étant donnée la bonne tolérance des inhibiteurs des COX-2, et de laisser les patients asthmatiques ou intolérants à l’aspirine continuer à consommer ces médicaments.

Cette étude, qui vient en confirmer beaucoup d’autres depuis plusieurs années, est intéressante car elle montre que des patients asthmatiques qui sont fortement intolérants à l’aspirine (dose provocatrice moyenne de 57 mg) tolèrent parfaitement une dose élevée d’un inhibiteur sélectif des COX-2 (rofécoxib, 50 mg) ; cette molécule anti-inflammatoire était commercialisée en France à une posologie de 10 à 20 mg par jour, dose largement inférieure à celles utilisées dans cette étude.

Ceci confirme que l’intolérance à l’aspirine et aux AINS classiques est en rapport avec une inhibition exclusive de la cyclo-oxygénase de type 1 (COX-1), expliquant la tolérance aux anti-COX-2, pouvant servir d’alternative chez les patients intolérants à l’aspirine mais ayant besoin d’anti-inflammatoires.

Les anti-inflammatoires ont été reclassés en fonction de leur activité anti-COX-2 ; ceux ayant l’activité anti-COX-2 la plus puissante sont le célécoxib (Célébrex°) et le rofécoxib (VIOXX°), avec un avantage pour le rofécoxib dans les études publiées concernant la tolérance parfaite chez les intolérants à l’aspirine ; or ces molécules sont encore formellement contre-indiquées dans les AMM chez les intolérants à l’aspirine, et le problème s’est compliqué avec l’enterrement définitif récent du rofécoxib, en raison des possibles complications cardiaques.

Ne reste donc plus que le célécoxib, mais pour combien de temps encore, les anti-COX-2 étant sous haute surveillance (un laboratoire pharmaceutique vient il y a quelques jours d’annuler sa demande d’AMM pour une molécule de la même famille).

L’alternative serait d’utiliser des AINS ayant une activité anti-COX-2 partielle et pour lesquels des études ont montré une relative bonne tolérance chez ces patients intolérants à l’aspirine.

Mais il faut rappeler que ces molécules n’ont pas l’AMM chez ces patients, que leur utilisation éventuelle reste donc de la responsabilité du prescripteur, et ne saurait s’envisager sans un test préalable de tolérance sous haute surveillance.

Par ailleurs, cela ne change rien aux autres complications associées à ces molécules, en particulier au niveau de la tolérance cutanée.

Rechercher

En bref

categories

  Allergenes

  Maladies

  Fonctionnel