Du dermographisme à l’urticaire chronique : l’étude Prévalence-D du réseau UCARE se penche sur cette maladie

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Du dermographisme à l’urticaire chronique : l’étude Prévalence-D du réseau UCARE se penche sur cette maladie

Du dermographisme à l’urticaire chronique : l’étude Prévalence-D du réseau UCARE se penche sur cette maladie

lundi 10 novembre 2025, par Dr Philippe Auriol

L’urticaire chronique spontanée (UCS) demeure un casse-tête diagnostique et thérapeutique. Qu’en est-il du dermographisme symptomatique (DS), une réaction cutanée exagérée au contact des surfaces, que les patients et même certains médecins ont tendance à sous-estimer ? La recherche mondiale intitulée PREVALENCE-D, dirigée par le réseau UCARE (Urticaria Centers of Reference and Excellence), vise à évaluer sa prévalence dans la population générale. Elle soulève une question cruciale : et si le dermographisme n’était pas simplement un phénomène bénin transitoire, mais une forme légère, locale et mécanique d’urticaire chronique ? The Prevalence of Symptomatic Dermographism : Results of the International UCARE PREVALENCE-D Study Kanokvalai Kulthanan in Allergy, 2025 ; 0:1–12

Méthode

  • Étude épidémiologique internationale, multicentrique, menée dans plusieurs pays d’Asie, d’Europe et d’Amérique.
  • Inclusion de plus de 15 000 adultes de la population générale avec un questionnaire structuré validé pour détecter le DS.
  • Définition : présence d’urticaire causée par un contact physique (frottement ou pression), persistant pendant plus de 6 semaines.
  • Analyse statistique des taux de prévalence par continent, tranche d’âge, sexe et comorbidités atopiques.
  • Limites méthodologiques : absence de test standardisé par dermographomètre, diagnostic purement déclaratif, possibilité de biais de mémoire.

Résultats

  • Prévalence mondiale du dermographisme (DS) : environ 6 % de la population adulte.
  • Les femmes sont plus touchées que les hommes, avec un pic chez celles âgées de 20 à 40 ans.
  • Dans un quart des cas, le DS est suffisamment gênant pour altérer la qualité de vie (prurit nocturne, inconfort vestimentaire).
  • Fréquence accrue de comorbidité avec l’UCS, suggérant une continuité physiopathologique.
  • Les patients souffrant de DS présentaient davantage d’antécédents d’atopie (rhinite allergique, asthme).

Discussion

  • Le DS est considéré comme une urticaire induite chronique (UIC) selon la classification internationale.
  • La frontière avec l’UCS est poreuse. Dans les deux cas, on observe une activation mastocytaire, une libération d’histamine et une réponse cutanée immédiate.
  • Le DS pourrait être une forme mineure, localisée et mécanique d’urticaire chronique, se distinguant par le rôle déclencheur du frottement.
  • Les recommandations ARIA/EAACI 2022 sur l’urticaire rappellent qu’il faut toujours rechercher des UIC chez les patients souffrant d’UCS, puisque celles-ci sont présentes dans plus de 30 % des cas.
  • Les antihistaminiques de deuxième génération sont la première ligne de traitement, avec des doses augmentées si nécessaire. Les biothérapies (omalizumab) sont efficaces dans les cas sévères de DS, comme pour l’UCS.
  • Il est important de noter que cette étude est basée sur un auto-questionnaire non confirmé cliniquement, ce qui pourrait entraîner une surestimation ou une sous-estimation des cas.

Conclusion

Cette grande étude montre que le dermographisme symptomatique est fréquent, qu’il peut être invalidant chez certains patients et qu’il est souvent associé à l’urticaire chronique spontanée. Il ne faut plus le considérer comme un phénomène rare, mais plutôt comme une entité faisant partie du spectre de l’urticaire chronique. Ses limites : manque de normalisation du diagnostic et de données physiopathologiques claires. Ses perspectives : l’étude ouvre la voie à des recherches intégrées UCS/UIC et renforce l’idée d’une approche globale de l’urticaire chronique, englobant toutes ses formes.


En allergologie clinique, nous savons à quel point la vie des patients atteints d’urticaire chronique est complexe : prurit, troubles du sommeil, altération de l’image corporelle. L’article met en évidence l’importance de considérer l’urticaire spontanée et le dermographisme non pas comme deux entités distinctes, mais plutôt comme un continuum pathologique. Pour le praticien, il s’agit d’une occasion d’élargir le dialogue avec le patient : un simple contact, un vêtement trop serré ou un geste banal peuvent déclencher une crise. Reconnaître ce lien permet d’adapter les conseils d’éviction, d’optimiser le traitement antihistaminique et de mieux évaluer la pertinence d’une biothérapie dans les formes sévères.

Sur allergique.org, nous avons déjà insisté sur la nécessité d’une prise en charge globale de l’urticaire. Cette nouvelle étude internationale vient confirmer que les formes mécaniques, telles que le dermographisme, font partie intégrante du spectre de l’urticaire.

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