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Le régime, traitement fétiche des mamans d’enfants atopiques : dangereux ?
lundi 12 juillet 2004, par
La dermatite atopique est une affection qui déstabilise souvent les parents et surtout les mamans ce qui est tout à fait normal. Cependant cela peut conduire à des pratiques qui ne sont pas toujours justifiées, comme des régimes d’exclusion alimentaires non documentés. Est-ce que ce type d’attitude est fréquent ?
Utilisation des régimes alimentaires par les parents d’enfants ayant une dermatite atopique. : Johnston GA, Bilbao RM, Graham-Brown RA.
Department of Dermatology, Leicester Royal Infirmary, Leicester LE1 5WW, U.K.
dans Br J Dermatol. 2004 Jun ;150(6):1186-9.
– Introduction :
- En 1989, les auteurs ont démontré que 71% des enfants qui consultent l’unité de dermatologie clinique pédiatrique pour une dermatite atopique (DA) ont déjà eu des essais de régimes alimentaires par leurs parents pour tenter d’améliorer leur affection.
- Les auteurs ont réexaminé cette population pédiatrique pour déterminer si un régime alimentaire prescrit en complément thérapeutique pour les enfants ayant une affection dermatologique est accompagné également de manipulations diététiques par les parents.
– Objectif de l’étude :
- Qualifier et quantifier l’usage de manipulations diététiques secondaires chez des enfants ayant une DA prise en charge.
– Méthodologie :
- Un questionnaire réalisé face à face a porté sur 100 enfants ayant une DA.
– Résultats :
- L’age moyen des enfants est de 7.3 ans (5.9 , de 0.6 à 17.1), avec une origine ethnique variable : blanc 59%, indo-asiatique 35%, africain 3%, autres 3%.
- 75% (75 sur 100) des patients ont essayé une régime d’exclusion : les aliments les plus souvent éliminés sont des produits laitiers dans 48% des cas (36 sur 75), œuf 27% (20 sur 75), lait de vache 25% (19 sur 75).
- 41% (41 sur 100) ont essayé des régimes de supplémentation. Les suppléments les plus fréquents sont l’huile de primevère 59% (24 de 41), dont 13% (3 sur 24) des parents pensent que cela améliore l’état cutané.
- Seulement 51% (38 sur 75) ont consulté un médecin ou un diététicien avant de commencer la manipulation alimentaire.
– Conclusions :
- Par rapport à l’étude précédente des auteurs, la proportion de patients qui ont un régime alimentaire d’exclusion a augmenté de 71 à 75%.
- La proportion de ces régimes qui ont été supervisés reste la même, ainsi que les aliments qui sont éliminés.
- La proportion de patients qui disent qu’un régime qui n’a pas été contrôlé est bénéfique a augmenté de 10 à 39%.
Dans ce travail les auteurs démontrent que des enfants ayant une prise en charge thérapeutique d’une dermatite atopique ont malgré tout dans 75% des cas un régime décidé par les seuls parents le plus souvent de type régime d’exclusion. Ce régime n’est généralement pas validé sur le plan médical.
Cette étude est intéressante car elle reflète un fait de société qui n’est pas sans poser des problèmes.
De plus en plus de parents pensent que certains aliments sont contre-indiqués chez leurs enfants et doivent être éliminés.
Il y a donc dans l’inconscient collectif, des aliments dits sains et des aliments qui sont mauvais.
Pour certains aliments il a effectivement été démontré qu’ils peuvent être allergisants : ils sont donc exclus de l’alimentation chez les enfants ou les adultes pour lesquels une allergie réelle a été démontrée vis-à-vis de cet aliment.
Mais exclure ces aliments chez des enfants sous prétexte qu’ils pourraient être allergisants est une dérive dangereuse, car ces aliments sont aussi les plus fréquents et utiles sur le plan des apports vitaminiques et acides aminés. Ainsi on trouve le lait et ses dérivés, les œufs, la farine de blé etc...
Prescrire un régime n’est pas une chose anodine : elle va conditionner l’enfant, créer des problèmes majeurs d’alimentation. On ne peut pas exclure qu’à terme cela puisse favoriser des pathologies graves comme l’anorexie mentale ou autres.
Il faudrait donc améliorer la communication vis-à-vis des parents ayant un enfant souffrant de dermatite atopique pour encadrer des pratiques qui sont parfois néfastes pour l’enfant comme ces régimes d’exclusion ou de supplémentation.
Il existe actuellement des moyens qui permettent de porter une diagnostic fiable : tests cutanés, dosages biologiques, et si nécessaire tests de provocation.
Il ne viendrait à personne l’idée de donner à son enfant un médicament sans prescription : un régime est également un acte thérapeutique, il doit donc être aussi encadré, avec une justification médicale.
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