Deuxième symposium du CICBAA : Premier jour

vendredi 26 septembre 2003 par Dr Hervé Masson5959 visites

Accueil du site > Evènements > Comptes rendus > Deuxième symposium du CICBAA : Premier jour

Deuxième symposium du CICBAA : Premier jour

Deuxième symposium du CICBAA : Premier jour

vendredi 26 septembre 2003, par Dr Hervé Masson

Le Cercle d’investigations Cliniques et Biologiques en Allergologie Alimentaire organisait à Nancy pour la deuxième fois un symposium dont le thème était : Allergologie alimentaire : de l’allergie à l’allergénicité.

La Lorraine est magnifique sous le soleil et la Place Stanislas resplendit de tous ses ors. Mais c’est dans l’enceinte du palais des congrès que les allergologues arpentaient sur le chemin d’une meilleure connaissance en allergie alimentaire.

Dr Hervé MASSON

Cette première journée a permis d’avancer dans la connaissance de deux grands thèmes : l’allergie au blé et l’allergie au soja.

Des intervenants français, mais aussi finlandais et des États-Unis, sont venus aborder ces deux sujets.

 Une grande simulatrice pour l’allergologue : L’intolérance au gluten Pr H Rousset

L’intolérance au gluten ou maladie cœliaque (MC) demeure un piège diagnostique pour l’allergologue. Certains signes sont communs ou proches, il s’agit d’une réaction immunologique mais pas allergique et la thérapeutique est l’éviction.

La MC est une maladie fréquente (1/300) qui touche aussi bien les adultes que les enfants.

Si son diagnostic est facile dans les formes complètes et classiques, l’orateur a insisté sur les formes inhabituelles qui peuvent induire en erreur le clinicien.

Le gluten est une substance protéique visqueuse restant après l’extraction de l’amidon des céréales suivantes : blé, seigle, orge. L’alpha-gliadine, l’accusée, est une protéine de la famille des prolamines.

La réaction immunologique générée par le contact entre le tractus digestif et cette protéine va déboucher sur une réaction inflammatoire responsable d’atrophie villositaire, sub-totale puis totale, prédominante dans la région proximale et s’étendant à l’ensemble de l’intestin grêle.

Le traitement consiste en l’éviction totale du gluten (moins de 50 mg/J) qui permet une repousse des villosités en 6 mois à un an.

La forme classique ne pose guère de problèmes de diagnostic : diarrhée, amaigrissement, douleurs abdominales avec flatulences et malabsorption (20% des cas).

Mais il faut se méfier des formes frustres fréquentes :

  • les manifestations hématologiques :
    • l’anémie isolée est le mode de révélation le plus fréquent (présent dans 90% des cas et exceptionnellement absent). Le plus souvent par carence en fer. Le prélèvement biopsique doit faire partie de l’endoscopie de la recherche étiologique d’une anémie.
  • Les manifestations muqueuses et cutanées :
    • La dermatite herpétiforme caractérisée par des lésions papulo-vésiculeuses prurigineuses, siégeant au niveau de la face postérieure des avant-bras, des genoux et des fesses est souvent associée à une atrophie villositaire sub-totale ou totale (75% des cas).
    • La biopsie fera la preuve du caractère immunologique de la lésion.
  • Les manifestations générales
    • l’amaigrissement en sachant que l’obésité n’élimine absolument pas le diagnostic
    • l’asthénie est très fréquente. Plusieurs observations de "syndrome de fatigue chronique" ont bénéficié d’un régime sans gluten.
  • Les signes osseux : fragilité, douleurs
  • L’atteinte hépatique : hyper-transaminasémie inexpliquée qui se normalise sous régime sans gluten.
  • Les signes neuro-psychiques : un des points les plus discutés. Des observations d’épilepsie, de syndrome dépressif etc... ont été décrites.
  • Les maladies auto-immunes associées :
  • Le diabète insulinodépendant (5,4% de diabète au cours de la maladie cœliaque)
  • Autres maladies : thyroïdite d’Hashimoto, vitiligo...

Le diagnostic, lorsqu’il a été évoqué cliniquement, sera facile à affirmer :

  • recherche d’anticorps anti-endomysium dont la sensibilité est de l’ordre de 90% et la spécificité de presque 100%
  • les anticorps anti-gliadine ont une sensibilité équivalente mais une spécificité moins bonne.
  • la biopsie duodénale sera de toutes façons indispensable pour affirmer le diagnostic :
    • endoscopie digestive haute guidée
    • en fonction de la clinique et des dosages biologiques
    • d’emblée si la suspicion est suffisamment importante.

L’intolérance au gluten peut donc se manifester sous des formes très variées qui n’orientent pas "à priori" vers cette maladie. Cette communication risque de nous faire la rechercher un peu plus souvent...

 Réponse immunitaire du sujet sain consécutive à l’exposition professionnelle à la farine de blé Kolopp-Sarda MN

Cette étude avait pour objectif d’évaluer la réaction d’un organisme exposé quotidiennement à la farine de blé.

121 hommes travaillant dans 11 moulins de France et 39 sujets travaillant dans une boulangerie industrielle constituaient le groupe "exposé". Le groupe témoin comportait 41 sujets.

Aucun test cutané à la farine n’a été retrouvé chez les témoins alors que 8% des exposés en avaient un.

Le taux d’IgG et d’IgA était supérieur dans la population exposée. Les taux d’IgE anti-farine et anti-gliadine était faible par contre.

De la même manière, le taux salivaire d’anticorps était plus élevé chez les exposés.

Cette étude montre qu’il existe une réponse humorale spécifique, systémique et locale dirigée contre la farine inhalée et ingérée, réponse particulièrement intense chez les sujets exposés chroniquement. Il existe une réactivité immune infra-clinique de sujets sains exposés à la farine. Ceci peut avoir deux conséquences :
* fausser l’interprétation du dosage d’IgA anti-gliadine sériques considérés comme pathognomoniques de la maladie cœliaque ou de la dermatite herpétiforme. Il faudra alors interpréter ces résultats en fonction de l’exposition du sujet.
* Le dosage d’IgG anti-farine salivaire ou d’IgG et d’IgA anti-farine et/ou anti-gliadine sériques apparaît comme un nouvel outil de mise en évidence d’une exposition à la farine.

 Néoallergénicité de certains isolats de farine de blé : implication du gluten déamidé V. Leduc

Les isolats de blé sont issus de la solubilisation du gluten, naturellement insoluble dans les tampons aqueux. Ils jouent un rôle technologique de liaison pour la reconstitution de produits de charcuterie et sont utilisés à une dose maximum de 2%.

L’auteur décrit 4 cas de réactions allergiques où ces isolats ont pu être incriminés.

  • une femme consommant sans problème du pain mais qui a souffert à deux reprises d’un angio-œdème avec urticaire après avoir mangé un pâté en croute et une saucisse.
  • une patiente avec un sandwich contenant du poulet reconstitué.
  • une enfant ayant fait deux accidents dont le point commun était la consommation de dinde ou de poulet pané (avec chapelure)
  • une femme qui a fait 3 accidents : plat de lentilles et saucisse ; pâté contenant des protéines de blé ; ingestion d’un "cordon bleu".

Dans ces cas, le diagnostic était posé par la réalisation d’un prick test à l’isolat de blé confirmés le plus souvent par TPO ou TPL. Le dosage des IgE spécifiques "Isolat de blé" étant à ce moment là commercialement indisponible, des disques "Isolat de blé" ont permis de vérifier la présence de forts taux d’IgE spécifiques allant jusqu’à la classe 6.

Cette communication va nous conduire une fois de plus à étendre notre bilan étiologique lors des réactions allergiques. Là encore, les tests avec les aliments incriminés natifs permettent un premier abord diagnostique.

Abonnez-vous!

Recevez les actualités chaque mois