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JPA 2005 : Neutrophiles - Dr Sylvie Huet
vendredi 14 janvier 2005, par
La première partie de la matinée du jeudi 13 était consacrée aux publications sur les neutrophiles.
Les neutrophiles et hypersensibilité
Le début de cette matinée du jeudi 13 janvier des JPA a été consacré aux polynucléaires neutrophiles.
En tant qu’allergologues, nous sommes plus familiers avec les éosinophiles, mais les données actuelles, exposées par le premier intervenant Madame MECARELLI (INSERM Hôpital Necker), nous ont montré que les neutrophiles étaient également impliqués dans les manifestations allergiques.
Les éosinophiles et les neutrophiles ont beaucoup de points communs, ils dérivent du même précurseur et sont tous deux capables de phagocyter et de sécréter des médiateurs toxiques.
En ce qui concerne les manifestations d’hypersensibilité, les neutrophiles peuvent être recrutés dans diverses situations. Il existe dans l’asthme allergique murin une phase transitoire de recrutement des neutrophiles précédant l’afflux plus tardif des éosinophiles.
Dans l’exanthème pustuleux généralisé aigu (allergie médicamenteuse), les pustules intra-épidermiques amicrobiennes contiennent un infiltrat à lymphocytes T puis à neutrophiles.
Le recrutement des neutrophiles peut être lié à l’immunité innée ou acquise, ces deux mécanismes ne s’excluant pas mutuellement.
Il se fait par l’intermédiaire de molécules d’adhésion et les mécanismes sont les mêmes que pour les éosinophiles. Cependant, les chiomiokines sont différentes pour les neutrophiles et les éosinophiles.
Dans la famille de CC chimiokines, la plupart attirent sélectivement les éosinophiles via le récepteur CCR3, alors que dans la famille de CXC chimiokines, elles peuvent pour la plupart d’entre attirer les deux types de cellules à l’exception de l’IL-18 qui est spécifique des neutrophiles via le récepteur CXCR1. On retrouve d’ailleurs des concentrations élevées d’IL-18 dans l’expectoration des patients présentant un asthme sévère et chez les patients atteints d’exanthème pustuleux généralisé aigu, on a démontré la sécrétion d’IL-18 par des clones lymphocytaires T spécifiques du médicament incriminé.
Une autre cytokine jouant un rôle important est l’IL-17, produite par les lymphocytes T lors d’infection par des bactéries Gram - et qui semble impliquée dans le recrutement des neutrophiles au niveau bronchique.
Enfin, l’apoptose des neutrophiles est inhibée par le LPS, le GM-CSF, le LTB4 et le TNFα, celle des éosinophiles l’est par IL-3, IL-5 et GM-CSF, alors qu’elle est ralentie par les corticoïdes, ces derniers accélérant au contraire l’apoptose des neutrophiles (ce point pourrait fournir une des explications à la cortico-résistance observée dans certains asthmes graves) .
Les neutrophiles contiennent des dérivés actifs de l’oxygène et des protéines antibiotiques, notamment la lacto-ferrine, les lysozymes, le BPI et des défensines α, qui sont antibiotiques, chimiotactique pour les lymphocytes T et les cellules dendritiques, et mitogènes pour les fibroblastes.
Ainsi, les neutrophiles sont responsables des lésions cellulaires et sont impliqués dans la genèse des lésions observées dans l’emphysème pulmonaire et la bronchite chronique.
Le second intervenant, le Pr MICHEL de Bruxelles a abordé les
relations endotoxines et neutrophiles.
Parmi ces endotoxines (ou plutôt exotoxines car elles sont libérées dans le milieu extérieur), on retrouve PAMP, LPS, glycans et DNA bactériens et autres qui agissent avec le système immunitaire inné des eucaryotes.
Le LPS, libéré par les bacilles Gram- peut être lié au HDL, ce complexe entraînant la neutralisation du LPS, au CD14 s ou au LPS binding protein, ces deux derniers complexes entraînant une activation cellulaire.
Cette endotoxine est présente dans la poussière de maison (de 1 à 20 μg/g de poussière) et dans la fumée de cigarette (120 nanog/cigarette).
En clinique, dans les BPCO professionnelles chez les non-fumeurs, particulièrement en milieu agricole, l’élévation des endotoxines dans les poussières agricoles est corrélée à l’augmentation du risque de développer une BPCO. La prévalence de bronchites chroniques est de 35% chez les non-fumeurs exposés à ces endotoxines contre 2% dans la population témoin.
L’inhalation de LPS entraîne, chez les patients atteints d’asthme ou de bronchite chronique, un bronchospasme survenant 6 heures après et associé à une neutrophilie sanguine qui se produit également 6 heures plus tard et perdure à la 24ème heure.
On observe parallèlement une élévation de la sélectine E et des protéines inflammatoires telles que la CRP. Il existe une relation dose-dépendante entre le niveau de LPS et la neutrophilie.
Au niveau local, l’inhalation de LPS entraîne la production de gélatinase, métalloprotéinase 9 ou MMP9, d’IL-8, de MPO, d’élastase, de TNF et l’élévation, dose-dépendante de CC16 (marqueur de la perméabilité épithéliale pulmonaire).
Les corticoïdes inhalés n’ont aucun effet sur la réponse au LPS, par contre les inhibiteurs de la phospho-diestérase, surtout iso-enzyme 4, diminueraient la neutrophilie pulmonaire induite par le LPS.
Un fait très important est qu’il existe une variabilité inter-individuelle très importante dans la réponse au LPS. Cette variabilité serait due à des mutations du TLR4, qui est une partie du récepteur du LPS. Il existe 44 mutations de TLR4 et la position mutée 896 est associée à une diminution de la réponse au LPS. Quant à la seconde partie du récepteur du LPS, le CD 14, il existe 37 mutations, mais aucune d’entre elles n’est associée à des modifications de la réponse au LPS.
Il existe de grandes similitudes entre l’inflammation secondaire à l’inhalation de LPS et celle des la BPCO, telles que la bronchoconstriction, la résistance aux corticoïdes, l’infiltrat à neutrophiles, l’activation des macrophages.. Il existe une relation entre la sévérité de la BPCO tabagique et la neutrophilie pulmonaire.
Tous les fumeurs ne développent pas de BPCO, et ce risque pourrait dépendre de critères génétiques et en particulier de la mutation du TLR4.
Toutes ces données sur
l’implication des neutrophiles dans l’asthme
ont été développées d’une manière plus clinique par le dernier intervenant, le Dr TILLIE LEBLOND de Lille.
On retrouve très souvent, dans l’asthme grave, dans l’expectoration induite ou dans le liquide de lavage bronchique des patients intubés une quantité très importante de neutrophiles, leur taux étant encore plus élevé en cas d’infection concomitante à l’origine de l’aggravation de l’asthme.
Les virus, les allergènes (Alternaria et isocyanates) et l’exposition aux endotoxines peuvent induire le recrutement des éosinophiles.
Dans l’asthme aigu grave, de nombreux médiateurs sécrétés par les neutrophiles sont susceptibles de majorer l’inflammation bronchique (élastase, métalloprotéinase et surtout MMP9) et entraînent un remodelage par dégradation de la matrice extracellulaire, une augmentation de la perméabilité épithéliale et endothéliale.
L’œdème péri-bronchique augmente les résistances des voies aériennes et l’élastase par son action secrétagogue favorise la formation de plugs contribuant à l’obstruction bronchique.
Ainsi, l’infiltration à neutrophiles dans l’asthme serait un marqueur de sévérité.
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