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WAC 2005 : Le congrès du Dr Hervé Masson. 1 et 2
jeudi 30 juin 2005, par
En ouverture de ce World Allergy Congress, les organisateurs nous ont proposé des séances de communications libres : voici celles que j’ai retenues sur le thème « Pollution et environnement ». Vous trouverez ensuite le compte rendu du symposium sur "Infection et allergie". Les communications libres sur l’allergie alimentaire ont aussi retenu mon attention.
Pollution et environnement
Session de présentations libres.
La pollution atmosphérique augmente la biodisponibilité des pollens
Motta A
Nous connaissons le rôle irritant pour les voies respiratoires des polluants atmosphériques.
Dans le cas des pollens, il a été évoqué un effet adjuvant de la pollution atmosphérique qui pourrait consister en l’interaction des allergènes polliniques avec les polluants atmosphériques, rendant le pollen plus allergisant.
Les auteurs ont exposé les pollens au NO2, O3 et SO2 et les modifications de la quantité d’allergènes ont été examinées.
– Après l’exposition, le contenu en allergènes polliniques était diminué, ce qui suggère soit une dégradation protéique, soit la libération d’allergènes libres induits par l’interaction avec les polluants.
– La réaction déclenchée par l’instillation dans les voies respiratoires de rats n’était pas modifiée, que le pollen soit exposé ou non.
– Cependant, l’examen en microscopie électronique révélait un nombre important de grains de pollens cassés et la libération de granules cytoplasmiques de pollens (PCG) dans les échantillons exposés aux polluants.
– Ils ont aussi constaté que l’exposition aux polluants exacerbait la libération de ces PCG par les pollens lorsqu’ils étaient en contact avec l’eau.
– Enfin, les auteurs ont constaté que l’allergénicité des PCG était supérieure aux grains de pollens intacts.
Les auteurs concluent que les polluants atmosphériques n’augmentent pas l’allergénicité des pollens mais favorisent la libération de microparticules (PCG) qui sont plus allergisantes que le pollen entier.
Voici donc pourquoi pour le diesel, en particulier, on a retrouvé un effet délétère en cas d’allergie aux pollens.
Il ne s’agit pas d’une augmentation de l’allergénicité des grains de pollens mais d’un facteur mécanique (facilitation de l’éclatement des grains) associé à une plus grande allergénicité des microparticules libérées.
Un rôle de stimulation de l’inhalation d’un taux faible de toluène dans un modèle murin d’allergie
Fujimaki H
Les auteurs ont exposé des souris à deux taux différents de toluène : 9 ppm et 90 ppm pendant 30 minutes les jours 1, 2, 3, 7, 14, 21 et 28.
Un jour après la dernière inhalation, les auteurs ont recueilli le sang, la rate, fluide de lavage broncho-alvéolaire et le bulbe olfactif des souris.
Certains groupes de souris ont été sensibilisés à l’ovalbumine (OVA) avant leur exposition au toluène.
– L’exposition à 9 ppm de toluène des souris sensibilisées à l’ovalbumine augmentait significativement la production de NGF et des IgE anti-OVA alors que l’on ne retrouvait pas cette augmentation chez les souris soumises à la dose de 90 ppm.
– L’expression de l’IFN gamma et de l’IL4 augmentait de manière dose dépendante.
– Le taux des cellules inflammatoires du liquide de lavage broncho-alvéolaire était inchangé en cas d’exposition.
– Chez les souris sensibilisées à l’OVA et exposées à 9 ppm de toluène, l’expression de CCL-2 et de CCL-3 mRNA augmentait dans le bulbe olfactif.
Les auteurs concluent que l’exposition à des taux faibles de toluène induit des perturbations du réseau neuro-immunologique de même qu’une stimulation antigènique.
Voici une nouvelle étude sur le lien entre pollution et système immunitaire.
Le toluène est un contaminant fréquent de notre environnement et des doses faibles semblent capables d’entrainer des modifications immunologiques.
Il n’en demeure pas moins que cette étude a été réalisée chez la souris et pas chez l’homme.
L’effet adjuvant des microparticules est influencé par des facteurs génétiques dans un modèle murin
Nygaard Uc
Il existe de plus en plus d’études évoquant le rôle de l’effet exagérateur des microparticules sur l’asthme, les symptômes allergiques et la sensibilisation.
Dans le même temps, il semble exister des différences conséquentes en fonction de facteurs génétiques.
Après injections sous-cutanées de particules de polystyrène (PSP) à différentes lignées de cellules, les auteurs ont étudié comment les PSP modifiaient les réponses IgE et IgG2a contre l’ovalbumine (OVA).
– Les PSP augmentent la réponse IgE spécifique de l’OVA dans toutes les lignées de souris alors que la réponse IgG2a n’était augmentée que de manière variable et pas dans toutes les lignées.
– Par ailleurs, les auteurs ont trouvé que chaque lignée de souris avec sa propre manière de réagir à l’OVA, PSP et OVA+PSP et aussi leur terrain cytokinique individuel.
Ils concluent que la lignée de souris influence fortement la façon de réagir aux particules des différentes souches.
Il semble donc que les facteurs génétiques soient responsables de réactions immunologiques variables en présence des particules polluantes.
symposium Infection et allergie
Ce symposium avait pour objectif de faire le point sur le lien entre allergie et infections quelles soient bactériennes, virales, fongiques ou parasitaires.
Infections bactériennes et allergie
Eckard Hamelmann, Berlin
Les infections bactériennes sont connues pour favoriser l’allergie :
- Exacerbation de l’asthme et de l’hyperréactivité bronchique,
- Exacerbation de l’inflammation des voies aériennes,
- Exacerbation de la dermatite atopique.
Existe-t-il un effet protecteur avec les mycobactéries ?
– L’auteur a présenté des études qui étudiaient la corrélation entre la réponse au test tuberculinique et le taux d’IgE
- Une seule étude montrait un effet protecteur,
- Toutes les autres ne retrouvaient aucune relation.
– Tuberculose et allergie :
- Plusieurs études montrent un effet protecteur sur la survenue de l’allergie de la tuberculose.
– Infection mycobactérienne expérimentale et allergie :
- Une réduction de l’allergie a été notée dans plusieurs études chez la souris.
- Elle serait due soit à une bascule de Th2 vers Th1, soit d’une interaction sur l’IFN-gamma.
Influence des probiotiques
– Le Lactobacillus GG (LGG) a été beaucoup étudié à différents moments de la vie et sur des durées plus ou moins longues.
– Il existe des études évoquant le rôle protecteur mais elles méritent d’être étendues à une population plus large.
Protection par les lipo-polysacharides (LPS)
– L’exposition aux endotoxines diminuerait la rhinite allergique saisonnière,
– La production d’IL12 et IL10 augmentait après stimulation par les LPS,
– Dans un modèle murin de souris sensibilisées, des auteurs ont réalisé une provocation à l’OVA et regardé l’influence des endotoxines : elles inhibent :
- la production d’IgE,
- la réponse TH2
- l’inflammation des voies aériennes après provocation.
– L’exposition aux LPS dans la période néonatale : - diminue la sensibilisation à la fois quand les LPS sont données aux nouveau-nés dans les premiers mois de la vie et chez la mère dans les dernières semaines de grossesse.
Conclusion de l’auteur :
Les infections bactériennes :
- Module les caractéristiques de la réponse immunitaire
- Les mycobactéries peuvent soit inhiber soit exacerber l’allergie,
- Induisent une déviation immunitaire vers Th1.
– Mais la voie d’administration est importante, la dose aussi.
– La chronologie est importante :
- Appliquées sur une allergie existante, on retrouve une exacerbation
- Avant l’apparition de l’allergie : elles auraient un effet protecteur.
– Il faut tout de même se souvenir que les infections bactériennes restent dangereuses.
– Il est encore nécessaire de réaliser d’autres études prospectives et interventionnelles.
Infections virales et allergies
Nikolaos Papadopoulos, Athènes, Grèce
L’auteur a présenté les études montrant l’influence des infections à virus sur la survenue de l’allergie.
Les oreillons
– Une étude du Lancet a montré un effet protecteur des oreillons contre l’allergie chez de jeunes africains,
– Un effet protecteur modéré a été montré en Écosse,
– Pas d’effet dans une étude chez les enfants finlandais,
– Et même un effet favorisant dans une autre étude finlandaise.
Hépatite A
– On constaterait une diminution des sensibilisations au décours d’une hépatite A
– Cet effet est aussi retrouvé avec la toxoplasmose et l’infection à hélicobacter,
– Cette étude ne retrouvait aucune influence des oreillons.
Infection au virus respiratoire syncitial
– Il existe une association positive entre asthme, allergie et infection au VRS.
– la fréquence des sifflements respiratoires favorisés par le VRS diminue avec l’âge mais les sifflements après une infection non à VRS augmente quant à elle.
– le VRS favorise la sensibilisation aux allergènes.
L’allergie module la réponse aux virus
– Les virus adorent les environnement allergiques : de hauts niveaux d’IL4 prolongent les infections pour la grippe, le VRS et le parainfluenzae.
– Lorsque l’on retrouve du VRS après 14 jours d’infection, il existe moins d’IF-gamma
– Les cellules épithéliales des asthmatiques allergiques ont une réponse déficiente au VRS.
Interactions virus/allergie
– Une étude a porté sur des enfants souffrant d’asthme intermittent, étude prospective avec provocation à la métacholine.
- l’hyperréactivité bronchique était plus longue après une infection virale chez les allergiques
- il existait plus de rhinite virale et d’asthme chez les atopiques
- l’hyperréactivité bronchique explorée à long terme était plus importante chez les atopiques.
Conclusion
– Les virus favorisent :
- le wheezing chez les atopiques
- la répétition des infections
- la persistance de l’hyperréactivité bronchique
– Tout ceci conduit à l’asthme.
Infections fungiques et allergie
Thomas Platts-Mills, Charlottesville, USA
Il existe très peu d’études sur le rôle des particules fongiques sur l’allergie. Par contre, les mycoses sont parfois évoquées dans l’asthme.
Ainsi, en cas d’asthme sévère ne répondant pas au traitement, il faut chercher :
– une exposition allergénique particulièrement importante,
– une sinusite chronique ou une maladie polypeuse sinusienne à éosinophiles,
– mais aussi la présence d’une infection fongique.
Le rôle des mycoses dans l’asthme :
– Par un mécanisme IgE et aéroporté : Alternaria représentant alors un facteur de gravité
– En cas de colonisation du poumon : il s’agit d’aspergillus dans 90 % des cas,
– Les dermatophytes peuvent être responsables de pathologies à IgE.
Il n’existe que peu d’études sur le rôle des éléments fongiques dans l’asthme.
On retrouve cependant quelques études sur l’infection à dermatophytes et la survenue tardive d’un asthme.
– certains asthmes sont atopiques, d’autres non
– certaines équipes ont proposé un traitement par fluconazole en cas d’asthme d’apparition tardive.
Communications libres : Allergie alimentaire
Cette session a permis de profiter de communications sur l’allergie alimentaire.
Innocuité et efficacité d’un protocole d’induction de tolérance de 6 jours chez des enfants souffrant d’allergie IgE médiée au lait de vache
A. Bauer, Passau, Germany
Les auteurs ont posé comme bases que l’allergie au lait de vache du jeune enfant est particulièrement élevée.
Approximativement 85% de ces enfants verront leur allergie disparaître spontanément mais les 15 % restant ont une probabilité de guérison très faible.
Dans certains cas, les risques d’anaphylaxie peuvent aller jusqu’au décès.
Il s’agissait donc de tester un protocole d’induction de tolérance chez des enfants souffrant d’anaphylaxie sévère au lait de vache.
Ils ont donc enrôlé 9 garçons d’âge moyen 5 ans qui présentaient des réactions sévères IgE médiées.
Les doses utilisées pour l’induction étaient calculées individuellement pour chaque enfant en fonction de ses réactions aux prick tests.
– 5 enfants ont toléré une dose quotidienne de 200 ml de lait ou plus après 6 jours de traitement,
– 3 enfants toléraient de 18 à 50 ml de lait par jour,
– 1 enfant a développé une réaction anaphylactique sévère malgré une induction prudente.
– Tous les enfants ont présenté des effets secondaires en général modérés et facilement curables.
Les auteurs concluent que l’induction de tolérance au lait de vache chez des enfants souffrant d’anaphylaxie est possible avec un protocole de 6 jours.
5 des 9 enfants ont été considérées comme guéris même s’ils avaient pour consigne de continuer à absorber un minimum de 200 ml de lait par jour.
3 autres pouvaient être considérés comme protégés en cas d’absorption accidentelle de lait.
Compte-tenu de la dangerosité potentielle de ce traitement, il s’agit d’une thérapeutique à réserver à l’hôpital.
Les études ne sont pas toutes unanimes sur la fréquence de ces anaphylaxies au lait de vache.
Dire qu’elle est très fréquente me parait un peu exagéré.
Malgré tout, il reste vrai que une telle induction de tolérance, suivie tout de même par plusieurs années de régime suivi, de contrôles de sensibilisation avant d’autoriser sans angoisse une alimentation lactée, est d’un réel secours pour les allergiques.
L’hypoacidité favorise la sensibilisation aux protéines alimentaires et diminue les seuils d’allergie
Untersmayr E, Copenhague, Danemark
Après avoir démontré que l’hypoacidité gastrique favorisait la sensibilisation aux aliments dans un modèle murin, les auteurs ont voulu savoir si ces données étaient reproductibles chez l’homme.
– 152 patients souffrant de dyspepsie ont été traités par antiacides ou inhibiteurs de la pompe à protons pendant 3 mois.
– Après traitement, 25 % des patients montraient une augmentation des IgE spécifiques à certains aliments,
- 10 % une aggravation d’une sensibilisation préexistante,
- 15 % une apparition d’IgE aux aliments.
– 5 mois après l’arrêt du traitement, des IgE spécifiques pouvaient encore être trouvées chez 6% de tous les patients et 7 % avaient des tests cutanés positifs.
– Par ailleurs, les auteurs ont aussi démontré que l’activité biologique des aliments digérés était augmentée.
En conclusion,
– Une digestion gastrique insuffisante favorise la sensibilisation aux allergènes alimentaires,
– Dans ces conditions, les doses seuil nécessaires pour déclencher une anaphylaxie pourraient être diminuées.
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