12ème congrès de pneumologie de langue française Lille : 8-11 février 2008

jeudi 6 mars 2008 par Dr Jean-Claude Roca1269 visites

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12ème congrès de pneumologie de langue française Lille : 8-11 février 2008

12ème congrès de pneumologie de langue française Lille : 8-11 février 2008

jeudi 6 mars 2008, par Dr Jean-Claude Roca

Compte-rendu de la dernière rencontre de la pneumologie francophone.

De la rhinite allergique à la prévention de l’asthme

 :
Bruno Wallaert (Lille)

La rhinite est un facteur de développement de l’asthme.

Trois points importants à retenir :

  • la prévalence de la rhinite est élevée ;
  • la prévalence de la rhinite augmente ;
  • la prévalence de l’asthme est plus élevée chez les patients atteints de rhinite.

Augmentation de la prévalence de la rhinite allergique (Paris, entre 1968 et 1992, dans la tranche d’âge des 20-24 ans) :
 rhinite allergique :

  • 1968 : 4% de la population ;
  • 1982 : 10% de la population ;
  • 1992 : 28% de la population ;

 asthme :

  • 1968 : 3% de la population ;
  • 1982 : 5% de la population ;
  • 1992 : 14% de la population.

Augmentation de la prévalence de la rhinite allergique et de l’asthme (E.C.R.H.S. II – European Community Respiratory Healthy Survey II - : 11 168 jeunes ayant participé à la phase E.C.R.H.S. I ont répondu à un questionnaire adressé par voie postale, en moyenne 10 ans plus tard : période 1991-1993 – période 1998-2003).
 Résultats :

  • pas d’augmentation des symptômes d’asthme ;
  • par contre, augmentation :
    • des exacerbations d’asthme dans les 12 derniers mois (0,8%) ;
    • des traitements pour l’asthme (2,1%) ;
    • de la rhinite allergique (3,7%), surtout chez les plus jeunes.

La prévalence de l’asthme est plus élevée chez les patients porteurs d’une rhinite
 Résultats de l’étude Pariente & coll. portant sur 1367 adultes (France) :

  • prévalence de l’asthme chez les patients porteurs d’une rhinite : 13,4% ;
  • prévalence de l’asthme chez les patients non porteurs d’une rhinite : 3,8%.

 Résultats de l’étude E.C.R.H.S./Leynaert & coll. portant sur 262 adultes (Montpellier et Paris, France) :

  • prévalence de l’asthme chez les patients porteurs d’une rhinite : 22,5% ;
  • prévalence de l’asthme chez les patients non porteurs d’une rhinite : 4%.

 Résultats de l’étude Wright & coll. portant sur 129 enfants (Tucson, Arizona, U.S.A.) :

  • prévalence de l’asthme chez les patients porteurs d’une rhinite : 32% ;
  • prévalence de l’asthme chez les patients non porteurs d’une rhinite : 5%.

 Résultats de l’étude Settipane & coll. portant sur 162 étudiants (Providence, Rhode island, U.S.A.) :

  • prévalence de l’asthme chez les patients porteurs d’une rhinite : 10,5% ;
  • prévalence de l’asthme chez les patients non porteurs d’une rhinite : 3,6%.

 Résultats de l’étude Sibbald & Rink portant sur 319 adultes (Londres, Royaume Uni) :

  • prévalence de l’asthme dans les rhinites saisonnières : 23% ;
  • prévalence de l’asthme dans les rhinites perannuelles : 26% ;
  • prévalence de l’asthme dans les rhinites à la fois saisonnières et perannuelles : 43%.

La rhinite allergique, facteur de risque d’asthme : La rhinite allergique triple le risque d’asthme.

La rhinite allergique : un facteur de risque de mauvais contrôle de l’asthme.

La rhinite est un facteur de risque d’hospitalisation pour cause d’asthme (Price & coll., 2005).

La rhinite et les recours annuels aux soins urgences pour cause d’asthme (Price & coll., 2005) :
 en médecine générale :

  • patients atteints d’asthme et de rhinite (N = 4 611) : 3,8% ;
  • patients atteints seulement d’asthme (N = 22 692) : 3,4%.

 à l’hôpital :

  • patients atteints d’asthme et de rhinite (N = 4 611) : 0,76% ;
  • patients atteints seulement d’asthme (N = 22 692) : 0,45%.

Augmentation du risque de crise d’asthme et de visites d’urgence parmi les patients asthmatiques porteurs d’une rhinite allergique :

  • patients atteints d’asthme et de rhinite (N = 893) : 3,6% ;
  • patients atteints seulement d’asthme (N = 597) : 1,7%.

La rhinite allergique double le risque de visite aux urgences des patients asthmatiques.

Le traitement de la rhinite permet d’optimiser le traitement de l’asthme.

Traitement de la rhinite et morbidité liée à l’asthme (étude Crystals-Peters, 2002) :

  • rhinites traitées (N = 3 587) :
  • hospitalisations pour asthme : 0,9% ;
  • admissions aux urgences pour asthme : 3,1% ;
  • rhinites non traitées (N = 1 357) :
  • hospitalisations pour asthme : 2,3% ;
  • admissions aux urgences pour asthme : 5,7%.

Recommandation de la S.P.L.F. (Société de Pneumologie de Langue Française)/conférence d’experts (Lyon, 2007) : « il est recommandé de traiter la rhinite pour améliorer le contrôle d’un asthme associé (niveau de preuves 3, recommandation de grade B) ».

Il faut une place plus précoce à la désensibilisation dans le traitement de la rhinite (travail de Grembiale & coll., 2000) :

  • étude de 44 patients porteurs d’une rhinite perannuelle et d’une hyperréactivité bronchique, monosensibilisés aux acariens et bénéficiant d’un traitement d’immunothérapie spécifique au dermatophagoides pteronyssinus ;
  • suivi de l’hyperréactivité bronchique durant 2 ans ;
  • résultats :
    • groupe placebo : apparition d’un asthme dans 9% des cas ;
    • groupe bénéficiant d’un traitement d’immunothérapie spécifique au dermatophagoides pteronyssinus : aucune apparition d’asthme.

L’efficacité de la désensibilisation se maintient après l’arrêt du traitement :

  • 60 enfants présentant une rhinite allergique avec ou sans asthme ont été suivis durant une dizaine d’années (35 dans un groupe actif dit groupe ITS – sous immunothérapie spécifique sublinguale durant 5 ans – et 25 dans un groupe placebo).
  • Résultats :
  • à l’inclusion :
  • groupe actif :
    • pas d’asthme : 4 ;
    • asthme intermittent : 15 ;
    • asthme persistant léger : 6 ;
    • asthme persistant modéré : 10 ;
  • groupe placebo :
    • pas d’asthme : 2 ;
    • asthme intermittent : 14 ;
    • asthme persistant léger : 4 ;
    • asthme persistant modéré : 5 ;
  • en fin de traitement (fin de 5ème année) :
  • groupe actif :
    • pas d’asthme : 31 ;
    • asthme intermittent : 2 ;
    • asthme persistant léger : 1 ;
    • asthme persistant modéré : 1 ;
  • groupe placebo :
    • pas d’asthme : 1 ;
    • asthme intermittent : 17 ;
    • asthme persistant léger : 3 ;
    • asthme persistant modéré : 4 ;
  • 5 ans après arrêt du traitement :
  • groupe actif :
    • pas d’asthme : 32 ;
    • asthme intermittent : 1 ;
    • asthme persistant léger : 2 ;
    • asthme persistant modéré : 0 ;
  • groupe placebo :
    • pas d’asthme : 1 ;
    • asthme intermittent : 17 ;
    • asthme persistant léger : 3 ;
    • asthme persistant modéré : 4.

Conclusion :
 les interactions nez-bronches sont complexes ;
 les liens entre rhinite et asthme sont étroits, y compris chez les non allergiques ;
 l’existence d’une rhinite (même non allergique) augmente le risque d’asthme (et cela d’autant plus s’il s’agit d’une rhinite persistante et sévère) ;
 traiter la rhinite permet de prévenir l’asthme ;
 traiter la rhinite permet de mieux contrôler l’asthme.

« L’asthme est une métastase de la rhinite ».

« Aujourd’hui, il faut savoir désensibiliser rapidement la rhinite allergique de l’enfant ».

Profils de sensibilisation des patients allergiques

Michel Miguéres (Toulouse)

Facteurs conditionnant la survenue d’une sensibilisation

L’exposition aux pneumallergènes

 Les acariens :

  • l’exposition aux acariens majore le risque de sensibilisation ;
  • les enfants vivant en zones humides sont plus souvent sensibilisés que ceux vivants en zones sèches ;
  • le seuil de sensibilisation est de 2 µg de Der p 1 par gramme de poussière recueillie.

 Les blattes :

  • plusieurs études soulignent les liens existant entre exposition et sensibilisation ;
  • des seuils de sensibilisation ont été proposés :
    • 0,32 µg de Bla g 2 par gramme de poussière recueillie ;
    • 4 U de Bla g 1 par gramme de poussière recueillie.

 Les pollens :

  • il existe une étroite corrélation entre la hiérarchie des taxons sensibilisants et la fréquence des tests cutanés positifs ;
  • l’influence sensibilisante des allergènes est d’autant plus marquée qu’elle survient précocement au cours de la vie.

 Les moisissures :

  • l’exposition aux moisissures dans l’enfance est un facteur d’atopie et de sensibilisation ;
  • l’allergie aux moisissures majore le risque de sensibilisation aux acariens ;
  • un composant de la paroi des moisissures bloquerait l’effet bénéfique des endotoxines sur la maturation du système immunitaire (liaison entre les endotoxines et le CD 14 des macrophages).

 Les animaux de compagnie :

  • l’exposition très précoce aux allergènes de chat pourrait induire un état de tolérance vis-à-vis de ces allergènes, à la différence d’une exposition plus tardive.

Les facteurs génétiques

 Il existe de fortes présomptions de gènes gouvernant le phénotype allergique confirmées par :

  • les enquêtes familiales,
  • les études de jumeaux,
  • les isolats de populations :
    • île Tristan da Cunha,
    • îles Caroline où 75% des enfants sont asthmatiques.
  • Le phénotype allergique parental (surtout maternel) influence le développement des maladies allergiques.
  • Il existerait également des prédispositions génétiques à la polysensibilisation :
    • étude Yoo (2005) portant sur 567 enfants âgés de 7 à 10 ans ayant présenté des symptômes allergiques : les polysensibilisations sont fréquentes dans la fratrie des enfants eux-mêmes polysensibilisés (significativement plus que dans les fratries d’enfants monosensibilisés).
    • Étude Kang (2005) : les polysensibilisations sont fréquentes chez les parents d’enfants polysensibilisés.

Les cofacteurs environnementaux

 L’hypothèse hygiéniste :

  • le risque allergique est minoré par :
    • le rang élevé dans la fratrie,
    • la fréquentation des crèches,
    • les familles nombreuses,
  • les infections répétées dans la petite enfance,
    • la vie en milieu rural.
  • Le risque allergique est également minoré par une forte exposition aux endotoxines (liaisons LPS - molécule CD 14 des cellules dendritiques).

 La pollution :

  • les polluants photochimiques d’origine automobile (oxyde d’azote, ozone) majorent le risque de sensibilisation allergénique ;
  • il est possible que la pollution issue du diesel joue un rôle d’adjuvant : au Japon, il y a 3 fois plus de pollinoses au pollen de cèdre du Japon dans les zones situées à proximité des grands axes routiers.

Quels profils de sensibilisations ?

E.C.R.H.S. I (2007) : Des degrés de sensibilisations variables :

 3 sensibilisations dominantes :

  • acariens (médiane = 21,7%),
  • pollens de graminées (médiane = 16,9%),
  • phanères de chat (médiane = 8,8%).

 3 sensibilisations rares (entre 0,8 et 1,7%) :

  • cladosporium,
  • pollen de pariétaire,
  • pollen d’ambroisie.

 3 sensibilisations intermédiaires :

  • pollens de bouleau (6,4%),
  • alternaria (3,3%),
  • pollens d’olivier (2,9%).

Il existe de grandes variations de fréquence de l’allergie, d’un pays à l’autre : 17,5 à 54,8% (médiane = 36,8%).

 Incidence faible :

  • Belgique,
  • Espagne (sauf Barcelone),
  • Islande,
  • Norvège.

 Incidence forte :

  • Australie,
  • États-Unis d’Amérique,
  • Royaume Uni,
  • Nouvelle-Zélande.

Acariens :
 forte prévalence :

  • Australie,
  • Belgique,
  • États-Unis d’Amérique,
  • France (Bordeaux),
  • Irlande,
  • Nouvelle-Zélande,
  • Royaume Uni.

 faible prévalence :

  • Espagne,
  • France (Montpellier),
  • Islande,
  • Italie,
  • Scandinavie.

Pollens de graminées : allergènes extrêmement ubiquitaires.

Phanères de chat :
 forte prévalence :

  • Suède ;

 faible prévalence :

  • Espagne,
  • Italie.

Pollen de bouleau : forte prévalence en Europe centrale et du nord.

Pollen de pariétaire : forte prévalence dans le sud de l’Europe.

Alternaria : forte prévalence en Australie, aux États-Unis d’Amérique et en Nouvelle-Zélande.

Allergènes non évalués :

  • pollen de cyprès,
  • blatte.

Toutes les sensibilisations ont-elles le même pouvoir pathogène ?

Le profil de sensibilisation conditionne symptômes et risque d’hyperréactivité bronchique.

Texte de la conférence d’expert de la S.P.L.F. (Lyon, 2007) : « L’atopie, au sens de sensibilisation aux allergènes de l’environnement, est un facteur de risque d’asthme et de survenue de symptômes chez l’asthmatique, d’autant plus clairement que la sensibilisation concerne les allergènes domestiques ».

Hypothèses formulées :

  • durée de l’exposition,
  • taille des particules : les allergènes de petite taille sont plus allergisants,
  • intensité de l’exposition,
  • facteurs associés.

Allergènes perannuels et d’intérieur (Étude Boulet - 1997) :
 patients sensibilisés aux allergènes d’extérieur :

  • rhinite : 73,8% ;
  • asthme : 11,8% ;
  • asthme + rhinite : 14,4%.

 patients sensibilisés aux allergènes d’intérieur :

  • rhinite : 48,6% ;
  • asthme : 24,5% ;
  • asthme + rhinite : 26,9%.

La polysensibilisation est-elle un facteur de sévérité ?

La polysensibilisation est associée à une plus grande fréquence de l’asthme :
 Étude Ghunaim (614 enfants, 2006) :

  • pollen de phléole seul : 7% d’asthmes ;
  • pollen de bouleau seul : 16% d’asthmes ;
  • allergie à 2 pollens : 19% d’asthmes ;
  • allergie à 3 pollens : 37% d’asthmes.

 Étude Vervloet (157 enfants allergiques aux acariens, 1999) :

  • 1 à 2 tests positifs : 17,1% d’asthmes ;
  • 3 ou plus tests positifs : 43,9% d’asthmes.

La polysensibilisation est associée à une maladie allergique plus complexe :
 le risque asthmatique est majoré ;
 la prise en charge du patient est plus difficile :

  • les sources d’allergies sont multiples,
  • l’exposition aux allergènes est plus durable,
  • l’éviction est naturellement plus difficile,
  • la nature du traitement d’immunothérapie spécifique à entreprendre est plus discutée.

Tous polysensibilisés ?

Étude Silvestri (1999) : 38,7% de polysensibilisés.

Étude Arshad (2002) : 51% de polysensibilisés.

Étude AART (2007) : 64% de polysensibilisés.

Étude Antonicelli (2007) : 73,4% de polysensibilisés.

Étude Moscato (2006) : 74,5% de polysensibilisés.

Les profils de sensibilisation évoluent-ils avec l’âge ?

L’immunothérapie spécifique prévient la survenue de nouvelles sensibilisations.

Sensibilisés ou allergiques ?

Le diagnostic d’allergie repose sur :
 la notion de sensibilisation et de symptômes,
 l’unité de lieu et de temps,
 l’anamnèse :

  • environnement,
  • saison,
  • exposition-éviction voire tests de provocation.

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