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EAACI 2012 : Dr Nhân PHAM-THI
lundi 18 juin 2012, par
Induction de tolérance orale en cas d’allergie à l’arachide.
Katharina Blumchen (Allemagne)
Le Dr Blumchen a fait une revue de la littérature sur l’Induction de Tolérance Orale (ITO) pour l’arachide.
Elle remet en perspective les différentes approches des protocoles :
- la « désensibilisation » qui comparerait les seuils de réactivité à l’entrée et la fin
- l’induction de tolérance aurait pour but de remonter le seuil de réactivité de manière significative
- l’induction d’une tolérance « robuste » dont le bénéfice persisterait à distance de l’arrêt du traitement d’entretien (au moins 2 semaines comme dans le protocole allemand)
Équipe (pays) | IgEs Arachide (kU/l) | Dose d’entretien quotidienne (mg) | Utilisation d’adrénaline |
---|---|---|---|
Clarck 2009 (UK) | 59 | 800 | 0 |
Jones 2009 (US) | 85 | 300 | 15 |
Blumchen 2010 (G) | 96 | 125-250 | 0 |
Anagnostou 2011 (UK) | 31 | 800 | 0 |
Varshney 2011 (US) | 82 | 4000 | 19 |
On remarque l’hétérogénéité des populations d’allergiques
En dehors de l’équipe allemande, les sujets allergiques très sévères ont été exclus des études (ceux qui nous préoccupent finalement).
Seule la dernière étude a été réalisée contre placebo.
Les objectifs étaient d’augmenter les seuils de réactivité et donc de diminuer les risques de réaction sévère. Les doses d’entretien étaient très variables et allaient jusqu’à 20 cacahuètes par jour ( !) pour une équipe américaine (on peut imaginer que cela puisse altérer la compliance dans le long terme pour les enfants …). La qualité de vie n’a pas encore été évaluée dans ces études.
L’adrénaline a été utilisée beaucoup plus fréquemment par les américains compte tenu de leurs critères plus larges et de leurs protocoles.
Dans l’étude anglaise de Cambridge, on a montré des signes biologiques d’acquisition de tolérance : les IgE spécifiques diminuaient, les IgG4 augmentaient, que la taille des prick diminuait et que les lymphocytes T reg CD4CD25 augmentaient en périphérique.
Les effets secondaires survenaient dans 8% des cas dans les phases initiales et dans 3% des cas durant le long terme (Blumchen 2010).
Durant la phase d’entretien, il fallait faire attention aux facteurs pouvant déstabiliser la tolérance comme les viroses, les exercices physiques (< 2heures), l’asthme non contrôlé, le jeûne, les expositions allergéniques (pollens notamment), le stress, les menstruations parfois.
Il y avait aussi un petit nombre de sujets dits non répondeurs pour lesquels les protocoles ont été inefficaces.
Enfin, elle concluait en disant qu’il ne s’agissait pas encore de protocoles pour notre pratique quotidienne car il faut encore du recul (3, 4 années de plus) et des d’autres études afin d’affiner les données et les protocoles encore trop hétérogènes pour le proposer de manière générale pour l’instant.
Le Dr Van Ree des Pays bas expérimente dans un modèle murin l’immunothérapie injectable avec des allergènes alimentaires dits « hypoallergéniques ».
Ses équipes ont mis au point une protéine de la carpe (cyp c1) modifiée (rupture des protéines de liaison au Calcium) qui voit sa réactivité diminuée de 5000 fois, qui a une bonne stabilité dans le temps ainsi qu’une immunogénicité acceptable.
Les protocoles pour de désensibilisation pour la souris sont en cours et les résultats prometteurs et pour les études sur l’homme sont prévues en 2013/14.
Le modèle concernant la protéine de la pêche (pru p3) est problématique concernant la stabilité… et celui de l’arachide trop concurrentiel pour l’instant…
Il s’agit d’une voie de désensibilisation pour les aliments qui semble pleine d’espoir : on pourrait imaginer combiner : une voie injectable pour débuter chez l’allergologue puis sublinguale et orale puis par patch pour l ‘entretien ? …toutes les voies mènent à Rome !
L’épigénétique, l’enfance de l’art et de l’art des défenses :
Donata Vercelli (USA)
Erika von Mutius (Allemagne)
Urs Frey (Suisse)
Le milieu immunitaire maternel dans lequel le futur bébé se prépare à son environnement aérien contient des éléments déterminants, comme le rapport des concentrations sériques maternelles des cytokines dosées au cours du 3ème trimestre de la grossesse.
Le rapport l’Il-13 / IFN gamma augmenté indiquerait un risque futur d’asthme à l’âge de 6 ans (OR = 3,09 , p=0,007) ( Halonen M, Rothers J et al).
Les techniques actuelles d’étude de l’épigénétique sont plus performantes et permettent de lancer des pistes de recherche sur l’effet des l’environnement (par méthylation de l’ADN) des modifications de l’expression des gènes et notamment ceux de l’asthme. Voici les gènes qu’il va falloir surveiller dans les publications à venir :
– Foxp2 : qui vient après le P3 ( !), dans la régulation lymphocytaire
– MS4A2 : codant pour la chaine Beta du récepteur FCER1
– Il-10B, RUNX1, BMP3 : lymphocytes régulateurs : Th17
– CXLL10 : Th1
– PDE4DIP
– EBF3 : pour le TGF Beta
– WWOX, TNFRSF19 : impliqués dans le cancer pulmonaire
– ERK1-2 : relai de l’inflammation
– « …et le numéro complémentaire .. : » : SCG3…
Les études de cohorte de populations partageant le même patrimoine génétique mais un environnement différent (immigration) sont maintenant nombreuses et corroborent de concert l’influence positive d’un environnement « fermier » sur la survenue de l’asthme (plus que de l’atopie).
L’étude dans le village polonais de Sobotka (près de Wroclaw..) montrait que les jeunes des villages avaient plus d’asthme que ceux des villes (Sozanska 07).
En Karélie, les finnois faisaient plus d’asthme et de rhinite que les russes de même souche : la composition des poussières des 2 lieux étaient différente en terme de bactéries (von Hertzen 06).
Plus récemment, les Amish suisses à la campagne ont moins d’allergie, d’asthme ou de rhinite que leurs homologues citadins (Holbreich 2012).
Les équipes d’Erika von Mutius avaient bien montré que les facteurs les plus actifs étaient certaines familles de bactéries notamment des Staphylocoques saprophytes (…) et quelques champignons type eurotium et penicillium (von Mutius 2012).
L’action protectrice de cette exposition à la ferme et aux bactéries commencerait déjà in utero : les dosages des cytokines dans le sang du cordon montre des modifications des réponses immunitaires (CD4CD25 et IFNgamma) (Schaub 09).
Ces influences bactériennes pèseraient plus sur l’avenir de la sensibilité des voies respiratoires que les autres organes. La colonisation néonatale bactérienne serait capitale pour la suite (Bisgaard 07). Les lavages bronchiolaires des enfants asthmatiques contiennent une flore différente des autres témoins (Cookson 10).
La colonisation initiale bactérienne ne semble représenter qu’une partie du puzzle : d’autres éléments de l’environnement doivent mettre en lumière ces différences de la flore dans la lumière digestive.
Le Dr Urs Freys a rassemblé les études concernant les facteurs influençant la fonction pulmonaire des petits asthmatiques. Il y a tout d’abord les infections précoces avec le rhinovirus qui déjà laisse des traces sur la trame bronchique des jeunes asthmatiques (van der Zalm 11).
Le tabagisme passif bien sûr et d’autant plus quand il est associé à l’atopie (Latzin AJRCCM 06). Durant la grossesse, l’exposition à la pollution extérieure altèreront les futures fonctions respiratoires (Latzin 09).
Son équipe a mis au point une méthode de dosage en continue du NO par masque appliqué sur le visage du nourrisson. Ces mesures altérées sont corrélées avec le risque futur d’asthme et les symptômes (Moller 08, Stern 11).
Les expositions des voies aériennes sensibles atopiques ne sont pas uniquement post natales : virales, allergéniques, polluants mais aussi anténatales.
Cette sensibilité se voit aussi elle-même régulée de manière épigénétique par des facteurs agissant encore en amont et éventuellement sur des générations précédentes.
Les bactéries interviennent « localement » précocement dans les voies respiratoires et dans la régulation immune (flore aéro digestive) puis apparemment tout au long de l’enfance dans son cadre de vie.
Compte-rendu offert grâce au soutien du laboratoire ALK
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