La
Désensibilisation
De nombreux traitements de la pathologie allergique sont symptomatiques avec récidive des symptômes dès l’arrêt de ces médicaments.(20)
L’éviction de l’allergène est considérée comme un traitement curatif, mais en fait, le risque de réaction allergique est toujours élevé si le patient s’expose malencontreusement à l’allergène.
En réalité, le seul traitement curatif de l’allergie est la désensibilisation
qui connaît actuellement un très grand regain d’intérêt
pour plusieurs raisons :
Actuellement, la désensibilisation est reconnue et doit faire partie
de l’arsenal thérapeutique de tout praticien de l’allergologie en charge
de combattre les maladies allergiques qui sont en augmentation constante dans
les pays industrialisés pour atteindre jusqu’à 25% de la
population.
Quelques définitions
|
les traiter et peut-on les prévenir ?
?
les études qui ont servi à ce dossier, commentées et analysées.
Qu’est ce que la désensibilisation
?
La dénomination de ce traitement s’est modifiée dernièrement,
reflétant ainsi les progrès dans la compréhension immunologique
de son mécanisme qui suscite beaucoup de recherches à travers
le monde.
On parle ainsi d’immunothérapie spécifique ou de vaccinothérapie.(21)
Cela signifie que la désensibilisation agit directement au niveau des
lymphocytes T en réorientant la réponse immunologique du patient
allergique.
La réponse cellulaire :
La réponse de type 1 correspond au mécanisme en cause dans les maladies inflammatoires et infectieuses avec production d’IgG1 et de lymphocytes cytotoxiques. La réponse de type 2 correspond à celle de l’allergique avec sécrétion de cytokines induisant la production d’IgE par les lymphocytes B.
Chez le sujet non allergique la réponse prépondérante est de type 1. Chez l’allergique le plateau penche fortement du coté des lymphocytes de type 2 : la désensibilisation va réprimer la réponse TH1 et TH2.
Ses conséquences sur la prise en charge de l’allergie :
Bientôt, l’allergologue va disposer d’allergènes pour le diagnostic et d’allergènes modifiés pour la thérapeutique en alliant efficacité et sécurité. La désensibilisation pourra être proposée sans doute beaucoup plus tôt puisque les immunologistes pensent qu’il faudrait intervenir sur le système immunologique avant l’âge de 5 ans. Ainsi, des recherches sont actuellement menées en parallèle pour améliorer le diagnostic précoce des maladies allergiques.
Quels allergènes ?
Tous les allergènes ne sont pas actuellement utilisables pour une désensibilisation
: celle-ci est réservée aux pneumallergènes et aux venins
d’hyménoptères. Mais des essais sont en cours avec des allergènes
modifiés pour les aliments.(24) Cela passe par un
travail de reconnaissance précis de l’allergène en cause dans
un aliment, à son identification moléculaire permettant ensuite
de le produire par génie génétique (allergène
recombinant) en ne conservant que le fragment qui peut se lier aux lymphocytes
T spécifiques.
Bien entendu, en rectifiant la balance lymphocytaire, la désensibilisation va modifier toute la réponse immunologique vis-à-vis de l’allergène avec modification du profil de sécrétion des cytokines, diminution de la production d’IgE spécifique, diminution de l’hyper-réactivité bronchique, nasale, oculaire et de tout autre organe atteint. (24)
Quelles sont les indications
de la désensibilisation ?
A qui la proposer ?
La vraie question est surtout de savoir quand instituer un traitement par immunothérapie,
et à qui le proposer :
Après un diagnostic allergologique précis, c’est-à-dire
qui va confronter les résultats de l’interrogatoire, des tests cutanés
et éventuellement de la biologie (IgE spécifiques).
Après avoir apprécié la place de l’allergie parmi les
autres facteurs de l’environnement entretenant ou aggravant la maladie allergique
(tabac, pollution, environnement professionnel et autres...), les affections
allergiques étant le plus souvent multifactorielles.
La désensibilisation est proposée en cas de rhinite et d’asthme après un bilan allergologique précis.
|
Après avoir traité la phase aigüe de l’asthme le patient devant être dans un état stable.
Après avoir constaté l’échec de mesures simples d’éviction
(valables seulement pour certains allergènes : acariens, phanères
animales...)
Et enfin, après avoir obtenu l’adhésion du patient à l’immunothérapie,
ce qui impose une bonne compréhension de ce traitement, et après
avoir vérifié l’absence de contre-indication.
Désensibilisation aux venins d’hyménoptères
Enfin, il faut mettre à part l’indication de l’immunothérapie dans l’allergie aux hyménoptères qui est le seul traitement préventif et curatif pour ces patients devenus allergiques aux venins de guêpes, frelons ou abeilles. (26)
Cette désensibilisation est appelée rush car contrairement aux autres allergènes, la dose efficace d’immunothérapie sera obtenue en quelques jours seulement, voire quelques heures dans les protocoles très rapides. Ceci n’est possible que parce que le mécanisme de l’allergie est différent, survenant chez des patients n’ayant pas un terrain habituellement allergique. Il s’agit d’une allergie avec une réponse de base normale aux allergènes communs de l’environnement.
L’efficacité de l’immunothérapie spécifique dans l’allergie
aux venins d’hyménoptères est prouvée par de multiples
études. (80% de succès pour l’abeille et 95% pour la guêpe)
Quelles sont les contre-indications de
la désensibilisation ?
Les contre-indications définitives :
- les maladies allergiques non contrôlées en particulier l’asthme
sévère - les maladies dysimmunitaires
- le déficit immunitaire
- la grossesse (contre-indication seulement de la mise en route du traitement alors qu’il n’y a pas de contre-indication, bien au contraire, lors de la phase d’entretien si le traitement est bien toléré)
Contre-indications relatives ou temporaires :
- âge inférieur à 5 ans
- traitement par béta-bloquant y compris local
Désensibilisation
et grossesse :
La prise en charge des affections allergiques pendant la grossesse est difficile
car de nombreux médicaments sont contre-indiqués, en particulier
tous les antihistaminiques de nouvelle génération.
Par contre la désensibilisation n’ayant aucun effet tératogène
n’est pas contre-indiquée.
Un traitement d’entretien peut être maintenu pendant toute la durée
de la grossesse.
Cependant, il n’est pas recommandé de débuter l’immunothérapie pendant la grossesse.
D’autre part, l’action de la désensibilisation n’étant pas
immédiate, il n’y aurait pas d’effet protecteur. (14)
La désensibilisation
est-elle efficace ?
Cette question a suscité de très nombreux travaux et a fait l’objet
de plusieurs publications de synthèse au cours de ces dernières
années.
Il n’y a aucun intérêt à revenir sur cette question que
l’on peut considérer comme totalement close depuis le rapport de l’OMS
de 1998 (21) qui a définitivement établi les preuves de l’efficacité de l’immunothérapie spécifique conduite selon les bonnes pratiques.
Nous invitons les lecteurs intéressés à se rapporter à
ce texte princeps et à la bibliographie attenante pour y rechercher des
informations complémentaires.
Partant de ce texte, il nous semble plus important de donner les résultats
d’études récentes qui répondent à un certain nombre
de questions qui n’avaient pas encore de réponses.
Dans quels cas la proposer ?
La désensibilisation est efficace (14) dans :
la rhinite allergique aux acariens, alternaria, pollens de graminées, ambroisie, pariétaire, cyprès, bétulacées.
l’asthme allergique léger à modéré aux pollens de graminées, acariens.
La désensibilisation a prouvé son efficacité dans la rhinite ou dans l’asthme allergique à ces allergènes, sachant que de nombreuses publications ont également rapporté des bénéfices de l’immunothérapie dans des cas particuliers vis-à-vis d’autres allergènes comme le chat, par exemple.
L’effet de la désensibilisation
est-il durable ?
Même après arrêt, les effets de la désensibilisation
sont prolongés dans le temps.
La désensibilisation est efficace et le reste
longtemps.
|
Ainsi, Cools et col (4) ont démontré, en réévaluant
des patients asthmatiques plus de 9 ans en moyenne après arrêt
de la désensibilisation (par rapport à un groupe contrôle
traité seulement par des médicaments), que les patients ayant
été désensibilisés avaient 3 fois moins de crises
d’asthme.
Ces résultats ont été confirmés non seulement pour
les acariens mais également pour les désensibilisations aux pollens
(19).
Ainsi, alors que les traitements médicamenteux sont seulement symptomatiques
avec une action qui cesse dès l’arrêt de la prise, la désensibilisation,
même une fois terminée, a un effet prolongé qui améliore
durablement le patient.
Il s’agit donc bien d’un traitement curatif.
La désensibilisation
à un allergène peut-elle empêcher d’être allergique
à d’autres allergènes ?
Cette question est importante car de façon logique on peut penser que désensibiliser un patient allergique aux acariens, par exemple, est de faible intérêt car il peut ensuite devenir allergique au chat, aux pollens ou autre.
Des études permettent de répondre précisément aujourd’hui
à cette question.
Ainsi, il a été montré (2) qu’une désensibilisation contre les acariens chez des enfants ayant un suivi sur 3 ans, permettait de prévenir de nouvelles sensibilisations à d’autres pneumallergènes chez 45% de ces enfants par rapport à 100% de nouvelles sensibilisations dans le groupe témoin.
Ces résultats ont été confortés par des études
publiées récemment dont celle de Pajno et collaborateurs (3)
qui porte sur un groupe plus important d’enfants avec un suivi plus long : après
6 ans (dont 3 ans de désensibilisation), 75.4% des enfants qui ont été
désensibilisés n’ont pas de nouvelle allergie, contre 33.3% seulement
dans le groupe qui n’a pas été désensibilisé.
Enfin, une étude rétrospective (1) de 8.396
patients mono sensibilisés et suivis pendant 7 ans, a montré que
le groupe de 7182 patients désensibilisés pendant 4 ans, a vu
apparaître une polysensibilisation chez 27% de ces patients, contre 77%
de polysensibilisation dans le groupe de 1214 patients qui n’avaient pas été
désensibilisés.
La désensibilisation prévient l’apparition
de nouvelles allergies.
|
Ainsi, ces travaux permettent de préciser plusieurs points très
importants :
ils confirment que la désensibilisation modifie réellement le terrain immunologique du patient.
Ces résultats confirment que la désensibilisation doit être proposée tôt, avant que le patient ne devienne allergique à l’ensemble de son environnement.
La désensibilisation
peut-elle induire des maladies immunologiques ?
Il y a actuellement un recul suffisant sur un nombre considérable de
patients depuis de nombreuses années avec un suivi de plus de 20 ans
pour affirmer que la désensibilisation ne peut pas entraîner de
manifestations d’auto-immunité ou de dérèglement de la
réponse immunologique.
Mais, l’existence d’une affection immunologique sous jacente a toujours été
considérée comme une contre-indication à la désensibilisation,
d’ailleurs sans que cela ne soit démontré mais plutôt par
application évidente d’un principe de sécurité. (21)
La désensibilisation n’est pas responsable
de maladies de système
|
L’élimination de ces patients à risque explique qu’il n’ y ait
jamais eu de doute sur la possibilité de ce type d’effets indésirables.
Les dernières recommandations internationales continuent de préconiser
l’abstention de toute immunothérapie spécifique chez les patients
ayant une affection immunologique de type maladie de système ou affection
auto-immune.
Comment se passe une désensibilisation
en pratique ?
On distingue 2 phases quelle que soit la technique d’immunothérapie
(sous cutanée ou sublinguale)
1° phase : Phase d’induction : montée
des doses
L’administration du produit de désensibilisation se fait par des doses
rapprochées et progressivement croissantes, avec des protocoles d’augmentation
très lents pour les patients particulièrement allergiques.
2°phase : Phase d’entretien : la même dose
est prise à intervalles réguliers pendant plusieurs mois.
La durée de la désensibilisation est variable entre 3 et 5
ans, avec une évaluation régulière des résultats
tous les ans.
Cette notion d’évaluation est très importante, le patient doit
savoir que l’effet bénéfique ne sera observable qu’après
6 mois à 1 an de traitement.
La poursuite du traitement sera discutée lors de chaque évaluation.
Quels sont les éléments de
surveillance de ce traitement ?
Par voie sous-cutanée :
- Une réaction locale est banale et ne justifie ni retard dans l’application
du protocole, ni diminution des doses (induration de la taille d’une pièce
de 2 Euros) - Une réaction syndromique peut se rencontrer lors de l’augmentation
de la dose d’allergènes injectée : en général,
on répète l’injection sans augmentation de la dose et on peut
ensuite poursuivre le protocole.
Par voie sublinguale :
- Une gêne sous la langue est banale et ne doit pas amener la modification
du protocole - Une réaction syndromique se gère de la même façon
en ralentissant la progression des doses.
Dans tous les cas, le plus important est de s’assurer
:
- que la maladie allergique est bien stable, et que le patient n’est pas en décompensation respiratoire par exemple ou dans un état pathologique aigu (hyperthermie, épisode infectieux aigu).
Faut-il proposer une désensibilisation
par voie sous-cutanée ou par voie sublinguale ?
Il n’y a pas d’antagonisme entre ces 2 modalités de désensibilisation
qui sont complémentaires.
Chacune offre des avantages et des inconvénients au patient, l’allergologue
peut préférer certaine technique en fonction de l’allergène
et de la réactivité du patient.
Très schématiquement, les avantages et inconvénients
de chaque technique sont les suivants :
Le mode d’administration de la désensibilisation
(sublinguale ou injectable) est un choix conjoint du patient et du médecin.
|
Désensibilisation par voie sous
cutanée
:Avantages :
- Validation par de nombreuses études
- Technique la plus expérimentée
- Application rigoureuse du protocole par un médecin
- Traitement d’entretien non astreignant (une injection par mois le plus
souvent)
Inconvénients :
- Injection sous-cutanée
- Injections tous les 8 jours lors de la phase d’induction
- Accidents graves mais rarissimes.
Désensibilisation par voie sublinguale
:
Avantages :
- Réalisation à domicile
- Pas d’injection
- Très peu de risque d’effet indésirable allergique
Inconvénients :
- Difficulté d’observance
- Pas de contrôle médical
- Traitement d’entretien plus astreignant (prise quotidienne)
Globalement, la voie sublinguale est très adaptée à l’enfant et la désensibilisation par voie sous cutanée demeure la préférence de certains adultes.
Où en est-on dans la validation
de la désensibilisation par voie sublinguale ?
Il existe 2 sortes de désensibilisation en pratique courante : la
désensibilisation par voie sous-cutanée et la désensibilisation
par voie sublinguale.
La désensibilisation par voie sous-cutanée
La désensibilisation par voie sous-cutanée consiste à
réaliser des injections (par l’allergologue ou le médecin traitant)
tous les 8 jours puis tous les 15 jours et enfin tous les mois pendant au
moins 3 ans.
C’est pour la voie sous-cutanée que les études d’efficacité et de tolérance sont les plus nombreuses. Elle a prouvé son efficacité comme démontré.(12,
13, 15, 16, 17,
18)
La désensibilisation par voie
sublinguale
La désensibilisation par voie sublinguale consiste à déposer l’allergène sous la langue à l’aide d’une pipette ou d’une pompe doseuse, voire d’un comprimé à jeun en gardant 2 minutes l’allergène sous la langue avant de l’avaler. La prise est ensuite quotidienne ou un jour sur deux.
La désensibilisation par voie sublinguale a immédiatement séduit
de nombreux médecins et de nombreux patients en raison de sa facilité
d’application et du fait qu’elle s’effectue à domicile. L’absence d’injection
permet également de la prescrire plus facilement chez les enfants.
De plus il existe moins souvent de réactions d’intolérance.
De nombreuses études sont maintenant disponibles sur cette nouvelle
technique d’immunothérapie.
L’efficacité de ce traitement est certaine aussi bien dans la rhinite que dans l’asthme allergiques vis-à-vis des allergènes perannuels comme pour les allergènes saisonniers.
S’il n’y a pas encore autant d’études disponibles que pour la désensibilisation
par voie sous cutanée, tous les travaux publiés sont tout de
même de très grande qualité scientifique (double aveugle
contre placebo)
Le lecteur intéressé trouvera une mise au point dans la bibliographie commentée. ( 6, 7,
8, 9, 10, 11,
28)
La désensibilisation peut-elle être
réalisée chez les patients polysensibilisés ?
Chez un polysensibilisé, les réactions à plusieurs allergènes
vont avoir un effet de sommation au niveau de l’organe cible.
Tout traitement qui pourra diminuer cette pression allergénique permettra
de mieux contrôler l’affection allergique.
Ainsi, pour un patient ayant une rhinite allergique à la fois aux acariens
et aux pollens, il est facile de comprendre que la réaction allergique
aux acariens pendant l’hiver va développer l’hyper-réactivité
de la muqueuse nasale du fait de l’inflammation induite par la réaction
allergique. Au printemps, le patient va réagir d’autant plus vigoureusement
aux pollens du fait de cette hyper-réactivité nasale. Même
si on ne désensibilise ce patient qu’aux acariens, il abordera le printemps
avec une muqueuse non inflammatoire donc non réactive et la saison pollinique
sera beaucoup plus facile à gérer par un traitement médicamenteux
simple.
La polyallergie n’est pas une contre-indication à l’immunothérapie spécifique.
|
Enfin, certains allergènes sont présents dans l’environnement toute
l’année (allergènes perannuels) alors que d’autres ne sont que transitoires
pendant une période plus ou moins longue (allergènes saisonniers).
Pourquoi ne désensibiliserait-on pas un patient à un allergène
perannuel sous prétexte qu’il serait également allergique à
un pollen par exemple qui entraîne un recrudescence de l’asthme 15 jours
par an ? Le bénéfice attendu de l’action sur l’allergène
perannuel justifie la mise en route d’une désensibilisation malgré
ce terrain de polysensibilisation.
Peut-on refaire une désensibilisation
si on en a déjà eu une ?
La réalisation d’une désensibilisation ne contre-indique pas
la mise en route d’une désensibilisation complémentaire à
un autre allergène, surtout si la première a été
efficace, témoignant d’une bonne réponse immunologique du patient.
Le fait d’avoir eu une désensibilisation dans l’enfance, par exemple,
ne contre-indique pas non plus la reprise d’une immunothérapie spécifique
pour le même allergène. En effet, les progrès sont constants
en pharmacologie allergologique et les produits utilisés aujourd’hui
n’ont plus rien à voir avec ceux utilisés hier. Les protocoles
sont également différents avec des doses d’entretien plus élevées.
A quels âges peut-on
la faire ?
A partir du moment où un patient fait une réaction allergique,
c’est que son système immunologique a la capacité de réagir
en fabriquant de façon inopportune des IgE, on doit donc pouvoir modifier
sa réponse vis-à-vis de l’allergène pour espérer
une guérison.
Des études ont montré que le patient âgé a des
capacités de réponses allergiques avec production d’IgE spécifique
(27).
Par ailleurs, l’asthme et la rhinite sont fréquents dans cette population
.
La sensibilisation aux hyménoptères est également beaucoup
plus dangereuse chez ces patients, un choc anaphylactique étant plus
grave par risque de décompensation d’une affection athéromateuse
sous jacente (risque d’infarctus, d’accident vasculaire cérébral)
Il n’y a donc pas de contre-indication formelle d’âge pour une désensibilisation,
à partir du moment où il y a suffisamment d’arguments pour la
proposer avec des objectifs précis et une bonne probabilité
de réussite.
Pour des raisons pratiques d’ordre technique, il est cependant difficile
de commencer avant l’âge de 6 ans.
Quels sont les risques de
la désensibilisation, comment les traiter et peut-on les prévenir
?
Les risques sont d’ordre allergiques (25).
Le traitement consistant à administrer l’allergène au patient
sensibilisé, on comprend qu’il puisse réagir de façon
inopportune et heureusement exceptionnelle, en faisant une crise allergique
malgré l’application d’un protocole validé permettant, dans
l’immense majorité des cas, d’éviter justement ce type de réponse.
Les manifestations peuvent être :
- Crise d’asthme
- Crise de rhinite
- Urticaire ou oedème de Quincke
- Parfois, réaction allergique sévère : choc anaphylactique, oedème de Quincke avec oedème de la glotte, décès.
Une désensibilisation doit être régulièrement surveillée, moyennant quoi les effets secondaires sont rares.
Comment les traiter ?
Souvent, lorsqu’un effet indésirable médicamenteux survient,
le médecin a peu de possibilités d’agir efficacement. A l’inverse,
en allergologie, la réponse thérapeutique en cas d’incident
est bien codifiée et efficace, réalisable par tout médecin
de façon très simple.
Cela offre donc une sécurité supplémentaire au patient
qui, s’il respecte quelques règles simples, est certain de ne pas risquer
d’effet indésirable qui resterait sans solution thérapeutique.
- En cas de réaction bénigne, le traitement reposera sur les
antihistaminiques en association ou non avec les corticoïdes - En cas de réaction allergique sévère (réaction anaphylactique, oedème laryngé) le traitement reposera sur l’adrénaline injectable par voie intra-musculaire.
- Dans tous les cas, on associera le traitement symptomatique classique
de l’affection sous jacente : bronchodilatateur dans l’asthme par exemple.
Le problème n’est pas lié au traitement de la réaction
allergique induite par la désensibilisation, puisqu’elle est facilement
réversible par un traitement simple que tout médecin a dans
sa trousse d’urgence. Il est plutôt de pouvoir traiter le patient en
cas de réaction indésirable, c’est-à-dire qu’il soit
à coté de son médecin si cet incident très rare
survient.
Il faut donc respecter la règle qui recommande que lors d’une désensibilisation
par voie sous cutanée, le patient reste 20 minutes sous la surveillance
du médecin, car dans 99% des cas la réaction indésirable
est immédiate et survient dans les 10 minutes qui suivent l’injection.
Peut-on prévenir ces incidents ?
La désensibilisation est un traitement non dangereux à condition
de respecter quelques règles très simples de sécurité
:
- suivre le protocole indiqué par l’allergologue pour éviter
une erreur grossière de doses - ne pas faire l’injection de désensibilisation en cas de crise d’asthme ou de décompensation de l’asthme ou si le patient présente une affection aigüe (fièvre élevée ou autre phénomène pathologique aigu)
- rester sous surveillance médicale pendant les 20 minutes qui suivent
l’injection
L’allergologue propose-t-il
toujours une désensibilisation ?
L’allergologie ne se résume pas à la désensibilisation,
le rôle principal de l’allergologue étant de faire le diagnostic
de l’affection allergique.
La désensibilisation est le seul traitement de la cause de l’allergie, avec l’éviction.
|
Il dispose ensuite de nombreuses modalités thérapeutiques,
l’art consistant à proposer en concertation avec son patient le meilleur
traitement pour une personne particulière et donc forcément
unique.
Cependant, l’allergologue est effectivement le seul à maîtriser
la technique d’immunothérapie spécifique et il est le médecin
qui la propose le plus souvent aux patients lorsque la situation clinique
fait que cette thérapeutique offre de nombreux avantages au patient.
Un allergique ne doit pas hésiter à aborder cette modalité
thérapeutique, car un patient qui a déjà des informations
sur ce traitement peut avoir un dialogue intéressant et riche d’enseignements
réciproques avec son médecin.
Quelles sont les voies d’avenir
de la désensibilisation ?
La désensibilisation apparaît de plus en plus, aux yeux des immunologistes, comme le meilleur traitement à long terme des maladies allergiquesLes recherches actuelles portent surtout sur les produits utilisés
: l’idée générale est de ne conserver que le fragment
d’allergène qui se combine au récepteur des lymphocytes T helper,
sans garder le fragment qui se lie aux IgE spécifiques. Ainsi, on conserverait
le potentiel désensibilisateur de l’allergène mais il deviendrait
totalement inoffensif et aucune réaction allergique ne pourrait survenir
accidentellement.
Les progrès portent également sur une meilleure caractérisation
des allergènes et une meilleure standardisation des extraits, permettant
d’assurer des traitements très rigoureux sur le plan posologique.
Enfin, d’autres voies d’administration sont à l’étude : voie locale etc...
Dans les années à venir, nous devrions disposer de nouveaux produits plus efficaces et toujours mieux tolérés, par exemple les allergènes recombinants et les molécules hypoallergèniques.
Conclusion :
La désensibilisation ou immunothérapie spécifique est un traitement moderne de la maladie allergique, qui offre par rapport au traitement médicamenteux les avantages d’un effet prolongé dans le temps, d’être curatif, de s’opposer au développement de nouvelles allergies, d’être préventif en évitant l’aggravation de la maladie, en particulier le développement d’un asthme chez le patient qui ne souffre que de rhinite.
C’est le bon respect des indications et la bonne collaboration du patient
et de son médecin, en suivant les protocoles prescrits, qui font de
la désensibilisation un traitement sûr et efficace.
Bibliographie commentée :
1 - Purello-d’Ambrosio F, Gangemi S, Merendino R.A, Isola S, Puccinelli P, Parmiani S, Ricciardi L. Prevention of new sensitizations in monosensitized
subjects submitted to specific immunotherapy or not. A retrospective study.
Clin Exp Allergy 2000 ; 31 : 1295-1302.
une augmentation de 23.87% dans le groupe B (p<0.0001). Le taux des IgE totales
diminue de 17.53% dans le groupe A contre une augmentation de 13.71% dans le
groupe B.
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2 - Des Roches A, Paradis L, Menardo JL, Bouges S, Daurès
JP, Bousquet J. Immunotherapy with a standardized Dermatophagoides pteronyssinus
extract ; Specific immunotherapy prevents the onset of new sensitizations
un children. J Allergy Clin Immunol 1997 ; 99 : 450-3.
désensibilisés n’ont pas de nouvelles sensibilisations, par contre
aucun dans le groupe des 22 enfants qui n’ont pas été traités
par immunothérapie n’en est indemne. (p=0.001).
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3 - Pajno GB, Barberio G, De Luca Fr, Morabito L, Parmiani
S. Prevention of new sensitizations in asthmatic children monosensitized
to house dust mite by specific immunotherapy. A six-year follow-up study.
Clin exp Allergy 2001 ; 31 : 1392-97.
sont les allergènes communs les plus souvent rencontrés dans ces
nouvelles sensibilisations.
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4 - Cools M, Van Bever HP, Weyler JJ, Stevens WJ. Long-term
effects of specific immunotherapy, administered during childhood in asthmatic
patients allergic to either house dust mite or to both house dust mite and
grass pollen. Allergy 2000 ; 55 : 69-73.
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5 - Bahçeciler NN, Isik U, Barlan B, Basaran MM.
Efficacy of sublingual immunotherapy in children with asthma and rhinitis
: a double-blind placebo controlled study. Pediatr Pulmonol 2001 ; 32 :
49-55.
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6 - La Rosa M, Ranno C, André C, Carat F, Tosca MA,
Canonica GW. Double-blind placebo controlled evaluation of sublingual-swallow
immunotherapy with standardized parieta judaica extract in children with allergic
rhinoconjunctivitis. J Allergy Clin Immunol 1999 ; 104 : 425-32).
tolérée.
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7 - Bousquet J, Scheinmann P, Guinnepain MT, Perrin-Fayolle
M, Sauvaget J, Tonnel AB, Pauli G, Caillaud D, Dubost R, Leiynadier F, Vervloet
D, Herman D, Galvain S, André C. Sublingual-swallow immunotherapy
in patients with asthma due to house-dust mites : a double-blind, placebo-controlled
study. Allergy 1999 ; 54 : 249-260.
les effets indésirables.
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8 - Vourdas V, Syrigou E, Potamianou P, Carat F, Batard
T, André C, Papageorgiou PS. Double-blind placebo controlled evaluation
of sublingual immunotherapy with standardized olive pollen extract in pediatric
patients with allergic rhinoconjunctivitis and mild asthma due to olive pollen
sensitization. Allergy 1998 ; 53 : 662-72.
traité.
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9 - Pajno GB, Morabito L, Barberio G, Parmiani S. Clinical
and immunologic effects of long-term sublingual immunotherapy in asthmatic
children sensitized to mites : a double-blind placebo-controlled study.
Allergy 2001 ; 55 : 842-49.
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10 - Passalacqua G, Albano M, Riccio A, Fregonese L, Puccinelli
S, Canonica GW. Clinical and immunologic effects of a rush sublingual immunotherapy
to parietaria species : a double-blind placebo-controlled trial. J Allergy
Clin Immunol 1999 ; 964-8.
de façon nette dans le groupe traité (p=0.006) avec également
dans le groupe désensibilisé une diminution des neutrophiles (p=0.001),
des éosinophiles (p=0.01) et de l’expression d’ICAM-1 (p=0.04) après
test de provocation.
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11 - Troise C, Voltolini S, Canessa A, Pecora S, Negrini
AC. Sublingual immunotherapy in Parietaria pollen-induced rhinitis : a
double-blind study. J Invest Allergol Clin Immunol 1995 ; 5(1) : 25-30.
du score médicamenteux (p<0.05) lors des pics polliniques et à
la fin du traitement il y a une diminution significative de l’hyper-réactivité
nasale (p<0.02) dans le groupe désensibilisé. Il y a également
dans ce groupe une augmentation significative du taux sérique des IgG4
spécifiques (p=0.02).
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12 - Gembiale RD, Camporata L, Naty S, Tranfa CME, Djukanovic
R, Marsico SA. Effects of specific immunotherapy in allergic rhinitic individuals
with bronchial hyperresponsiveness. Am J Respir Crit Care Med 2000 ; 162
: 2048-52.
observée dans le groupe placebo et 9% des patients de ce groupe ont développé
un asthme contre aucun dans le groupe désensibilisé.
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13 - Hedlin G, Wille S, Browaldh L, Hildebrand H, Holmgren
D, Lindfors A, Nordvall L, Lowenstein H. Immunotherapy in children with
allergic asthma : effect on bronchial hyperreactivity and pharmacotherapy.
J Allergy Clin immunol 1999 ; 103 : 609-14.
au chat ou aux acariens améliore la réactivité bronchique
et l’hyper réactivité à l’histamine.
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14 - Pichler CE, Marquardsen A, Sparholt S, Lowenstein
H, Bircher A, Bishof M, Pichler WJ. Specific immunotherapy with dermatophagoides
pteronyssinus and D. Farinae results in decreased bronchial hyperreactivity.
Allergy 1997 ; 52 : 274-83.
l’exposition aux acariens étant par ailleurs constante tout au long de
l’étude.
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15 - Olsen OT, Larsen KR, Jacobsen L, Svendsen UG. A
1 year, placebo-controlled, double-blind house-dust-mite immunotherapy study
in asthmatic adults. Allergy 1997 ; 52 : 853-59.
85 à 89% des valeurs prédites après traitement dans le
groupe actif. Le débit de pointe n’est pas modifié de façon
significative durant l’étude.
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16 - Bousquet J, Hejjaoui A, Clauzel AM, Guérin
B, Dhivert H, Skassa-Brociek W, Michel FB. Specific immunotherapy with
a standardized dermatophagoides pteronyssinus extract : prediction of efficacy
of immunotherapy. J Allergy Clin Immunol 1988 ; 82 : 971-7.
est significativement liée à l’âge, à la sévérité
de l’asthme avant le traitement et au VEMS.
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17 - Pauli G, Bessot JC, Bigot H, Delaume G, Hordle DA,
Hirth C, Thierry R. Clinical and immunologic evaluation of tyrosine-adsorbed
Dermatophagoides pteronyssinus extract : a double-blind placebo-controlled
trial. J Allergy Clin Immunol 1984, 74 : 524-35.
les 6 premiers mois dans le groupe traité avec une amélioration
du débit de pointe avant l’augmentation saisonnière du taux des
acariens.
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18 - Leynadier F, Banoun L, Dollois B, Terrier P, Epstein
M, Guinnepain MT, Firon D, Traube C, Fadel R, André C. Imminotherapy
with a calcium phosphate-adsorbed five-grass-pollen extract in seasonal rhinoconjunctivitis
: a double-blind placebo-controlled study. Clin Exp Allergy 2001 ; 31
: 988-96.
une réaction immédiate systémique modérée,
contre 2 patients dans le groupe placebo.
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19 - Durham SR, Walker SM, Varga EM, Jacobson MR, O’Brien
F, Noble W, Till SJ, Hamid QA, Nouri-Aria KT. Long-term clinical efficacy
of grass-pollen immunotherapy. N Engl J Med 1999 ; 341 : 468-75.
prolongé jusqu’à 3 ans après l’arrêt du traitement.
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20 - De Blay F, Casel S, Spirlet F, Pauli G. Eviction
des allergènes : intérêts et limites.Rev Fr Allergol
Immunol clin 2000 ; 40 : 367-71.
par les patients et l’intérêt du ou de la conseillère en
environnement pour faire le diagnostic précis des modifications qu’il
faudrait apporter à l’habitat pour obtenir un résultat sur le
plan clinique.
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21 - Bousquet J, Lockey R, Mailling HJ. Immunothérapie
des allergènes : traitement vaccinal des maladies allergiques.
Rev Fr Allergol Immunol Clin 1999 ; 39 (5) : 399-404.
en particulier sur les différentes définitions de ce traitement,
qui sont nécessaires en raison des progrès de l’immunologie qui
permettent de mieux comprendre le mécanisme d’action de l’immunothérapie
spécifique qui agit comme un vaccin.
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22 - Ndiaye M, Bousquet J, Dhivert-Donnadieu H, Godard
P, Demoly P. L’immunothérapie spécifique dans la rhinite
allergique et l’asthme : Quand et comment l’instituer puis l’arrêter
? Rev
Fr Allergol Immunol Clin 2002 ; 42 : 324-9.
puis l’arrêt de ce traitement, et rappellent également les modalités
de surveillance de ce traitement.
23 -
JPA 2003 : Dr Stéphane Guez
24 - AAAAI
Denver 2003 : Pr D.A. Moneret - Vautrin
25 - La désensibilisation sous-cutanée
: vous avez dit traitement « dangereux » ? Stéphane
Guez www.allergique.org.
26 - Les abeilles albanaises ont une taille de guêpe,
ou histoire de désensibilisation dans les Balkans. Stéphane
Guez www.allergique.org
27 - Reiss M, Reiss G. Rhinitis in old age. Schweiz
Rundsch Med Prax 2002, 91 ( 9) : 353-8.
<li
>Dans cet article les auteurs soulignent la difficulté de faire le diagnostic
étiologique d’une rhinite chez le sujet âgé.
<li
>En effet il y a des modifications physiologiques liées à l’âge
avec une perte du support nasal, atrophie des glandes muqueuses, diminution
de l’olfaction. Il existe une fragmentation du cartilage de la cloison nasale.
<li
>Cela contribue à constituer un nez de " vieillard " avec des
troubles souvent rapportés à une allergie ou à une sinusite.
<li
>Une bonne compréhension des différents phénomènes
en cause ainsi qu’un bon examen clinique doivent permettre de bien prendre en
charge ces rhinites.
<li
> On doit en premier penser aux tumeurs.
<li
>Si une affection allergique est dépistée, elle sera traitée
comme telle.
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28 - Mortemousque B, Bertel F, De Casamayor J, Verin
P, Colin J. House-dust mite sublingual swallow immunotherapy in perennial
conjunctivitis : a double-blind placebo controlled study. PMID : 12680861