Journées Parisiennes d’allergologie - 7 janvier 2004 -

jeudi 8 janvier 2004 par Dr Philippe Auriol9422 visites

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Journées Parisiennes d’allergologie - 7 janvier 2004 -

Journées Parisiennes d’allergologie - 7 janvier 2004 -

jeudi 8 janvier 2004, par Dr Philippe Auriol

Le Professeur Jacques Charpin nous a quitté cette année, ces journées Parisiennes d’Allergologie 2004 lui ont été naturellement dédiées par Mr le Pr David. Gageons qu’il aurait aimé ces longs discours sur le basophile !

Le 07 janvier 2004 : journée spéciale basophile

Le polynucléaire Basophile est une cellule très souvent négligée dans les bilans biologiques. C’est injuste car ce petit acteur de notre système immunitaire sait se mettre au cœur des réponses d’allergie, cette journée aura été pour nous tous l’occasion de nous en persuader.

Bien souvent, mastocytes et basophiles sont confondus : le basophile étant jugé comme un mastocyte circulant. Pourtant, s’il existe bien des mastocytes hors des muqueuses, ce sont des mastocytes qui gardent leur caractère éosinophilique à la coloration et nettement différents des basophiles puisque plus gros, le cytoplasme saturé de granules et un noyau ovalaire en bloc. Le basophile se présente comme une cellule plus petite, aux granulations irrégulières et au noyau polylobé. Ces deux cellules ont pourtant de fonctions immunes proches qui expliquent qu’elles soient facilement confondues voire même associées dans les publications d’immunologie.

Gilles Devouassoux nous a tout d’abord entretenu de cet acteur en nous rappelant quelques notions fondamentales.

Basophile mon ami
Enfin un regard humain sur le basophile

Ce basophile, décrit pour la première fois en 1879 par Ehrlich, est issu d’une cellule médullaire souche sous l’influence de Gm-CSF et d’interleukines 3 et 5. Nanti de récepteurs de forte affinité aux IgE et également d’un CD40 ligand (qui lui permet de déclencher le switch Th1/Th2) chez les lymphocytes B il a également des récepteurs pour les principales molécules d’adhésion (icam1 et vla 4) qui lui permettent de migrer sur le lieu d’une réaction allergique et il est producteur d’interleukines 4 et 13 connues pour amplifier la réponse allergique.
Enfin, la présence de récepteurs CCR1, 2, 3 et 4 sur sa membrane lui permettent d’être activé par des causes alternatives comme l’éotaxine (qui se fixe sur ccr3). Il existe une boucle d’amplification éotaxine/Il4 qui est capable de majorer fortement la réponse Th2.

Il est également mis en exergue le rôle des particules émises par les moteurs diesels qui activent spécifiquement la production d’IL4 par les basophiles.
Enfin, il existe des récepteurs aux facteurs complémentaires (C5a), aux immunoglobulines A ainsi que des Toll4

Au total, ce polynucléaire basophile se place comme un acteur polyvalent de l’immunité : aspécifique avec ses récepteurs Toll ou aux protéines A des staphylocoques et aux particules de Diesel, spécifique avec ses récepteurs pour les Immunoglobulines E, G et A.
Le point le plus important à mon avis est cette capacité très nette d’auto-amplification de la réponse allergique dont fait preuve cette cellule à part..
Comme l’a d’ailleurs souligné dans son intervention Manuel Tunon de Lara : « l’allergie est une maladie systémique » et les effets de son activation en un lieu ont un retentissement général et non pas seulement local.

Les autres interventions ont permis d’approfondir un peu plus le sujet :

Place de l’hématopoïèse dans la réaction allergique :

La plupart des auteurs sont d’accord pour dire que l’éosinophile et le basophile proviennent de la même cellule souche hématopoïétique, les autres hypothèses sont un progéniteur commun basophile/megacaryocyte et progéniteur commun basophile et mastocyte. Leur production médullaire est constante mais leur taux circulants varient avec une migration tissulaire lors de la mise en place de réactions allergiques. La synthèse des éosinophiles est inhibée par les anti récépteurs à l’IL5 (mepolizumab) mais leur association aux anti-leucotriènes cystéinés (zafirlukast) semble bloquer la prolifération des éosinophiles ET des basophiles de façon dose dépendante. Les corticostéroïdes ont une activité freinatrice sur la synthèse de ces cellules, sur leur maturation ET sur les conséquences de leur activation.

Récepteurs des basophiles :

Les basophiles ont des récepteurs de forte affinité aux IgE qui sont responsables de leur activation en cas d’allergie, mais à côté de ces récepteurs, il existe également des récepteurs aux immunoglobulines G dont le rôle est bien moins connu. Il semble que les basophiles humain bénéficient de récepteur aux IgG qui soient soit stimulant soit freinateur d’activation selon qu’ils sont des récepteurs Fc gamma 2a ou FcGamma2b. Physiologiquement, chez la souris, la résultante de l’activation de ces récepteurs est une réponse de freination : mais qu’en est il réellement chez l’allergique ?

Cytométrie de flux et allergie :

La cytométrie de flux semble apporter une réponse intéressante en terme de fiabilité pour le diagnostic d’allergies particulières : venins, myorelaxants, latex et amoxicilline. Mais encore beaucoup d’allergènes ne peuvent actuellement être de façon fiable être ainsi certifiées. La difficulté vient du fait qu’il faut réussir à identifier les basophiles sans les activer pour autant.

Cytométrie de flux
Cytométrie de flou plutôt, non ?

La chute des basophiles exprimant l’IgE marquée qui est fixée sur le CD63 signe l’activation. Le marqueur CD203c est également proposé dans le cadre des venins mais il est beaucop moins spécifique.

Récepteur à l’histamine :

Il en existe 4 types appelés H1, H2, H3, H4. Les récepteurs H1 sont largement répartis dans l’organisme et leur stimulation entraîne une vasodilatation et une extravasation plasmatique, la contraction des muscles lisses, une hypersécrétion muqueuse et l’activation de terminaisons sensitives. L’histamine attire les éosinophiles en faisant exprimer des molécules d’adhésion sur l’endothélium et elle favoriserait le switch Th2 en augmentant la synthèse d’IL 10 des cellules dendritiques et en réduisant l’IL12.

Les récepteurs H2 sont présents sur les cellules dendritiques. Leur stimulation augmente la production d’IL10 . Ces récepteurs inhibent la dégranulation des basophiles, éosinophiles et neutrophiles.

Les récepteurs H3 sont essentiellement présents sur les fibres nerveuses et au niveau du système nerveux central. La stimulation de ces récepteurs induit une altération de la vigilance.

Les récepteurs H4 sont pro-inflammatoires en recrutant des mastocytes, des éosinophiles et d’autres cellules immunes mais également anti-inflammatoires en stimulant la production d’IL10 et en abaissant la production des IgE. Ces récepteurs tissulaires H4 omniprésents sont encore mal connus.


En conclusion de cette journée, il me semble que de nombreuses pistes pour expliquer l’augmentation des allergies se font jour au vu de ces interventions : le basophile peut de son propre chef par des stimulations spécifiques (allergie) mais également aspécifiques (microbes, diesel) favoriser la mise en place du terrain allergique.
Proches à la fois des éosinophiles et des mastocytes ils se différencient d’eux par leur place essentiellement circulante mais s’en rapprochent en étant impliqué dans les mêmes réactions et avec parfois les mêmes médiateurs.
L’usage de la cytométrie de flux permettra de tester de plus en plus d’allergènes pour lesquels les tests cutanés sont insuffisants, c’est le cas des médicaments.
Enfin, l’histamine que nous croyons avoir totalement maîtrisée nous rappelle qu’avec quatre récepteurs les effets de sa présence sur notre organisme peuvent être bien variés et que les thérapeutiques inhibitrice que nous avons à disposition sont amenées à évoluer pour nous permettre d’avoir une action plus globale sur l’évolution de la maladie allergique.

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