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JPA 2004 : Réunion du CIAB et Les chimiokines
samedi 10 janvier 2004, par
Les chimiokines ont fait l’objet de plusieurs communications dont nous vous révélons ici la substantifique moelle.
Vous trouverez aussi ici un compte-rendu de la réunion du Club d’Immuno Allergologie biologique.
Les chimiokines
– A Magnan (Marseille) a d’abord traité des « chimiokines et pathologie allergique ».
Les chimiokines sont de petites protéines responsables de l’attraction des cellules inflammatoires au site de l’infection. Elles jouent un rôle essentiel dans l’induction et le type de réaction inflammatoire qui va dépendre du stimulus inducteur (allergène, infection..), de l’hôte, de l’organe, et du stade de la réaction (aigu, tardif, chronique).
C’est un système complexe qui agit conjointement avec les cytokines et les molécules d’adhésion.
Il y a actuellement plus de 50 chimiokines identifiées, qui vont agir au niveau cellulaire par l’intermédiaire de récepteurs dont 19 sont actuellement connus (plusieurs récepteurs peuvent lier une chimiokine et inversement). Les récepteurs sont exprimés sur les leucocytes, les cellules épithéliales et endothéliales ; certains sont constitutifs et d’autres inductibles. Certains récepteurs et certaines chimiokines semblent spécifiques d’un type cellulaire ; pour ce qui est de l’allergie, les chimiokines CCL-5 (RANTES), CCL-11 (éotaxine 1) et CCL-7 (MCP-3), et leur récepteur commun CCR3 semblent impliquées préférentiellement et induisent en présence d’IL5 l’attraction des éosinophiles. De plus, la répartition spécifique de ces molécules induit une compartimentalisation de la réponse inflammatoire, certains récepteurs étant par exemple plus exprimés dans les bronches que dans le tissu pulmonaire (récepteur CCL-2 des mastocytes CCL-2). Ces molécules pourraient donc être des cibles potentielles pour de futurs traitements anti-allergiques.
– M.Humbert (Clamart) a traité plus spécifiquement de l’inflammation allergique et du rôle de deux chimiokines : l’éotaxine et la fractalkine.
Les polynucléaires éosinophiles, mais aussi les basophiles et les TH2 expriment les récepteurs pour l’éotaxine (CCR3).
La production d’éotaxine accrue dans l’asthme est connue et son importance est corrélée à la sévérité de l’asthme ; d’autres chimiokines liant le CCR3 ont aussi une expression accrue dans les bronches (MCP63, RANTES...) mais leur rôle semble moins important.
Il est notable par ailleurs que les cellules épithéliales aussi expriment le CCR3, et il pourrait être une cible d’action des stéroïdes inhalés bronchiques.
Une autre chimiokine a été étudiée plus récemment : la fractalkine (CXCL-1), dont le récepteur est exprimé sur les lymphocytes, les monocytes et les mastocytes ; il semble que ce soit la seule chimiokine qui joue le double rôle d’adhérence et de chimiotactisme ; son taux est augmenté chez les patients allergiques, à la fois dans le sérum et le liquide de lavage alvéolaire. Elle semble par ailleurs avoir un intérêt aussi dans l’angiogénèse et le trafic cellulaire basal.
– Le Pr ATonnel (Lille) a enfin traité des « chimiokines comme futures cibles dans le traitement des maladies allergiques ».
L’omniprésence et la multiplicité des chimiokines à la surface des cellules impliquées dans l’allergie a conduit ces dernières années à les considérer comme des cibles thérapeutiques éventuelles ; l’action thérapeutique pourrait se situer
- soit au niveau de la chimiokine elle-même (utilisation d’un anticorps monoclonal),
- soit au niveau de son récepteur par l’utilisation d’antagonistes : antagonistes modifiant la structure biochimique de la chimiokine, antagonistes naturels (d’origine virale par exemple : le pox-virus produit des antagonistes du CCR-8, diminuant la réponse TH2), ou antagonistes synthétiques d’origine pharmacologique, à l’étude.
Toutes ces possibilités sont l’objet actuel de recherches intensives, mais il n’existe à ce jour aucun agent thérapeutique utilisable en pratique clinique.
Réunion du CIAB
C. Ponvert (Paris) a traité de
Discordances clinico-biologiques
: quelques cas particuliers à l’allergie aux venins d’hyménoptères et aux bêta-lactamines ».
– 1) La désensibilisation aux venins d’hyménoptères répond à des indications précises, tenant compte d’une part de la gravité de la réaction clinique et d’autre part d’un bilan allergologique positif qui repose sur les résultats des tests cutanés et du dosage des IgE spécifiques.
La sensibilité et la spécificité des tests cutanés (TC) immédiats sont supérieures à celles du dosage des IgE et la réactivité cutanée est corrélée à la gravité clinique.
Or certains auteurs ont attiré l’attention sur des patients qui avaient présenté une réaction clinique grave et qui avaient des TC négatifs et pour certains des IgE positives ; dans une étude récente, Golden a montré que si ces patients à TC négatifs étaient soumis à un test de provocation, 21% présentaient une réaction systémique (24% en cas de RAST positifs et 14% en cas de RAST négatifs).
Reprenant ces résultats pour les commenter, Reisman propose :
- de toujours effectuer des RAST chez les patients ayant eu une réaction systémique mais avec des TC négatifs, et de désensibiliser si le résultat est positif
- chez les patients ayant des TC et des RAST négatifs, compte-tenu d’un risque de récidive faible, de prescrire une trousse d’urgence avec de l’Adrénaline, et de contrôler régulièrement TC et RAST
– 2) Dans l’allergie aux bêta-lactamines, la sensibilité des TC à lecture immédiate est nettement supérieure à celle du dosage des IgE spécifiques.
Une étude récente a cependant montré que 15% des patients avec une allergie prouvée ou hautement probable avaient des TC négatifs et des RAST positifs.
Il ne faut cependant pas oublier que la sensibilité des RAST n’est que de 50% et que jusqu’à 15% des sujets témoins non allergiques aux bêta-lactamines ont des RAST positifs ; les autres tests biologiques n’ont pas de fiabilité supérieure.
En pratique clinique, il semble donc qu’en cas de TC négatifs et de RAST positifs, il faut certainement retenir l’allergie immédiate si l’histoire clinique est très évocatrice, et proposer l’éviction des antibiotiques de la même classe.
La biologie de l’allergie a-t-elle tenu ses promesses ?
H. Chabane fait le point sur l’historique et la pratique actuelle du dosage des IgE spécifiques, en faisant la part des avantages et des inconvénients de l’évaluation des IgE mais aussi des TC.
Un test in vitro doit être sensible, spécifique, reproductible, exact, linéaire, calibré sur un standard international, et ne pas avoir d’interférence avec les autres anticorps.
Pour ce qui concerne les IgE spécifiques, on peut en conclure que leur dosage est aujourd’hui une bonne alternative aux TC, qu’ils ne remplacent pas, mais qu’ils complètent ; mais ceci dès lors que l’on tient compte de la validation des différents tests et de leurs limites.
Leurs buts peuvent être de
- démontrer la présence d’IgE,
- de confirmer une sensibilisation potentielle,
- de pallier aux négativités éventuelles des TC ou à l’impossibilité de leur réalisation,
- de surveiller l’évolution dans le temps de l’allergie (intérêt pronostique) ou l’efficacité thérapeutique,
- d’apprécier parfois le pronostic de la maladie,
- et enfin d’aider à une décision éventuelle d’arrêt d’une désensibilisation (comme dans les allergies aux hyménoptères) ;
- ils pourront peut-être bientôt avoir un intérêt aussi dans la surveillance et l’ajustement des traitements par anti-IgE.
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