SFAIC 2004 : Le congrès du Dr Hervé Couteaux 1 et 3 avril.

dimanche 4 avril 2004 par Dr Hervé Couteaux3129 visites

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SFAIC 2004 : Le congrès du Dr Hervé Couteaux 1 et 3 avril.

SFAIC 2004 : Le congrès du Dr Hervé Couteaux 1 et 3 avril.

dimanche 4 avril 2004, par Dr Hervé Couteaux

On entend dire « partout » que les maladies allergiques sont en augmentation constante depuis plusieurs années. Cette mise au point d’une épidémiologiste vient à point nommé pour préciser ce qui, finalement, n’est pas aussi simple et monolithique que l’on pourrait le croire. Le dernier jour, les communications sur les urgences en allergologie ont été passionnantes.

Augmentation des maladies allergiques : réalités, hypothèses et ce que nous apprend l’étude européenne sur la santé respiratoire.

F.NEUKIRCH (Paris)

Il est actuellement admis qu’il y a une augmentation de la prévalence des maladies allergiques dans les pays industrialisés, surtout chez les jeunes.

Upton, en 2000, a retrouvé une augmentation de la prévalence de l’asthme chez les fils par rapport à leurs pères et chez les filles par rapport à leurs mères.

Cet effet cohorte a bien été retrouvé dans l’étude allemande d’E.Von Mutius (Lancet) 1998.
Cette étude, portant sur des enfants, a mis en évidence, pour les enfants nés après 1960, une forte augmentation de la prévalence de l’asthme en Allemagne de l’ouest, qui n’a pas été retrouvée en Allemagne de l’Est.

L’augmentation de l’incidence de l’asthme en fonction de la cohorte de naissance a bien été vérifiée : le risque de développer un asthme à 20 ans pour des enfants nés en 66 est le double de celui qui concerne des enfants nés en 46.

L’étude ISAAC s’est demandée comment évolue la prévalence des maladies allergiques entre 84 et 00.

  • Chez les 6-7 ans, augmentation de la fréquence des sifflements et des rhinites, beaucoup plus chez les filles que chez les garçons.
  • D’autres études transversales ont été menées, avec des résultats plus variables :
    • Italie : pas d’augmentation de prévalence de l’asthme entre 90 et 98 .
    • Australie : augmentation des symptômes d’asthme et de l’atopie.
    • Grande-Bretagne : augmentation globale
  • Chez les adolescents, les résultats sont plus contrastés :
    • Grande-Bretagne : augmentation de la prévalence de l’asthme mais diminution des symptômes de l’asthme.
    • Suisse : pas d’augmentation de prévalence.
  • Chez l’adulte,
    • Italie : pas d’augmentation de prévalence de l’asthme, augmentation de la prévalence des sifflements chez les moins de 30 ans et augmentation significative des allergies nasales.
    • Danemark : augmentation de la fréquence de l’asthme et de la rhinite
    • Norvège : augmentation de la fréquence de l’asthme et de la rhinite, plus marquée chez les filles que chez les garçons, ce que l’on retrouve dans pas mal d’études.

L’étude européenne ECRHS, portent sur 15000 adultes de 20 à 40 ans.

 Première étape en 91-92, et reprise en 2000-2001.

  • Pour l’asthme diagnostiqué (crise d’asthme dans les 12 derniers mois ou avoir un traitement pour l’asthme) on a retrouvé une augmentation de prévalence de l’asthme, plus importante chez les filles.
  • Il existe également une augmentation nette de la prévalence des rhinites allergiques, variable selon les tranches d’âges :
    Chez ceux qui avaient 20-24 ans en 92, augmentation de 7% pour les rhinites allergiques.
  • Augmentation beaucoup plus forte que chez les gens plus âgés, or la rhinite est un facteur de risque de la survenue d’un asthme. On a 6 fois plus de risque de développer un asthme si on a une rhinite allergique.
     Dix ans après, chez ceux qui ont développé une rhinite allergique, il y a une grosse augmentation du traitement pour asthme.

L’hypothèse hygiéniste est actuellement admise comme une explication raisonnable de l’augmentation des maladies allergiques dans les pays industrialisés. Elle fait notamment référence à une diminution de l’exposition aux germes, pathogènes ou non et reste cohérente vis à vis de l’ensemble des données épidémiologiques disponibles actuellement (augmentation de la prévalence associée au mode de vie occidental, diminution de la prévalence allant de pair avec la taille de la fratrie, ...)

Pour la relation entre l’exposition aux acariens, la sensibilisation et l’apparition de l’allergie, il a été mis en évidence une relation entre l’importance de l’exposition et l’apparition d’une sensibilisation, mais il n’existe pas de relation avec la survenue de l’asthme.

Ces résultats ont été confirmés par une étude longitudinale réalisée en Allemagne (LAU, Lancet 2000) : le pourcentage de sensibilisation augmente avec l’exposition, mais il n’y a pas de relation avec la survenue d’un asthme.

Qu’en est-il du rôle protecteur éventuel de la présence d’animaux domestiques ?

 Étude de TUCSON : chez ceux qui ont eu un chien pendant l’enfance, il y a diminution du risque de sifflements ultérieurs.

  • Si le chien est enlevé avant 3 ans, le risque d’apparition de sifflements rejoint celui de ceux qui n’ont pas eu de chien.
  • Si le chien est enlevé après 6 ans, il y a augmentation du risque.

 Pour le chat, de nombreuses études ont été réalisées, dont celle de PLATTS-MILLS :

  • une forte exposition au chat entraîne une réponse en IgG4 .
  • Les enfants peu exposés synthétisent peu d’IgG, si l’exposition est plus importante, le taux de sensibilisation augmente et les IgG augmentent également, et en cas de forte exposition, on observe une diminution de la fréquence des sensibilisations, et une forte synthèse d’IgG ( et surtout des IgG4) : en réponse à une exposition importante, il semblerait que l’on puisse développer une certaine tolérance.

 Cette étude nous amène naturellement à évoquer l’exposition aux animaux de ferme, étudiée depuis 89.

  • Plusieurs études ont retrouvé une relation dose-réponse ; l’exposition au bétail entraînait un risque diminué d’allergie.
  • Il existe une deuxième notion, celle de fenêtre pertinente : on a mis en évidence un effet protecteur du lait de ferme et de l’exposition au bétail ;
    • si l’exposition survient avant l’âge de 1 an, on note une forte protection vis à vis de l’asthme, de la rhinite et de la sensibilisation.
    • S’il n’y a exposition qu’à l’un seulement de ces deux facteurs, la protection est moindre.
    • Si l’exposition est plus tardive, il n’y a pas de protection.

Ces résultats ont été repris à la lumière de l’ECRHS : pour les sujets nés avant 60, avoir passé son enfance dans une ferme n’apporte pas de protection. Chez ceux nés après 60, le vécu dans une ferme n’amène pas de risque particulier de sensibilisation. Pour les autres, le risque de sensibilisation est très augmenté.

Les facteurs de risque des maladies allergiques sont modulés par la génétique ; le CD 14 est un récepteur pour lipoplysaccharides (paroi des bactéries Gram négatif). Une augmentation du CD 14 circulant correspond à une diminution du taux d’IgE . A la lumière de cette observation, essayons d’interpréter le fait qu’une exposition au chat soit corrélée à une baisse d’atopie, peut être seulement dans le cas ou le sujet est homozygote.

En cas de forte exposition, la protection est encore plus importante si l’exposition a lieu précocement (avant 1 an) et si le sujet a un « bon » génotype (homozygote).

 En résumé  :

  • l’allergie respiratoire est en augmentation chez les enfants et les adultes jeunes, et plus ou moins chez les adolescents.
  • L’augmentation est plus forte chez les filles (L’asthme est certes toujours plus fréquent chez les garçons mais depuis 10 ans, l’augmentation de fréquence est supérieure chez les filles )
  • Le schéma général s’oriente vers une interaction entre des stimulations bactériennes, des expositions allergéniques élevées et des facteurs de susceptibilité génétiques.

 Interventions de la salle :

  • On a mis en évidence un effet protecteur de la crèche avant un an, sauf si la maman est asthmatique. Les ATCD (et surtout les ATCD maternels) interfèrent beaucoup et pèsent plus lourd que les facteurs protecteurs. Par ailleurs il faut une certaine durée pour entraîner un effet protecteur. Cette durée pourrait être différente selon la présence ou l’absence d’antécédents.
  • Qu’en est-il de la prédominance féminine : plusieurs éléments de réponse ; l’augmentation du tabagisme féminin, le fait que les femmes sont plus sensibles aux facteurs de l’environnement (à tabagisme égal, la fonction respiratoire est inférieure chez la femme).

Ces bases épidémiologiques éclairent notre pratique quotidienne.

Elles apportent une pondération essentielle dans un foisonnement d’études aux résultats souvent contradictoires ; les notions de base restent valides .

Les atopiques se sensibilisent beaucoup plus vite que les non atopiques et surtout l’éviction allergénique reste importante en pratique.

Traitement du choc et bon usage de l’adrénaline.

Fabienne Rancé

Créé en 93, revu en 99 (essentiellement pour les allergies), le PAI s’est depuis multiplié... avec une double difficulté : identifier les situations à risque vital et transmettre un message clair au personnel scolaire sur la conduite à tenir en cas de réaction imprévue potentiellement grave.

Cette mise au point sur les traitements d’urgence s’inscrit bien évidemment dans nos préoccupations quotidiennes d’allergologues .

Le choc anaphylactique est un syndrome clinique grave, qui met en jeu le pronostic vital, et concerne tous les âges de la vie.

La prévalence exacte du choc anaphylactique n’est pas connue. Néanmoins, on estime que ce risque concerne environ 1 % de la population.

L’adrénaline est le traitement de choix du choc anaphylactique.

Les effets secondaires chez l’enfant sont tout au plus modérés et transitoires.

Le retard à l’emploi de l’adrénaline est un des facteurs explicatif d’évolution fatale dans certains accidents graves par allergie alimentaire.

La prescription d’adrénaline est variable selon les pays : large aux États-Unis et au Canada, elle est restreinte au choc anaphylactique et à l’asthme en Grande-Bretagne.

La prescription d’adrénaline s’accompagne d’un diagnostic précis, d’un programme d’éducation, d’information et de suivi thérapeutique.

 Définition du choc anaphylactique

Le terme d’anaphylaxie est employé couramment par les Anglo-Saxons, même pour des troubles bénins.

Il est donc important d’en préciser la définition : l’anaphylaxie est une réaction clinique grave, potentiellement létale, généralisée ou systémique.

Après le contact déclenchant, la réaction est rapide (en moyenne 15 minutes) atteignant plusieurs organes, évoluant, en l’absence de traitement spécifique, vers des signes cardio-vasculaires et neurologiques. La forme la plus grave comporte un bronchospasme sévère et une hypotension.

Les signes cliniques sont variés : l’urticaire est présent dans plus de 75 % des cas. L’hypotension est plus rare (une fois sur trois) et se rencontre surtout en cas de mécanismes IgE dépendant.

On distingue plusieurs stades de gravité clinique :

  • stade 1 : signes cutanéo-muqueux généralisés
  • stade 2 : atteinte multi-viscérale modérée, avec signes cutanéo-muqueux, hypotension et tachycardie, toux et difficulté respiratoire
  • stade 3 : atteinte multiviscérale sévère menaçant la vie et imposant une thérapeutique spécifique, se traduisant par un collapsus, une tachycardie ou une bradycardie, des troubles du rythme cardiaque, un bronchospasme, des signes cutanés pouvant apparaître après la remontée tensionnelle.
  • Stade 4 : arrêt circulatoire ou respiratoire

Il faut noter la possibilité de réaction en deux temps (dont les causes ne sont pas connues) avec récurrence au bout de 2 à 4 heures, qui concerne 5 à 20 % des anaphylaxie de l’adulte et 2 à 3 % chez les enfants.

Elle peut survenir jusqu’à 24 heures après les premiers signes, imposant une hospitalisation systématique au décours de toute anaphylaxie.

Le choc est souvent précédé de signes annonciateurs, survenant habituellement dans les minutes qui suivent l’exposition au facteur déclenchant. Ces signes peuvent permettre une thérapeutique précoce évitant ainsi l’installation du choc.

Il est important de distinguer anaphylaxie allergique, dépendante des IgE de l’anaphylaxie non-allergique, ou non IgE-médiée. Dans ce cas le rôle du complément, des complexes immuns (IgG dépendants) ou des cellules immunitaires est évoqué.
Le diagnostic différentiel est important avec une attaque de panique ou un malaise vagal. L’absence de chute tensionnelle, de pâleur, des signes respiratoires ou cutanés et la bradycardie habituelle du malaise vagal permettent de redresser facilement le diagnostic.

Les causes sont multiples, largement dominées par les aliments chez l’enfant. Dans l’étude de Pumphrey et Stanworth, portant sur 172 patients âgés de cinq mois à 69 ans, les auteurs estiment que 60 % des anaphylaxies et 91 % des anaphylaxies de l’enfant sont liées à l’ingestion d’un aliment. Le latex, les piqûres d’hyménoptères, les médicaments, les vaccins et l’exercice représentent les principales autres étiologies.

 Épidémiologie du choc anaphylactique

Les données épidémiologiques sont rares et l’incidence exacte de l’anaphylaxie n’est pas connue.

On peut se baser sur la prescription d’adrénaline ; on estime que, dans la population générale, 0,95 % des personnes ont eu une prescription d’adrénaline. Ce chiffre monte à 2 % chez les enfants entre 0 et 5 ans, tandis qu’il chute à 0,32 % après l’âge de 65 ans.

Globalement, le risque de choc anaphylactique concerne environ 1 % de la population générale (Simons, Peterson et Black, JACI 2002).

Aux États-Unis, l’incidence de l’anaphylaxie est de 7,6 cas pour 100000 personnes et par an. Elle est responsable de 150 à 200 décès annuels.

Au Danemark, une étude rétrospective sur 13 ans et chez 48 000 personnes ( Sorensen et al. Allergy 1989) enregistre 20 cas, soient 3,2 cas pour 100 000 habitants par an.

En France, Mme Monneret-Vautrin estimait cette incidence à 2,05 cas pour 100 000 habitants en 1995.

L’incidence de l’anaphylaxie est vraisemblablement sous-estimée, il est donc nécessaire de mettre en place un registre national des anaphylaxies fondé sur des critères diagnostiques certains.

 Les facteurs de risque d’un choc anaphylactique

Il faut tout d’abord mentionner les antécédents de réactions sévères, l’augmentation de la sévérité lors des réexpositions, la présence d’un asthme, même équilibré, une réintroduction d’aliments après éviction, un traitement concomitant par bêtabloquant ou inhibiteur de l’enzyme de conversion, ou encore une mastocytose.

La nature de l’allergène est également en cause : l’arachide, les fruits à coque, les poissons, les produits de la mer et le sésame sont les principaux aliments impliqués dans les anaphylaxies d’origine alimentaire.

L’arachide et les fruits à coque sont en cause dans la majorité des décès ou des menaces de décès par allergie alimentaire.

L’expérience nous apprend que la majorité des réactions anaphylactiques surviennent au restaurant et à l’extérieur du domicile et chez les patients qui n’ont pas à leur disposition d’adrénaline.

L’étude de Bock (JACI 2001) sur 32 décès par allergie alimentaire, enregistre une survenue au restaurant ou à l’extérieur du domicile dans 56 % des cas, l’absence ou le retard à l’injection d’adrénaline 86 % des observations et la coexistence d’un asthme 9 fois sur 10.

Dans l’étude de Pumphrey (Clin exp Allergy 2000) chez des patients décédés d’anaphylaxie, on observe que les symptômes débutent plus tôt pour les médicaments (5 minutes), que pour les piqûres d’hyménoptères (moins de 15 minutes) ou pour les aliments (en moyenne 30 minutes).

Les symptômes associés au décès par allergie alimentaire sont surtout le bronchospasme (90 % des cas), alors qu’il s’agissait beaucoup plus souvent du collapsus pour les médicaments et venins d’hyménoptères.

 Traitement curatif du choc

L’adrénaline représente indiscutablement le traitement de choix du choc anaphylactique par ses effets de stimulation des récepteurs alpha et Béta adrénergiques.

Le délai d’administration conditionne le pronostic. L’incidence des complications et de la mortalité augmente proportionnellement avec le retard d’utilisation de l’adrénaline.

Les premiers gestes de la prise en charge du patient comportent :

  • l’arrêt de l’exposition à la substance déclenchante
  • une évaluation rapide pour déterminer la sévérité et l’extension de l’anaphylaxie, la perfusion tissulaire et le degré de tolérance cardiaque.
  • Le patient inconscient est allongé sur le dos, tête basse en extension, tourné sur le côté, l’oxygène administré dès les premiers signes si nécessaire.
  • Il sera transféré, dès la mise en conditions, en milieu hospitalier pour une surveillance minimale de 24 heures.

Le traitement curatif sera suivi d’un traitement préventif pour éviter les récidives, et d’une recherche de la substance déclenchante, si elle n’est pas connue, un mois plus tard.

Les antihistaminiques sont habituellement administrés par voie orale ou parentérale.

Certains préconisent les corticoïdes pour moduler la réaction retardée, à la posologie de 2 mg/kg ou 60 à 80 mg chez l’adulte d’équivalent de prednisolone.

En cas de bronchospasme, les nébulisations de bronchodilatateurs sont utilisées.

Un remplissage par macromolécules avec éventuellement utilisation de drogues vasopressives sont adaptées au degré d’hypovolémie.

Le massage cardiaque externe s’impose en cas d’arrêt circulatoire ; il est associé rapidement à la ventilation assistée.

 Le bon usage de l’adrénaline

L’adrénaline est encore sous utilisée.

Le rapport du programme de surveillance pédiatrique canadienne des anaphylaxies enregistre l’utilisation d’adrénaline dans seulement 32 % des anaphylaxies alors que les antihistaminiques ont été utilisés dans 54 % des épisodes.

 La voie d’administration :

l’étude de référence reste celle de Simons et al. JACI 1998 qui démontre l’efficacité supérieure de la voie intramusculaire par rapport à la voie sous-cutanée. Ils mentionnent également la supériorité du site d’injection dans la cuisse et des dispositifs auto-injectables.

 La dose recommandée est de 0,01 mg/kg.
Un dosage à 25 mg correspondra à 0,04 ml/kg.

En résumé, 0,15 mg pour des poids inférieurs à 20 kilos et 0,3 mg pour des poids au-delà. Il reste à développer de nouvelles formulations permettant d’adapter mieux les doses au poids du patient.

 Les effets secondaires de l’adrénaline :
ils sont en règle mineurs et transitoires :

  • palpitations,
  • difficultés respiratoires,
  • pâleur,
  • étourdissements,
  • faiblesse,
  • tremblements,
  • anxiété,
  • maux de tête,
  • fièvre,
  • hypertension artérielle brutale.

Il a également été rapporté des manifestations plus sévères :

  • arythmie cardiaque létale,
  • oedème pulmonaire,
  • hémorragie cérébrale et
  • infarctus du myocarde.

 L’absence de réponse à l’adrénaline :
l’absence de réponse à une injection d’adrénaline provient d’une des situations suivantes :

  • retard à l’injection,
  • erreur dans le choix de la voie d’administration ou de la dose,
  • utilisation d’un dispositif périmé,
  • traitement concomitant par des inhibiteurs de l’enzyme de conversion,
  • allergie aux sulfites ou bien évolution explosive ( l’adrénaline n’arrête pas un choc établi avec troubles de l’hémodynamique).

L’échec de l’adrénaline fera recourir aux bronchodilatateurs, (Théophylline en Grande-Bretagne plutôt que Salbutamol). En parallèle avec le traitement du choc, il faut donc assurer le contrôle de l’asthme.

 Les dispositifs auto injectables à usage unique :

Anapen est le seul dispositif auto injectable disponible en France. Il se conserve à température ambiante. L’utilisation est unique et 2 dosages sont disponibles (0,15 mg en dessous de 20 kilos et 0,30 mg au-delà de 20 kilos)

L’utilisation du dispositif auto injectable n’est pas considérée comme un acte médical, d’après l’avis du conseil national de l’ordre des médecins du 31 août 2000.

Il convient de respecter la date de péremption pour une efficacité optimale.

Les dispositifs auto injectables résistent mieux au froid extrême qu’à une chaleur intense (pas plus de 30°C).

Les interactions médicamenteuses et les précautions d’utilisation de l’adrénaline :
Il n’existe pas de réelle contre-indication à l’utilisation de l’adrénaline, surtout en situation d’urgence.

Toutes les présentations de l’adrénaline contiennent des sulfites, elles sont pourtant autorisées chez le patient intolérant aux sulfites en cas de choc anaphylactique :

  • Anapen,
  • Anahelp 1mg/ml S/C et IV, une seringue et un piston à quatre positions avec trois ailettes enlevables, une ailette=0,25 ml, conservation entre +2 et +8°C à l’abri de la lumière ;
  • Adrénaline Aguettant 0,25 0,50 et 1 mg/ml, IV, S/C
  • Adrénaline à 0,01 % B.Braun 1mg/10ml IV,
  • Adrénaline Cooper 0,25 0,50 et 1 mg/ml, IV et S/C
  • Adrénaline Renaudin 0,25 0,50 et 1 mg/ml ; 5 mg par 5 ml, IV et S/C.)

L’adrénaline est déconseillée chez le patient cardiaque (insuffisance coronarienne sévère, Myocardiopathie obstructive, troubles du rythme ventriculaire) du fait d’une augmentation de la réactivité cardiaque. Des précautions sont nécessaires chez le patient diabétique, hyperthyroïdien ou atteint d’athérosclérose.

L’association de l’adrénaline aux thérapeutiques suivantes est déconseillée : anesthésiques volatils halogènés, antidépresseurs imipraminiques, antidépresseurs sérotoninergiques-noradrénergiques et guanéthidine.

 Quand faut-il prescrire ? (Revue de Kemp, J.paediatr child health 2003)
Plusieurs facteurs de risques sont à considérer :

  • un âge supérieur à 5 ans
  • un asthme par allergie alimentaire et des réactions antérieures sévères
  • asthme sous traitement et allergie alimentaire associée
  • réaction induite par une quantité minime (une quantité supérieure fera craindre une réaction plus sévère)
  • allergie à l’arachide

L’adrénaline est inutile pour des signes cliniques mineurs ; elle peut aussi conduire à un excès de confiance.

Ses indications se résument à divers tableaux cliniques : choc anaphylactique, asthme aigu grave, oedème laryngé, certaines urticaires généralisées.

Ses indications concernent également des réactions survenues pour des doses minimes d’allergènes.

Il faut également tenir compte de certaines périodes à risque, comme l’adolescence.

Certains aliments sont connus comme présentant un risque particulier en matière d’allergie alimentaire : ce sont l’arachide, les fruits à coque, le sésame et le poisson.

Enfin, on se méfiera des allergies multiples.

Le plus important est l’éducation du patient ou de son entourage (étude de Pumphrey en 2000 et de Sicherer) 40 % de ceux qui devraient utiliser l’adrénaline ne savent pas comment faire, 30 % des auto-injectables restent à domicile, et 81 % des médecins n’ont pas de matériel placebo de démonstration. Il est aussi important de prescrire de l’adrénaline que de remettre un plan d’action claire et précis en cas de réaction allergique par exposition accidentelle.

 Traitement à long terme

Il repose sur l’éviction de l’allergène identifié par des tests standardisés.

La connaissance des facteurs de risque de réaction sévère oriente vers une éducation thérapeutique adaptée.

L’éducation est une étape essentielle qui permet de mettre en place différentes mesures :

  • plan d’action en cas de réaction par exposition accidentelle
  • cartes d’identité précisant les allergies, protocole d’accueil individualisé en milieu scolaire et périscolaire.
  • Il est indispensable d’améliorer l’éducation des patients allergiques et également des médecins amenés à les suivre régulièrement à l’utilisation des dispositifs auto injectables d’adrénaline.

On peut en pratique distinguer deux situations :

  • à l’école : le mieux est d’appeler et d’expliquer la situation de l’enfant à un médecin qui dira s’il faut ou non pratiquer l’injection d’adrénaline
  • dans la famille : pour des enfants, les effets secondaires de l’adrénaline sont minimes ; si « la famille » pense qu’il faut le faire, on fait l’injection d’adrénaline.

 Conclusion

Le geste d’urgence du choc anaphylactique est l’injection précoce d’adrénaline.

Néanmoins elle reste encore peu utilisée. Il convient d’enseigner les modalités d’utilisation de l’adrénaline : dose, lieu d’injection, voie d’administration, et vérification des dates de péremption.

L’incidence de l’anaphylaxie est mal estimée, il convient donc de développer des registres nationaux sur les anaphylaxies avec création de réseaux d’allergovigilance.

Enfin il est essentiel de connaître les situations à risque d’anaphylaxie pour mettre en place des mesures éducatives et prévenir les récidives.

En matière de choc anaphylactique, l’adrénaline doit être utilisée précocement, aussi rapidement que possible, dès la survenue des premiers signes .

Cette ligne de conduite, en apparence simple, a en réalité plusieurs implications :

  • Identifier les situations exposant au risque
  • Eduquer le patient et/ou son entourage quant au maniement du médicament et à l’importance de garder ce dernier en permanence à portée de main.
  • Décrire les premiers signes devant faire décider de l’injection

En pratique, nous constatons des déficits à chacune de ces étapes :
Les facteurs de risque que nous rappellent F.Rancé sont de mieux en mieux connus, au premier rang desquels figure un ATCD de réaction sévère.

Or l’étude de Bellou, Emerg Med 2003, commentée par S.Guez, rappelait que seul un faible nombre de patients admis aux urgences pour une suspicion d’allergie étaient effectivement explorés en allergologie avec évidemment comme conséquence une absence de prévention de la récidive.

L’éducation reste perfectible : F.Rancé nous rappelle que seuls 20% des médecins concernés ont un dispositif placebo permettant d’effectuer des démonstrations avec en corollaire 40% de patients ignorant l’usage pratique de l’adrénaline dont les dispositifs auto-injectables restent d’ailleurs à la maison dans 30% des cas.

Quant à l’information au patient des signes cliniques devant faire pratiquer l’injection, cela reste un sujet difficile (faut-il faire l’injection dès l’apparition d’un prurit palatin ?) comme l’évoquait D.Vervloet dans la discussion de l’exposé. L’important reste un message clair ciblé : le message transmis à l’école est différent de celui qui est communiqué à la famille.

Au total, bien des progrès nous attendent, tant dans la prise en charge de cette réaction sévère, encore trop souvent fatale, que dans la prévention des récidives ; l’urgence est là...aussi !

L’asthme aigu grave : causes, diagnostic et traitement

- Sergio SALMERON
En 97, a été mis en place l’étude ASUR (ASthme, URgences), dans le but d’étudier les modalités de prise en charge de l’asthme aigu grave (AAG) dans les services d’urgences.

Les premiers résultats ont été publiés par S.Salmeron dans le Lancet en août 2001.

L’auteur nous livre ici l’état des lieux de la prise en charge de l’AAG en milieu urgentiste.

L’asthme est responsable d’environ 2000 décès par an en France, pouvant pratiquement tous être évités. Malgré cela, ces chiffres de mortalité sont stables depuis dix ans.

 Définition de l’asthme aigu grave (AAG) :
Cliniquement, il s’agit d’une crise résistant au traitement bronchodilatateur usuel et/ou d’un débit expiratoire de pointe < 30 % de sa valeur théorique.

 Facteurs prédisposant (patients à risque)

  • Ils se décomposent en facteurs liés à l’asthme ainsi qu’en facteurs dépendants du patient.
  • Les facteurs socio-démographiques interviennent tant par la présence de conditions socio-économiques défavorables que par la difficulté d’accès aux soins.
  • Les facteurs socio-psychologiques pèsent parfois très lourd, comme dans le cas d’une affection psychiatrique sévère, et sont plus généralement responsables d’une nom compliance du sujet.
  • Les facteurs liés à l’histoire de l’asthme sont nombreux :
    • antécédents de pneumothorax,
    • d’intubation,
    • d’hospitalisation,
    • maladie à l’aspirine,
    • affection cardiaque ou respiratoire associée,
    • corticothérapie à long terme,
    • allergie à alternaria.

Il faut insister sur la notion de dyspnée. L’AAG peut survenir après une période d’instabilité de l’asthme, mais il peut aussi faire suite à une période pendant laquelle le patient aurait été peu ou pas gêné sur le plan respiratoire.

 L’évolution de la crise fait distinguer 2 situations (on se rapportera à l’étude de Wasserfallen AJRCCM 94) :

 La crise progressive :

  • elle évolue en général sur plus de six heures, parfois sur plusieurs jours.
  • Elle concerne 80 à 90 % des cas et concerne essentiellement les femmes.
  • Elle s’observe par exemple dans le contexte d’une infection respiratoire.
  • À l’ « arrivée », sa gravité est plus ou moins marquée, avec une réponse lente au traitement.
  • Elle correspond à une inflammation caractérisée par une infiltration abondante d’éosinophiles.

 L’asthme suraigu :

  • il évolue en moins de trois heures (parfois jusqu’à six heures).
  • Il représente 10 à 20 % des cas et concernent essentiellement les hommes.
  • On l’observe en cas d’exposition allergénique massive ou parfois avec l’aspirine.
  • On retrouve souvent dans le contexte la présence d’un exercice physique ou d’un stress (conflit familial, simple vol d’un portefeuille...)
  • Sa gravité est marquée et le traitement entraîne une réponse rapide.
  • Le bronchospasme est sévère et cette forme correspond à une infiltration de neutrophiles et non d’éosinophiles (comme on l’observe dans la chronicité).

 Perception de la dyspnée :

Étudiée notamment par Kikuchi NEJM 94. Cette perception semble différente selon les patients, certains ayant une bonne perception de la perméabilité bronchique tandis que d’autres (notamment ceux qui présentaient des antécédents d’intubation)
tolérait bien mieux la charge imposée.

Une autre étude, par Magdale en 2002, sur 113 patients asthmatiques n’ayant jamais présenté de crises d’asthme presque fatales, avec un suivi de vingt-quatre mois, a permis d’isoler trois groupes de patients : perception de la dyspnée faible, normale ou forte.

L’auteur a retrouvé 25 % de patients dans ce groupe à faible perception de la dyspnée. Au cours du suivi ce groupe a significativement fréquenté davantage les urgences, était hospitalisé plus fréquemment tandis que l’on comptait 6 décès dans ses rangs.

C’est toute l’importance de la discordance qu’il peut y avoir entre la clinique et la gravité ; il faut rappeler que la définition intègre un DEP < 30 % de la théorique. L’ancien critère (< 150 litres par minute) n’étant pas pertinent (on comprend qu’un tel chiffre seuil n’a pas la même signification selon que vous mesurez 1,45m ou 2m...) Ce critère d’un DEP< 30 % de la théorique n’est toutefois pas parfait (comme cela a été évoqué dans la discussion qui a suivi l’exposé) ce DEP doit être apprécié (dans la mesure du possible) en fonction du point de départ et également du temps que le sujet a mis pour chuter à ce niveau.

 Cibles du traitement :

Bronchodilatateurs (Béta 2 agonistes) pour le bronchospasme et anti-inflammatoires pour l’inflammation...

Pour les bronchodilatateurs, la voie intraveineuse ne paraît pas supérieure à la nébulisation, notamment en raison d’une pénétration exponentielle au cours du temps pendant une nébulisation, mais il faut savoir la répéter.

C’est ce que confirme l’étude de Raimondi, Chest 97, qui retrouve une équivalence de traitement après 1 ou 3 heures maximum.

Pour l’adrénaline, c’est moins clair, en absence de choc anaphylactique : les Béta 2 ont une demi-vie plasmatique de 2 à 3 heures tandis qu’elle n’est que de quelques minutes pour l’adrénaline rendant toute comparaison difficile.

Ellul, en 75, n’a pas retrouvé de différence significative entre adrénaline et bronchodilatateurs.

En pratique, on utilise les Béta 2 et l’adrénaline en l’absence de réponse aux bronchodilatateurs. (À l’occasion d’une question de la salle à la fin de l’exposé, il a été rappelé qu’en France, le Salbutamol IV étaient largement utilisé en absence de réponse rapide de la nébulisation, à la dose de 0,5 mg par heures au début)

Les anticholinergiques ont longtemps été mal situés : ils sont moins puissants et moins rapides que les Béta 2. C’est une étude Uruguayenne, celle de Rodrigo, en 2000, qui apporte une réponse claire : pour les AAG les plus sévères, l’ipratropium a son intérêt en complément de doses massives de Béta 2.

 Réponse au traitement :

Elle doit être jugée rapidement ; à 30 minutes, on sait déjà si le sujet est répondeur ou non répondeur.

À 30 minutes, il doit y avoir une réponse : la fréquence respiratoire diminue, le sujet est plus calme et parle mieux.

En pratique, on fera appel à la réanimation si l’état du sujet est catastrophique d’emblée ou s’il n’y a pas d’amélioration à 30 minutes.

Une des nouveautés pourrait être le sulfate de magnésium (en voie IV) chez les non répondeurs. Il y a eu des méta-analyses concluant à un effet significatif. Silverman, chest en 2002, qui a retenu comme critère d’inclusion un FEV1 < 30 % de la valeur prédite, a retrouvé une augmentation (modérée mais significative) des débits expiratoires. Depuis, on peut poser la question avec la nébulisation. Après trois nébulisations (première heure) il existe une différence, avec un écart qui est plus important chez les plus sévères.

Il faut rappeler qu’une corticothérapie per os est nécessaire pendant plusieurs jours et une évolution favorable après huit jours ne rend pas utile la diminution progressive des doses.

Après la survenue d’un AAG, quelques incertitudes persistent sur l’état que le sujet recouvre au sortir de la phase aiguë : peu de patients ont un DEP chez eux, donc on ne sait pas précisément...

 En conclusion :

Les corticostéroïdes inhalés, en traitement de fond de la maladie asthmatique, sont les seuls à avoir démontré :

  • une diminution des hospitalisations
  • une diminution de la fréquence des exacerbations
  • une diminution du nombre des décès par asthme

En résumé, l’AAG est un événement fréquent, potentiellement grave, qui peut survenir quelque soit le stade de sévérité de la maladie asthmatique. Son traitement prioritaire est représenté par les Béta 2 à fortes doses.

L’asthme est responsable de 2000 morts par an en France, et ce chiffre est stable depuis maintenant plus de dix ans, malgré les progrès enregistrés par la thérapeutique . C’est un chiffre inacceptable car évitable dans la quasi-totalité des cas.

Dans l’étude ASUR, comme d’ailleurs cela avait été relevé il y a plus de 13 ans dans une autre étude, plus de 50% des patients admis en urgence pour asthme ne prenait pas de corticothérapie inhalée en traitement de fond ; la gravité de l’asthme est certes méconnue par le malade, mais elle l’est aussi par le médecin.

Si la clinique reste primordiale, cette mise au point nous rappelle qu’il y a parfois discordance et donc risque de sous-estimation de la gravité, d’où l’importance de critères paracliniques tel qu’un DEP<30% de la théorique.

La prévention de la mortalité passe par une amélioration de la prise en charge initiale et une meilleure collaboration entre les médecins premiers intervenant et les services d’aide médicale urgente.

La prévention primaire est entre les mains du médecin traitant en collaboration avec le praticien allergologue. Leur charge est de proposer, d’adapter et d’optimiser la prise en charge de l’asthme en période intercritique, notamment par un traitement de fond et/ou une immunothérapie spécifique, et de faire au mieux l’éducation sanitaire du patient .

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