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AAAAI 2005 : le congrès du Dr Alain Thillay. 1er jour
samedi 19 mars 2005, par
Session de posters intéressante dont voici quelques morceaux choisis.
– Minocycline permet une réduction des corticostéroïdes oraux et diminue la réponse IgE chez l’adulte asthmatique.
Joks R. et coll. Broocklyn, NY, USA.
Les antibiotiques de la famille des cyclines ont des propriétés anti-inflammatoires qui les font utiliser aussi dans des indications comme l’acné ou la polyarthrite rhumatoïde.
Le but de cette étude était la recherche du potentiel d’épargne des corticoïdes oraux grâce à la minocycline dans le traitement de l’asthme.
A l’aide d’une étude croisée contrôlée, randomisée, en double-aveugle, contre placebo qui concernait 15 patients asthmatiques et 4 patients atteints de BPCO, les patients recevant de la minocycline durant 8 semaines puis un placebo sur la même durée, les auteurs ont pu montrer que cet antibiotique avait un effet épargneur de corticoïde oral, une efficacité clinique et une suppression de la réponse IgE chez l’asthmatique.
Encore une étude sur l’effet anti-inflammatoire d’un antibiotique.
Cet effet est déjà bien connu pour les macrolides, ici, il s’agit de la minocycline antibiotique de la famille des cyclines.
Il peut paraître difficile de proposer ce type de traitement de façon courante pour des asthmes facilement maîtrisables par les traitements usuels. Par contre, dans le cas d’asthmes cortico dépendants et peut-être plus dans le cas d’asthme cortico nécessitants, donc relativement sévère, il est justifié d’avoir recours à cette thérapeutique complémentaire.
Il faudrait aussi chercher par où passe l’effet anti-inflammatoire de ces antibiotiques. Peut-être, une autre voie thérapeutique de l’asthme ?
– Rôle de l’allergie alimentaire chez l’enfant asthmatique.
Krogulsla A. et coll. Lodz, Pologne.
Si nous connaissons bien l’implication de l’allergie alimentaire dans la dermatite atopique, l’urticaire aiguë, le choc anaphylaxie et les troubles gastro-intestinaux, par contre, son rôle dans la maladie asthmatique reste peu clair.
Dans le but d’éclaircir ce point, les auteurs ont mené une étude sur 74 patients âgés de 6 à 18 ans tous atteints d’asthme.
Ils ont été évalués concernant l’allergie alimentaire par, questionnaire, tests cutanés, IgE spécifiques (CAP System FEIA Pharmacia) et DBPCFC.
– 31% des sujets rapportaient la notion de troubles gastro-intestinaux,
– 32,4% des réactions adverses en rapport avec les aliments dans les 2 ans précédents,
– par contre, aucun ne témoignait d’un aliment ayant déclenché une crise d’asthme.
– 12,2% des patients avaient des tests cutanés alimentaires positifs,
– 16,2% des IgE spécifiques à l’encontre d’aliments.
Parmi les enfants dont le bilan évoquait une allergie alimentaire avec des tests cutanés positifs et/ou des tests sériques positifs, 20 ainsi sélectionnés ont subi un test de provocation alimentaire en double-aveugle. Lors de ce test de provocation, 2 sujets ont toussé et 6 ont eu d’autres symptômes (poussée de dermatite atopique et symptômes gastro-intestinaux).
Cette semble bien confirmer que l’allergie alimentaire peut être impliquée dans l’asthme mais que sa prévalence est faible.
Encore une étude qui, certes montre la possibilité d’avoir un asthme « alimentaire », mais qu’il s’agit d’une occurrence relativement rare.
Toutefois, l’allergologue avisé ne l’oubliera pas et cherchera l’implication d’une allergie alimentaire dans le cas d’un asthme intervenant sur un terrain atopique mais dont les résultats de l’enquête vis-à-vis des aéroallergènes n’est pas convaincante.
Il serait en effet dommage de ne donner comme perspective à ce type de patient que le traitement anti-inflammatoire médicamenteux alors qu’une éviction alimentaire bien conduite permettrait de l’améliorer.
– Effets anti-inflammatoires des anti-histaminiques modernes dans l’asthme allergique. Lee D.K.C. et coll. Dundee, Ecosse.
Une controverse s’est fait jour pour ce qui concerne l’éventualité du rôle des anti-histaminiques modernes antagonistes des récepteurs H1 dans l’asthme allergique.
Ainsi, quarante-neuf patients ont été évalués grâce à trois études contrôlées, en double aveugle contre placebo pour vérifier l’action anti-inflammatoire de la desloratadine, la levocetirizine et la fexofenadine aux doses recommandées.
Ces trois anti-H1 montre significativement une amélioration lors du test de provocation bronchique non spécifique comparativement au placebo.
Les autres items de l’étude ne permettent pas de montrer une différence entre les trois anti-histaminiques testés.
Globalement, les anti-histaminiques modernes améliorent l’hyperréactivité bronchique, le calibre des voies respiratoires de petit calibre, des marqueurs de l’inflammation. Ces constations encouragent les chercheurs de ce domaine à évaluer les effets de ces médications sur les exacerbations asthmatiques.
Cette étude semble bien montrer que l’action anti-histaminique conduit à un rôle plus large anti-inflammatoire bronchique. Il est sûr que nombre de processus inflammatoires impliquent in fine l’histamine. Ce constat semble confirmé par le fait que, quel que soit l’anti-histaminique, l’action anti-histaminique génère une action anti-inflammatoire.
Un argument complémentaire pour le praticien qui sait très bien que la prise en charge de l’asthmatique allergique doit se faire dans la globalité : éviction des allergènes, traitements médicamenteux adaptés et immunothérapie spécifique.
– Dermatose due à l’exposition de moisissures domestiques.
Rockwell. W.J. et coll. Bridgeport.
Les moisissures ont été impliquées dans la rhinite et l’asthme allergique. Les auteurs de cette étude rapportent le cas d’un patient ayant subi une éruption pustuleuse lors d’une exposition à des moisissures d’intérieur.
Il s’agissait du cas d’un garçon de 15 ans souffrant d’érythème et de lésions pustuleuses du visage récurrents et se surinfectant souvent.
Les comptes des moisissures dans l’air de la chambre et de la salle de bain étaient respectivement de 4300 spores/m3 et 2400 spores/m3, majoritairement dus à Aspergillus.
Les tests cutanés étaient positifs pour Alternaria, Aspergillus, Pénicillium et Cladosporium.
Les IgG spécifiques d’Aspergillus fumigatus étaient élevées à 67 ng/ml (normale<29).
Après deux semaines de vie en dehors de son domicile, les lésions cutanées ne réapparaissaient pas pour la première fois depuis 15 ans ! Durant les 7 mois suivant de vie en dehors du domicile, les lésions n’étaient toujours par réapparues. Lors de son retour à domicile, les lésions cutanées sont réapparues dans la semaine.
L’enquête révèlera que la chambre avait été inondée 15 ans auparavant sans que ses conséquences fussent traitées correctement.
Il s’agissait donc d’une dermatite de type contact due à une exposition à l’Aspergillus.
Cette étude montre que l’inondation d’un habitat expose au risque allergénique. Nous le savons pour les acariens et les moisissures domestiques.
Il est suggèré la possibilité d’une dermatose de contact en rapport avec l’Aspergillus. Toutefois, il faut se souvenir que les moisissures ont aussi un rôle toxique. Même si les tests cutanés sont positifs en immédiat pour les moisissures domestiques classiques, même s’il existe des IgG spécifiques, tout cela peut ne correspondre qu’à une sensibilisation.
Il est dommage que les auteurs n’aient pas pratiqué des tests épicutanés avec ces moisissures.
– Asthme professionnel au lactosérum chez une boulangère.
Cartier A. et coll. Montréal, Canada.
Il s’agit du cas d’une femme de 43 ans, tabagique, travaillant depuis 24 ans dans une boulangerie à différentes tâches.
Depuis 3 ans, elle travaillait sur une machine préparant des tartes à l’aide d’une farine contenant du lactosérum (dérivé du lait).
Après un an de ce travail, sont apparus rhino-conjonctivite, dyspnée, toux et sifflements thoraciques, symptômes qui s’amélioraient en dehors du travail.
Les tests cutanés étaient positifs pour les acariens domestiques, chat, blé, seigle et le lactosérum.
Le test de provocation bronchique au lactosérum pur était positif avec une chute du VEMS de 28,5 % et une augmentation des éosinophiles dans les sécrétions bronchiques. Alors que ce même test pratiqué avec de la farine de blé pur entraînait une diminution de VEMS de 22 % mais sans augmentation des éosinophiles.
Il semble que cela soit le premier cas d’asthme professionnel au lactosérum.
A priori l’enquête qui a été menée chez cette patiente semble bien démontrer une allergie au lactosérum. Cette histoire rappelle qu’un allergène alimentaire peut provoquer un asthme par son inhalation et qu’il peut être caché.
Le cas décrit rappelle aussi que l’asthme du boulanger apparaît sur un terrain atopique, la patiente est sensibilisée aux acariens et au chat.
De plus, il semble bien que lactosérum soit en première ligne pour expliquer l’état de la patiente avec sans doute un rôle adjuvant de l’allergie à la farine de blé.
Il faut donc se méfier, chez le boulanger, des allergènes masqués, particulièrement chez les boulangers travaillant en boulangerie industrielle où l’utilisation des additifs est plus fréquente.
– Sensibilisation au latex par un bonnet de bain. Kelso J.M. et coll. San Diégo et Rochester, USA.
Il s’agit d’une femme de 20 ans souffrant d’un rhino-asthme allergique et qui rapportait des accès de prurit touchant d’abord le visage puis se généralisant progressivement à l’ensemble du corps et se complétant d’asthme lors de la pratique de la natation.
Ces réactions apparaissaient uniquement lorsqu’elle portait un bonnet de bain en latex alors qu’elle utilisait un bonnet en silicone sans aucun problème.
Elle n’avait jamais travaillé dans une profession l’exposant au latex, ni été opérée.
Les tests cutanés étaient positifs pour le latex et un échantillon du bonnet en latex alors que le test avec le bonnet en silicone était négatif.
Ce travail montre qu’un bonnet de bain en latex est susceptible de relarguer des particules de latex qui, dans le milieu humide d’utilisation, facilite l’absorption et la réactivité cutanée.
Cette étude est intéressante dans la mesure où la voie de sensibilisation n’est pas classique.
Comme pour les gants en latex, le milieu humide doit probablement jouer un rôle favorisant. Il faut rechercher toutes les sources du latex.
Ici, il aurait été tentant d’évoquer une anaphylaxie à l’effort en rapport avec une allergie alimentaire sur un tel terrain atopique connu.
– Réaction allergique au Play-Doh chez un enfant allergique au blé. Ponda. P.P. and coll. New York, USA.
Aux Etats-Unis, les manufactures alimentaires sont tenues d’identifier la présence des 8 allergènes alimentaires principaux, épices, parfums, colorants et autres additifs.
Les auteurs rapportent le cas d’une petite fille âgée de 2 ans présentant des allergies alimentaires multiples (lait, œuf, arachide et blé) et souffrant d’un asthme intermittent, d’une rhinite et d’une dermatite atopique.
Les IgE spécifiques du blé sont supérieures à 100 kUI/L, la papule pour le test cutané blé est de 14 mm.
Elle présentait une heure après le contact avec Play-Doh, œdème palpébral, érythème et prurit.
Les différents ingrédients constituants Play-Doh ne sont pas indiqués par la compagnie Hasbro sur les paquets de ce produit. Sur le site de cette entreprise, on peut lire : « les enfants atteints d’allergie au gluten du blé peuvent avoir une allergie à ce produit ».
Les personnes atteintes d’allergie au blé doivent être prévenues afin de ne pas manipuler le Play-Doh. Les auteurs de regretter que la loi n’oblige pas à noter la présence de trophallergène dans les produits non ingestables.
Voilà encore un détail que doit enregistrer l’Allergologue de terrain, il y a du blé et sans doute du gluten dans le Play-Doh.
Attention, aux produits non dédiés à l’alimentation mais pouvant contenir des trophallergènes.
– Désensibilisation réussie à la fourmi de feu en association avec l’Omalizumab. Majmundar A. et coll. Dallas, Texas, USA.
Une femme de 32 ans a souffert de réactions systémiques lors de la piqûre par des fourmis de feu (Solenopsis saevissima richteri).
Le test cutané pratiqué avec du corps total de la fourmi de feu était positif 6 semaines plus tard.
Après avoir reçu sans problème une désensibilisation accélérée à la fourmi de feu puis des rappels mensuels durant 8 mois, lors d’une nouvelle piqûre par cette fourmi, elle subissait à nouveau une réaction anaphylactique sévère nécessitant le recours à l’adrénaline.
En essayant d’augmenter les doses de l’immunothérapie, la patiente avait à nouveau une réaction systémique à type d’urticaire et de dyspnée.
La patiente a reçu chaque mois durant 8 mois 150 mg d’anti-IgE Omalizumab, ce qui a été parfaitement toléré.
La patiente a pu subir deux tests de provocation de piqûre de fourmi sans réaction grave.
L’Omalizumab trouve ici sont intérêt pour compléter l’effet de l’immunothérapie spécifique.
Des publications avaient relaté aussi son intérêt pour débuter les désensibilisations à risque, par exemple chez les patients très fortement sensibilisés et asthmatiques. Il s’agissait là de la recherche d’un effet protecteur.
Il serait intéressant d’avoir recours à l’Omalizumab dans le cadre des désensibilisations ultra-rush au venin d’hyménoptères à risque (histoire de réaction anaphylactique sévère, venin d’abeille, asthme, âge...).
– Réanimation cardio-respiratoire chez des patients présentant une réaction anaphylactique sous bêta-bloqueurs. Alam M.M. et coll. Cleveland, Ohio, USA.
Il est usuel de suspendre tout traitement bêta-bloqueur chez les patients devant subir une immunothérapie spécifique du fait du risque anaphylactique.
Dans cette étude rétrospective, les auteurs ont repris les données de la Clinique de Cleveland de 1996 à 2004.
Ainsi, 80 patients, ayant subi une anaphylaxie avec chute tensionnelle nécessitant une réanimation cardio-respiratoire, ont été identifiés et leurs dossiers étudiés.
Parmi ces patients, 33 patients étaient sous bêta-bloqueurs lors de leur réaction anaphylactique.
Les allergènes responsables étaient principalement : médicaments, produits de contraste iodés et latex.
Le temps moyen de réanimation n’était pas différent dans les deux groupes (avec ou sans bêta-bloqueurs), pas de différence significative au niveau de la survie un mois plus tard.
A priori, le fait de ne pas voir s’accroître la morbi-mortalité des patients subissant un choc anaphylactique sous bêta-bloqueurs est rassurant.
Il est évident que cette étude ne nous empêchera pas de suspendre les Bêta-bloquants lors d’une rush désensibilisation, ne serait que d’un point de vue médico-légal.
Il sera nécessaire de faire le point complet concernant cette histoire car souvent les cardiologues rechignent à stopper un traitement parfaitement bien toléré et efficace.
Par contre, l’étude ne dit pas si les patients sous bêta-bloqueurs ont reçu uniquement de l’adrénaline ou aussi du glucagon (alternative chez les patients sous bêta-bloqueurs).
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