Allergies et Asthme dans nos pays : conférence grand public

lundi 2 mai 2005 par Dr Hervé Couteaux, Dr Hervé Masson3806 visites

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Allergies et Asthme dans nos pays : conférence grand public

Allergies et Asthme dans nos pays : conférence grand public

lundi 2 mai 2005, par Dr Hervé Couteaux, Dr Hervé Masson

La conférence grand public "Allergies et Asthme dans nos pays" a donc eu lieu le 30 avril. Le Pr. Daniel Vervloet, le Pr. F.B. Michel et le Pr. C. Combes ont répondu aux attentes des allergiques et intéressés par l’allergie qui s’étaient déplacés. Voici, briévement retracé, leurs propos et les réponses aux questions posées ici et dans la salle.

"Le point de vue du clinicien"

Pr. Daniel Vervloet

Pr. Daniel Vervloet

Le Pr. Vervloet a tout d’abord mis en évidence la révolution dans l’art médical. Il n’est plus question, surtout en matière d’allergie, de prescrire, d’ordonner (prescription-ordonnance) mais plutôt de proposer, de susciter l’adhésion de son malade à ses choix thérapeutiques et de prise en charge.

À la question : "Pourquoi tant de patients souffrent ils d’asthme ou d’allergies", il est apparu qu’il n’existe pas actuellement de réponse univoque.

La théorie hygiéniste qui attribuerait à l’excès de propreté et de stérilisation dans lequel évoluent nos enfants la croissance exponentielle des allergies, n’est pour l’instant pas prouvée définitivement. Il faut quand même noter qu’il existe aussi plus d’allergies dans les villes polluées.

Les visages de l’allergie sont multiples et conduisent à traiter un patient et non les allergiques globalement.

L’orateur est revenu sur les formes masquées de l’allergie : toux chronique, rhinite allergique avec son altération de la qualité de vie et a rappelé que tout n’est pas allergique : on ne retrouve une allergie que dans 20% des urticaires.

Les allergies se manifestent de manière chronique et le degré de gêne est variable selon les patients.

Il est donc fondamental d’écouter le patient, entendre ce qu’il souhaite comme prise en charge et l’éduquer. Chaque malade devrait ainsi disposer d’un plan d’action personnalisé.

Dans cet esprit, la Journée Mondiale de l’Asthme qui a lieu cette année le 3 mai a pour thème : Vivre normalement avec son asthme.

Les traitements dont on dispose sont efficaces et sans danger lorsqu’ils sont bien utilisés. La désensibilisation représente une façon d’atténuer de manière prolongée les symptômes allergiques.


De gauche à droite : Pr D. Vervloet, Mme Christine Rolland, Pr. F.B. Michel

"Le point de vue de l’écrivain"

Le Pr François Bernard Michel nous a aussi présenté une vision historique de la maladie allergique.

Depuis l’invention du mot allergie par le Pr Von Pirquet au début du XXème siècle qui cherchait à immuniser des enfants contre des maladies infectieuses et qui avait remarqué des réactions violentes.

Richet et Portier sont aussi deux grands noms du monde allergologique. Ils ont aussi décrit des mécanismes d’intolérance violents chez un chien qu’ils souhaitaient protéger de venins. Ils sont les inventeurs du mot anaphylaxie.

L’allergique exprime le refus, la sensibilité, l’hypersensibilité et bien des écrivains ont trouvé dans ce dernier trait matière à leur art.

Le Pr Michel de conclure : "Si les allergies sont le fléau du XXIème siécle, ne sont elles pas un signe de notre temps, témoignage mondial du refus d’un certain environnement ?"


Pr C. Combes

Le point de vue de l’évolutionniste

Claude Combes, Perpignan.

La conférence ouverte au public qui clôturait ces journées nationales de la SFAIC a été l’occasion d’entendre divers points de vue sur le thème de l’allergie. J’ai choisi de vous rapporter ce que j’ai retenu de l’exposé du Pr Combes, évolutionniste, qui n’a pas hésité à nous résumer 3 milliards et demi d’années en une quinzaine de minutes pleines d’intérêt et d’originalité.

L’évolution se fait dans le sens d’une adaptation. Pour autant, on peut se demander, paraphrasant le Dr Panglosse, si tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Dans cette optique, l’allergie nous interpelle : loin d’illustrer ces propos de Voltaire, l’allergie nous renvoie
plutôt à Don Quichotte et ses moulins à vent.
En effet l’allergique se bat contre un ennemi imaginaire et l’on peut se demander pourquoi notre organisme réagit à d’inoffensifs grains de pollens, acariens ou poils de chat.

L’évolution et la sélection naturelle seraient-elle en faute ?

L’explication réside dans le mécanisme même de la sélection :
Depuis 3 milliards et demi d’années que les acides nucléiques gardent les plans des êtres vivant, des mutations apparaissent de manière aléatoire au cours des réplications.

Aussitôt que les individus ont été construits sur ces plans, leurs succès reproductifs différents font que les bons grains sont triés... Les bons grains, ce sont les adaptations, au premier rang desquels figure l’adaptation à reconnaître et à combattre « l’autre ».

Il faut remonter au « soi » et au « non soi » :
Les premières formes de vie étaient unicellulaires.

Ce qui a défini la cellule, c’est d’abord la compartimentation ; la cellule s’est entourée d’une membrane, première barrière entre soi et non soi. Et c’est la cellule qui décide ce qui traverse la membrane.

Sa seule problématique est de se multiplier au maximum.

La deuxième étape a été la pluricellularité (rappelons qu’un être humain est composé de 100 000 milliards de cellules).

Pour ce passage à la pluricellularité, il a fallu surmonter une triple difficulté :
Il ne s’agit plus de se multiplier indéfiniment dans une compétition permanente.
Dans la pluricellularité, on remplace la compétition par la collaboration.
Le soi et le non soi doivent changer de frontière : la membrane cellulaire n’est plus la limite.

Ce problème a été résolu par la division du travail : notre organisme est constitué de cellules sexuées et de cellules ouvrières avec des spécialisations multiples, dont l’action a pour résultat d’aider les cellules sexuées à assurer leur fonction de reproduction.

Dans cette collaboration intercellulaire indispensable, c’est le système immunitaire qui a été « chargé » de reconnaître les éléments non coopératifs, soit de l’intérieur (néoplasies), soit de l’extérieur (allergies, infections).

Le système immunitaire ne sait pas à l’avance qu’un méningocoque est dangereux et qu’un poil de chat est inoffensif. Sa seule adaptation est de reconnaître le non soi.

Ce système, grâce à des phénomènes sophistiqués rendus possibles par une grande diversité de molécules et de cellules, est capable de s’adapter à l’imprévisible : le système immunitaire peut reconnaître des molécules qu’il ne rencontrera jamais... C’est la première explication de l’allergie.

On peut essayer d’aller un peu plus loin dans l’explication, en remarquant que depuis qu’il a créé l’agriculture, l’homme se trouve confronté à du non soi auquel il n’était pas confronté auparavant. Or le système immunitaire reconnaît nombre de ces molécules : nous sommes adaptés pour reconnaître ces nouveaux antigènes.

Comment régler le problème de l’allergie ?

Pour que ces réactions au non soi qui sont « inutiles » disparaissent par un mécanisme évolutif, il faudrait d’une part que les individus allergiques aient significativement moins d’enfants que les non allergiques (hypothèse évidemment peu sérieuse) mais il faudrait aussi d’autre part attendre extrêmement longtemps (300 générations d’hommes couvrent à peu près 10 000 ans. Pour une bactérie, il faut une semaine. Ce qui explique que les occasions de mutations ne se rencontrent chez l’homme que tous les 30 ans environ).

Si l’on ajoute que l’environnement moléculaire change autour de nous à grande vitesse, cela explique que les solutions ne peuvent être trouvé que par l’accroissement des connaissances et des interventions thérapeutiques qui en sont l’application.

En matière d’allergologie comme dans bien d’autres domaines de la vie des hommes, le bouillonnement de l’information culturelle vole au secours du bouillonnement, devenu trop timide, de l’information génétique...


Réponses aux questions de la salle et www.allergique.org.

Il est évident que toutes les questions posées sur le site n’ont pas été exposées.

Certaines car elles étaient beaucoup trop personnalisées et en fait correspondait à une consultation allergologique. D’autres, car nous avons manqué de temps.

 L’état Français accorde-t-il des subventions à la recherche dans l’allergie ? Pr. Vervloet

  • Malheureusement, il existe actuellement des moyens efficaces de lutter contre la mort par allergie. Malheureusement car la réponse des gouvernants aux demandes des allergologues de prendre en compte l’atteinte sur la qualité de vie tombe sur un mur.
  • Il n’existe que très peu d’aide de l’état dans ce domaine.

 Pourquoi le Lomudal a-t-il été retiré du marché ? Pr. Vervloet

  • Il existe actuellement des médicaments qui ont apporté un progrès.
  • Le Lomudal se vendant moins, le laboratoire en a arrêté la commercialisation.

 L’allergie est elle héréditaire ? Pr. Vervloet

  • L’allergie est multifactorielle.
  • L’hérédité joue un rôle dans sa survenue mais pas exclusivement.

 Quelles sont les allergies les plus fréquentes de l’enfant et de l’adulte ? Pr. Vervloet

  • Classiquement, chez l’enfant jeune on retrouve plus d’allergies alimentaires et la rhinite et l’asthme allergiques apparaissent après quelques années.
  • Mais ceci est très schématique et on peut voir tout type d’évolution.

 Combien de temps dure une allergie ? Pr. Vervloet

  • L’asthme est une maladie de toute la vie : on nait et on meurt asthmatique mais on a de grandes périodes de sa vie sans aucun symptôme.
  • Le plus souvent l’allergie persiste mais il existe des moyens d’en soigner à long terme les symptômes tels que la désensibilisation.

 Peut on prévoir que quelqu’un sera allergique ? Pr. Vervloet

  • Il existe des facteurs génétiques, une prédisposition familiale à l’allergie mais qui est loin d’être systématique.
  • N’importe qui peut devenir allergique.
  • Pr Combes : Il faut résister à la tentation de réduire la diversité humaine. Le Pr Combes évoque le grand risque qui consisterait à vouloir faire une sélection avant la naissance, in utero, des bébés en voulant éviter certaines maladies dont on connaîtrait les gênes.

 Que penser de l’utilisation plus large des patchs tests ? Pr. Vervloet

  • Il n’apparaît pas indiqué de proposer largement ce type de patchs. Il n’est pas nécessaire d’envisager de campagne de dépistage général.

Nous avons adressé la liste des questions non répondues à nos orateurs qui vont essayer de libérer un peu de temps pour vous répondre

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