SFAIC 2005 - Le congrès du Dr Hervé Couteaux 29 avril

samedi 30 avril 2005 par Dr Hervé Couteaux5457 visites

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SFAIC 2005 - Le congrès du Dr Hervé Couteaux 29 avril

SFAIC 2005 - Le congrès du Dr Hervé Couteaux 29 avril

samedi 30 avril 2005, par Dr Hervé Couteaux

Cette matinée portait sur la conjonctivite allergique ou non. Voici 3 communications pratiques qui permettent de faire le point sur le sujet.

Lunettes de soleil obligatoires

Hyperréactivité conjonctivale : approche diagnostique

- J.-L.Fauquert (Clermont-Ferrand)

 Contexte :
 Le problème se pose devant une conjonctivite persistante pour laquelle on a des signes fonctionnels variés et un examen non spécifique. Le diagnostic d’une allergie est parfois posé, mais le traitement est plus ou moins efficace...
 Or il s’agit d’un problème fréquent : la prévalence de la conjonctivite serait de l’ordre de 25%, et, parmi les facteurs explicatifs de cette augmentation de prévalence, les facteurs environnementaux sont souvent au premier rang.

 HRB-HRN-HRC ? :
 Les notions d’hyperréactivité bronchique (HRB) et nasale (HRN) découlent de l’étude des mécanismes de l’asthme et de la rhinite. Est-il raisonnable de parler d’hyperréactivité conjonctivale (HRC) ?

 L’hyperréactivité muqueuse se définit par une réactivité accrue des muqueuses sous l’effet de différents facteurs.

  • Certains de ces facteurs sont spécifiques, les allergènes.
  • D’autres sont non spécifiques, composés essentiellement de facteurs environnementaux.

 L’HRC n’a fait l’objet que de rares travaux. La synthèse des connaissances en ce domaine nous a paru intéressante à faire.

 Les facteurs d’hyperréactivité muqueuse :
 Les facteurs spécifiques sont les allergènes : D’un côté, les pneumallergènes, le latex et certains allergènes professionnels, de l’autre les trophallergènes qui sont plus rarement en cause en pathologie oculaire.

 Les facteurs non spécifiques sont multiples :

  • Divers contacts,
  • Les variations de température,
  • L’humidité,
  • Les polluants comme le tabac,
  • Les odeurs fortes,
  • L’effort physique,
  • Les virus,
  • L’ingestion de plats chauds et épicés,
  • L’exposition à certains rayonnements UV,
  • L’exposition aux écrans d’ordinateurs ou de TV.

 Conjonctivites « allergiques » et hyperréactivité :
 Les conjonctivites « allergiques », conjonctivite allergénique et hyperréactivité conjonctivale :

  • La notion de conjonctivite allergique est ambiguë.
  • Elles sont classées en 5 groupes selon des critères ophtalmologiques.
  • Le bilan allergénique permet de distinguer les conjonctivites allergéniques, spécifiques d’un ou de plusieurs allergènes et les conjonctivites non spécifiques.
  • Ces différences de classification entretiennent des ambiguïtés sémantiques et des incompréhensions mutuelles.
  • La notion d’HRC permettrait de pallier ces difficultés.

 Selon certains auteurs, cette hyperréactivité serait due à une inflammation minimale persistante, asymptomatique de la muqueuse qui réagit en présence de facteurs déclenchants spécifiques ou non. Cf notamment les travaux de Ciprandi et al. En 1995.

 L’HRC existe-t-elle ?
 Bonini, en 1992, a étudié l’HRC en comparant des sujets sains et des patients atteints de KCV en période intercritique. Il a montré qu’existait bien, chez des patients asymptomatiques porteurs d’une KVC, une HRC, attestée par une rougeur conjonctivale après test de provocation.
 Ciprandi et al. Pensent que leurs résultats démontrent la présence d’une hyperréactivité au chlorhydrate d’histamine dans la conjonctivite allergique uniquement lorsqu’il existe au préalable une inflammation, même minime (c’est-à-dire consécutive au contact avec les acariens).
 Le même auteur a retrouvé une HRC par des tests de provocation aux stimuli hyperosmolaires dans la conjonctivite allergique lorsqu’il existe une inflammation concomitante, même minime.
 Toutefois, il n’y a pas de consensus pour un test qui mettrait en évidence cette HRC.

 Devant quels signes cliniques faut-il penser à une HRC ? :
 Prurit, jusqu’à la douleur oculaire, coté de 0 à 4.
 Troubles sécrétoires :

  • Sécheresse.
  • Larmoiement.
  • Sécrétions.

 A l’examen

  • L’hyperhémie
  • Le chémosis
  • La présence de papilles.
  • La présence de signes palpébraux.

 les signes d’atopie.
 Plus généralement, la persistance dans le temps.
 La résistance aux traitements symptomatiques (antihistaminiques locaux).

 Le bilan tient compte du terrain :
 Dans un contexte d’atopie, on sera rigoureux sur les critères de sensibilisation (Test cutané supérieur à la moitié du témoin positif et RAST supérieur à 0,35 UI/ml en CAP système ou équivalent) et la pertinence de cet allergène devra être solidement établie (TPC).
 En dehors d’un contexte d’atopie, TPC quasi-systématique.
 Dans les formes isolées d’HRC, avec examen ophtalmo négatif, TPC impératif si un allergène a pu être extrait du bilan allergo. Si le résultat est négatif, l’HRC est affirmée par défaut, en l’absence de test diagnostic.

 Sur le plan thérapeutique :
 La notion d’HRC et le concept d’inflammation minimale persistante justifie des mesures d’accompagnement lors de toute pathologie de la surface oculaire.
 Si l’allergie est prouvée, elle doit être considérée comme un phénomène inflammatoire complexe et prolongé. Le traitement doit tendre à contrôler cette inflammation minimale persistante, et donc être prolongé. Les mesures d’éviction sont d’autant plus justifiées.
 L’HRC stimulée par des facteurs non spécifiques doit être prise en compte lors de tout projet thérapeutique. Le recours aux traitements symptomatiques et antihistaminiques ne se limite pas aux conjonctivites allergiques mais devrait s’adresser à l’ensemble des HRC.

Place de la comédie
La ville au soleil

Quand pratiquer un bilan allergologique en pathologie oculaire ?

Serge Doan, Paris.

 Introduction :
 La collaboration ophtalmo-allergo n’est pas optimale.
 L’allergie oculaire est une cause fréquente de consultation ophtalmologique. Elle s’intègre dans plusieurs pathologies oculaires bien distinctes, en étant soit le mécanisme principal, soit un facteur aggravant de celles-ci.
 Le bilan allergologique est un outil important pour l’ophtalmologiste car la clinique et les examens complémentaires ne sont pas toujours ni sensibles ni spécifiques.

 Les arguments en faveur de l’allergie :
 Certains éléments sont évocateurs :

  • Terrain atopique.
  • Chronologie des symptômes.
  • Prurit oculaire.

 Il s’agit en général d’une conjonctivite papillaire.

  • Les papilles sont visibles seulement au niveau de la conjonctive palpébrale, surtout celle de la paupière supérieure, ce qui implique de savoir retourner les paupières.
  • Pour retourner une paupière, on demande au patient de regarder vers le bas, puis on tire les cils vers le bas. On dispose un objet fin et plat sur le pli palpébral et on éverse la paupière autour de cet axe. Le patient ne doit pas fermer les yeux sinon il contracte l’orbiculaire.
  • Les papilles se présentent sous la forme d’élevures, en général petites (on voit les reflets par un éclairage latéral) mais parfois géantes, visibles à l’œil nu.

 Diagnostic différentiel des allergies oculaires :
 Sécheresse oculaire.
 Blépharite.
 Conjonctivite environnementale non allergique (aggravée par la pollution).
 L’eczéma de contact péri-oculaire peut être évident (il impose un bilan de dermato-allergo de contact) mais il est parfois plus difficile à mettre en évidence (la présence de squames sur les paupières est alors un signe de valeur).

 Les « vraies »conjonctivites allergiques, saisonnières et perannuelles :
 La conjonctivite saisonnière est en général de diagnostic facile.

  • Tableau clinique bruyant.
  • Prurit majeur.
  • Papilles de grande taille.
  • Chemosis (œdème de la conjonctive, souvent au niveau du bulbe, pouvant donner un aspect en pneu.
  • Sécrétions présentes.
  • Oedèmes palpébraux.
  • Présence fréquente de rhinite associée.
  • Le bilan allergo confirme le diagnostic (ce bilan n’est pas toujours nécessaires selon certains ophtalmo)

 La conjonctivite persistante, perannuelle :

  • Les signes cliniques sont plus difficiles à apprécier.
  • La valeur du prurit est discutée. On a plutôt une irritation permanente, des symptômes d’œil sec.
  • Le BUT peut être altéré ; c’est un signe important mais non spécifique.
  • A l’examen, on a souvent rien de particulier ou une conjonctivite papillaire fréquemment oedémateuse.
  • Cette conjonctivite prend parfois la forme d’une épisclérite.
  • Les diagnostics différentiels sont nombreux.
  • Le bilan allergo est indispensable.

 La kérato-conjonctivite vernale pose de difficiles problèmes thérapeutiques :
 C’est une pathologie de l’enfant, plutôt un garçon.
 Elle est aggravée par des poussées estivales (rôle des UV, de la chaleur) où les moisissures ne sont pas en cause.
 Elle régresse après la puberté.
 Cliniquement :

  • Photophobie.
  • Larmoiement.
  • Yeux collés le matin.
  • Quand on retourne les paupières : papilles géantes.

 Sa complication majeure est la kératite, souvent ponctuée, superficielle (qui donne la photophobie). L’examen ophtalmo est indispensable.

  • Quand la kératite conflue, elle donne un ulcère vernal. Non traité, ce dernier évolue vers la plaque vernale (dépôts fibrineux) dont le traitement est chirurgical.

 La forme limbique s’observe surtout en Afrique (bourrelet limbique).
 Le rôle de l’allergie, si elle existe (le bilan est négatif dans 50% des cas), est celui d’un facteur aggravant (la présence d’une allergie est un facteur pronostic. La mise en évidence d’un allergène pertinent peut conduire à une désensibilisation dont il faut savoir que les résultats ne seront que partiels. Si les allergènes ne sont pas pertinents, une explication est souvent nécessaire car les parents sont souvent déroutés.
 Son mécanisme est complexe, pas seulement IgE dépendant, ce qui explique que les anti-histaminiques locaux ne soient pas toujours efficaces.
 Intérêt du test de provocation conjonctival (TPC).

 La kérato-conjonctivite atopique :
 C’est l’équivalent de l’eczéma atopique.
 En général il s’agit d’un homme de 30-50 ans, avec un terrain atopique.
 La conjonctivite est sévère, comme une vernale, mais chronique.
 Elle n’est souvent soulagée que par les corticoïdes.
 Il existe parfois un eczéma associé des paupières.
 L’évolution est souvent fibrosante avec des complications cornéennes :

  • Kératite ponctuée superficielle, ulcère.
  • Néo vascularisation
  • Taie opaque.
  • Surinfection herpétique, avec risque de cécité.

 Le diagnostic est facile
 Le bilan allergo objective l’atopie, identifie les facteurs aggravants, mais c’est partiel...De plus, ne pas confondre sensibilisation systémique et oculaire qui sont toutes deux distinctes de l’allergie oculaire. Il faut penser aux diagnostics différentiels et ne pas oublier les problèmes d’hyperréactivité non spécifiques.

  • C’est ainsi que, devant une femme ménopausée, on recherchera un Goujerot-Sjogren.
  • Le problème de la rosacée oculaire est parfois délicat ; on recherchera les flush évocateurs.
  • Ne jamais négliger la iatrogénie des collyres (fenêtre thérapeutique, bilan allergo).

 Au total, on a souvent une interaction entre sécheresse, meibomiite et allergie.

 Conclusion :
 La culture ophtalmologique est indispensable à l’allergologue tout autant que la collaboration ophtalmo-allergo.
 Nous sommes en présence de maladies multifactorielles avec des diagnostics intriqués fréquents et des diagnostics différentiels à faire.


Le test de provocation conjonctival (TPC) : Quand et comment ?

Frédéric Chiambaretta (Clermont-Ferrand)

La réunion de consensus du groupe ophtalmo-allergo qui s’est tenu lors des JPA, en 2004, a permis de jeter les bases de cet examen.

 Principe :
 C’est la provocation d’une réaction allergique conjonctivale.
 S’il est positif,

  • Le TPC affirme l’HRC spécifique.
  • Mais ne fournit pas obligatoirement l’explication de l’ensemble de la physiopathologie de la maladie (cf KCP).

 Indications :
 Recherche fondamentale.
 Recherche pharmacologique.

  • Pour la FDA, le TPC valide les molécules antiallergiques.

 Utilisation du TPC à visée diagnostique, qui confirmera ou infirmera l’implication d’un allergène dans une atteinte oculaire d’origine allergique.

  • Conjonctivite chronique (polysensibilisation fréquente) ou saisonnière (notamment si discordance)
  • KCV

 Suivi d’une désensibilisation.

 Pré-requis du TPC :
 Ophtalmologique :

  • Diagnostic précis (Conjonctivite chronique ou aigue saisonnière, KCV, KC atopique, CGP, très rare, peu d’indication du TPC).
  • Diagnostics différentiels éliminés.

 Légal : consentement écrit du patient (ou des parents de l’enfant)

  • Allergologique :
  • Mise en évidence d’une sensibilisation allergénique (Tests cutanés supérieurs à la moitié du témoin positif, RAST supérieur à 0,35UI/ml en CAP)
  • Implication évidente d’un allergène si les signes cliniques sont évocateurs et les tests cutanés ou les IgE sont négatifs. On testera « large » : pneumallergènes, latex, allergènes professionnels (tests réalistes) et trophallergènes.

 Modalités :
 Trois préalables :

  • Éviction médicamenteuse : 1 semaine pour les anti-H1, 3 semaines pour le ketotifène, 15 jours pour les corticoïdes et 3 jours pour un collyre.
  • Éviction allergénique : Exclure les périodes d’exposition à l’allergène. Il faut un examen ophtalmo normal et un délai d’une semaine entre 2 TPC.
  • Environnement médical : Surveillance médicale (rares urticaires et crises d’asthme) avec un traitement disponible (antihistaminique, bronchodilatateur, corticoïde et antihistaminique local). En l’absence de réaction, surveillance jusqu’à la fin du test et jusqu’à 2 heures après la fin du test en cas de réaction positive, avec une instillation systématique d’antihistaminique. La surveillance se poursuit à domicile, pendant 24 heures avec N° de téléphone du médecin à joindre et une ordonnance systématique (antihistaminique per os et local).

 Protocole :
 Ambulatoire (A) : qui peut être réalisé par un allergo.
 Hospitalier (H) : surtout pour KCV, à la recherche d’un facteur aggravant, avec un examen régulier à la lampe à fente.

 La pratique :
 Extrait lyophilisé, calibré en IR, solvant non phénolé (sérum physio isotonique aux larmes).
 Dilution variable selon les protocoles :

  • à Clermont (A)(0,1 1 10 100), (H)(3,1 6,2 12,5 25 50 100),
  • à Bordeaux (1,2 3,7 11 33 100)

 Le test :

  • Œil gauche : sérum physio, témoin négatif
  • Lampe à fente
  • Instillation toutes les ½ heures d’une goutte de 20 microlitre.
  • Cotation analyse à 15’.

 Les critères :

  • En (A) : le prurit est le seul critère, coté de 0 à 4 (0=absent, 1=faible sensation intermittente de picotement, 2=sensation permanente sans désir de se frotter les yeux, 3= avec désir de se frotter les yeux, 4=insupportable, besoin impérieux de se frotter les yeux). Le seuil retenu est un score strictement supérieur à 2 (c’est-à-dire au moins 3)
  • En (H) : on intègre larmoiement, chémosis et rougeur. Le score retenu est strictement supérieur à 5 (c’est-à-dire au moins 6)

 Conclusion :
 Le TPC est un élément diagnostique utile pouvant déboucher sur des mesures thérapeutiques (désensibilisation et/ou éviction)
 Il encourage la collaboration allergo-ophtalmo.
 Ces protocoles seront précisés/réévalués dans 2 ans.

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