EAACI 2012 : Dr Philippe CARRÉ

jeudi 21 juin 2012 par Dr Philippe Carré2147 visites

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EAACI 2012 : Dr Philippe CARRÉ

EAACI 2012 : Dr Philippe CARRÉ

jeudi 21 juin 2012, par Dr Philippe Carré

Allergie aux venins à travers les âges.

Cet atelier visait à faire le point sur les allergies aux venins chez l’enfant, chez le sujet âgé, et en cas de maladie cardio-vasculaire associée.

Controverses dans la prise en charge de l’allergie aux venins chez l’enfant : Konstantinou, USA.

Il existe peu de données épidémiologiques sur la prévalence ou l’incidence des réactions allergiques graves chez l’enfant ; on sait que :

  • l’histoire naturelle de l’allergie est le plus souvent favorable spontanément
  • les réactions systémiques sont moins sévères, cutanées la plupart du temps
  • leur pronostic est meilleur
  • les décès sont très rares, surtout en cas de mastocytose ou de pathologie cardiaque pré-existante
  • l’immunothérapie n’est généralement pas nécessaire avant l’âge de 16 ans en cas de réaction uniquement cutanée (le risque de réaction systémique est de 10 %, et de réaction systémique grave de 5 %)
  • si elle est faite, elle est plus efficace que chez l’adulte et persiste plusieurs années après son arrêt.
    Le problème qui se pose est celui de la transition de l’enfance à l’âge adulte : que se passera-t-il à ce moment-là ? Peu de réponses sont disponibles.
    Les controverses portent sur :
  • la dose optimale en cas d’immunothérapie ? la dose habituelle recommandée est de 100 µg par injection ; une piqûre d’abeille injecte de 50 à 140 µg et une piqûre de guêpe de 2 à 17 µg ; plusieurs auteurs (Reisman, Golden) ont montré que les rappels avec une dose de 50 µg étaient à peu près aussi efficaces ; les doses plus faibles apportent une quantité moins grande de produit, ce qui a l’avantage d’améliorer la tolérance locale, de diminuer les effets secondaires, et donc d’améliorer la compliance
  • la durée : 3 ou 5 ans ? la littérature montre que la protection est la même avec les deux durées, au moins dans l’année qui suit l’arrêt du traitement.

Des études complémentaires et des recommandations claires sont en attente.

En ce qui concerne le risque chez le sujet âgé, Guenova (Allemagne) a montré que dans la littérature l’âge était un facteur de risque de sévérité des réactions allergiques, et que la sévérité des réactions augmentait avec le taux de tryptase basal.

Mais le problème est que la tryptase basale est souvent plus élevée chez le sujet âgé et représente un facteur confondant ; en dehors des cas de mastocytose (7.5 % des cas), d’autres situations fréquentes chez le sujet âgé peuvent s’accompagner d’une augmentation de la tryptase : les leucémies myélocytaires, les syndromes myélodysplasiques, le syndrome hyperéosinophile, l’insuffisance rénale terminale.

Enfin est revenu à Müller (Suisse) d’aborder le problème des allergies aux venins associées à l’existence d’une maladie cardio-vasculaire.

Une étude en Suisse a recensé 29 après piqûres d’hyménoptères entre 1978 et 1987 (âge moyen 61 ans) ; 12 patients ont été autopsiés, dont 11 avaient une pathologie cardiaque (cardiomyopathie, fibrose myocardique…).

On sait que le nombre et la densité des mastocytes cardiaques sont augmentés dans les maladies ischémiques et les cardiopathies dilatées, ce qui pourrait expliquer des taux de tryptase plus élevés et des réactions plus sévères. On sait aussi que l’anaphylaxie augmente le risque d’infarctus en cas d’athérosclérose, et que classiquement les médicaments souvent utilisés chez ces patients (les béta-bloqueurs BB, et à un moindre degré les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine IECA) peuvent aggraver les réactions cliniques.

Pour ce qui est des BB, ils interfèrent avec les mécanismes neuro-humoraux du système de la cyclo-oxygénase, augmentant la synthèse et la libération des médiateurs cellulaires, et bloquent l’effet des catécholamines endogènes ; ils sont donc souvent contre-indiqués chez ces patients allergiques aux venins, mais l’évidence clinique de cette attitude n’est pas forte ; dans la seule étude prospective réalisée en 1990 par Hepner, sur 3178 patients dont 68 sous BB, la prévalence des réactions systémiques était de 4.8 % dans le groupe sans BB et de 1.5 % dans le groupe BB ; dans une étude rétrospective en 2005, Müller a montré dans un groupe de 1389 patients, dont 10.2 % avaient une maladie cardiaque et 3.2 % étaient sous BB, que les effets secondaires de l’immunothérapie et les réactions après repiqûres étaient moins importants chez ceux sous BB.

Les choses sont moins claires pour les IECA, mais plusieurs publications ont rapporté des anaphylaxies graves sous traitement ; le polymorphisme d’un gène dans le système rénine-angiotensine pourrait être impliqué.

En conclusion :

  • le risque d’anaphylaxie fatale ou d’infarctus après piqûre d’hyménoptère est augmenté en cas de maladie cardio-vasculaire
  • les réactions anaphylactiques chez ces patients doivent donc être prises en charge en unité de soins intensifs cardiologiques, avec une surveillance prolongée
  • l’incidence des réactions anaphylactiques sous BB ou IECA n’est probablement pas plus importante, mais les réactions sont plus sévères
  • la place de l’immunothérapie et des traitements à visée cardiaque doit être discutée avec le patient, en accord avec son cardiologue ; les BB peuvent être habituellement remplacés par une autre classe dans l’HTA, mais ils sont un facteur de bon pronostic cardiaque dans la pathologie coronarienne et l’insuffisance cardiaque (évidence de niveau A) où leur maintien est le plus souvent indiqué. Certains proposent parfois d’interrompre les BB 24 à 48 h avant les injections de désensibilisation, mais Müller pense que ce n’est pas une bonne stratégie en terme de protection cardiaque.

Il serait intéressant de réaliser une controverse sur ce sujet avec nos collègues cardiologues, et de discuter la question de savoir chez quels patients (à partir de quel âge et avec quels facteurs de risque ?) il faudrait envisager un bilan cardiologique systématique avant de débuter une immunothérapie aux venins ; chez des patients qui pourraient par ailleurs être candidats à recevoir un jour de l’adrénaline, ce qui représente un facteur de risque cardiaque supplémentaire.


Réactivité et plasticité des mastocytes.

Ce symposium a fait le point sur quelques données récentes concernant les phénotypes des mastocytes et leur distribution anatomique dans l’organisme.

Un phénotype mastocytaire hyperactif : D. Metcalfe, USA.

Il existe différents types de mastocytose, qui sont liés à un risque cumulatif d’anaphylaxie variable :

  • mastocytose cutanée, avec un risque de 13 %
  • mastocytose systémique indolente, avec un risque de 49 %
  • mastocytose systémique, avec un risque qui reste mal connu.

Des travaux ont montré qu’il existe, dans une sous-population de patients ayant une anaphylaxie idiopathique, une prolifération mastocytaire avec des marqueurs de clonalité, avec un risque d’expansion clonale et d’évolution vers une mastocytose systémique.

Une hypothèse a été émise qu’existeraient des mutations et un polymorphisme dans l’expression des mastocytes qui définissent un phénotype dit « hyper-répondeur » ; deux récepteurs mastocytaires seraient en particulier impliqués dans cette différenciation (NTAL, GPCR) ; il serait possible de distinguer les sujets répondeurs des sujets non répondeurs par l’utilisation d’un agoniste de la protéine GPCR (PGE2).

Les répondeurs ont une augmentation du nombre de mastocytes dans le sang, une dégranulation plus importante par rapport aux autres sujets et une modification au niveau des gènes des mastocytes (dans les cartographies des gènes présents à la surface des mastocytes, 292 ont une concentration multipliée par 5, 20 sont surexprimés, et 9 sont connus pour altérer la fonction des mastocytes.

Des questions restent non résolues :

  • quelle est la prévalence des mutations du système KIT dans les maladies allergiques ?
  • quelle est la part précise du phénotype mastocytaire hyper-répondeur ?
  • est-il possible d’activer le compartiment mastocytaire à partir d’un traitement ? (ce qui pourrait expliquer certaines anaphylaxies d’origine médicamenteuse).

Hétérogénéité des mastocytes pulmonaires chez le sujet sain et malade : J. Erjefält, Suède.

L’hétérogénéité des mastocytes permet de comprendre l’existence de phénotypes différents à partir de caractéristiques distinctes de contenu moléculaire, de structure ou de fonction des cellules.

Il existe une hétérogénéité mastocytaire fonctionnelle, avec des sous-types différents de mastocytes spécifiques d’organes à partir des progéniteurs médullaires communs : c’est ce qu’on appelle la plasticité des mastocytes.

Cette hétérogénéité est-elle présente dans le poumon ? Des études ont été réalisées à partir de biopsies bronchiques et transbronchiques : la densité mastocytaire augmente progressivement des voies aériennes centrales vers les petites voies aériennes puis les alvéoles pulmonaires ; il existe des sous-types différents dans chaque compartiment anatomique.

Les mastocytes alvéolaires ont une expression moléculaire différente, avec une faible expression des récepteurs à IgE ; mais peu d’études ont été réalisées car ils sont peu présents dans la lumière alvéolaire : quel est leur rôle physiologique spécifique ? Ont-ils un rôle pathogène ou protecteur ? Jouent-ils un rôle clef dans la régulation immune périphérique ? Quels sont leurs facteurs d’activation ?

On sait que les mastocytes sont altérés dans la fibrose pulmonaire, la mucoviscidose et la BPCO ; qu’en est-il dans l’asthme ? On sait qu’ils acquièrent un phénotype de type IgE-récepteur chez les patients ayant un asthme non contrôlé ; le nombre des cellules est inchangé mais il existe une augmentation importante de l’expression des mastocytes de type IgE-récepteur dans les alvéoles des patients, ce qui permet aux mastocytes de lier les IgE ; cette augmentation n’est pas liée à l’atopie seule. Ces mastocytes spécifiques pourraient-ils être un nouveau marqueur de l’asthme allergique ? On sait qu’ils sont associés à une inflammation alvéolaire de type TH2.

On voit que la place de ces vieilles cellules, qui est passée au second plan après les éosinophiles dans l’asthme, est en train de renaître à la lumière des travaux récents, et que leur plasticité est une caractéristique importante pour comprendre certains mécanismes physiopathologiques de l’asthme.

Anaphylaxie induite par les médicaments et les venins dans la mastocytose.

Les rapports entre anaphylaxie et mastocytose ne sont pas sans poser des problèmes cliniques et thérapeutiques aux allergologues. Ce symposium visait à en faire le point.

Mastocytose et anaphylaxie induite par les médicaments : (Bonadonna, Italie).

La mastocytose est caractérisée par l’accumulation de mastocytes dans un ou plusieurs organes ; la classification de l’OMS de 2001 distingue les mastocytoses cutanées (80 à 90 % des cas) représentées 2 fois sur 3 par l’urticaire pigmentaire, et les mastocytoses systémiques qu’on sépare en plusieurs tableaux différents :

  • la mastocytose indolente (74 % des cas)
  • la mastocytose avec maladie clonale hématologique (14 % des cas)
  • la mastocytose agressive (10 % des cas)
  • la leucémie mastocytaire (1 % des cas).

Dans l’étude faite en Italie, les médicaments représentaient 18 % des cas (AINS, produits de contraste, amoxicilline, anesthésiques) ; les molécules les mieux tolérées étaient pour les AINS le nimésulide, et pour les antibiotiques l’azithromycine. Il s’agissait surtout de mastocytoses non clonales, par opposition aux mastocytoses clonales qui sont vues plus souvent dans les anaphylaxies aux hyménoptères. Mais on connaît peu de choses sur la prévalence des anomalies mastocytaires clonales chez les sujets faisant une réaction systémique sévère aux médicaments.

L’auteure a présenté les résultats d’une étude comparant des patients ayant présenté des anaphylaxies à des médicaments (n=86), à des aliments (n=51) et aux hyménoptères (n=244) ; tous les patients avaient un dosage de tryptase au moins 2 semaines après la réaction, et en cas de taux supérieur à 11.4 mg/l une évaluation dermatologique et hématologique (étude médullaire et recherche d’une mutation C-KIT) ;

l’étude a montré pour le groupe des anaphylaxies aux médicaments que :

  • il s’agissait en majorité de femmes par rapport aux 2 autres groupes
  • les réactions cliniques étaient dans leur grande majorité plus sévères (grade IV)
  • la tryptase était élevée dans 8.1 % des cas (contre 13.9 % pour les hyménoptères et 3.9 % pour les aliments)
  • une clonalité mastocytaire a été mise en évidence dans 1.2 % des cas (contre 11.1 % pour les hyménoptères et 2 % pour les aliments).

Pour les patients ayant une mastocytose et devant prendre des médicaments, l’auteure recommande avant l’utilisation de PCI une prémédication par corticoïdes (qui diminuent la libération des médiateurs), antiH1 et antiH2 ; d’éviter les AINS et de favoriser le paracétamol après réalisation d’un TPO ; d’éviter la morphine et les solutions colloïdes. Il existe un centre de référence sur les mastocytoses dans beaucoup de pays (dont la France) à qui on peut s’adresser si besoin.

Anaphylaxie aux hyménoptères chez les patients ayant un taux de tryptase basale élevé : Helbling, Suisse.

Il est rappelé que le taux normal supérieur de tryptase retenu est de 11.4 µg/l, car il correspond au percentile à 95 % de la population générale.

En ce qui concerne l’épidémiologie :

  • 50 % des patients ayant une mastocytose feront une anaphylaxie
  • 30 % auront une allergie aux venins en cas de piqûre
  • l’association mastocytose + allergie aux venins est plus forte que pour les aliments ou les médicaments
  • la prévalence de la mastocytose chez les patients ayant une allergie aux venins va de 0.9 à 7.9 %
  • dans 8 études regroupant plus de 8000 patients allergiques aux venins, la prévalence de l’augmentation de la tryptase va de 5.8 à 12 %
  • la sévérité des réactions est plus grande (82 %) en cas de tryptase élevée, avec des réactions systémiques sévères répétées, alors que l’urticaire est moins fréquente (26 % contre 76 % en cas de taux normal)
  • en cas de mastocytose, le risque potentiel de réaction systémique sévère existe, quel que soit le taux de tryptase ; les patients ont un risque plus élevé de réaction sévère pendant l’immunothérapie. Le risque augmente avec le taux de base, et il est plus grand pour les venins de vespidés.

L’absence de signes cutanés n’élimine pas la mastocytose ; mais si une biopsie montre des signes de mastocytose, l’immunothérapie doit être poursuivie à vie.

Conclusions de l’auteure :

  • il existe une association significative entre les taux élevés de tryptase basale et la sévérité des réactions aux hyménoptères
  • la détermination du taux de tryptase basale doit être fait de façon systématique chez tous les patients ayant une allergie systémique grave aux venins
  • l’examen dermatologique doit être fait systématiquement si le taux de tryptase est élevé
  • une trousse d’urgence doit être prescrite aux patients ayant fait une réaction locale étendue après piqûre et qui ont un taux de tryptase basale élevé
  • une immunothérapie doit être proposée à tous les patients ayant fait une réaction systémique, quelle qu’en soit la gravité, en cas de tryptase élevée
  • ces patients ont un risque plus grand d’effets secondaires en cours d’immunothérapie
  • avant de décider de l’arrêt de l’immunothérapie, même si les critères d’arrêt habituel sont réunis, il faut discuter avec le patient la nécessité d’un traitement à vie, lui donner une information correcte sur l’augmentation des risques, les recommandations, les traitements d’urgence, et notifier clairement la décision dans le dossier du patient.

Aspects sécuritaires de l’anesthésie générale dans la mastocytose : Garvey, Danemark.

L’incidence des réactions anaphylactiques en anesthésie chez les patients présentant une mastocytose est mal connue ; une revue sur Pubmed faite en 2012 par l’auteur a trouvé une prévalence d’anaphylaxie de 6 à 9 % chez l’enfant, et chez l’adulte de 22 à 49 %. Mais en pratique moins de réactions semblent actuellement signalées par les anesthésistes, ce qui pourrait être dû à l’amélioration des techniques anesthésiques et à la meilleure attention portée dans la prise en charge des facteurs mécaniques qui peuvent favoriser les réactions chez ces patients (prévention du stress opératoire, température adaptée dans le bloc…).

La prévention de l’anaphylaxie en cas de mastocytose connue passe par :

  • la poursuite du traitement habituel de la maladie
  • une prémédication : antiH1 et antiH2, corticoïdes, anxiolytiques
  • éviter les facteurs mécaniques déclencheurs
  • diminuer si possible le nombre de médicaments de l’anesthésie, et favoriser les techniques inhalées ; mais il n’y a pas de raison à priori de faire l’éviction de médicaments, sauf en cas de réaction préalable où les patients auront eu le bilan allergologique habituel.

Le traitement de l’anaphylaxie per-opératoire repose sur les mêmes principes qu’en l’absence de mastocytose.

Les données les plus intéressantes de ce symposium concernaient les recommandations chez les patients allergiques aux hyménoptères.


Syndromes auto-inflammatoires.

Ce symposium a fait le point sur ces pathologies encore mal connues mais dont le diagnostic et la prise en charge sont maintenant mieux appréhendés.

Comment ne pas manquer un diagnostic de syndrome auto-inflammatoire : I. Touitou, Montpellier

Les maladies inflammatoires entraînent des désordres immunologiques qui peuvent être séparés :

  • en maladies auto-immunes, bien connues, qui font intervenir l’immunité adaptative
  • et en maladies auto-inflammatoires, qui font intervenir l’immunité innée, dont le concept s’est développé depuis la fin des années 90
    • il s’agit de pathologies multifactorielles, dans lesquelles on trouve la maladie de Crohn, la maladie de Behcet, le Wegener, et d’autres pathologies moins connues comme les fièvres récurrentes (la fièvre familiale méditerranéenne…).
    • Le rôle de l’immunité innée dans ces pathologies est de favoriser une protection immédiate contre les signaux de danger liés à des anomalies des mécanismes cellulaires du contrôle inflammatoire (au niveau par exemple du NFkB, de l’IL1b…).
    • Ces maladies peuvent correspondre à des pathologies liées à des gènes mal connus (Behcet par exemple), à des granulomatoses (Crohn par exemple), à des maladies infectieuses, à des fièvres récurrentes (fièvre familiale méditerranéenne : FFM), à des anomalies de la reproduction (môle hydatiforme) ; classification non exhaustive.

Caractéristiques générales des fièvres récurrentes :

  • absence de tout symptôme entre les accès fébriles
  • élimination d’une autre cause (infectieuse, auto-immune, carcinologique…)
  • association à d’autres symptômes variés (abdominaux, articulaires, cutanés…)
  • critères d’inflammation pendant les accès (CRP…)
  • évolution possible vers une amylose rénale.
  • Il existe une prépondérance en fonction de certaines populations : la FFM atteint essentiellement les populations méditerranéennes : surtout arméniennes, turques, arabes et juives sépharades ; mais aussi italiennes, espagnoles et grecques ; voire parfois des populations non méditerranéennes (japonaises, anglosaxonnes…). Il en est de même pour d’autres fièvres (CAPS : syndrome périodique lié à la cryopyrine, surtout en Europe et aux USA ; TRAPS : syndrome périodique associé au récepteur TNF, surtout chez les Irlandais et les Ecossais).

Pour ne pas rater le diagnostic de FMF, elle se caractérise par :

  • une fièvre quasi constante, entre 38 et 40°
  • des crises abdominales (patients souvent multi-opérés pour des suspicions de péritonite)
  • des monoarthrites des extrémités inférieures
  • des pseudo-erysipèles
  • une splénomégalie
  • des atteintes des séreuses (plèvre, péricarde, méninges)
  • une durée de 24 à 48h
  • une amylose de type AA
  • l’efficacité de la colchicine.

Chaque « fièvre récurrente » a ses caractéristiques propres, les signes communs étant la fièvre, les douleurs abdominales, les signes articulaires et les signes cutanés ; il s’y ajoute par exemple dans le TRAPS un œdème péri-orbital, un érythème, des douleurs musculaires.

Les pathologies auto-inflammatoires ont souvent un support héréditaire, et il existe en France un centre de référence infantile et un centre de référence adulte (à Montpellier, Professeur Touitou), qui recueille les données des patients présentant au moins 3 épisodes inexpliqués avec CRP élevée.
La maladie de Behcet doit être suspectée devant :

  • une aphtose, avec des ulcères buccaux ou génitaux
  • des lésions cutanées (pseudo-érythème noueux, lésions papulo-pustuleuses…)
  • d’autres atteintes : oculaire (panuvéite, vascularite rétinienne), articulaire, neurologique, pulmonaire, gastro-intestinale, génito-urinaire.

Elle est associée à une composante génétique comme l’attestent la prévalence élevée dans la population méditerranéenne, la prévalence élevée d’HLAB51, l’existence de cas familiaux ; des gènes candidats sont identifiés (MEFV, TNFRSF1A).

En résumé, l’auteure rappelle les principaux messages à retenir concernant le diagnostic de syndrome auto-inflammatoire :

  • la suspicion clinique doit être évoquée devant des épisodes récurrents de fièvre avec signes systémiques d’inflammation, des signes biologiques d’inflammation, après avoir éliminé les autres causes possibles
  • la confirmation génétique est possible dans les maladies monogéniques si le gène est connu, avec l’aide des centres de compétence.

Paul Brogan (Royaume Uni) a précisé les données de la traque génétique concernant l’auto-inflammation :
 5 maladies ont été identifiées comme monogéniques (FFM, CAPS, TRAPS, HIDS : hyperIgD syndrome, et syndrome de Blau)
 1 est une maladie sans support génétique actuel : le syndrome PFAPA (fièvre périodique, aphtes ulcérés, pharyngite, adénite cervicale)
 le problème est que beaucoup de familles ou d’enfants ont une maladie auto-inflammatoire sévère mais ne rentrent dans aucun cadre connu de maladie auto-inflammatoire, et n’ont pas de mutation mise en évidence
 il est important de trouver de nouveaux gènes d’auto-inflammation, de façon à comprendre la pathogénie de ces maladies qui permettra la mise au point de traitements ciblés, à donner un conseil génétique aux autres membres de la famille, à mieux comprendre le système immunitaire et son rôle dans l’inflammation et à identifier de nouvelles cibles thérapeutiques

En résumé :
 le diagnostic de maladie auto-inflammatoire repose sur un faisceau de suspicion
 les études génétiques sont importantes, même si les gènes actuellement identifiés ne représentent que la partie visible de l’iceberg
 les techniques de cartographie génétique et de séquençage exomique (et bientôt les micropuces) vont permettre le diagnostic de nouvelles maladies auto-inflammatoires monogéniques ou digéniques.

Une révolution thérapeutique dans les syndromes auto-inflammatoires : (Simon, Pays-Bas).

Si la description clinique des premiers cas de syndromes auto-inflammatoires a débuté vers le début des années 1980, et les études génétiques vers la fin des années 1990, les avancées thérapeutiques datent du début des années 2000.

Avant l’ère de la colchicine, le pronostic était mauvais : dans une étude portant sur 470 patients : 125 (26.5%) développaient une amylose, avec ensuite un taux de mortalité élevé.

Alors que dans une étude de 587 patients qui ont été traités par colchicine, et dont 61.4% l’utilisaient régulièrement, 37 patients (6.3%) ont développé une amylose, 14 sont décédés (dont 7 d’une amylose) ce qui est une mortalité similaire à la mortalité de la population générale.

La réponse thérapeutique à la Colchicine est variable en fonction du syndrome :

  • dans la FFM, la réponse est de 95%
  • alors qu’elle est moins importante par exemple dans le CAPS et le HIDS, et intermédiaire dans le TRAPS

D’autres applications thérapeutiques ont été développées, à partir d’inhibiteurs de cytokines :

  • inhibiteurs d’IL1 : Anakinra, Canakinumab, Rilonacept
  • inhibiteurs d’IL6 : Tocilizumab, Sirukumab
  • inhibiteurs de TNF : Etanercept, Infliximab, Adalimumab, Certolizumab, Golimumab…

Des traitements par Anaknira chez des patients avec HIDS se sont déjà montrés très efficaces pour la réduction des attaques de la maladie. De même dans les déficits en antagoniste du récepteur IL1 (DIRA).

Les efforts dans le futur porteront sur l’amélioration de la biodisponibilité des agents biologiques thérapeutiques, la prise en compte des effets à long terme, le développement de recommandations, de protocoles de traitement et d’indices d’activité de ces pathologies. Mais d’ores et déjà des traitements anti-IL1 ont prouvé leur efficacité dans beaucoup de pathologies auto-inflammatoires, ce qui laisse le champ ouvert à d’autres traitements anti-cytokiniques.

Ce symposium était intéressant dans la mesure où il faisait le point sur des pathologies, certes rares, qu’on connaît mal, et dont les critères diagnostiques méritent d’être connus puisque des traitements spécifiques sont disponibles.


Phénotypes et prise en charge de l’asthme sévère.

Sujet ô combien d’actualité, tant les discussions et les publications sont fréquentes sur ce sujet…

Marqueurs biologiques et types d’asthme sévère Sally Wenzel, Pittsburgh.

Il existe de nombreux phénotypes différents d’asthme sévère : exacerbateurs ou non, plus ou moins obstructifs, inflammation de type TH2 prédominante ou absente, à début précoce ou retardé, associé ou non à une obésité…

L’asthme à prédominance TH2 se définit par l’existence d’une atopie ou la présence d’IgE (probablement le plus mauvais indicateur), un début précoce, une éosinophilie sanguine ou pulmonaire, la présence de NO dans l’air exhalé, des profils associés à des biomarqueurs géniques.

Par ailleurs :

  • Des approches épidémiologiques confirment l’importance de l’âge de début de l’asthme chez les asthmatiques sévères ; l’étude SARP, analysant 628 variables, a identifié 5 clusters différents de critères : les plus performants étaient le VEMS pré et post-bronchodilatateur, et l’âge de début de l’asthme, alors que l’atopie n’était pas discriminante
  • L’approche moléculaire confirme que des biomarqueurs de type TH2 permettent d’identifier le phénotype TH2 : 3 gènes exprimés in vitro sur les cellules épithéliales en réponse à une stimulation par l’IL13 permettent de définir un « cluster » d’asthme modéré ayant plus d’atopie, d’éosinophiles et d’hyperréactivité bronchique ; ce tableau est associé à la présence dans les cellules épithéliales d’un marqueur particulier : la périostine
  • la présence d’un asthme de type TH2 est associée à une réponse forte à la corticothérapie inhalée, ce qui n’est pas le cas pour des asthmes non TH2.

Cette approche moléculaire est importante dans l’analyse des études cliniques :

  • une étude publiée en 2011 dans le NEJM avait étudié l’effet d’un traitement par IL13 contre placebo chez 200 asthmatiques ayant un asthme modéré à sévère ;
  • l’IL13 n’améliorait que de façon modeste le VEMS ;
  • une analyse secondaire en fonction du phénotype TH2 des patients a montré que le sous-groupe des patients ayant des TH2 élevés était associé à des taux élevés de périostine dans les cellules épithéliales et à l’augmentation la plus grande du VEMS sous traitement.
  • Des études avec le FENO ont montré aussi qu’existaient des clusters de réponse différents, certains étant associés par exemple à des éosinophilies importantes et un recours plus grand aux stéroïdes oraux.

Un phénotype particulier est représenté par l’asthme de l’adulte hyperéosinophilique à début précoce :

  • asthme sévère malgré des doses élevées de corticoïdes inhalés, requérant souvent des cures de stéroïdes oraux
  • il est souvent associé à une sinusite, parfois à une hypersensibilité à l’aspirine, et peut répondre aux inhibiteurs de la lipo-oxygénase
  • la relation à une expression TH2 est moins claire : les patients sont moins souvent allergiques malgré des taux d’IgE variables, et ils ont des taux très élevés de FENO.

Les études avec l’IL13 confirment l’approche TH2 comme une caractéristique particulière : des études antérieures n’avaient pas montré d’efficacité de l’IL13, mais une approche ciblée des asthmes éosinophiliques avait montré une réduction de 40% des exacerbations dans ce groupe particulier ; la plupart des patients avaient un phénotype d’asthme éosinophilique à début tardif.

L’asthme à expression TH2 faible :

  • est beaucoup moins bien défini
  • commence en règle à l’âge adulte
  • peut être associé souvent à une obésité, un terrain infectieux, une neutrophilie, un tabagisme…
  • et a la plupart du temps une mauvaise réponse aux corticoïdes.

Les études chez les asthmatiques obèses suggèrent qu’existe un phénotype particulier caractérisé par un asthme à début tardif et une expression TH2 faible.

En ce qui concerne l’asthme neutrophilique :

  • il est associé de façon importante à une utilisation plus grande de corticoïdes et un VEMS plus bas
  • l’étude SARP a montré que le cluster des patients les plus sévères, ayant un asthme peu réversible et à début tardif était aussi celui qui était associé à une neutrophilie plus grande.

Wenzel a donc montré l’importance des différents phénotypes d’asthme, qui correspondent non seulement à des tableaux cliniques d’expression différente, mais sont associés à des réponses thérapeutiques différentes.

L’approche moléculaire permet de comprendre certaines caractéristiques qui les distinguent. Il est clair aujourd’hui que les biomarqueurs de l’asthme, et notamment l’asthme sévère, qui sont en développement permettront seuls de cibler les différents phénotypes et de proposer aux patients des prises en charge spécifiques.

Tout le problème restant celui de la disponibilité de ces marqueurs en pratique clinique.

Prise en charge de l’asthme sévère : (Charlotte Ulrich, Danemark) ;

Dans cet exposé moins novateur, l’auteure a rappelé qu’environ 15% des asthmatiques étaient de type sévère en Europe.

La sévérité est habituellement définie par l’existence de symptômes persistants malgré des corticoïdes inhalés à forte dose, mais il faut certainement distinguer les « asthmes sévères » des « asthmes difficiles à contrôler ».

Ce qui nécessite de rechercher les facteurs confondants de mauvais contrôle :

  • diagnostiquer tout ce qui n’est pas de l’asthme : dilatations bronchiques, BPCO, dysfonction des cordes vocales, hyperventilation, RGO…
  • vérifier l’adhérence thérapeutique : elle dépasse rarement 50% dans les études
  • de prendre en compte les phénotypes particuliers sur lesquels une action efficace peut être appliquée : obésité et tabagisme en particulier, mais aussi exposition professionnelle, exposition environnementale à domicile, pollution… Des associations moins évidentes ont été rapportées, comme le déficit en Vitamine D associé aux asthmes sévères.

Des études ont montré que des programmes d’intervention multiple auprès des patients permettaient d’améliorer le contrôle de la maladie.

Reste le problème de l’évaluation de l’inflammation bronchique, pour laquelle existent plusieurs techniques de recherche :

  • invasives : bronchoscopie avec lavage alvéolaire
  • semi-invasives : marqueurs inflammatoires dans les expectorations, mesure du taux d’éosinophiles et de neutrophiles dans le sang, marqueurs protéomiques plasmatiques
  • non invasives : mesure de l’hyperréactivité bronchique, mesure du tax de NO dans l’air exhalé, dosage des leucotriènes E4 dans les urines.

Pour et contre : le traitement des voies aériennes distales est très important dans l’asthme.

Dans cette confrontation sur un pseudo-ring se sont affrontés pacifiquement notre collègue Antoine Magnan de Nantes et Thomas Platts-Mills des USA. Le vote préalable des personnes présentes à cette confrontation était nettement en faveur du traitement.

Antoine Magnan a défendu la thèse en faveur du traitement sur un certain nombre d’arguments :

  • Traiter est important car les petites voies aériennes sont le site majeur de l’inflammation des voies aériennes, un mauvais contrôle de l’asthme est associé une atteinte prédominante des petites voies aériennes, et l’amélioration globale de l’asthme passe donc par le traitement des petites bronches
  • Les petites voies aériennes sont petites certes… mais aussi complètes, ce qui veut dire que leur structure associe un épithélium mais aussi des fibres musculaires lisses
  • Des études anatomiques ont montré qu’il existe une inflammation cellulaire qui atteint aussi les petites voies aériennes, et qui est associée à une surexpression des cellules TH2, et qu’il existe une infiltration mastocytaire locale
  • Les petites voies aériennes sont le site majeur de l’inflammation dans l’asthme : la présence d’éosinophiles , de cellules T et de mastocytes dans les petites bronches est constante, même dans les asthmes très sévères voire mortels
  • Le contrôle de l’atteinte des petites voies aériennes est un indice corrélé au contrôle de l’asthme : cette atteinte est reflétée par les hétérogénéités de ventilation pulmonaire, et celle-ci est le seul paramètre corrélé au contrôle de l’asthme et prédictif d’un changement du contrôle de l’asthme (un papier en cours de publication dans le JACI conclut qu’une anomalie de la fonction des petites voies aériennes est un déterminant important de la réponse symptomatique lors de la titration d’un traitement corticoïde inhalé).
  • En conclusion :
    • les petites voies aériennes (< 2 mm) représentent le site majeur de l’inflammation dans l’asthme
    • l’atteinte des petites voies aériennes est l’indice le plus fort qui est relié au contrôle de l’asthme
    • l’atteinte des petites voies aériennes pourrait être utilisée pour la titration du traitement anti-asthmatique
    • le traitement des petites voies aériennes est donc fondamental dans la prise en charge de l’asthme.

Thomas Platts-Mills avait fort à faire pour défendre la position contraire.

Il a axé son exposé sur les questions suivantes :

  • peut-on traiter sélectivement les petites voies aériennes ? Non
  • où se situe l’obstruction dans les bronches ? Partout
  • de quelle taille sont les particules allergéniques ? De grande taille
  • les traitements pénètrent-ils jusque dans les petites voies aériennes ? Pas toujours

Ses arguments sont les suivants :

  • l’inflammation et le changement de calibre des voies aériennes sont distribués tout au long des voies aériennes, y compris les voies aériennes de moyen calibre
  • il n’existe pas de traitement des voies aériennes qui ne peut être actif sans traiter les grosses voies aériennes
  • les particules allergéniques importantes ont une taille qui ne leur permet pas d’atteindre les petites voies aériennes.

En conclusion, il ne nie pas que traiter les petites voies aériennes puisse avoir un impact global sur l’évolution de l’asthme, mais pour lui ce traitement n’est pas essentiel ni le principal : il n’a donc pas une importance extrême dans la prise en charge des patients.

Après quelques échanges croisés et amicaux au cours de la discussion, un nouveau sondage a été réalisé auprès des participants de façon à avoir l’évolution de leur conviction sur le sujet : manifestement Antoine Magnan a été convaincant car le vote montre une stabilité des opinions.

On continuera donc à traiter les petites voies aériennes des asthmatiques en Europe !


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