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AAAAI Denver 2003 : Dr Fabienne Rancé
mercredi 12 mars 2003, par
Le Dr Fabienne Rancé, pédiatre allergologue réputée, rejoint notre équipe pour vous tenir informés en temps réel des progrès dans le domaine de l’allergie.
Samedi 9 Mars
Asthme
Les nébulisations chez le nourrisson vont à coup sûr devenir un plaisir avec le nouveau système utilisant une sucette. Les nourrissons resteront paisibles durant le temps de l’aérosol. Le dispositif est fabriqué par la compagnie Westmed (3020 S. Tejon Street Englewood, Colorado 80110, USA) et ne demande qu’à être importé en Europe. D’autres informations sont disponibles sur le site www.westmedinc.com.
Les prick tests représentent une méthode de dépistage d’une sensibilisation aux aéro-allergènes (D farinae, blatte, chat et chien) plus sensible que le dosage des IgE (Cap system, Pharmacia). Bahna et al. observent une faible concordance entre les deux méthodes, variant de 52 à 62%. L’étude est réalisée chez 118 patients, enfants et adultes, souffrant de rhinite ou d’asthme.
Allergie alimentaire
Lin FL rapporte 3 observations d’allergie sévère au rouge carmin chez des femmes adultes ayant présenté auparavant des réactions à l’utilisation de produits cosmétiques contenant ce colorant. Les aliments à l’origine de la réaction sont une fois un yaourt, un bonbon ou une boisson. Les prick tests sont psoitifs pour le rouge carmin dans les 3 cas.
Le contenu en graisses des aliments affecte profondément la sévérité des réactions allergiques. Quatre patients allergiques à l’arachide ont développé au cours du test de provocation par voie orale en double aveugle des réactions plus sévères avec un véhicule composé de 22.9% de graisses comparé avec un autre à 31,5%. De plus, 3 des 4 patients ont réagi à des doses d’arachide 23 fois moins forte utilisant l’aliment moins riche en graisses. Le contenu en graisses doit être pris en considération pour la pratique des tests de provocation par voie orale, notamment dans le choix du véhicule utilisé, mais également dans la pratique clinique et de recherche (Hourihane JO et al).
Hugh Sampson précise les caractéristiques des allergies alimentaires au cours des gastro-entéropathies à éosinophiles. Il faut y penser chez le nourrisson à l’adolescent qui présente des symptômes à type de reflux, d’anorexie, de satiété rapidement atteinte, de refus alimentaire, de douleurs abdominales intermittentes et récurrentes, de troubles du sommeil, ou une irritabilité. D’autres éléments sont évocateurs : absence de réponse au traitement anti-reflux, amélioration avec l’éviction et récidive à la réintroduction des protéines alimentaires. Les examens qui permettent de porter le diagnostic sont l’endoscopie digestive, les biopsies objectivant une éosinophilie, et une hyper-éosinophilie sanguine. L’aliment en cause est difficile à identifier. Les prick tests sont négatifs dans les deux tiers des cas. Les patch tests alimentaires semblent améliorer le diagnostic. Le mécanisme est le plus souvent non IgE-médié. Les symptômes persitent plusieurs années mais finalement l’évolution sera favorable dans la majorité des cas.
Les aliments récents à l’origine d’anaphylaxie sont la cerise (Palomino JR etal.) et le manioc (Gaspar A et al.). L’anaphylaxie induite par l’exercice physique peut être associée à l’ingestion de blé (Lowe C etal.), à la prise concommitante d’alcool et d’épinard (Betschel AD et al.) ou de Celecoxib inhibiteur de la COX-2 et de pain aux fruits (Coifman RE).
L’analyse rétrospective des admissions aux urgences montre que l’anaphylaxie est plus fréquente chez l’enfant male et l’adulte femelle. Les aliments représentent la principale cause d’anaphylaxie autant chez l’enfant que chez l’adulte. Les fruits à coque sont en cause chez l’enfant alors que les fruits de mer sont impliqués chez l’adulte (Friesen JH et al.).
Même chez les familles bien éduqués sur les gestes à effectuer en cas d’anaphylaxie, les auto-injecteurs d’adrénaline à usage unique sont sous utilisés. La difficulté d’apprécier la gravité d’une réaction par l’entourage est mis en avant par Dilay Djet al. Diamond S et al. proposent d’éduquer aussi les pharmaciens qui délivrent l’adrénaline…
L’allergie alimentaire augmente le risque de récidive chez les enfants qui ont présenté une anaphylaxie. C’est le résultat de l’enquête téléphonique chez 76 enfants suivis pendant 7,4 années en moyenne (Cianferoni A et al.)
Il est possible de doser les IgE spécifiques à partir de sérums hémolysés non conservés au réfrigérateur pendant 7 jours. La sensibilité reste à 75% de la valeur de référence. Tout de même, mieux vaut respecter les consignes et utiliser le plasma (Hoffman DR).
Allergologie générale
Les piqûres d’orties entraînent des réactions urticariennes bien connues. En revanche, le déclenchement d’un choc anaphylactique vrai n’avait jamais été décrit. Une femme de 47 ans a développé à deux reprises après piqûre d’ortie une réaction généralisée sévère avec hypotension. La positivité des prick tests pour Urtica dioica n’exclut pas un mcanisme IgE-médié (Morgan M et al.).
Dimanche 10 mars
Asthme
– Le traitement injectable par anti-IgE (omalizumab) améliore les symptômes d’asthme et de rhinite (Bousquet J et al.). L’étude est réalisée chez 205 adolescents et adultes qui présentent un asthme allergique peu contrôlé, modéré à sévère, associé à une rhinite. La qualité de vie est aussi significativement améliorée (Higgins B et al).
– Montelukast, antagoniste des récepteurs des leucotriènes, diminue significativement les signes de la rhinite allergique saisonnière avec une tolérance similaire à celle du placebo (Philip G et al.). Utilisé en nébulisation nasale, il pourrait réduire les signes de la polypose nasale (Spector et al.).
Allergie alimentaire
– Les familles d’allergènes à l’origine des réactions croisées, cupin, prolamine, PR like, profilines et papaïne like sont de mieux en mieux documentées. Leurs implications cliniques sont également mieux identifiées.
A titre d’exemple, la superfamille des prolamines comporte les 2 S albumines. Le patient allergique à un fruit à coque doit exclure par prudence les autres fruits à coque du fait d’un risque évalué à 40% de réagir à l’ingestion d’un autre fruit à coque. En revanche, les fréquentes sensibilisations croisées démontrées « in vitro » entre les légumineuses sont cliniquement présentes dans seulement 5% des cas. Les lipoprotéines de transfert (LTPs) expliquent que l’allergique à la pêche et à l’abricot a de forte chance de développer une allergie à la cerise et à la prune.
– Le traitement de l’allergie alimentaire repose sur l’éviction stricte du ou des aliments identifiés par une exploration bien conduite.
Pour l’arachide, les accidents par exposition accidentelle sont fréquents et évalués à un tous les 2 à 3 ans.
De nouvelles thérapeutiques prometteuses sont attendre très prochainement.
Hugh Sampson rapporte son expérience de l’utilisation des anti-IgE chez 84 patients allergiques à l’arachide. Les effets secondaires sérieux sont rares. L’allergique à l’arachide sévère qui réagissait en ingérant 450 mg de cacahuètes peut, après traitement, manger 24 cacahuètes, soit une dose 30 fois plus importante !.
Les travaux de recherche chez la souris se poursuivent. On évoque toujours le traitement par herbes chinoises.
Plus récemment, les mêmes auteurs obtiennent une protection des souris allergiques à l’arachide pendant au moins 10 semaines en administant par voie rectale des protéines modifiées (Ara h 1-3) avec un adjuvant qui correspond à E. coli chauffé et tué.
Les enfants qui guérissent de l’allergie à l’arachide ont des valeurs d’IgE spécifiques inférieures à 5 kU/L.
Selon Fleischer DM et al., la moitié des patients allergiques à l’arachide ayant des valeurs d’IgE spécifiques inférieures guérissent de leur allergie alimentaire.
Comparant la qualité de vie des allergiques à l’arachide avec celle des diabétiques, l’équipe d’Hourihane objective une altération significative de la qualité de vie des allergiques à l’arachide. On peut reprocher à cette étude l’absence d’utilisation d’un questionnaire validé de qualité de vie pour les allergies alimentaires et la difficulté de comparaison de ces 2 pathologies sur des items spécifiques à l’allergie alimentaire.
La prévalence de l’allergie à l’arachide est plus forte au Canada qu’aux Etats-Unis. En effet, une enquête rélisée dans les écoles privées et publiques de Montréal estime la prévalence entre 1,24% et 1,62% (Kagan RS et al.). Néanmoins, la méthodologie de l’enquête mérite d’être mieux précisée.
Allergologie générale
– Les pièces de 1 et 2 euros sont responsables d’allergie de contact au nickel prouvée par tests épicutanés utilisant le sulfate de nickel et aussi les pièces elles-même. La sensibilisation au nickel par le biais des euros est similaire chez l’atopique et le non atopique. Il faut en aviser les pouvoirs publics (Amon U et al.).
– Le pimécrolimus en topique, dérivé de l’ascomycine, a montré son efficacité dans le traitement de la dermatite atopique. A l’inverse des dermo-corticoïdes, il ne modifie pas la réactivité cutanée et permet donc la réalisation des tests cutanés (Chang EE et al.).
– Les allergies aux anesthésiques locaux sont rares. Elles concernent surtout les anesthésiques « amide ». En cas d’allergie prouvée aux anesthésiques locaux, la procaïne (groupement ester) apparaît souvent utilisable et mérite d’être testée (Morais-Almeida M et al.).
Lundi 11 Mars
Asthme
– Les enfants atopiques âgés de 3 ans qui présentent un wheezing récidivant consomment plus de graisses polyinsaturées que les enfants du même âge non atopique. Ces graisses polyinsaturés pourraient stimuler la synthèse de prostaglandine E2 et accentuer le risque d’inflammation allergique (Murray CS et al.).
– L’atopie familiale multiplie par 3,33 le risque de développer une allergie respiratoire à l’âge de 4 ans chez les enfants souffrant d’une allergie alimentaire à l’âge de 2 ans (56 enfants, Huang S).
Allergie alimentaire
– Un déficit enzymatique pourraît prédisposer à l’anaphylaxie fatale liée à l’ingestion d’arachide.
* Le PAF est un médiateur lipidique produit par les mastocytes capable de reproduire les manifestations de l’anaphylaxie.
* La PAF acetyl hydrolase (PAF AH) dégrade et inactive le PAF. Cette enzyme circule dans le plasma avec des particules de cholestérol LDL. La concentration sérique de la PAF AH est donc étroitement corrélée à celle de l’apoprotéine B.
* La PAF AH est présente normalement dans le sérum à des concentrations variant de 7,8 à 47,8 nmol/min/ml.
* La PAF AH a été mesurée dans le sérum de 8 patients décédés d’une anaphylaxie liée à l’ingestion d’arachide (15,7 nmol/min/ml), chez des témoins en bonne santé dont 26 adultes (35,2) et 26 enfants (27,7), 63 enfants allergiques à l’arachide (24,9), 24 anaphylaxies non fatales (29,6) et chez des patients décédés d’une cause autre que le choc anaphylactique (26,4 nmol/min/ml).
* Les différences observées sont particulièrement significatives entre les patients décédés d’une anaphylaxie liée à l’ingestion d’arachide et les enfants allergiques à l’arachide (p=0.0003) et aussi avec les patients décédés d’une cause autre que le choc anaphylactique (p=0,02).
* L’analyse de l’ADN chez 3 patients ayant un taux bas de PAF AH exclue une mutation sur le gène codant la PAF AH.
* Ces données montrent clairement que l’activité de la PAF AH est réduite chez les patients qui décèdent d’un anaphylaxie induite par l’ingestion d’arachide.
* Néanmoins, ce déficit en PAF AH est insuffisant à lui seul pour expliquer l’anaphylaxie fatale ; il faut aussi un cofacteur représenté par un niveau élevé d’IgE spécifiques dirigées contre l’arachide.
* Cette étude est très intéressante car elle permet d’envisager une voie pharmacologique en développant des antagonistes du recepteur du PAF comme le WEB 2170 et le WEB 2086 (Vadas P et al.).
– Modification de l’allergénicité des aliments
* Le traitement enzymatique des protéines de l’arachide a des résultats variables selon l’enzyme : la transglutaminase n’altère pas les activités allergéniques de l’arachide, alors que la peroxidase réduit partiellement les activités d’Ara h1 et Ara h2 (Chung S et al.). La pepsine a une action majeure : la digestion gastrique des protéines d’arachide (Ara h1) par la pespsine est complète au bout de 2 heures et un repas à base d’arachide n’est plus décelé dans l’estomac du porc (Kopper RA et al.).
* Pour la crevette, l’activité allergénique est réduite par la fermentation et le salage (Hong C et al.).
* L’allergénicité peut varier pour un même aliment en fonction de la variété. C’est le cas du kiwi dont l’allergénité de la variété Zespri green est nettement supérieure à celle Zespri gold. Ainsi, l’allergique au kiwi déclenchera une réaction en mangeant du kiwi vert, mais il pourra manger du kiwi jaune (Lewis SA et al.).
– Valeur seuil des IgE spécifiques et prédiction de l’évolution de l’allergie alimentaire
* Les allergies au lait de vache et à l’œuf guérissent chez la majorité des enfants. Il est possible de préciser les enfants qui vont guérir ou à l’opposé rester allergiques par la simple détermination des valeurs d’IgE spécifiques et leur suivi dans le temps.
* Ainsi, le suivi pendant 7 années de 67 enfants allergiques à l’œuf de poule enregistre une allergie persistante pour 46 d’entre eux (69%). La valeur initiale des IgE est de 23,5 kU/L ; elle est en moyenne de 12,2 kU/L à l’âge de 7 ans. En revanche, dans le groupe des 21 enfants qui guérissent de l’allergie alimentaire à l’œuf, la valeur initiale des IgE est significativement plus faible (6,1 kU/L) et diminue 1,0 kU/L à l’âge de 7 ans.
* Parmi les 44 enfants allergiques au lait de vache, 23 (52%) sont toujours allergiques à l’âge de 8 ans. La valeur initiale des IgE spécifiques est de 29,1 kU/L et se situe à 24,4 kU/L à l’âge de 8 ans. Chez les 11 enfants qui guérissent de l’allergie au lait de vache, la valeur initiale moyenne des IgE spécifiques est de 5,7 kU/L et diminue à 1,8 kU/L au suivi. Un taux initial bas d’IgE spécifiques est un bon marqueur d’une évolution favorable, ce d’autant que les valeurs diminuent dans le temps (Shek LPC et al.).
Allergologie générale
Les patients atteints d’un urticaire au froid sévère et aquise pourraient être améliorés par la cétirizine associé au zarfilukast (antileucotriènes) ( Bonadonna P).
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