Le condensat exhalé, un plus dans l’évaluation des enfants asthmatiques ?

jeudi 31 juillet 2003 par Dr Arnaud Scherpereel2135 visites

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Le condensat exhalé, un plus dans l’évaluation des enfants asthmatiques ?

Le condensat exhalé, un plus dans l’évaluation des enfants asthmatiques ?

jeudi 31 juillet 2003, par Dr Arnaud Scherpereel

L’intérêt de la réalisation de condensats exhalés, méthode non invasive d’échantillonnage des secrétions des voies aériennes, est ici discuté dans l’asthme de l’enfant au travers de l’étude des variations de marqueurs (exhalés) du stress oxydatif et de l’inflammation des voies aériennes.

Augmentation du 8-Isoprostane exhalé dans l’asthme de l’enfant. : Eugenio Baraldi, MD ; Laura Ghiro, MD ; Vania Piovan, MD ; Silvia Carraro, MD ; Giovanni Ciabattoni, MD ; Peter J. Barnes, DM and Paolo Montuschi, MD * From the Department of Pediatrics (Drs. Baraldi, Ghiro, Piovan, and Carraro), School of Medicine, University of Padova, Padova, Italy ; Department of Drug Sciences (Dr. Ciabattoni), School of Pharmacy, University "G. d’Annunzio", Chieta, Italy ; Department of Thoracic Medicine (Dr. Barnes), Imperial College, School of Medicine, National Heart and Lung Institute, London, UK ; and Department of Pharmacology (Dr. Montuschi), School of Medicine, Catholic University of the Sacred Heart, Rome, Italy. dans Chest. 2003 ;124:25-31

 Objectifs de l’étude :
* quantifier le stress oxydatif pulmonaire chez des enfants asthmatiques en mesurant les concentrations du 8-isoprostane, un marqueur du stress oxydatif, dans les condensats exhalés, une méthode non invasive d’échantillonnage des secrétions des voies aériennes.
* Les objectifs secondaires étaient :
** (1) de mesurer les niveaux de prostaglandine(PG) E2 exhalée, l’altération de la production de PGE2 ayant été impliquée dans la pathogenèse de l’asthme chez les adultes ; et
** (2) de mesurer les niveaux de la fraction exhalée de l’oxyde nitrique (FeNO), qui est un marqueur de l’inflammation des voies aériennes.

 Type d’étude : étude monocentrique, en cross-section.

 Patients :
* vingt enfants sains, 12 enfants asthmatiques jamais traités par corticostéroides,
* et 30 enfants présentant un asthme léger à modéré persistant, stable, ayant été traités par corticostéroides inhalés (CSI) [dose moyenne, 300 µg par jour] ont été étudiés.

 Méthodes : les sujets ont été évalués en consultation externe en une seule fois pour la réalisation d’un condensat exhalé et une mesure du FeNO.

 Mesures et résultats :
* les concentrations du 8-Isoprostane et de la PGE2 dans les condensats exhalés ont été mesurées par des dosages spécifiques immunoradioactifs.
* La FeNO était mesurée en ligne par un analyseur de chimioluminescence.
* Le 8-Isoprostane était détectable dans les condensats exhalés des enfants sains (moyenne [± SEM], 34,2 ± 4,5 pg/mL), et ses concentrations étaient augmentées chez les enfants asthmatiques jamais traités par corticostéroides (moyenne, 56,4 ± 7,7 pg/mL ; p < 0,01) mais aussi chez les enfants asthmatiques traités par stéroides (moyenne, 47,2 ± 2,3 pg/mL ; p < 0,05).
* Il n’y avait pas de différence pour les concentrations de 8-isoprostane exhalé entre les deux groupes d’enfants asthmatiques (p = 0,14).
* A l’opposé, les concentrations de PGE2 exhalée étaient similaires parmi les trois groupes de l’étude (p = 0,56).
* Les niveaux du FeNO étaient plus élevés chez les enfants asthmatiques jamais traités par corticostéroides (49,2 ± 9,6 parties par milliard [ppb] ; p < 0,05) et, à un degré moindre, chez les enfants asthmatiques traités par stéroides (37,8 ± 6,6 ppb ; p < 0,05) comparé aux enfants sains (15,2 ± 1,7 ppb).

 Conclusions :
* le stress oxydatif est augmenté chez les enfants asthmatiques stables, comme cela est reflété par les concentrations augmentées du 8-isoprostane exhalé.
* Cette augmentation semble être relativement résistante au traitement par les CSI.
* La diminution de production pulmonaire de la PGE2 ne joue probablement pas un rôle physiopathologique dans l’asthme de l’enfant.


Comme précédemment dans l’asthme de l’adulte, un état de stress oxydatif des voies aériennes est mis en évidence dans l’asthme de l’enfant via la mesure d’une augmentation des concentrations du 8-isoprostane, un marqueur d’oxydation tissulaire, dans les condensats exhalés d’enfants asthmatiques.

Un traitement par les CSI n’influence pas ce marqueur chez les enfants asthmatiques stables dans cette étude.

La mesure des concentrations de PGE2 exhalée, substance impliquée dans le poumon dans la pathogenèse de l’asthme chez les adultes, n’était pas discriminante entre les groupes d’enfants ou asthmatiques étudiés.

Enfin, les niveaux de la fraction exhalée de l’oxyde nitrique (FeNO), marqueur de l’inflammation des voies aériennes, était logiquement plus élevés chez les enfants asthmatiques par rapport aux sujets sains, notamment chez les enfants asthmatiques non traités par CSI.

Le nombre des sujets de l’étude, quoique limité, permet d’obtenir des résultats relativement tranchés par groupe étudié, comme cela est souligné par les erreurs standarts moyennes (SEM) assez faibles.

L’interprétation des auteurs semble correcte sur la base de ces effectifs et de ces résultats.

Cependant, se pose la question de la valeur des condensats exhalés seuls pour l’évaluation du stress oxydatif des voies aériennes chez les enfants asthmatiques. En effet les concentrations de 8-isoprostane dans les condensats exhalés sont ici faibles et globalement peu discrimantes entre les groupes malgré les statistiques.

Si les tissus pulmonaires des enfants étudiés étaient disponibles comme le sont ceux des modèles murins d’asthme ( !), il est fort probable qu’un marquage spécifique tissulaire du 8-isoprostane, comme d’autres marqueurs d’oxydation tissulaire, distinguerait mieux les tissus pulmonaires des enfants asthmatiques au stress oxydatif elevé par rapport aux enfants sains (de manière similaires aux résultats des études par modèles animaux). Ceci serait d’autant plus probable que l’inflammation des voies aériennes, pour part induite par l’oxydation tissulaire et évaluée ici par le FeNO exhalé, est nettement et logiquement élevée chez les enfants asthmatiques par rapport aux sujets sains.

Au total, cette étude comme d’autres avant, nous propose de manière alléchante la méthode relativement simple et non invasive des condensats exhalés comme un moyen d’évaluation indirecte du stress oxydatif et de l’inflammation des voies aériennes chez les enfants asthmatiques.

Cependant, s’il est intéressant de montrer une différence pour les marqueurs exhalés (si possible plus significative pour certains !) d’un point de vue physiopathologique entre les groupes asthmatiques (+/- traités par CSI) ou non, l’intérêt réel de la méthode serait à mon avis d’un point de vue clinique pour les patients plus d’évaluer la « stabilité » de l’asthme (prédiction d’une décompensation…), sa réponse ou non à un traitement….

D’autres études, cinétiques celles-là, de marqueurs mesurés dans les condensats exhalés chez les enfants asthmatiques pourront peut-être nous apporter des arguments pour une telle application des condensats exhalés et nous inciter ainsi à les réaliser dans la pratique courante chez nos patients asthmatiques.

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