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Congrès de la WAO : suite 2
dimanche 14 septembre 2003, par ,
Et oui, une fois le décalage horaire digéré, nos rédacteurs peaufinent leurs comptes-rendus.
Dr Philippe Carré
– Symposium : Impact de l’inflammation allergique des voies aériennes supérieures sur l’asthme.
BUSSE W. a rappelé qu’il existe un lien entre l’allergie des voies aériennes supérieures (VAS) et la survenue des réactions allergiques des voies aériennes inférieures (VAI) et que ce lien est encore augmenté en cas d’infection respiratoire virale.
De nombreuses études montrent que la rhinite allergique est un facteur de risque de sifflements en cas de rhume (infection à rhinovirus).
L’infection virale touchant habituellement d’abord les VAS, il existe un lien entre les événements allergiques et infectieux au niveau des VAS et des VAI.
Quels en sont les mécanismes ?
* les infections des VAS augmentent le risque qu’un antigène inhalé provoque une réponse inflammatoire retardée ;
* les infections à rhinovirus favorisent la libération des médiateurs pulmonaires mastocytaires et le recrutement pulmonaire d’éosinophiles ;
* certains patients porteurs d’une rhinite et d’un asthme allergiques ont une diminution de la synthèse d’interféron Gamma qui favorise la survenue d’une réaction inflammatoire sévère et persistante au niveau des VAI.
HAMID Q. a précisé les liens physiopathologiques entre la rhinite allergique et l’asthme, qui coexistent de façon fréquente.
Il existe des caractéristiques histologiques et des sécrétions de cytokines communes, qui permettent d’évoquer une « unité des voies aériennes », la rhinite et l’asthme étant les deux spectres d’une même maladie.
Cette maladie allergique doit être considérée comme une maladie systémique, le stimulus antigènique provoquent la libération de cytokines proinflammatoires par stimulation directe de la moelle osseuse.
Enfin LOCKEY F. a retracé les liens physiopathologiques entre la rhinosinusite et l’asthme.
Non seulement la rhinite est un facteur de risque pour l’asthme et la rhinosinusite, mais la rhinosinusite aiguë allergique ou infectieuse ainsi que la rhinosinusite chronique allergique ou hyperplasique sont aussi des facteurs de risque de l’asthme.
Au total, il apparaît donc que la prise en charge des maladies des VAS est nécessaire pour un contrôle optimal de la maladie asthmatique.
– Symposium : Asthme pédiatrique.
SZEFLER S. a évoqué le problèmes des asthmes infantiles difficiles, corticorésistants, pour lesquels certains facteurs de risque doivent toujours être évoqués :
* une mauvaise compliance thérapeutique ;
* une comorbidité associée : rhinite, rhinosinusite, reflux gastro-oesophagien ;
* un facteur de déséquilibre psychologique ;
* une dysfonction des cordes vocales (ou dyskinésie laryngée épisodique) :
* des complications des médicaments.
Mais des altérations plus complexes que les mécanismes de régulation physiopathologique pourraient être impliqués :
* altération de la fixation des corticoïdes aux récepteurs cellulaires ;
* augmentation des facteurs de transcription cellulaire ;
* anomalie des récepteurs aux corticoïdes ;
* remodelage des voies aériennes, qui existe aussi chez les enfants, ce qui nécessite un diagnostic précoce de l’asthme, et donc des techniques de mesure simples de la fonction respiratoire de l’enfant, afin de mettre en place des traitements préventifs précocement.
BLAISS M. a évoqué des moyens importants à mettre en place, en terme de santé, pour améliorer la prise en charge de l’asthme infantile.
Ces moyens doivent être axés dans 3 directions :
* des outils d’évaluation cliniques, avec des mesures subjectives (symptômes, consommation de médicaments), mais aussi objectives car les patients surestiment le bon contrôle de leur maladie (mesure de la fonction respiratoire, de marqueurs de l’inflammation) ;
* des outils d’évaluation psychosociaux (échelles de qualité de vie) ;
* des outils économiques (évaluation des coûts directs et indirects).
Seule la combinaison de ces moyens permet une prise en charge optimale, dont les buts pour l’enfant peuvent être résumés en 3 mots :
* Sleep (pas de symptôme nocturne) ;
* Learn (pas d’absentéisme scolaire) ;
* Play (pas de limitation dans les activités).
– Symposium sur IgE, asthme allergique et traitement par anti-IgE Platts-Mills T, Boulet L-P, Meltzer E et Johansson SGO.
Platts-Mills a évoqué le contraste entre l’allergie aux acariens et l’allergie au chat : alors qu’il y a habituellement une corrélation entre l’exposition aux acariens et l’asthme, cette corrélation est peu fréquente avec le chat ; la présence d’un chat diminue de façon très significative la prévalence des IgE au chat contrairement aux acariens.
Parmi les patients allergiques, le taux des IgE au chat est beaucoup plus bas que celui des acariens. Enfin, dans une étude sur 51 enfants asthmatiques avec un chat à domicile, 27 étaient monosensibilisés aux acariens.
Au total, la présence d’un chat à la maison a un effet non spécifique sur la sensibilisation aux autres allergènes (acariens, blattes). Ainsi, l’exposition précoce a des taux élevés d’allergène du chat modifierait à la baisse la réponse TH2 en faisant intervenir les IgG4, alors qu’une exposition à des taux moins élevés serait associée à une réponse allergique TH2 normale.
Boulet a fait le point sur les moyens du contrôle optimal de l’asthme, en rappelant qu’il faut distinguer le contrôle de la sévérité : un asthme sévère peut être bien contrôlé alors qu’un asthme modéré peut ne pas l’être.
Toutes les études montrent que les patients surestiment le contrôle de leur maladie. Il est nécessaire d’avoir des mesures objectives. D’autant que le mauvais contrôle de la maladie a des conséquences directes sur le coût de la maladie.
Meltzer a fait le point des études concernant l’Omalizumab : anticorps monoclonal humanisé anti-IgE, qui se fixe sur les IgE et inhibe la liaison allergénique.
Deux études pivot sont disponibles (une américaine et une européenne), dont les résultats sont concordants, le traitement diminue le score des symptômes et la fréquence des exacerbations, améliore la fonction pulmonaire et la qualité de vie.
Le traitement est parfaitement toléré, avec des effets secondaires comparables au groupe placebo ; il s’adresse aux asthmatiques allergiques, après 12 ans, dont la maladie n’est pas contrôlée par les traitements classiques, et quel que soit le taux des IgE (un taux bas nécessite simplement des doses plus élevées).
Johansson a commenté l’utilisation des anti-IgE :
Il n’y a pas d’effet secondaire significatif, mais les effets à long terme ne sont actuellement pas connus ; les IgE ne sont pas totalement bloquées par le traitement ;
Enfin, lorsque les injections sont arrêtées on assiste à un retour progressif à l’état antérieur (la durée de vie de l’Omalizumab semble être de 3 semaines).
Un avantage potentiel de ce traitement, pourrait être de faciliter la désensibilisation plus rapide et à des doses plus importantes (effet « parapluie »).
La place exacte de ce traitement n’est pas complètement positionnée.
Dr Fabienne Rancé
– Tuez le chat, achetez un ou 2 chats, mais sans nul doute gardez le chat que vous avez !
Telle est la conclusion de l’amusante confrontation entre l’anglais Adam Custovic et l’américain Thomas Platts-Mills.
Une forte exposition aux allergènes du chat favorise la tolérance pour cet allergène. Les mécanismes font intervenir les propriétés spécifiques des molécules Fel d 1 qui active la synthèse d’IL10. Cette réponse ne majore pas le risque d’asthme.
Mais, la présence d’un chat augmente le risque d’asthme si le chat est l’allergène dominant.
L’éviction du chat n’est pas toujours possible. Sa présence est ubiquitaire expliquant les sensibilisations par le biais de lieux autre que le domicile.
– Les allergies de l’enfant : le constat d’Ulrich Wahn, l’actuel président de l’EAACI
L’augmentation des maladies allergiques chez l’enfant pose un véritable problème de Santé Publique.
La prévalence des maladies allergiques évaluée à 4% dans les années 50 est actuellement de 25%.
La particularité de l’enfant allergique est de suivre une évolution communément dénommée « la marche de l’allergique » ou « la carrière de l’allergique ».
Elle débute classiquement par une dermatite atopique et des allergies alimentaires chez le nourrisson, puis apparaissent vers 3-4 ans les allergies respiratoires, l’asthme et la rhinite allergique.
C’est l’origine de la campagne développée par le groupe des Pédiatres Européens de l’EAACI pour un dépistage précoce des allergies chez l’enfant. Ils ont également établi les recommandations pour la pratique des tests d’allergie chez l’enfant. La traduction française est sous presse.
Il revient à la responsabilité des médecins généralistes de reconnaître une dermatite atopique, les symptômes saisonniers, l’asthme. Ils doivent savoir prendre en considération l’historique de la famille, réaliser en première intention des tests d’allergie in vitro et connaître « la carrière de l’atopique ».
Le médecin allergologue identifie les causes en se fondant sur les recommandations, propose des traitements pharmacologiques, porte l’indication d’une immunothérapie spécifique, conseille sur les mesures d’éviction et de prévention.
Il forme également le médecin généraliste.
Le futur est envisagé par le biais du développement de réseaux.
– La prévention des maladies allergiques de l’enfant par John Warner
La prévention primaire s’oriente vers une immuno-modulation pendant la grossesse et une prise en charge précoce de l’enfant.
La prévention secondaire par la cétirizine, antihistaminique de dernière génération, prévient le développement de l’asthme chez les enfants sensibilisés aux pollens et atteints de dermatite atopique (étude ETAC).
Elle retarde seulement l’âge de début de l’asthme chez les enfants sensibilisés aux acariens et atteints de dermatite atopique.
La suite de l’étude est en cours : elle sélectionne les nourrissons atteints de dermatite atopique et déjà sensibilisés aux acariens ou aux pollens (étude EPAAC).
La prévention tertiaire par l’immunothérapie spécifique se confirme. Elle réduit significativement l’apparition de nouvelles sensibilisations et peut également éviter le développement d’un asthme chez l’enfant soufrant d’un rhinite allergique.
– Les brèves en Allergologie Pédiatrique
Les facteurs environnementaux sont à l’origine des différences de réponse immunitaire observée entre les enfants Estoniens et Suédois. En revanche, l’incidence cumulée des maladies allergiques est comparable entre les 2 groupes d’enfants (Voor T et al.).
Les études sur l’utilisation préventive des probiotiques, et notamment du fameux Lactobacillus GG se poursuivent. Elles démontrent toutes une diminution du score d’eczéma. Néanmoins, lactobacillus reste incapable de réduire les sensibilisations IgE-dépendantes (Viljanen M et al ; Taniuchi S et al.).
– Allergie alimentaire
En Espagne, Fernandez-Rivas M et al. ont analysé l’incidence de l’allergie aux aliments d’origine végétale chez 203 enfants connus comme allergiques aux aliments. Une allergie aux aliments d’origine végétale est relevée chez 45% des enfants. Les 10 aliments les plus cités sont la pêche, la pomme, l’arachide, la banane, le melon, les noix, les lentilles, les pois chiches, l’amande et la noisette. Cette allergie concerne surtout des enfants âgés de plus de 3 ans. Elle se traduit fréquemment par un syndrome oral, en dehors des fruits à coque et des légumineuses responsable de symptômes plus sévères (urticaire, anaphylaxie).
Le riz apparaît comme le principal aliment à l’origine du syndrome d’entérocolite induite par les protéines alimentaires (Kakakios A et al.). Il s’agit de 14 enfants dont le diagnostic est fondé sur le test de provocation par voie orale. La période de recrutement est de 10 années. L’âge moyen de début des symptômes est de 5 mois. Les autres aliments à l’origine de ce syndrome sont représentés par le soja, les œufs, le lait de vache, le poulet, la pomme de terre et le blé.
– La biologie : outil incontournable de l’allergie alimentaire HA Sampson
Le dosage des IgE spécifiques apporte des informations essentielles pour le diagnostic d’une allergie alimentaire. Il permet de réduire jusqu’à 50% des indications des tests de provocation.
Les valeurs seuils sont connues pour 4 aliments. Mais le dosage est âge-dépendant.
A titre d’exemple, une valeur d’IgE spécifique œuf supérieure à 2 kUA/L est suffisante pour le diagnostic d’une allergie à l’œuf chez l’enfant âgé de moins de 2 ans. Jusqu’à présent la valeur seuil établie pour l’œuf était supérieur ou égale à 7 kUA/L. Les résultats sont présentés sous forme de probabilité d’être allergique.
La biologie précise le pronostic d’une allergie alimentaire.
Les épitopes « informatifs » et les courbes tridimensionnelles font leur apparition.
Les premiers sont réservés à des centres ultra-spécialisés. Le patient allergique à l’arachide qui possède les épitopes 3 et 4 sur Ara h1, les épitopes 3 et 6 sur Ara h2 et l’épitope 3 sur Ara h3 a toutes les chances de rester indéfiniment allergique !
Les courbes tridimensionnelles établissent des probabilités de guérison en fonction de l’évolution des concentrations d’IgE spécifiques. Ainsi, le patient qui a des concentrations d’IgE œuf inférieures à 1,2 kUA/L, inférieures à 7 kUA/L pour le lait de vache et inférieures à 5 kUA/L pour l’arachide, a une probabilité de guérir de son allergie alimentaire évaluée à 50%.
Le dosage des IgE spécifiques guide les mesures d’éviction et peut autoriser des régimes d’exclusion moins draconiens. Il détermine le pronostic en identifiant le patient dont l’allergie guérira ou au contraire perdurera. En revanche, la biologie n’est pas corrélée avec la sévérité de l’allergie alimentaire.
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