Prévention primaire du risque atopique chez le nourrisson et l’enfant : coup de chapeau à Denise Anne, Erika, Fabienne, Gisèle...

jeudi 13 novembre 2003 par Dr Dominique Marchand5082 visites

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Prévention primaire  du risque atopique chez le nourrisson et l’enfant : coup de chapeau à Denise Anne, Erika, Fabienne, Gisèle...

Prévention primaire du risque atopique chez le nourrisson et l’enfant : coup de chapeau à Denise Anne, Erika, Fabienne, Gisèle...

jeudi 13 novembre 2003, par Dr Dominique Marchand

Est il possible de prévenir ou à défaut réduire le risque de survenue de maladie atopique, donc faire de la prévention primaire, en modifiant le régime alimentaire d’un nourrisson, voire recommander l’utilisation de préparations lactées à base d’hydrolysat et même faire mieux que le lait maternel. Une méta-analyse des travaux publiés sur le sujet s’impose, la voici.

Contribution des laits infantiles à base d’hydrolysat de protéines pour la prévention des allergies et intolérances alimentaires chez les nourrissons : Osborn D, Sinn J.

dans Cochrane Database Syst Rev. 2003 ;4:CD003664

 Contexte :
* Les allergies et réactions aux aliments sont banales et peuvent être en rapport avec des aliments dont les laits infantiles à base le lait de vache.
* Les préparations contenant des protéines hydrolysées ont été utilisées pour traiter les nourrissons avec une intolérance alimentaire et ont été mises en avant pour la prévention de l’allergie et des réactions d’intolérance chez ces derniers.

 Objectifs :
* Se prononcer sur l’utilisation de préparations à base d’hydrolysat pour l’alimentation infantile afin de prévenir allergies et intolérances alimentaires.
* Si les préparations à base d’hydrolysat sont efficaces, déterminer :
** 1° quel type d’hydrolysat est le plus efficace entre les préparations hautement ou partiellement hydrolysées.
** 2° quels nourrissons tireront le meilleur bénéfice entre ceux à faible et haut risque d’allergie, selon également que l’introduction a été précoce, à court terme ou prolongée.

 Stratégie de recherche : la stratégie standardisée de recherche de la section néonatale Cochrane a été utilisée comprenant des recherches dans le registre des essais contrôlés Cochrane (2003, publication n°1) ; MEDLINE (de 1966 à janvier 2003), EMBASE (de 1980 à janvier 2003), ainsi que les références citées dans les revues antérieures.

 Sélection des critères  : les essais randomisées et quasi-randomisés qui ont comparé l’utilisation d’une préparation à base d’hydrolysat au lait maternel ou au lait de vache. Les essais où il existait un suivi des participants supérieur à 80% étaient éligibles.

 Recueil des données et analyse :
* Le caractère éligible des études, fonction de la qualité méthodologique et de l’exploitation des données, a été déterminé indépendamment par chaque investigateur.
* Les principaux critères comprenaient le statut clinique allergique, les allergies spécifiques ou intolérance.
* La méta analyse fut conduite à partir d’une grille de valeur rigoureuse.

 Principaux résultats  :
* 18 essais rentraient dans les critères d’inclusion.
* Aucun des essais éligibles n’a comparé l’utilisation prolongée de préparation à base d’hydrolysat à une l’alimentation avec du lait maternel.
* 2 essais ont comparé l’utilisation précoce et à court terme de préparation à base d’hydrolysat à l’alimentation au lait maternel et n’ont rapporté aucune différence significative en matière d’allergie chez les nourrissons ou à propos de l’allergie au lait de vache chez le jeune enfant.
* 2 essais ont comparé l’utilisation précoce, à court terme de préparation à base d’hydrolysat à une alimentation avec du lait de vache sans rapporter aucun bénéfice significatif.
* Une vaste étude quasi-randomisée a rapporté une réduction de l’allergie au lait de vache chez les nourrissons avec une significativité limite chez les enfants à risque faible d’allergie (RR 0.62, IC 95% 0.38, 1.00).
* 7 études ont comparé une alimentation à base d’hydrolysat à une alimentation à base de lait de vache sans co-interventions d’autres facteurs prophylactiques sur l’allergie.
* La méta analyse de 4 études (386 nourrissons) a trouvé une réduction significative dans l’incidence de l’allergie dans cette tranche d’age (RR 0.63, IC 95% 0.47- 0,85, risque maladie -0.15, IC 95 % -0.25,-0,06).
* Une étude rapporta une réduction significative de l’incidence de l’allergie dans l’enfance (RR 0.54, IC 95% 0.36, 0.81).
* Des réductions significatives furent trouvées dans la prévalence de l’asthme dans l’enfance, l’incidence dans la petite enfance et prévalence dans l’enfance de l’eczéma, la prévalence des allergies alimentaires dans l’enfance et l’incidence de l’allergie au lait de vache dans la petite enfance.
* Toutes les études ont enrôlés des nourrissons à haut risque d’allergie.
* Seulement 3 essais comparant une alimentation avec une préparation à base d’hydrolysat à une préparation à base de lait de vache furent considérés comme de bonne méthodologie. Un seul d’entre eux démontra un bénéfice dans l’enfance à l’age de 5 ans.
* Aucun essai éligible n’examina les conséquences d’une alimentation prolongée avec une préparation hydrolysée sur la survenue d’allergie au delà du stade de la prime enfance.
* Les coûts ne furent pas rapportés.
* 3 essais ont comparé une alimentation prolongée avec une préparation extensivement hydrolysée à une partiellement hydrolysée et ne rapportèrent pas de différence significative dans l’incidence de l’allergie dans la petite enfance.

 Conclusions des auteurs investigateurs :
* Il n ’existe aucune preuve pour promouvoir l’alimentation avec un hydrolysat pour la prévention de l’allergie de préférence à une alimentation au sein.
* Chez les nourrissons à haut risque qui sont dans l’impossibilité d’être complètement allaités au sein, la preuve existe qu’une alimentation prolongée avec un hydrolysat par rapport au lait de vache réduit le développement d’allergie dans la petite enfance et enfance ainsi que l’allergie au lait de vache dans la petite enfance.
* D’autres essais seront nécessaires afin de déterminer s’il existe un bénéfice clinique significatif qui persiste au delà de 5 ans et s’il existe quelque effet bénéfique supplémentaire pour prôner l’utilisation une préparation lactée hautement hydrolysée comparé à une préparation faiblement hydrolysée.
* Les coûts complémentaires croissants ainsi que les conséquences sur la compliance devraient être mesurés.


Pour les non initiés, le titre est un clin d’œil à DA Moneret-Vautrin, E Isolauri, F Rance, G Kanny, toutes animatrices du CICBAA et pionnières de la prévention primaire du risque atopique par une alimentation hypoallergénique chez le nourrisson.

Au terme d’une méta analyse qui a porté sur des études contradictoires et ne répondant pas toutes aux critères d’éligibilité Cochrane, les auteurs sont cependant parvenus à 3 conclusions avec pour cible la prévention de la maladie atopique :
* 1° : il n’y a aucune raison de substituer au lait maternel un hydrolysat pour la prévention même pour les nourrissons à haut risque.
* 2° : seuls les nourrissons à haut risque atopique (la mère ou les 2 parents sont atteints) peuvent tirer bénéfice d’une alimentation avec un hydrolysat lorsque le sein est impossible sans pouvoir faire de discrimination entre les formules faiblement ou hautement hydrolysées actuellement et à condition que l’introduction soit précoce et la substitution poursuivie sur le long terme
* 3° : une seule vaste étude a montré que le bénéfice pouvait également être une réduction de la prévalence de l’asthme dans l’enfance (après 5 ans), l’incidence et la prévalence de l’eczéma dans l’enfance, la prévalence des allergies alimentaires dans l’enfance, l’incidence de l’allergie au lait de vache dans la petite enfance.

Pour ma part j’aurais 2 commentaires :
* 1° : la définition du risque atopique (haut vs.faible) repose toujours en 2003 sur l’hérédité parentale, donc des critères amnamnestiques en l’absence de test de dépistage reconnu. Rappelons que dosage des IgE au sang du cordon, de l’ECP sérique ou même de l’EPX urinaire ont montré leur peu de valeur discriminative. Même l’élaboration du profil cytokinique (orientation Th2 vsTh1) sur les cellules mononuclées du sang du cordon et en présence l’allergènes ou mitogènes (difficile à mettre en œuvre en routine et d’un coût prohibitif) n’a pas fait la preuve d’un caractère prédictif individuel net comme en témoigne la parution dans Allergy de Novembre 2003 par S.l Prescott, B King, T.L Strong & P.G Holt : The value of perinatal immune responses in predicting allergic disease at 6 years of age.

* 2° : la méta analyse n’a pas évalué l’apport des pro biotiques et / ou pré biotiques pour la prévention primaire de la maladie atopique. Les challenges en cours vont concerner la supplémentation des hydrolysats ou encore la supplémentation des mères allaitantes. Grâce aux travaux de l’équipe E Isolauri nous savons que la concentration en TGF-β dans le lait maternel augmente si la mère est supplémentée en probiotique tel que Lactobacillus GG. Lors du dernier symposium CICBAA en septembre 2003, ce même auteur a présenté une étude préliminaire chez 27 enfants porteurs d’une intolérance aux protéines du lait de vache et traités par un hydrolysat extensif : 13 enfants / 27 furent supplémentes en Lactobacilles GG. Le suivi a concerné le taux de TNF-α dans les fèces et même le NO exhale avec des résultats significatifs en faveur de la supplémentation.

Affaire à suivre ...

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