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Les bébés ont de la chance, les allergologues ne peuvent pas faire de prédiction allergologique sur leur sang ! !
vendredi 28 novembre 2003, par
Peut-on faire un diagnostic prédictif fiable d’allergie future à la naissance d’un enfant ? La question est importante car les données immunologiques confirment qu’il faudrait agir tôt sur le système immunitaire par des vaccins ou autre pour le modifier dans un sens favorable. En particulier, le typage lymphocytaire est-il intéressant ?
Valeurs des réponses immunes périnatales pour prédire le devenir allergique à l’age de 6 ans. : Prescott SL, King B, Strong TL, Holt PG.
Department of Paediatrics, University of Western Australia, Australia
dans Allergy. 2003 Nov ;58(11):1187-94
Des anomalies caractéristiques précoces du développement du système immunitaire des individus allergiques apportent des bases importantes pour définire la pathogénie des affections et la stratégie de prévention future.
– Objectif : Cette étude compare les différentes réponses immunologiques précoces d’enfants d’une cohorte basée sur le devenir allergique et les réponses aux prick-tests à l’age de 6 ans.
– Méthodes :
* Des enfants provenant d’un cohorte suivie à la naissance (n=60) provenant de 44 familles à haut risque et de 16 familles à faible risque en raison des antécédents familiaux, ont été revus et explorés à l’age de 6 ans.
* Des informations cliniques précises sur les affections allergiques ont été recueillies (n=53) et un sous groupe (n=31) a accepté des prick tests à des allergènes communs alimentaires et respiratoires.
* L’exploration immunologique a été réalisée à la naissance et à l’age de 1 an et 2 an avec étude : de la lympho prolifération et de la production de cytokines (IL4, 5, 6, 10, 13, IFN gamma) en réponse à l’ovalbumine (OVA), aux acariens, à l’allergène du chat Fel d 1, à la phytohemaglutinine (PHA), à la toxine tétanique et l’ensemble a été à nouveau analysé à l’age de 6 ans.
– Résultats :
* 28 enfants à haut risque et 3 enfants à bas risque ont une affection allergique à l’age de 6 ans avec un diagnostic médical d’asthme (n=17) et/ou de l’eczéma (n=24).
* La plupart des enfants (78%) ayant une atopie à 6 ans ont des tests cutanés positifs aux allergènes testés et 70% ont eu des symptômes durant la dernière année.
* Les enfants ayant un risque génétique (antécédents familiaux) d’allergie ont une réponse IFN gamma polyclonale T helper TH1 plus faible (p=0.017) dans la période néonatale par rapport aux enfants à faible risque.
* Bien que les enfants ayant une allergie à l’age de 6 ans ont tendance à avoir une réponse IFN gamma plus faible en période néonatale que ceux qui n’ont pas de symptômes, la différence n’est pas très significative (p=0.05).
* Un test cutané positif aux acariens à l’age de 6 ans est associé à une réponse plus forte de production d’IL13 lors de la stimulation par les acariens à l’age de 1 an (p=0.02) alors que la présence d’une affection allergique à l’age de 6 ans est associée à une augmentation en ARNm d’Il 5 aux acariens à l’age de 8 ans (p=0.01).
* Malgré ces associations, une analyse en régression logistique montre que les seuls facteurs précoces prédictifs de la sensibilisation allergique à l’age de 6 ans sont des antécédents familiaux d’allergie et des manifestations cliniques d’atopie à l’age de 2 ans.
* Par ailleurs, aucun des paramètres immunologiques précoces étudiés n’est prédictif d’une affection allergique ou d’une sensibilisation chez les enfants âgés de 6 ans.
– Conclusion : Bien que les observations des auteurs suggèrent de subtiles différences dans la réponse en cytokines à diverses stimulations sur des prélèvements sanguins à la naissance avec une association à des manifestations atopiques ultérieures, il n’y a pas encore de biomarqueurs précoces réellement prédictif de l’allergie. Des antécédents familiaux allergiques restent le facteur prédictif essentiel.
Les auteurs ont recherché s’il existait un moyen de dépister une allergie à l’age de 6 ans par l’étude du profil de réponse immunologique des lymphocytes T à la naissance.
La réponse est négative. L’existence d’antécédents familiaux allergiques reste le facteur prédictif le plus certain pour une allergie chez l’enfant.
Ce travail est intéressant pour 2 raisons.
D’abord, ce qui est rare, les auteurs ont publié un résultat négatif. Il n’y a donc pas de « tricherie » intellectuelle : les auteurs ont formulé une hypothèse logique compte tenu des données actuelles de l’immunologie et cette hypothèse est négative. Il était nécessaire de le démontrer.
Le deuxième point intéressant est que l’interrogatoire simple à la recherche d’antécédents familiaux d’allergie reste le moyen le plus sûr de prédire une future allergie chez le nouveau né. C’est donc un moyen non invasif, fiable et non coûteux.
Il n’empêche qu’il a ses limites, en particulier souvent il n’y a pas un diagnostic médical pour étayer les suspicions d’allergie chez les parents. D’autre part la prédiction n’est pas exacte à 100%, ce qui ne sera donc pas suffisamment précis lorsqu’il faudra décider par exemple d’une thérapeutique précoce anti-allergique, chaque geste thérapeutique n’étant jamais anodin.
Il faudra des preuves certaines d’une évolution vers une allergie pour proposer ces traitements.
Le problème reste donc entier : il est urgent de pouvoir disposer d’un test prédictif fiable sensible et spécifique pour prévoir l’apparition ou non d’une allergie à l’age de 6 ans.
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