L’inhalation de corticostéroïde chez l’enfant est-elle un acte masochiste ?

samedi 24 janvier 2004 par Dr Dominique Marchand6751 visites

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L’inhalation de corticostéroïde chez l’enfant  est-elle un acte masochiste ?

L’inhalation de corticostéroïde chez l’enfant est-elle un acte masochiste ?

samedi 24 janvier 2004, par Dr Dominique Marchand

Des pneumo pédiatres français ont réalisé une étude clinique sur la toux induite par 3 corticostéroïdes aérosolisés inhalés via une chambre chez des enfants asthmatiques de moins de 5 ans. L’effet secondaire étudié sera analysé en fonction du corticoïde inhalé utilisé et permettra un débat contradictoire avec les auteurs en toute confraternité

A propos de la toux après inhalation de corticostéroïdes via une chambre d’inhalation chez les enfants avec asthme. : Dubus JC, Mely L, Huiart L, Marguet C, Le Roux P ; Reseau de Recherche Clinique en Pneumologie Pediatrique.

Department of Pediatrics, Timone Children’s University Hospital, Marseille, France. jean-christophe.dubus@ap-hm.fr

dans Fundam Clin Pharmacol. 2003 Oct ; 17(5) : 627-31.

 Contexte : les enfants utilisant une chambre d’inhalation de préférence à un autre système d’inhalation pour l’administration de corticostéroïdes inhalés (CSI) ont été identifiés comme plus à risque de toux immédiatement après inhalation.

 But de l’étude : cette étude avait pour but de cerner les différents facteurs influençant la survenue d’un tel effet indésirable.

 Population, critères d’inclusion  :

  • les auteurs ont recherché l’effet secondaire local soupçonné chez 402 enfants asthmatiques âgés de 55,6 +/-34,9 mois traités pendant au moins un mois avec du dipropionate de béclométasone (n=331), du budésonide (n=47) ou du propionate de fluticasone (n=24) administrés à l’aide d’un d’aérosoliseur pressurisé et d’une chambre d’inhalation de petit (75.1%) ou grand volume (24.8%) généralement couplée à un masque facial (90,7%).
  • Un total de 219 patients (54,5%), traités soit avec de hautes doses de CSI ou CSI et agonistes de longue durée d’action étaient considérés comme porteurs d’un asthme sévère.

 Résultats :

  • un épisode de toux fut rapporté après chaque inhalation de corticostéroïdes chez 216 patients (53,7%). Parmi eux, environ 30% se plaignaient de toux après inhalation de bêta-2-agonistes.
  • En dépit de différents gaz propulseurs et dispersants, tous les corticostéroïdes induisaient similairement de la toux.
  • La toux n’était pas reliée à la sévérité de l’asthme mais était significativement en rapport avec la durée et l’utilisation de bêta-2-agoniste de longue durée d’action.
  • Le modèle ou le volume de la chambre d’inhalation, l’utilisation d’un masque facial ou d’un embout buccal n’étaient pas des facteurs d’influence.

 Conclusion : la toux après inhalation de corticostéroïdes administrés par chambre d’inhalation est un effet secondaire fréquent chez les enfants asthmatiques. Cette conséquence peut altérer considérablement la compliance. Tout praticien se doit d’envisager une telle éventualité lors de chaque examen clinique.


Cette étude menée par des chercheurs français réunis au sein du Réseau de Recherche Clinique en Pneumologie Pédiatrique a mis en exergue la fréquence de la toux (53,7%) immédiatement après inhalation de corticostéroïdes à l’aide dune chambre d’inhalation au sein d’une population d’enfants de moins de 5 ans d’âge dont plus de la moitié (54,5%) était traitée par de hautes doses de corticostéroïdes pour un asthme sévère.

Il serait intéressant de savoir si l’effet secondaire toux était éventuellement proportionnel à la quantité de CSI sur un mode dose/réponse permettant une relation de causalité et touchait donc préférentiellement les patients sous haute dose de CSI, soit supérieure ou égale à 800 μg de béclométasone, 400 μg de budésonide et 500 μg de fluticasone (d’après GINA 2002).

Les auteurs innocentent les gaz propulseurs et concluent qu’il s’agit d’un effet intrinsèque retrouvé quelque soit le CSI étudié, le type de chambre avec emploi indifféremment d’un embout buccal ou d’un masque facial.

Toutefois la puissance l‘étude et la force des conclusions ne peuvent être les mêmes pour chacun des 3 CSI, sachant que 82% de la population a utilisé la béclométasone, 14% le budésonide et seulement 6% environ la fluticasone.

La fréquence accrue de la toux chez les enfants traités par bêta-2-agonistes de longue durée d’action est un constat intéressant mais d’interprétation difficile : effet potentialisant des bêta- 2 de longue durée d’action ou sélection de patients plus à risque d’hyper réactivité bronchique ?

Pour mémoire les gaz propulseurs en cause ne pouvaient (vérification faite) être que des gaz dit CFC (dichlorodifluorométhane, dichlorotétrafluorométhane, trichlorofluorométhane) pour la béclométasone, le budésonide, la fluticasone dosée à 50 μg ou le seul bêta-2 agoniste de longue durée d’action disponible en spray (salmétérol), tandis que le gaz vecteur du propionate de fluticasone pour les formes à 125 et 250 μg par dose est le norflurane 134a soit le tétrafluoroéthane qui appartient à la classe des HFA ou encore alkanes parfois cités, sans partie pris volontairement iconoclaste, comme composés organiques volatils responsables de sibilants dans des études récentes environnementales chez l’enfant (cf. le congrès du Dr dominique Marchand EAACI 2003).

Pour innocenter définitivement les gaz propulseurs, potentiels pollueurs, il faudrait à mon sens une étude randomisée corticostéroïde par corticostéroïde et mettant en balance la nébulisation pneumatique (lorsque cette présentation est disponible comme pour le budésonide) versus l’inhalation via une chambre d’inhalation avec des gaz CFC et /ou HFA.

Les fabricants étant dans l’obligation d’éliminer à court terme les CFC (gaz fréon) des aérosoliseurs, une clarification sera rapidement disponible. Le fait que 30% des patients au sein des 53,7% identifiés comme souffrant de toux après inhalation, soit 16,11% du total des patients de l’étude, décrivaient de la toux après inhalation de bêta-2 de courte durée d’action ne permet pas encore d’incriminer formellement les corticostéroïdes dans la mesure où le gaz propulseur d’un des plus prescrit (le salbutamol) est déjà un gaz HFA 134a dont l’action tussigène mériterait d’être précisée

En fait toute molécule aérosolisée et dispersée par un gaz vecteur puis inhalée à l’aide d’une chambre d’inhalation n’est-elle pas capable d’induire de la toux d’autant qu’il s’agit de patients présentant à l’origine une hyper réactivité bronchique ou une hyper réflectivité à l’étage laryngé ?

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