L’immunothérapie sublinguale fait-elle mieux quand tout est déjà mieux ?

mercredi 7 mars 2007 par Dr Philippe Carré1066 visites

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L’immunothérapie sublinguale fait-elle mieux quand tout est déjà mieux ?

L’immunothérapie sublinguale fait-elle mieux quand tout est déjà mieux ?

mercredi 7 mars 2007, par Dr Philippe Carré

La place de l’immunothérapie sublinguale (ISL) fait l’objet de discussions dans la stratégie de prise en charge de l’asthme allergique chez l’enfant. En particulier quand le contrôle de l’asthme est déjà optimal avec les mesures d’éviction et le traitement médicamenteux. L’ISL apporte-t-elle un plus ? C’est l’objet de cette étude française.

Évaluation de l’efficacité de l’immunothérapie sublinguale chez des enfants avec un asthme allergique induit par les acariens de la poussière, contrôlés de façon optimale par un traitement pharmacologique et des mesures d’éviction des acariens. : 1Department of Paediatric Pneumology and Allergy, Hôpital Necker-Enfants Malades, Paris, 2Scientific and Medical Department, Stallergènes SA, Antony, France

1Department of Paediatric Pneumology and Allergy, Hôpital Necker-Enfants Malades, Paris, 2Scientific and Medical Department, Stallergènes SA, Antony, France

dans Pediatric Allergy and Immunology 18 (1), 47-57.

 Contexte

  • Bien que plusieurs études aient démontré l’efficacité de l’immunothérapie sous-cutanée dans l’asthme allergique, peu d’études ont montré le même bénéfice de l’immunothérapie sublinguale (ISL) chez des patients asthmatiques.

 Objectifs

  • Cette étude a été conduite pour évaluer l’efficacité de l’ISL aux acariens de la poussière, en complément d’une éviction allergénique et d’un traitement pharmacologique standardisé.

 Méthodes

  • Un essai contrôlé en double-aveugle a été réalisé chez 111 enfants (âgés de 5 à 15 ans), ayant un asthme léger à modéré aux acariens de la poussière
  • Après une phase d’observation de 4 semaines, les patients étaient randomisés pour recevoir une ISL par des comprimés d’extrait d’acariens de la poussière (n=55) ou un placebo (n=56), pendant 18 mois
  • Le traitement pharmacologique était adapté tous les 3 mois, en suivant une approche de décroissance thérapeutique
  • Les scores de symptômes d’asthme, la réduction de la consommation de stéroïdes inhalés et de béta-agonistes inhalés, les symptômes de rhinite, les tests de fonction respiratoire, la sensibilité cutanée aux acariens, les IgE et les IgG4 aux acariens, ainsi que la qualité de vie ont été évalués pendant l’étude.

 Résultats

  • Après 18 mois de traitement, les scores de symptômes d’asthme diurne et nocturne ne montraient pas de différence significative entre les groupes ISL et placebo
  • L’utilisation des stéroïdes inhalés et des béta2-agonistes était diminuée dans les 2 groupes, sans différence significative entre les 2 groupes
  • Il n’y avait pas de différence significative dans la fonction respiratoire (VEMS et variations du DEP) entre les groupes
  • Le score de symptômes de la rhinite était diminué dans les 2 groupes, sans différence
  • La dimension de sévérité du questionnaire de qualité de vie était significativement améliorée dans le groupe ISL (dans le groupe de 6 à 12 ans)
  • L’ISL induisait une réduction significative de la réactivité cutanée aux acariens (p<0.01) et une augmentation significative des IgE et des IgG4 aux acariens (p<0.001) dans le groupe ISL par rapport au groupe placebo
  • L’ISL était parfaitement tolérée avec des effets secondaires locaux légers à modérés
  • Aucune réaction systémique sévère n’a été rapportée

 Conclusions

  • Cette étude montre que, quand des enfants avec un asthme léger à modéré sont contrôlés de façon optimale par un traitement pharmacologique et une éviction allergénique, l’ISL n’apporte pas de bénéfice additionnel, malgré une réduction significative dans la réponse allergique aux acariens
  • Dans de telles conditions, seul un arrêt complet des stéroïdes inhalés (éthiquement infaisable) aurait pu démontrer un bénéfice possible de l’ISL.

Le but de cette étude était d’évaluer l’efficacité de l’ISL chez des enfants asthmatiques allergiques aux acariens, et déjà contrôlés de façon optimale par un traitement médicamenteux et une éviction allergénique.

Elle a comparé chez eux l’efficacité d’une ISL aux acariens, délivrée par comprimés pendant 18 mois, par rapport à un placebo, dans une étude en double-aveugle.

Il n’y avait aucune différence significative dans les 2 groupes en ce qui concerne les scores de symptômes d’asthme et de rhinite, l’utilisation des stéroïdes et des béta2 agonistes inhalés, le niveau de fonction respiratoire, après les 18 mois de traitement.

L’ISL induisait une réduction significative dans la sensation de sévérité du questionnaire de qualité de vie, ainsi que dans le niveau de réactivité cutanée aux acariens. Par ailleurs, elle induisait une augmentation du taux des IgE et des IgG4 aux acariens par rapport au placebo.

L’ISL était parfaitement tolérée, sans réaction systémique sévère.

Les auteurs concluent que, dans ce groupe particulier d’enfants contrôlés déjà de façon optimale par l’éviction et le traitement médicamenteux, l’ISL n’apporte aucun bénéfice additionnel, malgré une réduction des indices de réponse aux acariens ; et que le bénéfice aurait pu être démontré si le traitement par stéroïdes inhalés avait été interrompu, ce qui leur apparaît éthiquement infaisable.

Cette étude donne en effet raison aux recommandations internationales sur la prise en charge de l’asthme, telles qu’elles viennent d’être revues dans la dernière version du GINA de novembre 2006, et qui réservent l’immunothérapie aux asthmes allergiques persistants malgré un traitement optimal, incluant des mesures d’éviction. Le traitement de base de l’asthme chronique reste le traitement anti-inflammatoire.

Cette étude clinique française utilisait une ISL par comprimés, voie qui est amenée à se développer dans les mois qui viennent, et les données expérimentales récentes ne permettent pas de penser que les résultats auraient été différents avec une ISL « liquide ». Elle montre aussi que la voie sublinguale reste bien tolérée en terme d’effets secondaires ; mais deux rapports récents, publiés fin 2006 dans Allergy, ont rapporté la possibilité de réactions de type anaphylactique avec l’ISL ; ces rapports préliminaires demandent à être précisés, mais comme toujours en médecine, « la prudence est la mère des vertus » !

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