Urticaire : cette fois, c’est à une pêche d’en faire !

lundi 29 novembre 2010 par Dr Hervé Couteaux6321 visites

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Urticaire : cette fois, c’est à une pêche d’en faire !

Urticaire : cette fois, c’est à une pêche d’en faire !

lundi 29 novembre 2010, par Dr Hervé Couteaux

L’urticaire de contact induit par la pêche est associée à une sensibilisation aux protéines de transfert lipidiques (LTP). : Riccardo Asero

Ambulatorio di Allergologia, Clinica San Carlo, Paderno Dugnano, Italia

dans Int Arch Allergy Immunol 2011 ;154:345-348 (DOI : 10.1159/000321827)

 Contexte :

  • L’urticaire de contact induite par la pêche est fréquente chez les sujets allergiques à la pêche.

 Objectifs :

  • Le but de cette étude a été de détecter si l’urticaire de contact était associée à un allergène particulier de la pêche.

 Méthodes :

  • 92 sujets allergiques à la pêche ont été étudiés.
  • Les patients ont été diagnostiqués comme étant sensibilisés à la protéine de transfert lipidique (LTP ; Pru p 3) ou comme ayant un syndrome pollen-aliment induit par Pru p 1 et / ou Pru p 4, une profiline, sur la base des résultats des pricktests cutanés à des formes isolées de ces allergènes.
  • Des tests de liaison aux IgE spécifiques d’un extrait de pêche ont été également mesurés.
  • L’urticaire de contact a été confirmée par un test de contact avec des pêches intactes non traitées.
  • Un test de contact avec la nectarine a été effectué comme contrôle.

 Résultats :

  • Dans l’ensemble, une urticaire de contact était présente chez 21% des patients.
  • Le test de contact à la pêche était positif dans tous les cas.
  • L’urticaire de contact était significativement plus fréquent chez les patients réactifs aux LTP (63%) que chez les sujets atteints d’un syndrome pollen-aliments (6%, p <0,001) et n’était pas associée à un niveau plus élevé d’IgE spécifiques de pêche.
  • Dans plusieurs cas, l’urticaire de contact a précédé l’apparition d’allergie alimentaire de plusieurs années.
  • Le test contrôle de contact avec les nectarines a été négatif 5 fois sur 5.

 Conclusions :

  • Bien que le test de contact avec la pêche n’ait pas été effectué chez tous les sujets, et que l’allergie à la pêche n’ait pas été confirmée par des tests de provocation oraux, cette étude montre que l’urticaire de contact induit par la pêche est associée à une sensibilisation à la LTP de pêche.
  • L’histoire clinique et les tests de contact négatifs avec les nectarines joint à la concentration élevée bien connue de LTP au niveau du duvet de pêche suggèrent que le duvet de pêche joue un rôle dans la pathogenèse de l’urticaire de contact.

Dans cette étude italienne, pilotée par Riccardo Asero, ce n’est pas tant la méthodologie, peu rigoureuse au dire même de l’auteur, qui est intéressante, mais plutôt ce que ses résultats suggèrent : l’urticaire de contact à la pêche paraît liée aux LTP qui seraient contenus dans le duvet de pêche.

Les LTP appartiennent au groupe des protéines de défense végétales (PDV) : ce sont des PR-14 selon la classification de Van Loon (1999).

Ces protéines de défense sont sécrétées par les plantes en réponse aux stress biotiques ou abiotiques ; on peut considérer grossièrement que la moitié des familles de protéines renfermant les allergènes végétaux sont des PDV, c’est dire leur importance en allergologie !...

Leur présence n’est donc pas une constante mais varie selon les différents facteurs de stress auxquels sont soumis les plantes (ou leurs organes), au premier rang desquels on peut citer les conditions de culture, les modes de stockage, etc…

Très présentes chez les végétaux, notamment les végétaux supérieurs, au niveau de leurs organes aériens (pollens, feuilles, graines et fruits), croisant généreusement entre elles à de rares exceptions, du moins pour les LTP alimentaires, on les considère comme des panallergènes importants en allergologie.

Ces LTP sont bien entendu surtout connues pour leur rôle en allergie alimentaire, avec des réactions volontiers sévères : c’est le désormais classique syndrome LTP.

La pathogénie de ce syndrome ne se réfère classiquement pas aux pollinoses, même si ces dernières y sont pourtant fréquentes ; un gradient Nord-Sud a par ailleurs été clairement identifié, mais reste non expliqué...

On est un peu moins disert sur le rôle et la place des LTP de certains pollens (armoise, ambroisie, olivier) et encore moins sur les LTP présentes au niveau des feuilles (des cas d’asthme par exposition aux feuilles de pêchers avec réactivité aux LTP ont été rapportés…) et enfin, c’est le sujet de l’étude du jour, du rôle et de la place que des contacts cutanés avec la peau de certains fruits, peuvent avoir, notamment dans l’induction ultérieure (des années après ?...) d’allergie alimentaire.

L’allergologie moléculaire est un monde passionnant qui n’en finit pas d’ouvrir des portes, et par là d’améliorer notre compréhension des allergies, nous faisant du même coup mesurer l’ampleur des domaines encore obscurs qui nous restent à découvrir !