Enigme géographique en allergologie : mais où est la source des IgEs ?

mercredi 3 octobre 2012 par Dr Stéphane Guez1504 visites

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Enigme géographique en allergologie : mais où est la source des IgEs ?

Enigme géographique en allergologie : mais où est la source des IgEs ?

mercredi 3 octobre 2012, par Dr Stéphane Guez

La majorité des IgE spécifiques des allergènes dans le sang des patients allergiques n’est pas originaire des cellules B dérivées du sang ou des cellules plasmatiques. : J. Eckl-Dorna, I. Pree, J. Reisinger, K. Marth, K-W Chen, S. Vrtala, S. Spitzauer, R. Valenta and V. Niederberger,

dans Clinical & Experimental Allergy, 2012 (42) 1347–1355.

 Introduction :

  • La production des IgE spécifiques des allergènes est le marqueur de l’allergie IgE médiée, mais la contribution des cellules sanguines à la production des IgE spécifiques des allergènes chez les patients allergiques n’a pas été étudiée en détail.

 Objectifs de l’étude :

  • Ils ont été :
    • de caractériser les cellules productrices d’IgE dans le sang de patients allergiques -**et de déterminer la quantité d’IgE qui sont produites par ces cellules, en relation avec la quantité totales d’IgE spécifiques circulantes.

 Matériel et Méthode :

  • Les cellules mononuclées du sang périphérique ont été isolées chez des patients allergiques, et les populations cellulaires ont été purifiées ou séparées par billes magnétiques marquées par des anticorps dirigés contre des marqueurs spécifiques de la surface cellulaire (CD19, CD20, CD22, CD27, CD38, CD126, CD138, CD203C).
  • Les IgE spécifiques des allergènes ont été mesurées dans des échantillons de sérums et dans le surnageant de cultures cellulaires par ImmunoCAP quantitatif et par méthode ELISA en utilisant des allergènes recombinants purifiés.
  • Les transcrits IgE ont été détectés par PCR avec des amorces spécifiques des IgE humaines.

 Résultats :

  • Les auteurs montrent que les taux des IgE spécifiques des allergènes dans le surnageant des cultures de cellules mononuclées sont :
    • fortement corrélés avec les taux sériques des IgE spécifiques,
    • mais représentent moins de 1% des IgE circulantes.
  • La déplétion cellulaire en basophiles entraine une réduction substantielle des taux d’IgE spécifiques dans le surnageant des cultures cellulaires des cellules mononuclées, suggérant que la source importante des IgE spécifiques des allergènes dans le surnageant pourrait provenir d’IgE dérivant de la surface des basophiles.
  • Les IgE nouvellement synthétisées dérivent des cellule plasmatiques CD138+ mais pas des LB ni des LB mémoires, et représentent approximativement 0.2% des IgE circulantes du sang.

 Conclusion et implications cliniques :

  • Ces résultats indiquent :
  • que la majorité des IgE spécifiques des allergènes du sang périphérique ne dérivent pas des cellules sécrétrices d’IgE du sang,
  • suggèrent que la production locale d’IgE au niveau des tissus est la source majeure des IgE spécifiques
  • et suggèrent une nouvelle cible pour une intervention thérapeutique.

Les auteurs ont cherché à identifier l’origine de la production des IgE spécifiques des allergènes mesurés dans le sang circulant.

Seulement 1% des IgE ont une origine sérique, 99% étant donc fabriquées au niveau périphérique en particulier tissulaire, avec seulement 0,2% d’IgE nouvellement synthétisées présentent dans le sérum.

Ce travail est très intéressant car il permet finalement de comprendre certaines situations allergologiques qui restent mystérieuses.

Ainsi, en confirmant que la majorité des IgE sont bien fabriquées au niveau tissulaire et non par des cellules immunologiques du sang circulant permet de comprendre que l’on puisse avoir un patient authentiquement allergique mais avec une négativité des marqueurs sériques de l’allergie (taux d’IgEs et tests cutanés). En effet, la production des IgE se fait bien directement au niveau de la muqueuse de l’organe cible allergique.

D’autre part, on comprend également mieux l’absence d’identification d’un marqueur fiable d’efficacité de la désensibilisation, car le sang circulant n’est pas le lieu de production donc de régulation de la production des IgEs.

Les auteurs rappellent dans leur étude que les IgE ont une demi vie courte et qu’il y a donc en permanence une production locale tissulaire d’IgEs. C’est à ce niveau qu’il faudrait trouver un marqueur de modification de cette production.

Enfin, l’immunothérapie serait certainement plus efficace en agissant directement sur le site de la réaction allergique tissulaire.

Bref, ce travail ouvre bien de nouvelles perspectives en allergologie.