Attention ! Il y a un agent double dans la pêche !

mercredi 23 janvier 2013 par Dr Céline Palussière884 visites

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Attention ! Il y a un agent double dans la pêche !

Attention ! Il y a un agent double dans la pêche !

mercredi 23 janvier 2013, par Dr Céline Palussière

La peamacleine- Une nouvelle protéine allergisante de la pêche : similitudes, différences et caractéristiques trompeuses comparées à Pru p 3. : L. Tuppo1,2,†, C. Alessandri2,†, D. Pomponi2, D. Picone3, M. Tamburrini1, R. Ferrara2, M. Petriccione4, I. Mangone5, P. Palazzo2, M. Liso2, I. Giangrieco1,2, R. Crescenzo1,2, M. L. Bernardi2, D. Zennaro2, M. Helmer-Citterich5, A. Mari2,*, M. A. Ciardiello1

dans Clinical & Experimental Allergy
Volume 43, Issue 1, pages 128–140, January 2013

 Contexte :

  • Parmi les allergènes issus de la pêche déjà connus, les protéines de transfert des lipides (Pru p 3) semblent être un de ceux qui provoquent le plus de réactions sévères.

 Objectif :

  • Le but était d’identifier et caractériser un nouvel allergène de pêche responsable de tableaux cliniques semblables à ceux de Pru p 3.

 Méthodes :

  • Les patients étaient sélectionnés sur la base de réaction clinique sévère et leurs résultats négatifs pour un panel d’allergènes de pêche disponibles sur la puce ISAC103.
  • Plusieurs préparations de fabrication maison et commerciales ont été comparées.
  • Plusieurs méthodes étaient utilisées pour caractériser la molécule nouvellement identifiée.
  • Des tests d’IgE réactivité et d’inhibition ont été menés grâce à la technique ABA (allergen micro-Beads array).

 Résultats :

  • Les résultats négatifs sur la puce ISAC pour Pru p 3 étaient confirmés par des tests complémentaires, en contradiction avec des résultats positifs obtenus par des extraits commerciaux de peau de pêche enrichis en Pru p 3.
  • Les analyses de l’une de ces préparations ont conduit à l’identification de la Peamacleine, une nouvelle protéine allergisante.
  • Il s’agit dune petite protéine, basique, riche en résidus cystéine, stable à la chaleur et résistante à la digestion, homologue d’un peptide antimicrobien de la pomme de terre.
  • La Peamacleine était capable de provoquer des tests cutanés positifs et de lier les IgE au test ABA.
  • Elle a montré une mobilité électrophorétique et un comportement chromatographique semblable à ceux de Pru p 3 ; elle peut ainsi être masquée dans les préparations de Pru p 3.
  • En fait, il a été prouvé que les extraits de peau de pêche enrichis en Pru p 3 contenaient à la fois du Pru p 3 et de la Peamacleine, par le biais de tests comparatifs in vitro, et par des tests biochimiques et immunochimiques.
  • Les anticorps polyclonaux anti-Pru p 3 disponibles commercialement avaient une double spécificité pour les deux molécules.

 Conclusion et pertinence clinique :

  • Un nouvel allergène de la pêche, appartenant à une nouvelle famille de protéines allergisante, a été identifiée et caractérisée.
  • Ces connaissances sur la Peamacleine amélioreront notre compréhension des aspects cliniques de l’allergie à la pêche et la qualité des réactifs diagnostiques.

Pru p 3, tout le monde connait : la LTP de la pêche, responsable de réactions clinique sévère, principalement pour les sujets allergiques à la pêche issus du pourtour méditerranéen (mais pas que...).

Voilà que cet allergène se comporterait comme un agent double, en masquant un nouvel allergène, que jusqu’alors nous aurions complètement ignoré !

C’est là qu’entre eu jeu la puce ISAC. Parmi les 103 allergènes fixés sur la biopuce, il y a Pru p 3, obtenu sous forme recombinant, très pure donc. Les auteurs ont identifié des sujets ayant présenté des réactions sévères à la pêche, et pour lesquels rPru p 3 était négatif en technique ISAC (ainsi que la PR10 et la profiline de la pêche).

Il y avait donc un autre coupable... Ils ont donc comparé ces résultats en testant les séra de ces patients avec divers extraits, dont un extrait de peau de pêche enrichi en Pru p 3, et qui, là, s’avérait positif...

Avec diverses techniques que je serai bien en peine de résumer, les auteurs ont réussi à identifier l’espion. Une molécule ayant des caractéristiques physico-chimiques tout à fait comparables à celle de Pru p 3 s’était discrètement glissé dans la préparation de peau de pêche !

La Peamacleine était mise au grand jour. Douée des mêmes capacités de résistance à la chaleur et à la digestion que la LTP Pru p 3, il s’agit d’un allergène pertinent cliniquement puisque capable de réagir en tests cutanés.

Cette enquête montre tout l’intérêt de la puce ISAC dans le domaine de la recherche, par la mise à disposition de protéines recombinantes, ne pouvant pas masquer d’autres allergènes comme le font d’autres techniques comme les immunoblot par exemple.

Il reste à savoir quelle est la fréquence de réactivité des sujets allergiques à la pêche pour cette protéine. Le test d’IgE réactivité pour rPru p 3 est disponible commercialement, et ne pose pas de doute sur la présence de la Peamacléine.

Tout ceci ne simplifie pas notre travail de détective-allergologue, mais pourrait toutefois nous permettre d’expliciter certains cas épineux...

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