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L’asthme aussi s’enflamme dans les quartiers défavorisés.
jeudi 7 février 2013, par Dr Philippe Carré
Mères, lieux de vie et risque d’hospitalisation pour asthme dans l’enfance : une étude nationale suédoise. : Xinjun Li1,*, Jan Sundquist1,2, Susanna Calling1, Bengt Zöller1, Kristina Sundquist1,2
DOI : 10.1111/cea.12093
dans
Clinical & Experimental Allergy
– Objectif :
- Cette étude a évalué si le fait de vivre dans un quartier défavorisé augmentait le risque d’hospitalisation pour asthme dans l’enfance, en tenant compte des caractéristiques sociodémographiques maternelles individuelles.
– Méthode :
- Une cohorte ouverte de tous les enfants uniques âgés de 2 à 11 ans a été suivie entre le 1 janvier 1995 et le 31 décembre 2006
- Les adresses résidentielles pendant l’enfance étaient géocodées et classées en fonction du niveau de précarité du quartier
- Les données étaient analysées par régression logistique multiple, avec en premier niveau les caractéristiques individuelles (sexe, âge, statut marital de la mère, ressources de la famille, niveau d’éducation maternelle, statut d’immigration maternel, statut urbain ou rural maternel, mobilité, histoire d’asthme maternel et tabagisme maternel) et au second niveau le degré du quartier défavorisé.
– Résultats :
- Pendant la durée de l’étude, sur un total de 866.860 enfants, 17.682 (2 %) ont été hospitalisés pour un asthme infantile
- Les taux d’hospitalisation pour asthme infantile ajustés à l’âge augmentaient avec le degré du quartier défavorisé
- Dans la population, 1.9 % des enfants vivant dans les quartiers les moins défavorisés et 2.3 % de ceux vivant dans les quartiers les plus défavorisés étaient atteints d’asthme
- Les taux d’hospitalisation pour asthme augmentaient avec le degré de défavorisation du quartier dans toutes les catégories sociodémographiques maternelles individuelles, incluant le statut marital, le niveau d’éducation, le statut urbain ou rural, les antécédents maternels d’asthme et de tabagisme
- L’odd ratio (OR) des enfants habitant dans des environnements très défavorisés par rapport à ceux vivant dans des environnements moins défavorisés était de 1.23 (IC à 95 % : 1.16-1.30)
- Vivre dans un quartier très défavorisé restait significativement associé à un risque d’asthme infantile après ajustement sur les caractéristiques sociodémographiques maternelles (OR=1.08, p=0.016).
– Conclusions :
- Cette étude est à ce jour la plus importante sur l’influence du type de quartier d’habitation sur l’asthme de l’enfance
- Les résultats suggèrent que les caractéristiques de l’environnement affectent le risque d’hospitalisation pour asthme infantile indépendamment des caractéristiques sociodémographiques maternelles.
Les caractéristiques sociodémographiques des sujets asthmatiques ne suffisent pas à expliquer totalement les disparités du risque d’asthme infantile dans des groupes de populations, et la question se pose de savoir si l’environnement socio-économique est associé à un risque accru d’asthme.
L’étude présentée ici visait à déterminer si le fait de vivre dans des quartiers défavorisés entraînait un risque différent d’hospitalisation pour asthme infantile, dans des sous-groupes de mères, à partir d’une cohorte prospective suédoise d’enfants de 2 à 11 ans, entre les années 1995 à 2006 (n=866.860), en utilisant les registres nationaux suédois.
Les auteurs ont utilisé une géolocalisation des adresses des sujets, permettant de déterminer leurs lieux d’habitation au sein des zones restreintes d’environnement créées par le bureau des statistiques du gouvernement suédois, qui permet de connaître précisément le type et les conditions d’environnement des habitants.
Puis un index a été calculé à partir de plusieurs items évaluant le niveau de développement de chaque famille (éducation, revenus, emploi, couverture sociale), permettant de définir des populations vivant dans des quartiers peu ou très défavorisés.
Les auteurs montrent, dans cette étude nationale :
- que vivre dans un quartier défavorisé augmente le risque d’hospitalisation pour asthme de 23 %
- que le risque d’hospitalisation est corrélé d’autant plus que le quartier est plus défavorisé
- le risque d’asthme était le plus élevé chez ceux dont les mères ne s’étaient jamais mariées ou étaient séparées ou divorcées, chez celles qui avaient le niveau d’éducation le plus faible, qui avaient des antécédents d’asthme ou étaient fumeuses.
Cette étude confirme une étude antérieure faite uniquement dans la ville de Chicago, et qui avait montré une augmentation de 32 % du risque chez les enfants vivant dans les quartiers les plus défavorisés, quelles que soient les caractéristiques sociodémographiques maternelles.
L’augmentation du risque d’asthme dans les quartiers défavorisés est liée à des ressources en santé moins accessibles, à une désintégration sociale, à des ressources sociales faibles, et au stress quotidien qui en découle et qui peut influencer le stress hormonal et/ou immunologique.
Cette étude nationale prospective montre donc que la vie dans un quartier défavorisé augmente le risque d’asthme chez les enfants ; c’est un point important à connaître pour les professionnels de santé qui travaillent dans ces quartiers, de façon à adapter la prise en charge de ces enfants.