Malassezia et DA : la mauvaise association !

vendredi 3 mai 2013 par Dr Alain Thillay2043 visites

Accueil du site > Maladies > Eczéma > Malassezia et DA : la mauvaise association !

Malassezia et DA : la mauvaise association !

Malassezia et DA : la mauvaise association !

vendredi 3 mai 2013, par Dr Alain Thillay

Sensibilisation à Malassezia chez les enfants atteints de dermatite atopique associée à l’allergie alimentaire. : Kekki O-M, Scheynius A, Poikonen S, Koskinen A, Kautiainen H, Turjanmaa K.

Sensitization to Malassezia in children with atopic dermatitis combined with food allergy.

dans Pediatr Allergy Immunol 2013.00.

 Contexte :

  • La levure Malassezia appartient à notre flore cutanée normale, mais est capable de sensibiliser les individus atteints de dermatite atopique (DA).

 Objectif :

  • Notre objectif était d’étudier la prévalence de la sensibilisation à Malassezia sur 10 ans de suivi d’enfants atteints de DA associée à une allergie alimentaire (AA) et tout cela mis en relation avec la mesure de l’extension de la DA dans la petite enfance.

 Méthodes :

  • Cent quatre vingt sept enfants souffrant de DA et ayant conjointement une allergie au lait de vache et/ou au blé, avant l’âge d’un an, ont été inclus dans l’étude.
  • La superficie de la DA a été estimée à partir des dossiers des patients lors de la première visite et mesurée à l’aide du SCORAD à 10 ans de suivi.
  • Les IgE spécifiques de Malassezia ont été déterminées par ImmunoCAP à l’âge de 11 ans.

 Résultats :

  • Dans la petite enfance, 24 enfants (13%) étaient allergiques au lait, 71 (38%) au blé et 92 (49%) à la fois au lait et au blé, et, 94 (50%) enfants étaient atteints d’une DA légère, 57 (30%) d’une DA modérée et 36 (19%) d’une DA sévère.
  • Lors de la visite de suivi à 10 ans, 19 (10%) enfants avaient une allergie en cours au lait et/ou au blé ; 147 enfants (79%) avaient une dermatite atopique légère et 30 (16%) avaient un index du SCORAD à 0.
  • Les IgE spécifiques de Malassezia mix étaient positives (≥ 0,35 kU / l) chez 27% des enfants et les IgE spécifiques de M. sympodialis étaient retrouvées positives chez 20% des 187 enfants.
  • La superficie de la DA dans la petite enfance étaient associée à un risque plus élevé d’avoir des IgE spécifiques à Malassezia lors de la visite de suivi à 10 ans.
  • Le rapport de risque d’AA était de 3,11 (IC 95% : 2,05 à 4,72, p <0,001) si les IgE spécifiques de Malassezia étaient positives.

 Conclusions :

  • Les nourrissons atteints de dermatite atopique sévère et d’allergie alimentaire semblent avoir un plus grand risque de devenir sensibilisés à Malassezia pendant 10 ans de suivi.

Le genre Malassezia rassemble des levures appartenant au groupe des Fungi imperfecti. Elles font partie de la flore commensale des humains. En situation normale, ces levures ne sont pas pathogènes. Toutefois, pour prendre l’exemple de Malassezia furfur, il est établi que cette levure lipophile est impliquée chez environ 3% de la population de dermatoses dont la plus connue est la dermite séborrhéique de l’adulte.

Depuis une vingtaine d’années, des travaux s’ajoutent pour impliquer les Malassezias dans le déclenchement de certaines poussées de dermatite atopique avec atteinte élective de la tête et du cou, c’est la fameuse entité « head an neck dermatitis ».

Dans cette perspective, il est facile d’imaginer que Malassezia puisse agir, soit en tant qu’agent infectieux sur une peau pathologique, soit par une allergie IgE dépendante à cette levure.

Ici, dans cette étude finlandaise, des enfants ont été suivi sur dix ans, dès avant l’âge d’un an.

Ils étaient donc initialement 187 enfants atteints de dermatite atopique et d’allergie alimentaire au blé et/ou au lait de vache.

La superficie des zones cutanées touchées par la DA était mesurée chez chaque enfant.

A l’âge de 11 ans les IgE spécifiques de Malassezia mix étaient évaluées par ImmunoCAP.

Sans reprendre en détail les résultats, nous constatons que tous les enfants âgés de moins d’un an sont allergiques au lait de vache et/ou au blé (définition même du recrutement) alors, que les mêmes enfants, à l’âge de 11 ans ne sont plus que 10% à l’être.

Toujours avant l’âge d’un an, 50% des enfants sont atteints d’une DA sévère ou modérée, alors qu’à l’âge de 11 ans, ils sont 95% à avoir une DA légère ou une DA avec un SCORAD à zéro.

Lors du suivi à 10 ans, l’ImmunoCAP Malassezia mix est positif chez 27% des enfants.

L’extension de la dermatite atopique est associée à un risque plus élevé d’avoir des IgE spécifiques de Malassezia.

De même, l’existence de l’allergie alimentaire expose à un plus grand risque de posséder des IgE spécifique de Malassezia.

Nous pourrions rétorquer aux auteurs de ce travail que c’est peut-être l’inverse qui est important.

En effet, ne se pourrait-il pas que l’IgE-réactivité vis-à-vis de Malassezia soit responsable de la sévérité de la dermatite atopique ?

Ainsi, il aurait été très judicieux de rechercher cette IgE-réactivité, non seulement à l’âge de 11 ans, mais, dès l’inclusion, puis, tous les ans.

Ayant, personnellement, l’expérience de nombreux cas de dermatite atopique persistante de l’adulte (je suis d’accord, cette expérience n’a pas le niveau de preuve d’une véritable étude à la méthodologie impeccable, elle donne simplement à réfléchir), je peux avancer que quasi tous ces patients ont une réactivité à l’encontre de Malassezia.

D’ailleurs, quelques bons shampooings « corps entier » au KETOCONAZOL gel améliorent l’état cutané de ces patients.

Ce constat suggère que l’IgE-réactivité à Malassezia commanderait la sévérité mais aussi la persistante de la DA.

D’autres études prospectives de grande ampleur sont donc nécessaires pour préciser le rôle jouer par les levures du genre Malassezia dans la dermatite atopique.

Rechercher

En bref

categories

  Allergenes

  Maladies

  Fonctionnel