Urticaire chronique + aspirine + AINS : le mauvais cocktail.

mardi 27 mai 2003 par Dr Alain Thillay14629 visites

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Urticaire chronique + aspirine + AINS : le mauvais cocktail.

Urticaire chronique + aspirine + AINS : le mauvais cocktail.

mardi 27 mai 2003, par Dr Alain Thillay

Le clinicien le sait de façon intuitive, l’intolérance à l’aspirine et aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) est un moyen d’entrer dans l’urticaire chronique. Cette constatation se révèle-t-elle dans les faits ? Cette étude rétrospective reprend les dossiers de patients vus initialement pour intolérance aux AINS et/ou à l’aspirine et suivis sur 10 ans.

L’intolérance aux anti-inflammatoires non stéroïdiens peut précéder des années avant la survenue d’une urticaire chronique. : Asero R. Ambulatorio di Allergologia, Clinica San Carlo, Paderno Dugnano (MI), Italy dans J Allergy Clin Immunol 2003 May ;111(5):1095-8

 CONTEXTE.
* Des études récentes ont montré que beaucoup de sujets par ailleurs normaux ayant une histoire d’urticaire aiguë induite par différents médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) avaient une réaction erythémato-papulaire lors de l’injection intradermique de sérum autologue.
* Ce phénomène a été précédemment observé chez des patients atteints d’urticaire chronique (UC) et suggère un possible mécanisme commun entre l’UC et l’urticaire induite par les AINS.
* Une relation entre ces 2 situations est encore plus suggérée du fait que plus de 30% des patients souffrant d’urticaire chronique ont une aggravation de leurs manifestations cutanées après l’ingestion d’AINS de structures chimiques différentes.

 OBJECTIF.
* Nous avons cherché à démontrer si des sujets par ailleurs normaux ayant une intolérance à un ou plusieurs AINS montraient une propension à avoir de l’UC.

 METHODES.
* Nous avons étudié deux cent quatre-vingt patients normaux ayant sans équivoque possible des antécédents d’urticaire aiguë induite par les AINS, vus durant les 10 dernières années.
* Sur la base, à la fois, de l’histoire clinique et d’un test de provocation orale avec au moins deux types d’AINS, les patients étaient classés soit, comme étant intolérants à un seul AINS, ou soit, comme étant intolérants à plusieurs.
* Tous les patients étaient réévalués avant la fin de 2002, 1 à 10 ans après la première consultation, afin d’évaluer l’apparition de l’UC.
* Cent adultes allergiques sans antécédent d’UC et d’allergie médicamenteuse suivis durant 10 ans ont été utilisés comme groupe de contrôle.

 RESULTATS.
* Cent cinquante neuf patients et 121 autres ont été finalement considérés respectivement comme ayant une intolérance à un seul AINS ou une intolérance à plusieurs AINS.
* A la consultation de suivi, 93 (33%) des 280 patients avaient une UC.
* La prévalence de l’UC était très similaire dans les deux groupes, intolérant à un seul AINS ou intolérant à plusieurs AINS (48/159 soit 30% contre 45/121 soit 37%).
* Seulement un (1%) des 100 sujets atopiques du groupe de contrôle avait de l’UC durant période de suivi.
* Parmi ceux qui ne réagissaient qu’à un seul AINS, les patients souffrant d’UC avaient une prévalence significativement plus élevée d’intolérance à l’aspirine que ceux ne souffrant pas d’UC (36/48 soit 75% contre 41/111 soit 37%, P<0,001), tandis que le dernier avait une prévalence nettement plus grande d’intolérance aux médicaments pyrazolés (52/111 soit 47% contre 10/48 soit 21%, P<0,01).
* Dans l’ensemble, seulement 12 (15%) des 82 patients intolérants à d’autres médicaments que l’aspirine contre 36 (47%) de 77 réactifs à l’aspirine avaient de l’UC.

 CONCLUSION. L’intolérance aux AINS peut précéder la survenue de l’UC des années avant. Les deux groupes, ceux réactifs à un seul AINS et ceux réactifs à plusieurs, avec des antécédents d’urticaire à l’aspirine révélaient un plus haut risque d’UC que les patients ayant une histoire d’intolérance à un seul AINS autre que l’aspirine.


Cette étude rétrospective montre qu’un sujet victime d’une urticaire aiguë due à la prise d’un AINS ou d’aspirine a plus de risque de développer une urticaire chronique.

Un tiers des patients ayant une urticaire aiguë en rapport avec la prise d’un AINS ou de plusieurs développent une urticaire chronique. Il semble que le fait d’avoir en plus une intolérance à l’aspirine, tout en ayant une intolérance à un ou plusieurs AINS expose encore plus à l’urticaire chronique.

Cela suggère que le mécanisme physiopathologique de ces urticaires chroniques est lié à un trouble du métabolisme de l’acide arachidonique, l’inhibition de la voie de la cyclo-oxygénase favorisant celle de la lipo-oxygenase qui in fine augmente l’activité des leucotriènes.

Cela peut signifier aussi, qu’une fois ce phénomène enclenché lors d’une urticaire aiguë en rapport avec la prise d’un AINS, la voie métabolique de l’acide arachidonique devient instable et pourra réagir à des stimuli habituellement inefficaces (sulfites, benzoates…).

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