Sevrage tabagique à l’hôpital : fumisterie ?

mardi 17 juin 2003 par Dr Arnaud Scherpereel3693 visites

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Sevrage tabagique à l’hôpital : fumisterie ?

Sevrage tabagique à l’hôpital : fumisterie ?

mardi 17 juin 2003, par Dr Arnaud Scherpereel

Que faire pour obtenir un sevrage tabagique des patients hospitalisés ? Faut-il ne rien faire, ou se limiter à un bref entretien-conseil isolé, ou encore associer un traitement de substitution de la nicotine à cet entretien ? Ces différentes méthodes sont ici comparées pour leur efficacité dans l’obtention d’un sevrage tabagique.

Essai clinique comparant un traitement de substitution de la nicotine (TSN) associé à un bref entretien-conseil et une intervention minimale pour le sevrage tabagique chez des patients entrant à l’hôpital. : A Molyneux1, S Lewis1, U Leivers1, A Anderton1, M Antoniak1, A Brackenridge3, F Nilsson4, A McNeill3, R West3, J Moxham2 and J Britton1
1 Division of Respiratory Medicine, University of Nottingham, City Hospital Nottingham, UK
2 Guy’s, King’s and St Thomas’ School of Medicine, London, UK
3 Department of Psychology, St George’s Hospital Medical School, London, UK
4 Pharmacia Consumer Healthcare, Medical Affairs, Helsingborg, Sweden.
dans Thorax 2003 ;58:484-488

 Introduction :
* les recommandations sont qu’un sevrage tabagique soit proposé dans le cadre de toutes structures cliniques à tous fumeurs désirant essayer d’arrêter de fumer.
* L’efficacité de l’apport en routine d’un entretien-conseil et d’un traitement de substitution de la nicotine (TSN) aux fumeurs admis à l’hôpital n’ayant pas encore été établie, un essai randomisé contrôlé de ces modes thérapeutiques associés comparé à un bref entretien-conseil seul ou une intervention minimale a été réalisé chez des patients entrant à l’hôpital.

 Méthodes :
* les patients pris en charge en service de médecine et de chirurgie, fumeurs à leur entrée à l’hôpital, étaient randomisés pour recevoir soit un soin simple (pas de conseil additionnel à l’admission), un entretien-conseil seul (une intervention de 20 minutes avec des supports écrits), ou un traitement de 6 semaines par substitutifs de la nicotine (TSN) associé à un entretien-conseil.
* L’abstinence tabagique continue et ponctuelle (validée par un dosage du monoxyde de carbone exhalé <10 ppm) était mesuré à la sortie de l’hôpital, puis après 3 et 12 mois, et la diminution de la consommation tabagique auto-rapportée par les fumeurs était évaluée à 3 et 12 mois.

 Résultats :
* 274 patient fumeurs ont été enrollés.
* L’abstinence était plus forte dans le groupe TSN associé à un entretien-conseil (n=91) que dans les groupes entretien-conseil seul (n=91) ou soin usuel (n=92).
* La différence entre les groupes était significative pour les prévalences d’abstinence à la sortie (55%, 43%, 37% respectivement ; p=0,045) et après 12 mois (17%, 6%, 8%, p=0,03).
* Les différences respectives pour l’abstinence continue validée à 12 mois étaient 11%, 4%, 8% (p=0,25).
* Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes entretien-conseil seul et soin usuel, et dans la diminution de la consommation tabagique entre les différents groupes thérapeutiques.

 Conclusions : le traitement de substitution de la nicotine (TSN) associé à un bref entretien-conseil donné aux patients entrant à l’hôpital est une méthode efficace en routine de sevrage tabagique.


Les principaux résultats de cette étude sont la démonstration de l’efficacité supérieure pour le sevrage tabagique de l’association traitement de substitution de la nicotine et entretien-conseil donné aux patients entrant à l’hôpital, par rapport à un entretien-conseil ou un soin sans action anti-tabagique.

La notion d’abstinence à la sortie semble un critère peu intéressant car peu discriminant mais il est surprenant de noter les pourcentages d’abstinence faibles dans les trois groupes si on considère que les patients ne sont pas censés fumer en cours d’hospitalisation surtout s’ils débutent leur sevrage !

Le pourcentage d’abstinence à 12 mois pour le groupe associant traitement de substitution de la nicotine et entretien-conseil est de 17% soit un chiffre dans la moyenne des études similaires (réussite dans environ 20% des cas).

C’est évidemment mieux que les groupes de patients ne recevant qu’un entretien-conseil ou rien pour le sevrage tabagique.

Mais il paraît exagéré de conclure comme les auteurs que le traitement de substitution de la nicotine associé à un bref entretien-conseil donné aux patients entrant à l’hôpital est une méthode efficace en routine de sevrage tabagique. Cette efficacité est souvent moins bonne pour les sujets ayant commencé très tôt leur intoxication tabagique et/ou si celle-ci est très importante.

Cependant, il est indispensable qu’un sevrage tabagique avec toutes ses possibilités soit proposé à tous fumeurs désirant essayer d’arrêter de fumer.

Pour cela, nos gouvernants pourraient enfin prendre en charge, même partiellement, le coût du traitement de substitution de la nicotine souvent important, et ne pas se limiter à encaisser les recettes de l’augmentation du prix du tabac, mesure d’effet limité pour le sevrage tabagique !

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