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Management de l’urticaire chronique à la française !
jeudi 24 juillet 2003, par
Il s’agit d’une étude française, INSERM U330, ISPED à Bordeaux, qui aborde l’aspect de la prise en charge diagnostique et thérapeutique de l’urticaire chronique par les dermatologues, allergologues et omnipraticiens. Cette enquête a été réalisée avant la publication du consensus de l’ANAES et sera renouvelée après.
« Management » de l’urticaire chronique. Un essai concernant les intentions de pratique de dermatologues, allergologues et médecins généralistes. : Maurice-Tison S, Pouyanne J, Doutre MS. INSERM U330, ISPED, Universite Victor Segalen Bordeaux 2, 146, rue Leo-Saignat, 33076 Bordeaux. dans Ann Dermatol Venereol. 2003 May ;130(5 Suppl):160-73
– CONTEXTE. Ce rapport présente les résultats d’une étude nationale (France) réalisées en juin et juillet 2002 afin de décrire les intentions de pratique de dermatologues, allergologues et médecins généralistes face à l’urticaire chronique, avant la publication de la conférence de consensus sur ce sujet.
– METHODES. 75% des médecins généralistes (112/148), 73% des dermatologues (131/180) et 90% des allergologues (58/64) ont complété un questionnaire par téléphone. Les autorités de santé et les associations médicales ont fourni les listes pour pratiquer le tirage au sort.
– RESULTATS.
* Les médecins généralistes réalisent peu d’investigations diagnostiques et prescrivent dans la plupart des cas des anti-histaminiques. Si persistance, ils avaient recours aux spécialistes, dermatologues ou allergologues.
* Dermatologues et allergologues paraissent avoir des pratiques similaires dans la gestion de l’urticaire chronique, même si les allergologues pratiquent plus de tests cutanés.
* L’urticaire chronique reste inexpliqué dans environ 60% des cas des observations.
* Lorsqu’une étiologie était identifiée, c’est une urticaire physique pour les allergologues et une urticaire induite par un médicament pour les dermatologues.
* Pour tous les praticiens les anti-histaminiques sédatifs ou non sédatifs représentent le principal traitement, parfois associés à d’autres médicaments en cas de résistance.
* La plupart des praticiens perçoivent les facteurs psychologiques comme important. Parfois, Ils suggèrent une thérapie spécifique.
– CONCLUSION. Cette étude de questionnaire sera faite à nouveau quelques mois après la publication des recommandations pour apprécier leurs impacts sur les médecins.
Globalement cette étude de questionnaire (rempli par téléphone) semble montrer que l’ensemble des praticiens interrogés, allergologues, dermatologues et médecins généralistes, sont raisonnables pour ce qui concerne les bilans complémentaires.
Les généralistes, après avoir prescrit un anti-histaminique, délèguent volontiers aux spécialistes.
Les allergologues et les dermatologues n’ont pas de grande différence dans le démarche diagnostique, au détail près que les allergologues pratiquent plus de tests cutanés. Il est vrai que ces tests représentent un moyen simple, rapide et peu onéreux de mettre en évidence un terrain atopique dont l’existence peut orienter l’enquête.
L’urticaire chronique reste inexpliquée dans 60% des cas, ce qui correspond, me semble-t-il, aux résultats d’études plus anciennes.
En cas d’inefficacité d’un anti-histaminique, les spécialistes ont recours aux associations avec d’autres anti-H1 ou avec d’autres médicaments.
Ce questionnaire sera renouvelé dans quelques mois pour voir si la publication du consensus de l’ANAES sur l’urticaire à fait évoluer les pratiques.
Il faut se souvenir que dans le cas de l’urticaire chronique, comme toute autre maladie, il faut rester un clinicien avant tout.
Ici, bien sûr, comme ailleurs, le souci est de ne pas passer à côté d’une maladie systémique plus ou moins grave. D’où l’intérêt d’un interrogatoire fouillé sur l’histoire de l’urticaire, les signes d’accompagnements…, d’où l’intérêt d’un examen clinique soigneux à la recherche d’anomalies thyroïdiennes, d’une hépatomégalie, d’adénopathies…
Ainsi, les examens complémentaires seront choisis en fonction de ces constatations.
Tout est une question de logique. Il n’y a pas de bilan complémentaire standard.
Enfin, en ce qui concerne l’aspect psychologique, il me semble que « psychiatriser » le patient d’urticaire chronique rebelle qui ne fait pas sa preuve est le plus souvent un abus du praticien qui ne sait pas dire qu’il ne sait pas. Nous voyons encore trop souvent arriver des patients qui disent que leur urticaire, « c’est psychique ». La plupart du temps, on s’aperçoit qu’ils sont victimes d’une carence de prise en charge. La seule chose à faire, dans la plupart des cas, est une prise en charge dans une relation d’aide (selon la définition de C. Rogers, le père de la psychiatrie comportementale). Cela passe avant tout par une prise en charge sérieuse comportant interrogatoire, examen clinique, tests cutanés (ils prennent ici un intérêt didactique) et bilan complémentaire adapté.
Tout en expliquant au patient que le but est :
* éliminer ou confirmer une étiologie allergique ;
* éliminer ou confirmer une étiologie systémique ;
* en cas de négativité des démarches 1 et 2, de dire qu’il s’agit d’une urticaire chronique sans cause précise, dont l’évolution se fera sur un an à 2 ou 3 ans. Et que dans ce cas, par tâtonnement, le praticien trouvera presque toujours le moyen de soulager le patient par un traitement adapté.
A l’aide de cette méthode simple, le patient devient acteur de sa prise en charge thérapeutique.
Bien sûr, et surtout, à la fin de chaque consultation, il faut illico donner un nouveau rendez-vous. Le patient se sent aider et surtout ne se sentira pas abandonné. Il ne faut pas oublier de lui remettre, outre l’ordonnance, un plan d’action écrit en cas d’urticaire rebelle.
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