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N’oubliez pas les bras et les jambes chez le patient BPCO !
jeudi 25 septembre 2003, par
L’ergométrie est une technique encore peu connue et répandue dans la prise en charge en routine des patients souffrant de broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Avec le développement de la prescription de réhabilitation respiratoire pour ces sujets, cette méthode pourrait aider à mieux cerner l’indication de réhabilitation pour chaque patient BPCO.
Pic physiologique de la réponse du bras et de la jambe en Ergométrie chez des patients hommes et femmes avec une obstruction des voies aériennes. : Rick Carter, PhD, MBA, FCCP ; David B. Holiday, PhD ; James Stocks, MD, FCCP and Brian Tiep, MD
From the University of Texas Health Center at Tyler (Drs. Carter, Holiday, and Stocks), Tyler, TX ; and Pulmonary Care Continuum (Dr. Tiep), Irwindale, CA.
dans Chest. 2003 ;124:511-518
– Objectif de l’étude : rechercher les différences de la capacité de travail pour les bras et les jambes chez les patients avec une BPCO modérée à sévère.
– Technique de l’étude : investigation en cross-section.
– Patients :
* 124 patients (90 hommes et 34 femmes) âgés de 45 à 81 ans avec une BPCO modérée à sévère.
* Le VEMS était de 0,70 à 2,79 L/min (CVF, 1,73 à 5,77 L ; VEMS/CVF, 24 à 69%).
* Tous les patients étaient stables au moment du test et recevaient un traitement médicamenteux stable également.
– Mesures :
* Chaque patient a rempli un questionnaire sur son histoire démographique et médicale, et a bénéficié d’études de la fonction pulmonaire (spirométrie, volumes pulmonaires, et capacité de diffusion), d’une ergométrie d’exercice de pointe avec étude de l’échange des gaz pour les bras et les jambes.
* Ils avaient aussi côté l’évaluation subjective de leur dyspnée perçue et de leur fatigue par le score de Borg pendant l’exercice.
– Résultats :
* les patients étaient comparables pour l’age, avec des hommes plus grands et plus lourds que les femmes.
* Le tabagisme était significativement moindre pour les femmes (47,9 paquets-années vs 66,6 paquets-années pour les hommes) même étudié par tranches d’âge similaire (p > 0.05).
* Les femmes étaient moins obstructives que les hommes, avec un VEMS/CVF (moyenne ± SD) de 46,5 ± 10,9% vs 40,2 ± 9,3%, respectivement.
* La limitation ventilatoire pendant l’exercice était présente pour tous les patients étudiés.
* La capacité maximale de travail était supérieure pour les hommes, et les pics de réponses pour les jambes étaient supérieurs à ceux des bras quelque soit le sexe.
* Au fur et à mesure que l’obstruction des voies aériennes augmentait, la capacité de travail devenait plus limitée.
* La capacité maximale de travail pour les bras était de 38,9 ± 19,6 W, la captation d’oxygène (O2) était de 903,9 ± 263,5 mL/min, et la ventilation minute (E) était de 33,7 ± 9,5 L.
* La capacité maximale de travail pour les jambes était de 62,9 ± 24,8 W, O2 était de 1091,4 ± 321,5 mL/min, et E était de 39,3 ± 12,0 L.
* De là, les valeurs pour le bras étaient 62%, 83% et 85% des valeurs mesurées pour la jambe respectivement.
* Les scores de dyspnée et d’effort extrêmes étaient similaires pour les hommes et les femmes, et pour les bras et les jambes.
* L’analyse de régression était utilisée pour obtenir des équations de prédiction du travail du bras à partir de celui de la jambe mesurée en ergométrie. Pour les watts de travail, un modèle à 3 variables émergeait expliquant 66% de la variance ; l’O2 fournissait un modèle à 4 variables expliquant 80% de la variance et l’E fournissait un modèle à 3 variables expliquant 72% de la variance.
– Conclusion :
* la capacité de travail du bras est réduite de 38% par rapport à celle des jambes, alors que de plus modestes réductions sont notées pour O2 et E, suggérant une plus grande efficacité mécanique pour le travail des jambes comparé à celui des bras.
* Ces données suggèrent aussi une demande métabolique plus importante pour les muscles respiratoires et l’ergométrie du bras.
* Les scores de Borg pour la dyspnée et l’effort extrême étaient équivalents pour chaque modalité et niveau d’obstruction des voies aériennes étudiées, suggérant que la perception joue un rôle important dans la limitation à l’exercice, et que le seuil de fin d’un exercice peut exister.
* De plus, les résultats de l’ergométrie maximale de la jambe peuvent être utilisés avec les index de la fonction pulmonaire pour prédire la charge maximale du bras en watts, la captation d’oxygène (O2) et la ventilation minute (E).
* Ces données peuvent être utilisées pour aider le clinicien dans la prescription d’une réhabilitation ou l’estimation de l’aptitude à l’exercice du bras quand le test du bras n’est pas disponible.
Dans ce travail intéressant et détaillé, les auteurs mettent en évidence une altération franche de la capacité maximale de travail des bras dans une population de patients présentant une BPCO modérée à sévère.
Cette altération, proportionnelle à la sévérité de l’atteinte respiratoire, est largement supérieure (+38%) au niveau des bras par rapport aux jambes pour un même patient, alors que l’extraction d’oxygène au niveau des différents membres est proche.
L’efficacité mécanique du travail des jambes semble ainsi plus longtemps préservé par rapport aux muscles respiratoires et à ceux des bras qui ont de plus une demande métabolique plus importante.
Ces données ont été obtenues sur un échantillon de patients certes hétérogène (VEMS de 0,70 à 2,79 L/min) mais suffisamment large et représentatif de la population générale des patients BPCO en terme de données épidémiologiques.
On notera la corrélation faible entre le score subjectif d’évaluation de la dyspnée d’un patient et l’altération de sa fonction respiratoire.
Ainsi, associée à l’amyotrophie fréquemment présente chez les patients présentant une BPCO modérée à sévère, il existe une diminution significative de la capacité maximale de travail de la masse musculaire restante, musculaire et des quatre membres. Cette diminution est supérieure aux bras par rapport aux jambes, ce qui devrait peut-être relativiser le résultat d’un test de marche ou d’une épreuve d’effort respiratoire sur tapis dans l’appréciation de la capacité fonctionnelle de ces patients.
Ces différentes anomalies seront à prendre en considération pour la prescription de réhabilitation respiratoire chez les patients présentant une BPCO modérée à sévère, traitement désormais important dans l’arsenal thérapeutique pour cette population.
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