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« On n’est jamais d’accord, Gina, alors nous deux, c’est fini... »
mercredi 1er septembre 2004, par
Deux ans après l’actualisation du consensus GINA, cette étude française nous propose une photographie de l’opinion de 3000 praticiens au sujet du contrôle et de l’exacerbation de l’asthme. Spécialistes et non-spécialistes français de l’asthme sont-ils d’accord à l’heure de définir ces notions ?
Contrôle et exacerbations de l’asthme : une étude auprès de plus de 3000 praticiens français : P. Demoly1, B. Crestani2, C. Leroyer3, A. Magnan4, N. Mounedji5, M. Humbert6
1Clinique des Maladies Respiratoires-INSERM U454, Hôpital Arnaud de Villeneuve, CHU Montpellier, Cedex ; 2Service de Pneumologie, Hôpital Bichat, Paris ; 3Service de Pneumologie, CHRU de la Cavale Blanche, Brest ; 4Service de Pneumo-Allergologie, Hôpital Sainte-Marguerite, Marseille ; 5Laboratoire AstraZeneca, Rueil-Malmaison Cedex, Cedex ; 6Service de Pneumologie et Rèanimation Respiratoire, Hôpital Antoine-Béclère, Clamart, Université Paris-Sud, France
dans Allergy 59 (9), 920-926
– contexte :
- le contrôle de l’asthme et la prévention des exacerbations sont les objectifs premiers de la prise en charge de l’asthme.
- Cependant, il y a un manque de définition universelle de ces notions qui peuvent donc avoir une signification variable selon la pratique du médecin.
– Méthodes :
- dans cette étude, 1805 médecins généralistes, 551 pneumologues, 176 allergologues et 470 médecins urgentistes/réanimateurs ont été sélectionnés au hasard à l’automne 2001, et priés de répondre à une question sur le contrôle de l’asthme et à trois questions sur les exacerbations de l’asthme.
– Résultats :
- pour ce qui concerne le contrôle de l’asthme,
- la présence de symptômes minimums a été le premier critère pour les spécialistes de l’asthme (pneumologues et allergologues),
- tandis qu’une fonction respiratoire normale a été choisie par les praticiens non-spécialistes (médecins généralistes et médecins d’urgence).
- Le premier critère d’exacerbation légère
- pour les spécialistes de l’asthme a été la survenue, pendant au moins deux jours, d’une augmentation de la fréquence de la dyspnée et/ou l’utilisation de Béta 2 mimétiques rapides.
- Pour les non-spécialistes, une dyspnée retentissant sur les activités quotidiennes et/ou le sommeil a été la notion choisie.
- L’hospitalisation a été unanimement reconnue comme le premier critère d’exacerbation sévère.
- Les critères suivants étant une diminution du débit pointe de plus de 30 % par rapport à la ligne de base sur deux jours consécutifs, et la survenue d’un épisode nécessitant des corticoïdes systémiques.
– Conclusions :
- cette étude souligne la complexité des notions de contrôle de l’asthme et d’exacerbation et fournit de nouvelles informations pour orienter les programmes d’éducation continue.
Portant sur plus de 3000 médecins, cette étude donne un reflet de l’abord de l’asthme en pratique quotidienne.
Pour les spécialistes de cette maladie, le contrôle de l’asthme est avant tout une stabilité clinique tandis que les non-spécialistes mettent en avant une fonction respiratoire normale.
Toujours pour les spécialistes, l’exacerbation légère est avant tout une altération des scores cliniques et médicamenteux.
Pour les non-spécialistes le choix s’est porté sur le retentissement de la dyspnée sur les activités quotidiennes et/ou le sommeil.
Les deux catégories de praticiens étaient d’accord pour reconnaître l’hospitalisation comme premier critère d’exacerbation sévère ; viennent ensuite une dégradation fonctionnelle appréciée sur une chute de plus de 30 % du débit de pointe pendant plus de deux jours consécutifs, puis la présence d’un épisode imposant le recours aux corticoïdes systémiques.
Le consensus Gina, publié en 95, revu en 2002, définit ainsi le contrôle de l’asthme :
- Peu (idéalement aucun) de symptômes chroniques, y compris les symptômes nocturnes.
- Peu de crise d’asthmes (ou rarement).
- Pas d’admission dans un service d’urgence ou de consultation médicale imprévue (en urgence).
- Faible besoin de Béta 2 mimétiques à la demande.
- Aucune limitation de l’activité physique, même à l’effort.
- Fonction respiratoire normale ou quasi normale.
- Peu (ou pas) d’effets indésirables induits par le traitement.
Que ce soit pour le contrôle de l’asthme ou pour les exacerbations, ce consensus n’a pas vraiment généré l’harmonie des pratiques que l’on pouvait espérer...
Ce « manque de consensus » est confirmé par de multiples études, tant nationales qu’internationales (classifying asthma, K.Baker, D.Brand, J.Hun dans Chest 2003), qui conclue à la nécessité de redéfinir le système de classification de l’asthme, et plus récemment, l’étude multicentrique sur la prise en charge de l’asthme au niveau mondial, publiée dans le JACI, en juillet 2004, que rapportait et commentait dans ces colonnes Stéphane Guez.
Entraîner l’adhésion des patients à un projet thérapeutique peut difficilement s’envisager sans une cohérence du discours qui repose nécessairement sur des définitions acceptées par tous.
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