Le jackpot de l’allergique au bouleau : le jackfruit !!

samedi 16 octobre 2004 par Dr Stéphane Guez6274 visites

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Le jackpot de l’allergique au bouleau : le jackfruit !!

Le jackpot de l’allergique au bouleau : le jackfruit !!

samedi 16 octobre 2004, par Dr Stéphane Guez

La Réunion, son accueil, ses plages, son eau....Mais nous savons malheureusement bien, et nos patients aussi, que l’allergie peut transformer un beau voyage en un véritable cauchemar. La consommation de fruits exotiques par exemple est-elle dangereuse pour un allergique au bouleau ?

L’allergie au ti-jacque : un nouvel exemple d’allergie croisée alimentaire à Bet v 1. : S. T. H. P. Bolhaar1, R. van Ree2, C. A. F. M. Bruijnzeel-Koomen1, A. C. Knulst1, L Zuidmeer2

1Department Allergology/Dermatology, University Medical Center Utrecht, Utrecht, The Netherlands ; 2Sanquin, Department of Immunopathology, Amsterdam, The Netherlands

dans Allergy 59 (11), 1187-1192

 Introduction :

  • L’allergie au ti-jacque a été rapportée seulement une fois.
  • On ne sait pas s’il s’agit d’une allergie alimentaire liée à une sensibilisation directe ou à une allergie croisée avec des allergènes polliniques.

 Objectif de l’étude :

  • Établir si l’allergie au ti-jacque est liée à une allergie au pollen de bouleau.

 Méthodologie :

  • 2 patients ayant une allergie au ti-jacque et 5 patients ayant une allergie au pollen de bouleau avec une allergie croisée à la pomme ont été recrutés.
  • La sensibilisation, aux pollens ou aux plantes alimentaires, a été établie par des prick-tests et par des RAST et immunoblotting.
  • Les RAST ont été faits pour Bet v A11 et Mal d 1.
  • La réactivité croisée a été évaluée par inhibition du RAST et de l’immunoblot.
  • L’activité biologique des IgE a été mesurée par un test de libération d’histamine des basophiles.
  • L’allergie au ti-jacque a été évaluée par un test de provocation alimentaire en double aveugle contre placebo ou par un test en ouvert.

 Résultats :

  • Chez les 2 patients, le test de provocation confirme l’allergie au ti-jacque.
  • Les prick tests étaient respectivement de 41 et 27 mm², et le taux des IgE spécifiques au ti-jacque de 5.9 et 0.8 UI/ml.
  • L’analyse par immunoblot a montré une réactivité des IgE à des bandes de 17 kDa.
  • La correspondance de cet allergène avec celui de Bet v 1 a été démontrée par les tests d’inhibition du RAST et de l’immuno-marquage.
  • Pour évaluer si l’allergie au ti-jacque est habituelle chez les patients ayant une allergie croisée pomme/bouleau, 5 patients ayant cette allergie croisée ont eu un test de provocation au ti-jacque. Les 5 ont eu des symptômes.

 Conclusions :

  • L’allergie au ti-jacque peut être rajoutée à la liste des allergies croisées alimentaires possibles chez les patients allergiques au bouleau.
  • L’augmentation de consommation de ce fruit pourrait conduire à une augmentation des réactions allergiques.

Les auteurs ont mis en évidence une nouvelle allergie croisée entre bet v1 et un fruit, le ti-jacque. Il faudra donc en tenir compte comme un nouvel allergène croisé chez des patients sensibilisés au bouleau. Si ces derniers sont également allergiques à la pomme alors il y a toutes les chances qu’ils le soient aussi au ti-jacque.

Ce travail est très intéressant car il part d’une constatation clinique et avec des moyens simples permet de mettre en évidence une nouvelle allergie croisée avec des preuves certaines.

Le jacquier est un arbre (artocarpus heterophyllus) qui fait partie de la famille des moracées comme le figuier. Il est originaire des indes mais se trouve actuellement beaucoup à la Réunion. Il donne des fruits parfois très volumineux, qui deviennent à la mode et que l’on trouve de plus en plus souvent sur les étals des marchands de fruits exotiques.

On constate encore une fois que certains allergènes sont très ubiquitaires et sont donc non seulement des allergènes puissants mais également des allergènes entraînant des manifestations allergiques croisées avec un grand nombre de fruits.

Cela ouvre des perspectives à la fois diagnostique et thérapeutique.

  • On peut imaginer des produits de tests allergologiques de deuxième génération qui seront constitués uniquement du fragment Bet v 1 par exemple, permettant de reconnaître de façon certaine ces patients à risques d’allergies croisées.
  • Sur le plan thérapeutique on peut aussi imaginer des nouveaux médicaments comme des anti Bet v 1, ou des anti IgE contre les IgE spécfiques de Bet v 1, ou encore, pourquoi pas, une désensibilisation avec un allergène un peu modifié pour diminuer les réactions cliniques.

La mise en évidence de ces allergies croisées va donc bien au de-là d’un simple cas clinique anecdotique.

Pour tous les patients qui se rendent de plus en plus souvent à la Réunion il faut les prévenir s’ils sont allergiques au bouleau et à la pomme : ne pas approcher le jacquier ou du moins ses fruits.

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