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Atopie : un avenir sombre pour les idées claires ?
mercredi 5 octobre 2005, par
Sensibilisation, atopie, maladie allergique : nous utilisons ces mots au quotidien sans qu’il soit vraiment certain que nous leur accordions tous la même signification. Finalement, s’agit-il de notions de base fécondes ou de concepts à préciser ?
Caractérisation des phénotypes atopiques de l’enfance dans le but d’étudier le lien entre sensibilisation atopique et maladie allergique. : R. J. Kurukulaaratchy, S. Matthews, S. H. Arshad
The David Hide Asthma and Allergy Research Centre, St Mary’s Hospital, Newport, Isle of Wight, UK
dans Allergy 60 (10), 1280-1286
– Objectifs :
- Bien que la sensibilisation atopique soit fréquente chez l’enfant, ses liens avec la maladie allergique clinique restent encore partiellement incompris.
- Nous avons donc cherché à explorer cette relation par la caractérisation de la sensibilisation basée sur les phénotypes atopiques.
– Méthodes :
- Les enfants ont été recrutés à la naissance (n = 1456) puis revus à 1, 2, 4 et 10 ans.
- Des tests cutanés (SPT) aux allergènes communs ont été réalisés à 4 ans (n = 980) et à 10 ans (n = 1036) en même temps qu’une exploration fonctionnelle respiratoire (n = 981), des tests d’hyperréactivité bronchique (n = 784) et des IgE sériques (n = 953), ceci à 10 ans.
- Les phénotypes atopiques ont été définis, par leur profil de sensibilisation, pour les enfants avec SPT à la fois à 4 et à 10 ans (n = 823).
– Résultats :
- Parmi les enfants phénotypés :
- 68% n’ont jamais été atopiques.
- 4.3% atopie de la petite enfance (seulement atopiques à 4 ans).
- 16.5% atopie chronique de l’enfance (à 4 et à 10 ans).
- 11.2% atopie retardée de l’enfance (seulement à 10 ans).
- Le groupe des enfants « jamais atopiques » comportait une faible mais identifiable prévalence de maladies allergiques telles que l’asthme, l’eczéma et la rhinite.
- Parmi les sujets sensibilisés les aéroallergènes étaient plus fréquemment en cause que les aliments, quelle que soit la période de l’enfance.
- Les enfants atopiques chroniques ont :
- La plus forte prévalence de sibilants, d’eczéma et de rhinite.
- Une prévalence augmentée de sensibilisation vis-à-vis des aéroallergènes.
- Quelques signes de sensibilisation alimentaire persistante.
- Des IgE du cordon significativement plus élevées que le groupe des « jamais atopiques » (p = 0.006).
- Des IgE totales (p<0.001) et une hyperréactivité bronchique (p<0.001) plus élevées à 10 ans que les autres phénotypes.
– Conclusions :
- Chez les enfants, une certaine proportion d’eczéma, de rhinite et d’asthme ne relève pas de l’atopie.
- Le profil d’atopie le plus fréquent chez l’enfant est celui d’une sensibilisation chronique, associée à une maladie allergique précoce, persistante et cliniquement significative.
- Le concept couramment admis de « la marche de l’allergie » chez l’enfant peut être une simplification abusive de l’histoire naturelle de l’atopie de l’enfance et de la maladie allergique.
Non, l’asthme n’a pas toujours à voir avec l’atopie chez l’enfant, pas plus que la rhinite ou l’eczéma.
En matière d’atopie, la situation la plus commune est toutefois celle d’une atopie chronique associée à une maladie allergique débutant tôt dans la vie et ayant tendance à persister.
Au total la « marche de l’allergie » chez l’enfant, concept communément admis, ne serait qu’une simplification abusive pour ne pas dire une représentation erronée de la réalité.
Autant de concepts familiers bousculés jusqu’à la remise en cause, voilà qui témoigne de la vitalité de notre discipline et de la nécessité d’une attitude critique permanente, y compris et peut être même surtout envers nos « concepts fondateurs » comme l’atopie.
L’atopie n’est pas toujours clairement définie, mais elle est toujours difficile à caractériser et son histoire naturelle n’est pas toujours celle d’un chemin rectiligne comme l’avait montré une étude Grecque de 2002, qui avait retrouvé des variations de sensibilisations avec le temps, pas toujours en rapport avec la persistance de l’asthme.
Ici, les auteurs ont cherché à définir des phénotypes distincts de l’atopie selon des critères que l’on peut bien sûr discuter (IgE totales).
Leur classification a tout de même permis de distinguer différents profils évolutifs, rejetant ipso facto toute tendance à la généralisation.
Être allergique c’est vraiment réagir différemment des autres !
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