Vivre « naturaliste » pour être moins allergique ?

samedi 28 janvier 2006 par Dr Alain Thillay2429 visites

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Vivre « naturaliste » pour être moins allergique ?

Vivre « naturaliste » pour être moins allergique ?

samedi 28 janvier 2006, par Dr Alain Thillay

L’anthroposophie se caractérise par une vie naturaliste prescrivant d’utiliser un minimum d’antibiotiques, d’antipyrétiques et de vaccins. Une étude antérieure avait montré une diminution de la prévalence des maladies allergiques chez les enfants ayant ce style de vie. Cette étude s’attache à préciser les facteurs impliqués.

Maladies allergiques et sensibilisation chez les enfants des écoles Steiner. : Helen Flöistrup, MScab, Jackie Swartz, MDc, Anna Bergström, PhDa, Johan S. Alm, MD, PhDd, Annika Scheynius, MD, PhDe, Marianne van Hage, MD, PhDf, Marco Waser, PhDg, Charlotte Braun-Fahrländer, MDg, Dieneke Schram-Bijkerk, MSch, Machteld Huber, MDi, Anne Zutavern, MDj, Erika von Mutius, MDj, Ellen Üblagger, MDk, Josef Riedler, MD, PhDl, Karin B. Michaels, ScD, PhDm, Göran Pershagen, MD, PhDan, the PARSIFAL Study Groupo

a From the Institute of Environmental Medicine
b Centre for Allergy Research, Karolinska Institutet, Stockholm
c Vidar Clinic, Järna
d Sachs’ Children’s Hospital, Stockholm Söder Hospital
e Department of Medicine, Clinical Allergy Research Unit
f Department of Medicine, Clinical Immunology and Allergy Unit, Karolinska Institutet and University Hospital, Stockholm
g Department of Environment and Health, Institute of Social and Preventive Medicine, University of Basel
h Institute for Risk Assessment Sciences, Utrecht University
i Louis Bolk Institute, Driebergen
j Dr von Hauner Children’s Hospital, University of Munich
k Department of Paediatric Pulmonology and Allergology, Children’s Hospital, Salzburg
l Children’s Hospital Schwarzach
m Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, and Department of Epidemiology, Harvard School of Public Health, Boston
n Department of Occupational and Environmental Health, Stockholm County Council
o Göran Pershagen, Tobias Alfvén, Johan Alm, Anna Bergström, Lars Engstrand, Helen Flöistrup, Marianne van Hage, Niclas Håkansson, Gunnar Lilja, Fredrik Nyberg, Annika Scheynius, Jackie Swartz, Magnus Wickman (Sweden) ; Charlotte Braun-Fahrländer, Marco Waser, Felix Sennhauser, Roger Lauener, Johannes Wildhaber, Alex Möller (Switzerland) ; Bert Brunekreef, Dieneke Schram-Bijkerk, Gert Doekes, Mirian Boeve, Jeroen Douwes, Machteld Huber, Mirjam Matze (The Netherlands) ; Erika von Mutius, Marcus R. Benz, Jörg Budde, Markus Ege (Germany) ; Josef Riedler, Waltraud Eder, Ellen Üblagger, Gertraud Weiss, Mynda Schreuer (Austria) ; Karin B. Michels (United States)

dans JACI Volume 117, Issue 1, Pages 59-66 (January 2006)

 Contexte

  • Le style de vie anthroposophique présente plusieurs caractéristiques intéressantes dans la relation avec l’allergie, par exemple, une restriction de l’usage des antibiotiques et de certaines vaccinations.
  • Une étude antérieure suédoise pratiquée chez des enfants de l’école Steiner, ayant souvent un style de vie anthroposophique, montrait une réduction du risque atopique. Toutefois, les facteurs protecteurs n’avaient pas été identifiés.

 Objectif

  • Mettre en évidence les facteurs qui peuvent contribuer à un risque plus faible d’allergie parmi les enfants d’écoles Steiner.

 Méthodes

  • Il s’agit d’une étude multicentrique en section croisée incluant 6630 enfants âgés de 5 à 13 ans (4606 provenant d’écoles Steiner et 2024 provenant d’écoles classiques) de 5 pays européens.

 Résultats

  • Dans plusieurs études, les résultats objectivaient une prévalence inférieure chez les enfants des écoles Steiner par rapport aux enfants des écoles de référence.
  • Globalement, il existait une réduction statistiquement significative des risques de rhino-conjonctivite, d’eczéma atopique et de sensibilisation allergique (IgE spécifiques > ou = à 0,35 kU/L), avec une hétérogénéité entre les pays.
  • En prenant en compte le diagnostic de maladie par le médecin, l’usage des antibiotiques durant la première année de vie était associé à une augmentation du risque de rhino-conjonctivite (OR :1,97 ; IC 95% : 1,26-3,08), d’asthme (OR : 2,79 ; IC 95% : 2,03-3,83) et d’eczéma atopique (OR :1,63 ; IC 95% : 1,22-2,17).
  • L’usage précoce des antipyrétiques était en relation avec une augmentation du risque d’asthme (OR :1,54 ; IC 95% : 1,11-2,13) et d’eczéma atopique (OR : 1,32 ; IC 95% : 1,02-1,71).
  • Les enfants ayant reçu le vaccin rougeole, oreillon, rubéole montraient une augmentation du risque de rhino-conjonctivite, alors que la rougeole était associée à une diminution du risque d’eczéma IgE médié.

 Conclusion

  • Certaines caractéristiques du style de vie anthroposophique, comme la restriction de l’usage des antibiotiques et des antipyrétiques, sont associées à une réduction du risque de maladies allergiques chez l’enfant.

L’anthroposophie est une « médecine » ou plutôt une philosophie de la vie datant de 1920, de type naturaliste, dont les grandes lignes sont un régime plutôt végétarien avec des végétaux fermentés, l’usage de l’homéopathie et de la phytothérapie et un minimum d’antibiotiques, d’antipyrétiques et de vaccinations.

Une étude antérieure suédoise avait montré que le mode de vie anthroposophique améliorait la flore intestinale ce qui pouvait expliquer la diminution de la prévalence atopique chez ces enfants des écoles Steiner.

Ici, les auteurs ont tenté de préciser quels étaient les facteurs qui diminuent le risque allergique chez ces enfants. Ainsi, les différentes études pratiquées dans 5 pays objectivent une diminution de l’ensemble des maladies IgE médiées chez les enfants ayant un style de vie anthroposophique comparativement aux enfants ayant un style de vie commun.

Le recours fréquent aux antibiotiques semble lié à un plus grand risque de rhino-conjonctivite, d’eczéma atopique et d’asthme.

L’usage précoce des antipyrétiques serait lié à un plus grand risque d’asthme et d’eczéma atopique.

Enfin, les enfants ayant reçu le vaccin ROR aurait un plus grand risque de rhino-conjonctivite alors que le fait d’avoir eu la rougeole protègerait de la dermatite atopique.

Ainsi donc, la vie anthroposophique protègerait du risque des maladies IgE médiées.

Faut-il accepter sans discuter ces résultats ? Non, bien sûr ?

On ne connaît rien du statut allergique des parents et des enfants eux-mêmes dans les deux groupes. Cela aurait alourdi sans doute la méthodologie, pourtant, nous aurions aimé connaître les résultats des tests cutanés et CAP RAST des parents et des enfants pour ce qui concerne les aéroallergènes classiques. En d’autres termes, n’y aurait-il pas moins d’atopiques chez les « Steiner » que chez les « classiques » ?
N’entrerait-on pas en « anthroposophie » justement parce que l’on va bien ?

Ainsi, la prochaine étape serait de pratiquer une étude comparative des enfants anthroposophiques et des enfants élevés classiquement en connaissant le statut atopique des parents et des enfants. Cela permettrait définitivement d’éliminer cet éventuel biais de recrutement.

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