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La désensibilisation à la soupe américaine, ça marche !
samedi 20 mai 2006, par
Les allergologues américains ont recours fréquemment à des immunothérapies spécifiques à large spectre, mélangeant ainsi de nombreux allergènes dans le même flacon. Les auteurs de cette étude cherchent à mettre en évidence l’effet à long terme d’une telle désensibilisation pratiquée dans l’enfance en réévaluant ces patients à l’âge adulte.
Effets immunologiques à long terme de l’immunothérapie spécifique à large spectre aux aéroallergènes. : Susan L. Limba, Kathryn C. Browna, Robert A. Woodb, Peyton A. Egglestonb, Robert G. Hamiltona, N. Franklin Adkinson, Jr.a
aDivision of Allergy and Clinical Immunology and
bDepartment of Pediatrics, Johns Hopkins University School of Medicine, Baltimore, Md., USA
dans International Archives of Allergy and Immunology 2006 ;140:245-251
– Introduction :
- Les données concernant les effets immunologiques prolongés et à long terme de l’immunothérapie spécifique chez des individus polysensibilisés sont limitées.
- Afin d’étudier les effets possibles à long terme, des prick-tests et le taux des IgE spécifiques ont été obtenus de sujets qui avaient antérieurement reçu durant plusieurs années une immunothérapie spécifique à large spectre avec des aéroallergènes.
– Méthodes :
- Quatre-vingt deux sujets (78% de sujet de sexe masculin, âge moyen 23 ans) antérieurement enrôlés dans un essai randomisé, contrôlé contre placebo concernant l’immunothérapie spécifique pour traitement d’un asthme allergique infantile, ont été réévalués à l’âge adulte (intervalle moyen de suivi : 10.8 ans) à l’aide de prick-tests et de CAP-RAST concernant les aéroallergènes principaux.
- Tous ont accompli au moins 18 mois (médiane 27 mois) d’injections actives ou d’injections de placebo en entretien, sans autre immunothérapie spécifique par la suite.
– Résultats :
- Lors du suivi à l’âge adulte, 36% de l’ensemble des prick-tests aux allergènes utilisés comme traitement parmi les sujets qui ont reçu l’immunothérapie (n=41) avaient sensiblement réduit d’intensité contre 26% chez les patients ayant reçu une immunothérapie placebo (n=41 ; p=0.03).
- Aucune différence significative n’a été notée pour les différents allergènes thérapeutiques.
- On n’a observé aucune différence significative des modifications à long terme du taux des IgE spécifiques sériques pour l’ensemble des allergènes thérapeutiques entre le groupe immunothérapie spécifique et le groupe placebo (p = 0.43).
- Le groupe immunothérapie spécifique et le groupes placebo ont eu une acquisition semblable de nouvelles sensibilisations au prick-tests, de la période de randomisation de l’étude initiale dans l’enfance à la fin de celle-ci (15% contre 20% ; p = 0.28) et durant le suivi à l’âge adulte (30% contre 31% ; p = 0.75).
– Conclusions :
- L’immunothérapie supprime la réactivité des tests cutanés 8 à16 ans
après interruption du traitement, mais les effets à long terme sur les IgE sériques spécifiques ne sont pas observés. - L’immunothérapie spécifique à large spectre ne semble pas influencer l’acquisition de nouvelles sensibilisations aux aéroallergènes.
Il s’agit d’une étude américaine de suivi après coup. Les auteurs ont à nouveau exploré, à l’âge adulte, des patients suivis durant l’enfance et ayant reçu une immunothérapie spécifique à large spectre aux aéroallergènes pour traiter un asthme.
Quand ces auteurs américains parlent d’immunothérapie spécifique à large spectre, je pense qu’il faut entendre par là, comme c’est l’habitude aux USA, qu’il s’agit d’un mélange complexe pouvant contenir des extraits de pollens, d’acariens, de protéines animales, de moisissures. Ce que nous, français, appelons une soupe.
En effet, les allergologues américains ont conservé cette habitude d’ITS à large spectre alors que nous, allergologues européens, avons l’habitude des mélanges plus ciblés. Il est important de le savoir car cela peut sans doute créer un biais si nous voulons rapporter les résultats de cette étude à notre pratique européenne.
Cette étude montre donc que les tests cutanés pratiqués à l’âge adulte, correspondant aux aéroallergènes utilisés pour l’ITS, montrent moins de réactivité dans le groupe actif que dans le groupe placebo. En revanche, il n’y a pas de différence lorsque l’on prend en compte les IgE spécifiques sériques.
Pour ce qui concerne, l’acquisition de nouvelles sensibilisations, désensibilisés ou pas, il n’y aurait pas de différence, le risque d’acquérir de nouvelles sensibilisations serait le même.
Il est dommage que cette étude ne donne pas de notion clinique concernant les deux groupes, les patients désensibilisés vont-ils mieux ? Consomment-ils moins de médicaments anti-asthmatiques ?
Comme déjà indiqué, on ne peut pas sortir grand-chose de ce travail par rapport à la pratique européenne qui tend à cibler les allergènes entrant dans la composition des vaccins allergéniques.
Cette étude rappelle simplement qu’au long cours la désensibilisation pratiquée suffisamment longtemps poursuit son action même beaucoup plus tard après son interruption et que cela serait contrôlable au niveau de la réactivité des tests cutanés. Ce que tout allergologue praticien avait constaté depuis bien longtemps.
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