La pectine rend les fruits indigestes, et ça pourrait vous donner des boutons !

lundi 4 juin 2007 par Dr Hervé Couteaux19482 visites

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La pectine rend les fruits indigestes, et ça pourrait vous donner des boutons !

La pectine rend les fruits indigestes, et ça pourrait vous donner des boutons !

lundi 4 juin 2007, par Dr Hervé Couteaux

La stabilité des allergènes n’est pas qu’une simple question de biochimie. Un allergène fragile sera rapidement inactivé, ne provoquant au pire que des syndromes oraux tandis qu’un allergène résistant notamment à la digestion, pourra entraîner, après ingestion, des syndromes systémiques, parfois sévères…

Un effet matrice des fruits riches en pectine perturbe la digestion des allergènes par la pepsine in vitro et in vivo. : N. Polovic, M. Blanusa, M. Gavrovic-Jankulovic, M. Atanaskovic-Markovic, L. Burazer, R. Jankov, T. Cirkovic Velickovic (2007)

*Department of Biochemistry, Faculty of Chemistry, University of Belgrade, Belgrade, Serbia, University Children’s Hospital, Belgrade, Serbia and Institute of Immunobiology and Virology, Torlak, Belgrade, Serbia

dans Clinical & Experimental Allergy
Volume 37 Issue 5 Page 764Issue 5 - 771 - May 2007

 Contexte :

  • On pense généralement qu’un allergène alimentaire soumis à une digestion gastrique devrait être stable.
  • Les divers polysaccharides acides des plantes, y compris la pectine, sont omniprésents dans des matrices de fruit et peuvent former des hydrogels dans des conditions de pH faible.

 Objectif :

  • Le but de cette étude était d’étudier l’effet de l’hydrogel formant les matrices de fruits riches en polysaccharides sur la digestion pepsique gastrique des allergènes de fruit in vitro et in vivo.

 Méthodes :

  • Des protéines d’extrait de fruit (kiwi, banane, pomme et cerise) et un allergène majeur purifié du kiwi, Act c 2, ont été digérés par un fluide gastrique simulé selon la pharmacopée des USA.
  • Des expériences in vivo sur la digestion de kiwi ont été réalisées chez quatre volontaires en bonne santé, non atopiques, en examinant le contenu gastrique 1 heure après l’ingestion du kiwi.
  • Les protéines de kiwi et l’Act c 2 ont été détectées par immunoblot avec des anticorps monoclonaux anti-Act c 2 et des polyclonaux (anticorps antisera de lapin).

 Résultats :

  • Les extraits bruts de fruit étaient résistants à la digestion par la pepsine par comparaison avec les extraits généralement préparés.
  • Dans la teneur gastrique de tous les volontaires, après l’ingestion de kiwi et immunoblotting, des molécules intactes d’Act c 2 ont été détectées avec des anticorps monoclonaux anti-Act c 2, tandis que des protéines de kiwi de poids moléculaires plus élevé étaient détectées par l’utilisation d’antisérum polyclonal de lapin.
  • L’addition de pectine de pomme (1.5% et 3%) à l’allergène purifié de kiwi (Act c 2) le rendait capable de résister à la digestion de pepsine in vitro.

 Conclusion :

  • L’effet matrice de fruits riches en pectine peut influencer la digestibilité de protéines alimentaires et, de ce fait, modifier le processus de sensibilisation allergique chez les individus atopiques.

Les fruits frais riches en pectine ne sont guère modifiés par la digestion gastrique, ce qui peut avoir des conséquences sur la sensibilisation aux protéines qu’ils contiennent.

Certaines protéines emprisonnées dans un hydrogel de pectine résistent en effet aux processus de digestion gastrique alors que les molécules « nues » seraient probablement dégradées.

Ce phénomène a été observé dans cette étude tant pour Act c 2, une Thaumatine-like du kiwi vert, que pour plusieurs protéines constitutives du kiwi au sujet desquelles nous manquons malheureusement de détail.

La connaissance des allergènes, et particulièrement de la biochimie de ces protéines fait partie de l’allergologie moléculaire.

Les caractéristiques de ces molécules ont parfois des conséquences cliniques importantes : une protéine de réserve, très résistante et non dégradée par la digestion pourra donner des réactions généralisées car son « contact » avec le sujet allergique sera plus « intime » que celui d’une protéine rapidement dégradée par la salive, dont les conséquences ne seront que buccales ou péribuccales.

La connaissance que pourra avoir l’allergologue de telles caractéristiques modulera, à n’en pas douter, l’information délivrée à son patient ainsi que son attitude thérapeutique en général.

Petit rappel sur les thaumatines, catégorie de protéines à fort pouvoir édulcorant, extraites à l’origine du fruit de la plante tropicale Thaumatococcus danielli :

  • Act c 2 est une proteine thaumatine-like (TLP, à ne pas confondre avec LTP, les protéines de transport de lipides).
  • La famille des Thaumatines appartient au groupe des PR-5.
  • On trouve des Thaumatines chez la plupart des plantes ainsi que chez certains champignons, acariens et insectes.

Selon l’intéressante base de données Allfam, récemment présentée au symposium international d’allergologie moléculaire de Rome par Christian Radauer (cf compte rendu de ce congrès sur allergique.org) (http://www.meduniwien.ac.at/allerge...) il est admis que les TLP sont stables dans des milieux à pH faible (milieux acides) et résistantes aux traitements par la chaleur ou aux dégradations protéolytiques.

Les TLPs ont été caractérisées en tant qu’allergènes dans plusieurs fruits (pomme, cerise, kiwi, orange et raisin) et légumes (poivron) ainsi que dans certains pollens, notamment de Cupressacées (Cryptomeria japonica, Cupressus arizonica, C. sempervirens, Juniperus ashei,…) mais on dispose actuellement de peu de données sur l’allergie aux thaumatine-like.

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