CSI durant le premier trimestre de grossesse : attention à la dose !

jeudi 31 décembre 2009 par Dr Alain Thillay807 visites

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CSI durant le premier trimestre de grossesse : attention à la dose !

CSI durant le premier trimestre de grossesse : attention à la dose !

jeudi 31 décembre 2009, par Dr Alain Thillay

Beaucoup de travaux existent pour suggérer que l’utilisation de doses faibles à modérées de corticostéroïdes inhalés durant la grossesse, particulièrement le premier trimestre, n’engendre pas d’augmentation du risque de malformations congénitales. Mais, qu’en est-il des doses supérieures à 1000 µg par jour ? C’est tout l’intérêt de cette étude que de tenter d’y répondre.

Doses élevées de corticostéroïdes inhalés pendant le premier trimestre de la grossesse et malformations congénitales. : Lucie Blais, PhDacd, Marie-France Beauchesne, PharmDacd, Catherine Lemière, MD, MScbc, Naoual Elftouh, MScc

a Faculty of Pharmacy, Université de Montréal, Montreal, Quebec, Canada

b Faculty of Medicine, Université de Montréal, Montreal, Quebec, Canada

c Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal, Montreal, Quebec, Canada

d Endowment Pharmaceutical Chair AstraZeneca in Respiratory Health, Montreal, Quebec, Canada

dans JACI Volume 124, Issue 6, Pages 1229-1234.e4 (December 2009)

 Contexte :

  • Bien que des données rassurantes existent sur l’utilisation de doses faibles à modérées de corticostéroïdes inhalés (CSI) pendant la grossesse, les données sont insuffisantes pour les femmes recevant des doses élevées.

 Objectif :

  • Etudier l’association entre les doses de CIS au cours du premier trimestre de la grossesse et le risque de malformations congénitales chez des femmes souffrant d’asthme.

 Méthodes :

  • Nous avons mené une étude de cohorte sur 13280 grossesses de femmes asthmatiques (1990-2002) en reliant les 3 bases de données administratives du Québec (Canada).
  • A l’aide de modèles d’équation d’estimation généralisée, nous avons comparé les femmes qui prennent des doses jusqu’à 1000 µg/j de CSI (équivalent de chlorofluorocarbone de dipropionate de béclométasone) avec des femmes qui prennent des doses supérieures à 1000 µg/j de CSI et celles n’en prenant pas du tout.
  • Les principales mesures de résultat étaient toutes les malformations congénitales majeures ou non.

 Résultats :

  • Nous avons identifié 1257 nourrissons atteints d’une malformation congénitale (9,5%) et 782 nouveau-nés avec une malformation majeure (5,9%).
  • Nous avons constaté que les femmes ayant utilisé des doses supérieures à 1000 µg/j de CSI (n=154) étaient beaucoup plus susceptibles (63%) d’avoir un bébé atteint d’une malformation que les 4392 femmes ayant utilisé des doses allant jusqu’à 1000µg/j (rapport de risque ajusté, 1,63 ; IC 95%, 1,02-2,60).
  • D’autre part, les femmes qui ont utilisé des doses jusqu’à 1000 µg n’avaient pas plus de risque que les femmes n’ayant pas recours aux CSI durant le premier trimestre (n=8734).
  • Pas de tendances significatives d’une ampleur similaire ont été trouvées pour les malformations majeures.

 Conclusions :

  • Notre étude ajoute des preuves sur la sécurité des doses faibles à modérées de CSI au cours du premier trimestre de grossesse, mais soulève des inquiétudes sur les doses élevées.
  • Cependant, nous ne pouvons pas exclure la possibilité de confusion résiduelle selon la gravité de cette association.

Les anomalies congénitales regroupent les malformations métaboliques, anatomiques et fonctionnelles.

Au Canada, les statistiques montrent que dans la population générale les anomalies congénitales graves concernent 2 à 3 % des naissances alors que tous niveaux de gravité confondus ce pourcentage passe à environ 4%.

Ici l’étude de cohorte s’étend sur douze ans de 1990 à 2002 pour prendre en compte 13280 grossesses de femmes asthmatiques.

Toutes malformations confondues, bénignes ou graves, 9,5% des nourrissons sont atteints dont 5,9% de malformations graves.

D’emblée, force est de constater, concernant ces malformations graves, que la prévalence est beaucoup plus grande que pour des grossesses de la population générale, largement le double !

Les femmes ayant utilisées durant leur grossesse des doses de CSI à un maximum de 1000 µg par jour durant le premier trimestre n’avaient pas plus de risque d’avoir un enfant atteint de malformation congénitale que les femmes asthmatiques n’ayant pas eu recours aux CSI.

A l’encontre, les femmes ayant eu recours à des doses supérieures à 1000 µg par jour durant le premier trimestre avaient un risque statistiquement significatif plus élevé d’avoir un bébé porteur d’une malformation congénitale.

Si certes ce travail rassure quant aux posologies courantes, jusqu’à 1000 µg par jour maximum durant le premier trimestre gestationnel, il est franchement inquiétant pour les posologies supérieures avec 9,5% de malformations congénitales contre 4% dans la population générale !

Nous pouvons donc être critiques à l’instar des auteurs qui ne négligent pas la possibilité d’un biais.

Ou alors, il faudrait admettre que le génotype de l’asthme grave commande aussi un surplus de malformations congénitales…

En tous cas, sur le plan pratique, au quotidien, le praticien adaptera au mieux la posologie minimale efficace de CSI durant le premier trimestre de grossesse compte tenu du rapport bénéfice/risque.

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