Les asthmatiques résisteraient-ils aux particules diesel ?

lundi 31 janvier 2011 par Dr Philippe Carré645 visites

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Les asthmatiques résisteraient-ils aux particules diesel ?

Les asthmatiques résisteraient-ils aux particules diesel ?

lundi 31 janvier 2011, par Dr Philippe Carré

Des doses de particules diesel pro-inflammatoires chez des sujets sains, n’entraînent pas chez les sujets asthmatiques d’inflammation équivalente ou plus importante des voies aériennes. : 1. Annelie F Behndig1,2,
2. Nirina Larsson1,2,
3. Joanna L Brown3,4,
4. Nikolai Stenfors1,
5. Ragnberth Helleday1,2,
6. Sean T Duggan5,
7. Rosamund E Dove1,5,
8. Susan J Wilson3,
9. Thomas Sandstrom1,2,
10. Frank J Kelly5,
11. Ian S Mudway5,
12. Anders Blomberg1,2

dans Thorax 2011 ;66:12-19 doi:10.1136/thx.2010.140053

 Contexte :

  • L’exposition aux polluants aériens du trafic automobile, en particulier les émissions de particules diesel, a été associée à des effets néfastes sur la santé, surtout chez les sujets ayant une maladie respiratoire pré-éxistante
  • Cette étude examine l’hypothèse que cette sensibilité augmentée reflète une augmentation de la réponse inflammatoire transitoire rapportée antérieurement chez les sujets sains exposés aux particules diesel.

 Méthodes :

  • 32 sujets asthmatiques (de sévérité légère à modérée) et 23 sujets contrôles ont été exposés, selon un schéma en double-aveugle et en cross-over, à la fois à de l’air filtré et à des particules diesel (100µg/m3) pendant 2 heures
  • L’inflammation des voies aériennes a été évaluée par une bronchoscopie réalisée 18 heures après l’exposition
  • De plus, la fonction respiratoire, le taux de NO exhalé et la réactivité bronchique à la métacholine ont été mesurés chez les sujets asthmatiques.

 Résultats :

  • Chez les sujets contrôle, une augmentation significative des neutrophiles dans la sous-muqueuse a été observée après le test aux particules diesel (p=0.004)
  • Des augmentations significatives du nombre de neutrophiles (p=0.01) et des concentrations d’interleukine 6 (p=0.03) et de myéloperoxydase (p=0.04) ont aussi été observées dans le liquide de lavage bronchique après exposition aux particules diesel, par rapport au test sous air filtré
  • Il n’a pas été observé d’augmentation de l’inflammation des voies aériennes chez les sujets asthmatiques après le test d’exposition aux particules diesel.

 Conclusions :

  • L’exposition aux particules diesel, à des concentrations en rapport avec les niveaux observés le long des routes, entraînait une inflammation à neutrophiles aigue et active dans les voies aériennes des sujets sains
  • Cette réponse était absente chez les sujets asthmatiques, de même que toute évidence soutenant une aggravation de l’inflammation des voies aériennes.

Il a été montré antérieurement que la proximité d’une exposition aux polluants du trafic automobile pouvait exacerber les symptômes d’asthme chez l’enfant et chez l’adulte ; l’impact le plus important semble lié aux véhicules utilisant du carburant diesel, ce qui a été confirmé par des études contrôlées d’exposition aux particules diesel de sujets sains et asthmatiques.

Cependant, les lieux de trafic automobile ne contiennent pas uniquement des particules diesel, mais aussi des polluants provenant des freins, des pneus, de l’abrasion du revêtement de la chaussée et de la resuspension d’autres polluants par le trafic ; la contribution potentielle de ces composés dans les effets de la pollution automobile sur la santé respiratoire est souvent ignorée.

Les auteurs ont donc voulu définir la contribution des émissions de particules diesel dans la réponse bronchique des sujets asthmatiques, dans la vraie vie, en exposant 32 sujets asthmatiques et 23 sujets contrôles, pendant une durée de 2 heures (comportant des périodes alternées de repos et de bicyclette ergométrique), à des particules diesel (100µg/m3) ou à de l’air filtré, dans une chambre d’exposition, en double-aveugle et en cross-over avec un délai minimal de 3 semaines entre les 2 expositions.

Pour évaluer les effets de l’exposition, ont été réalisés :

  • une étude de la fonction respiratoire avant et immédiatement après l’exposition
  • des mesures du NO exhalé au moment de l’inclusion et 18h après l’exposition
  • un test à la métacholine à l’inclusion et 40 heures après l’exposition
  • une bronchoscopie avec biopsies bronchiques et lavages 18h après l’exposition
  • un recueil des scores symptomatiques pendant l’exposition.

Les résultats montrent que l’inhalation de particules diesel :

  • entraîne une augmentation des neutrophiles dans la sous-muqueuse des sujets sains
  • entraîne une augmentation des neutrophiles, de l’interleukine 6 (p=0.03) et de la myéloperoxydase dans le liquide de lavage bronchique
  • mais n’entraîne pas d’augmentation de l’inflammation des voies aériennes chez les sujets asthmatiques.

Dans les études épidémiologiques, il est difficile de distinguer les effets des particules diesel de ceux des autres composantes du trafic automobile. Le mélange particulaire est complexe, ce qui souligne l’importance du rôle important des expositions particulaires contrôlées dans des chambres d’exposition, de façon à examiner chaque composant de façon isolée. Ceci permettra de mieux protéger la santé des populations exposées, en particulier celle des asthmatiques.

Cette étude n’a pas mis en évidence de réponse inflammatoire aigue des voies aériennes en réponse à une exposition aux particules diesel. Ceci suggère que l’augmentation de la sensibilité des asthmatiques à la pollution liée au trafic automobile n’est pas associée nécessairement avec une inflammation aigue classique.

Les mécanismes expliquant les différences de réponse des voies aériennes entre les sujets sains et les asthmatiques nécessitent des investigations complémentaires.

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