Faut-il mettre l’Helicobacter au pilori des maladies allergiques ?

mardi 29 avril 2014 par Dr Philippe Carré963 visites

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Faut-il mettre l’Helicobacter au pilori des maladies allergiques ?

Faut-il mettre l’Helicobacter au pilori des maladies allergiques ?

mardi 29 avril 2014, par Dr Philippe Carré

Exposition à l’infection à Helicobacter pylori dans la petite enfance et le risque de maladie allergique et de sensibilisation atopique : étude de cohorte de naissance longitudinale. : A. Amberbir, G. Medhin, W. E. Abegaz, C. Hanlon, K. Robinson, A. Fogarty, J. Britton, A. Venn and G. Davey.

dans Clinical & Experimental Allergy, 2014 (44) 563–571.

 Contexte :

  • Une relation inverse entre l’infection à Helicobacter pylori et les maladies allergiques a été rapportée dans certaines études épidémiologiques indépendantes, mais l’évidence à partir d’études longitudinales est insuffisante.

 Objectif :

  • Les auteurs ont étudié les effets de l’infection H. pylori sur l’incidence et la prévalence des maladies allergiques et la sensibilisation dans une cohorte de naissance de faible revenu.

 Méthodes :

  • En 2005/2006, une cohorte de population de naissance a été créée à Butajira, en Ethiopie, et les 1006 bébés nés ont été suivis à l’âge de 1, 3 et 5 ans
  • Les symptômes de maladies allergiques ont été recueillis en utilisant le questionnaire ISAAC, des tests cutanés d’allergie ont été réalisés, et des prélèvements de selles analysés à la recherche de l’antigène H. pylori et d’ hélminthes
  • Une régression logistique multiple était utilisée pour déterminer les effets indépendants d’H. pylori mesuré à l’âge de 3 ans sur l’incidence de chaque résultat entre les âges de 3 ans et 5 ans (chez ceux sans le résultat à l’âge de 3 ans), en contrôlant pour les facteurs confondants potentiels, et pour évaluer les associations croisées additionnelles.

 Résultats :

  • Un total de 863 enfants ont été suivis jusqu’à l’âge de 5 ans
  • L’infection à H. pylori a été trouvée chez 25% des enfants à la fois à l’âge de 3 et de 5 ans, dans 21% à l’âge de 5 ans mais pas 3, et dans 17% des cas à l’âge de 3 mais pas de 5 ans
  • L’infection à H. pylori à l’âge de 3 ans était associée significativement à une diminution du risque incident d’eczéma entre les âges de 3 et de 5 ans (OR ajusté, IC à 95%, 0.31 ; 0.10-0.94, p=0.02)
  • De façon croisée à l’âge de 5 ans, l’infection à H. pylori était associée de façon inverse à la sensibilisation cutanée (OR ajusté, IC à 95%, 0.26 ;0.07-0.92, p=0.02).

 Conclusion et relevance clinique :

  • Ces données fournissent une preuve de plus pour suggérer que l’exposition à H. pylori dans la vie précoce peut jouer un rôle protecteur dans le développement de l’allergie.

Dans le cadre de la fameuse hypothèse « hygiéniste » sur le développement des allergies, des études récentes se sont intéressées au rôle protecteur de l’infection à Helicobacter pylori (HP) sur l’évolution de l’asthme et des maladies allergiques.

Ces études ont été faites chez l’adulte ; l’originalité de l’étude actuelle est qu’elle a été faite dans une cohorte de naissance, 863 nouveau-nés ayant eu un suivi longitudinal jusqu’à l’âge de 5 ans.

Cette étude montre à l’évidence un effet protecteur de l’infection à HP sur l’eczéma (diminution du risque de 69%) et la sensibilisation (diminution du risque de 74%) à l’âge de 5 ans, chez de jeunes enfants d’une cohorte de naissance de faible revenu, dans laquelle le statut social ou l’antibiothérapie ne semblent pas être des facteurs confondants. Il n’y avait cependant pas d’association pour les sifflements et la rhinite.

En ce qui concerne les mécanismes, des études ont montré que la réponse inflammatoire induite par l’infection à HP était associée à des réponses cellulaires de type TH-1, avec une expression plus importante d’interféron gamma, d’IL-10 et d’IL-12 qui orientent le système immunitaire vers moins de réponses de type TH-2 ; l’effet protecteur vis-à-vis de l’allergie est aussi médié par la secrétion de lymphocytes T régulateurs (Tregs) qui suppriment la réponse immune et inflammatoire par le biais d’effets sur l’IL-10.

Les recherches sur les mécanismes immunologiques impliqués pourraient améliorer la compréhension des interactions entre le microbiome digestif et les maladies allergiques, permettant peut-être dans le futur une prévention primaire des pathologies qui y sont associées.

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