La rhinite virale précoce est-elle allergisante plus tard ?

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La rhinite virale précoce est-elle allergisante plus tard ?

La rhinite virale précoce est-elle allergisante plus tard ?

vendredi 27 février 2015, par Dr Philippe Carré

Rhinite dans les 18 premiers mois de la vie : exploration du rôle des virus respiratoires. : Hardjojo A, Goh A, Shek LPC, Van Bever HPS, Teoh OH, Soh JY, Thomas B, Tan BH, Chan YH, Ramamurthy MB, Goh DYT, Soh S-E, Saw S-M, Kwek K, Chong Y-S, Godfrey KM, Gluckman PD, Lee BW. Rhinitis in the first 18 months of life : exploring the role of respiratory viruses.

dans Pediatr Allergy Immunol 2015 : 26 : 25–33.

 Contexte :

  • La rhinite est fréquente dans la première enfance, mais la rhinite allergique est considérée comme une manifestation tardive de la marche atopique
  • Cette étude visait à évaluer la rhinite (allergique et non-allergique) dans les 18 premiers mois de la vie, ses liens avec d’autres manifestations de l’atopie et le rôle des virus respiratoires.

 Méthodes :

  • 1237 sujets de la cohorte de naissance GUSTO à Singapour ont été suivis tous les trimestres jusqu’à l’âge de 18 mois par des questionnaires, pour recueillir les symptômes de rhinite durant depuis au moins deux semaines et avec des appels mensuels aux sujets positifs pour détecter les symptômes de rhinite prolongés ou récurrents (durée totale > 4 semaines)
  • Un prélèvement nasal antérieur était réalisé pour détection virale moléculaire au cours de visites, et proche des épisodes de rhinite (dans la limite d’un mois)
  • Des prick-tests cutanés aux allergènes communs environnementaux et alimentaires ont été réalisés à la visite du 18è mois.

 Résultats :

  • Une rhinite prolongée ou récurrente était associée de façon significative à une histoire d’atopie parentale (mère : ORa=2.17 ; père : ORa=1.82) et aux comorbidités atopiques à type d’eczéma (ORa=2.53) et de sifflements (ORa=4.63) (p<0.05), mais pas à la sensibilisation allergique
  • Bien que la fréquence de détection des virus respiratoires dans le nez pendant les visites trimestrielles programmées ne différait pas entre la rhinite prolongée ou récurrente et les contrôles appariés (p>0.05), la détection virale était plus élevée dans les prélèvements obtenus dans le mois suivant les épisodes de rhinite chez les sujets ayant une rhinite prolongée ou récurrente comparativement aux prélèvements faits au cours des visites programmées (p ajusté=0.04).

 Conclusions :

  • Basée sur la durée des symptômes de rhinite, cette étude a défini un sous-groupe d’enfants avec une rhinite survenant pendant la petite enfance, qui était associé à une prédisposition atopique et à des comorbidités
  • Une atteinte respiratoire virale persistante peut contribuer à la symptomatologie
  • Savoir si cette entité est un précurseur d’une rhinite allergique ultérieure dans l’enfance nécessiterait un suivi plus prolongé.

Cette étude, réalisée chez 1237 enfants suivis de la naissance jusqu’à l’âge de 18 mois, visait à mieux comprendre les liens entre la rhinite et les autres manifestations atopiques ainsi que le rôle des infections virales.

La prévalence de la rhinite, définie selon une durée d’au moins 2 semaines, était supérieure à 21% ; l’existence d’une rhinite prolongée ou récurrente (définie comme ayant une durée d’au mois 4 semaines) était associée à une histoire parentale de symptômes atopiques et de comorbidités atopiques (eczéma et sifflements), ce qui suggère qu’un délai seuil de 4 semaines au cours des 18 premiers mois de vie pourrait être une approche utile pour la définition de la rhinite allergique dans ce groupe d’âge.

L’existence d’une rhinite allergique n’était par contre pas corrélée à la sensibilisation allergique définie par la positivité des tests cutanés ; ce qui supporte des données antérieures (cohorte européenne MeDALL) sur le fait que l’eczéma, les sifflements et la rhinite peuvent coexister même en l’absence de sensibilisation IgE, qui peut ne pas être un mécanisme causal dominant impliqué dans ces comorbidités. Une autre explication serait que la production locale d’IgE dans le nez serait indétectable par les tests cutanés, ou que les phénotypes cliniques de la rhinite précéderaient le développement de la sensibilisation atopique.

Cette étude a inclus une détection de virus intra-nasaux (et pas naso-pharyngés compte-tenu du jeune âge des nourrissons) quand les symptômes duraient au moins 2 semaines, et n’a été positive que dans 34.5% des cas, c’est à dire moins que dans d’autres enquêtes où les critères étaient moins exigeants :

  • dans ce sous-groupe d’enfants, l’analyse n’a pas montré d’association entre la détection virale lors des visites trimestrielles programmées et une rhinite prolongée -*par contre, l’analyse des prélèvements recueillis chez les sujets dans le mois suivant les épisodes de rhinite a montré un taux de détection plus élevé comparativement aux prélèvements des visites programmées (p=0.041).

La persistance de virus observée chez les sujets avec une rhinite prolongée ou récurrente peut être liée à un défaut inné de ces sujets à éliminer les virus respiratoires, ou qu’ils sont plus susceptibles de faire de nouvelles infections après chaque épisode de rhinite aigue.

Ce sous-groupe de nourrissons avec une rhinite précoce et une prédisposition atopique semble représenter une entité particulière : celle-ci est-elle un précurseur d’une rhinite allergique ultérieure dans l’enfance ? Des études longitudinales de suivi sont nécessaires.