Tout n’est pas bon dans le cochon : attention au rognon !

lundi 1er février 2016 par Dr Alain Thillay2467 visites

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Tout n’est pas bon dans le cochon : attention au rognon !

Tout n’est pas bon dans le cochon : attention au rognon !

lundi 1er février 2016, par Dr Alain Thillay

Deux peptidases de rognon de porc porteuses de galactose-α-1,3-galactose sont les médiatrices des réponses anaphylactiques de l’allergie retardée à la viande. : C. Hilger1,*, J. Fischer2, K. Swiontek1, F. Hentges3, C. Lehners3, B. Eberlein4, M. Morisset3, T. Biedermann4 andM. Ollert1,5

dans Vol. 71 Issue 3
Allergy

 Contexte :

  • Les IgE sériques spécifiques de galactose-α-1,3-galactose (α-Gal) sont associées à une nouvelle forme d’anaphylaxie retardée survenant lors de la consommation de viande rouge ou de certains viscères.
  • Le rognon de porc est connu comme le plus puissant déclencheur de ce syndrome, mais les allergènes responsables n’ont pas encore été identifiés.

 Objectif :

  • Le but de cette étude était l’identification et la caractérisation des protéines rénales de porc capables d’entraîner des réactions anaphylactiques retardées par l’intermédiaire des IgE spécifiques de l’ α-Gal.

 Méthodes :

  • Une cohorte de 59 patients ayant des IgE spécifiques d’α-Gal a été explorée par immunoblot des protéines IgE-réactives du rognon de porc.
  • Les protéines ont été identifiées par immunoempreinte de masse peptidique.
  • Les protéines isolées ont été dosées en ELISA et ELISA inhibition, activation des basophiles et prick-test cutané.

 Résultats :

  • Plusieurs IgE se liant à des protéines de haut poids moléculaire (100 à 200 kDa) ont été détectées dans les extraits de rognon de porc par immunoblot en utilisant des sera de patients et un anticorps anti-α-Gal.
  • Deux protéines majeures se liant aux IgE ont été identifiées, l’enzyme de conversion de l’angiotensine I (ECA I) et l’aminopeptidase N (AP-N).
  • La réactivité des sera de patients et de l’anticorps anti-α-Gal pour les deux protéines a été inhibée par l’oxydation des glucides.
  • Les épitopes α-Gal spécifiques des IgE ont résisté à la dénaturation thermique.
  • L’extrait de rognon de porc, l’ECA I et l’AP-N étaient capables d’activer les basophiles des patients et d’obtenir des réponses positives aux tests cutanés.

 Conclusion :

  • Deux protéines de la membrane cellulaire portant des épitopes α-Gal ont été identifiées dans le rognon porc.
  • Pour la première fois, il a été démontré que les protéines de viande isolées étaient capables d’induire l’activation des basophiles chez les patients atteints d’anaphylaxie retardée à la viande rouge confirmant une nouvelle fois la pertinence clinique de ces protéines porteuses d’α-Gal.

En 2008, un vent révolutionnaire est venu abattre une idée reçue. Alors que l’on considérait depuis les années 80 l’IgE réactivité à l’encontre des CCD (épitopes glucidiques croisants) comme non symptomatique mais responsable, dans certains cas, de réactivités croisées, plusieurs publications dont la première date de 2008 sont venues remettre en cause ce dictat.

En effet, exception qui confirme la règle, il a été démontré que galactose-α-1,3-galactose (α-Gal) qui fait partie des CCD, pouvait entraîner des IgE réactivités symptomatiques ce qui a permis d’expliquer l’allergie au cetuximab et certains allergies retardées à la viande rouge et aux viscères particulièrement le rognon de porc.

Si les études antérieures concernant l’allergie au rognon de porc ont bien montré l’implication de la réaction à IgE vis-à-vis d’α-Gal aucune n’avait jusqu’alors pu préciser quelles étaient les protéines porteuses de cet épitope glucidique.

C’est ce que fait cette étude européenne (Luxembourg, Allemagne, Danemark).

Je ne reviendrai pas sur les techniques immunologiques qui m’apparaissent parfaitement pertinentes, à noter le grand nombre de patients inclus, 59 patients présentant une réactivité sériques à l’encontre de galactose-α-1,3-galactose (α-Gal).

Les deux protéines porteuses de cet épitope glucidique sont l’enzyme de conversion de l’angiotensine I (ECA I) et l’aminopeptidase N (AP-N).

Si ces deux protéines subissent une oxydation des glucides, elles ne lient plus aux IgE anti-α-Gal.

Par contre, la dénaturation thermique n’inhibe pas l’IgE réactivité, ce qui correspond bien à la réalité de la consommation du rognon de porc.

Sur le plan pratique, cette étude vient confirmer le risque potentiel allergique du rognon de porc (allergie retardée et souvent sévère) et met l’accent sur le fait que la cuisson même prolongée ne permettra pas de le rendre inoffensif.