2016, enfin une bonne année : disparition des allergologues et création de généralistes spécialisés en allergologie.

lundi 22 février 2016 par Dr Stéphane Guez2275 visites

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2016, enfin une bonne année : disparition des allergologues et création de généralistes spécialisés en allergologie.

2016, enfin une bonne année : disparition des allergologues et création de généralistes spécialisés en allergologie.

lundi 22 février 2016, par Dr Stéphane Guez

Quelle serait la proportion d’adultes allergiques, adressés à un spécialiste, qui pourrait être pris en charge par un généraliste formé à l’allergologie ? : H. E. SmithEmail author, J. Wade and A. J. Frew

dans Clinical and Translational Allergy20166:3
DOI : 10.1186/s13601-016-0091-1

 Introduction :

  • Le concept de médecin généraliste avec une formation particulière plus poussée dans une spécialité (General Practitioner with Special Interest)(GPwSI) a été proposé par le système de santé anglais en 2000 afin de permettre l’accès à un traitement spécialisé à proximité du patient et pour réduire les temps d’attente spécialisés dans les hôpitaux.
  • Etant donné l’éparpillement des allergologues sur le territoire anglais et leur faible nombre, cette alternative pourrait permettre de diminuer la pression sur les services spécialisés en allergologie.

 Objectif de l’étude :

  • Il a été d’évaluer la proportion de patients adressés dans un service spécialisé d’allergologie qui pourrait être prise en charge par un service de GPwSI avec une définition des moyens et du niveau d’expertise (diagnostic exact et prise en charge de l’allergie, réalisation de tests cutanés en prick, conseil sur les évictions allergéniques, capacité à évaluer la possibilité d’une désensibilisation).

 Matériel et Méthode :

  • 100 GP consécutifs s’adressant à un service spécialisé d’allergologie ont été revu afin de déterminer si les patients adressés auraient pu être vus par des MG formés dans un centre de recours de proximité.
  • Les données pour chaque patient ont été revues par 3 spécialistes en allergologie d’une façon indépendante.
  • Les patients qui pourraient être vus ainsi ont été évalués sur la lettre initiale seule, puis sur la lettre de consultation spécialisée, afin de déterminer s’il est possible de faire un tri initial des patients de façon prospective.
  • La proportion des patients pouvant être vu par le GPwSI a été calculée et leurs caractéristiques cliniques identifiées.

 Résultats :

  • 29% de patients ont unanimement été jugés comme pouvant être pris en charge par un GPwSI, et 30% de plus par 2 spécialistes sur 3.
  • 18% des patients ne pouvaient être pris en charge de cette façon compte tenu de la complexité de leurs problèmes cliniques, en raison de comorbidités ou parce que nécessitant des connaissances particulières ou des moyens particuliers.

 Conclusions et Implication clinique :

  • Environ ¼ et probablement la moitié des patients adressés dans un service d’allergologie spécialisé pourrait être pris en charge par un généraliste de proximité formé à l’allergologie, ce qui permettrait de diversifier le parcours de soins et de réduire le temps d’attente pour une prise en charge spécialisé pour les cas complexes.

Ce travail anglais porte sur l’intérêt de développer des généralistes formés à l’allergologie pour compléter l’offre de soins à coté des spécialistes en allergologie.

Les auteurs démontrent que un quart à la moitié des patients adressés à des spécialistes allergologues pourrait être pris en charge par ces généralistes.

Bon voici un article lié à une problématique propre à la Grande Bretagne qui a un système de santé bien particulier qui ne ressemble absolument pas au notre.

Nous n’entrerons pas dans la polémique consistant à s’interroger sur les qualités respectives de ce système par rapport au notre, de toute façon nos décideurs en santé publique adore l’Angleterre, et les anglais…adorent se faire soigner en France : à chacun de tirer des conclusions.

Le problème est surtout de savoir s’il faut entrer dans un système de spécialisation à 2 niveaux et s’il est réellement adéquat pour la prise en charge des allergiques.

Je ne ferai que quelques commentaires, libre à chacun de se faire une opinion.

En Angleterre les délais de recours aux spécialistes sont très longs et passent obligatoirement par le généraliste. Compte-tenu de la gravité démontrée de nombreuses allergies et du retentissement négatif des maladies allergiques sur la qualité de vie des patients, il est évident qu’il faut trouver des solutions pour permettre une prise en charge à tous ces patients en attente. Deux solutions sont possibles : former plus de spécialistes, ou former des axillaires spécialistes avec une compétence moindre.

Pour l’Angleterre le choix s’est fait sur des auxiliaires en allergologie. Cela devrait effectivement permettre un accès plus rapide à une prise en charge allergologique. Cependant l’étude réalisée ici est rétrospective. Il est indispensable de faire une étude prospective pour apprécier le nombre de « cas complexes » qui pourraient être égarés dans ce parcours de soins.

Est-ce que ce système peut être appliqué en France ?

Si l’évolution de l’allergologie suit sa pente descendante clairement amorcée fin 2015, il faudra de toute façon trouver une solution car il n’y aura plus d’allergologue.
Comme il n’y aura plus assez d’ophtalmologistes, de gynécologues, de pédiatres, d’anesthésistes etc.

Est-ce que la solution est de former des généralistes pour qu’ils puissent faire des actes non complexes : anesthésie sur un patient médicalement non complexe, chirurgie orthopédique non compliquée, prise en charge allergique simple, etc.

Cela rappelle la médecine de la fin du 19° début du 20° siècle qui était certainement beaucoup plus exaltante pour les généralistes car ils avaient la possibilité de faire beaucoup de chose. Mais les connaissances n’étaient pas les mêmes, l’attente des patients non plus et la pression médico-légale inexistante.

Mais ce système peut se défendre dans une conception de médecine d’état avec rémunération des médecins non liés à des actes : le médecin hospitalier n’a pas vocation à faire beaucoup de consultations, et il est logique que le travail de routine soit proposé aux généralistes référents.

Quelle serait la place des allergologues « spécialistes » de ville ? A priori ils devraient disparaître. Le système anglais semble donc exportable en France.

Est-ce que la prise en charge globale de la population sur le plan allergologique serait meilleure ? Clairement, l’université n’a pas su mettre en place un enseignement de qualité permettant aux généralistes de se débrouiller avec les maladies allergiques.

Former rapidement à l’allergologie en 1 an va t’il permettre une prise en charge satisfaisante ? Beaucoup d’allergologues qui ont commencé par exercer avec une double casquette, généraliste et allergologue, ont rapidement du choisir l’allergologie exclusive pour être au niveau des connaissances et avoir le temps de prendre en charge ces patients.

Pour conclure ces réflexions, je reviendrai sur le début de mon commentaire : le choix proposé par le système de santé anglais est satisfaisant pour le système, mais pour les patients ? cela reste à démontrer.

Il serait intéressant d’en débattre, et je vais suggérer à allergique.org d’ouvrir un espace d’échanges sur le site pour poursuivre cette discussion.

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